Contenu du sommaire
Revue | Revue Française de Sociologie |
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Numéro | 1984, 25-4 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Les manœuvres de séduction : une analyse des annonces matrimoniales - François de Singly p. 523-559 François de Singly : Les manœuvres de séduction : une analyse des annonces matrimoniales. A partir d'un corpus de petites annonces matrimoniales (rédigées par les individus eux-mêmes), l'auteur analyse premièrement les formes par lesquelles les annonceurs fournissent des indications sur leur identité dans le cadre des contraintes de la situation, et deuxièmement les anticipations de l'échange repérées par la comparaison entre l'offre et la demande juxtaposées dans chaque annonce. Ainsi sont approchées, par ces représentations théâtrales, les représentations mentales qu'ont les individus de la compétence requise pour séduire en tant que mari ou épouse éventuel, et les formes conjugales du masculin et du féminin souvent oubliées dans les études du choix du conjoint. L'observation du marché matrimonial parallèle permet d'appréhender un des processus par lesquels tout individu (ou tout groupe) tente de faire reconnaître sa valeur sociale en mettant en scène ses richesses les plus propres à séduire, à convaincre, à entraîner l'adhésion, à provoquer l'affection.François de Singly : The man?uvers of seduction : an analysis of matrimonial advertisements. Working on a corpus of matrimonial ads written by the individuals concerned, the Author first analyses the forms they use to provide information on their identity within the framework of the limits imposed by the situation ; he next examines their expectations with respect to the exchange by comparing what is offered and what is being looked for in each ad. Through these theatrical representations insight is given into the mental representations individuals have of the seductive competence needed in the future husband or wife, and the conjugal forms of masculine and feminine which are often neglected in studies dealing with the choice of the marriage partner. The observation of this parallel matrimonial market makes it possible to apprehend a process which all individuals or groups use when they attempt to prove their social value- by making a show of those possessions most appropriate for charming and convincing.
- Durkheim et le pragmatisme. La psychologie de la conscience et la constitution sociale des catégories - Hans Joas, Marc Sagnol p. 560-581 Hans Joas : Durkheim et le pragmatisme. La psychologie de la conscience et la constitution sociale des catégories. Après la publication de sa dernière œuvre majeure « Les formes élémentaires de la vie religieuse » Durkheim a fait une série de conférences sur « Pragmatisme et sociologie » qui ont dû attendre 1955 pour être publiées et sont d'ailleurs passées à peu près inaperçues. Cela tient certainement à une connaissance insuffisante de l'importance du Pragmatisme pour une théorie du Social. Cet article oppose la conception durkheimienne du Pragmatisme ? « Utilitarisme logique » ? à une interprétation qui en fait une théorie de l'action et une critique fondamentale de l'Utilitarisme. Ce n'est qu'après avoir montré que le Pragmatisme et la théorie durkheimienne d'une constitution sociale des catégories de la connaissance constituent des projets parallèles que l'on peut mettre en balance les difficultés immanentes au programme de Durkheim et sa critique du Pragmatisme. On constate alors que d'une part manque chez Durkheim une théorie de l'Interaction symbolique dans la vie quotidienne et que, d'autre part, les configurations d'activités qui se situent hors du quotidien sont d'une grande importance pour la constitution des identités collectives.Hans Joas : Durkheim and pragmatism. Mentalist psychology and the social constitution of categories of knowledge After the publication of his last major work, "The Elementary Forms of the Religious Life", Emile Durkheim gave a series of lectures entitled "Pragmatism and Sociology". These were published very late (1955) and received hardly any attention in the reception of Durkheim's work. It is no question that this is due to the insufficient recognition of the importance of pragmatism for a theory of the social. In this article Durkheim's conception of pragmatism as "logical utilitarianism" is opposed by an interpretation of pragmatism as a theory of action fundamentally critical toward utilitarianism. After showing the parallelism between pragmatism and Durkheim's theory of the social constitution of categories of knowledge the inherent difficulties in Durkheim's own program and Durkheim's critique of pragmatism can be balanced. This leads to the insight, on the one hand, into the lack of a theory of everyday symbolically mediated interaction in Durkheim, and into the importance of action contexts apart from everyday forms for the constitution of collective identities, on the other hand.
- Everett C. Hughes et le développement du travail de terrain en sociologie - Jean-Michel Chapoulie p. 582-608 Jean-Michel Chapoulie : E. C. Hughes et le développement du travail de terrain en sociologie. L'article analyse dans son contexte social, institutionnel et intellectuel une des étapes importantes de l'introduction en sociologie de l'observation directe et, plus généralement, du travail de terrain (fïeldwork). En s'appuyant sur les essais de méthode d'E. C. Hughes (1897-1983) et sur divers témoignages, l'article dégage les caractéristiques de la formule de recherche proposée et illustrée par Hughes à l'Université de Chicago. L'apport de Hughes, par rapport à la formule des monographies réalisées sous l'impulsion de Park, tient : a) à sa réflexion, nourrie d'une connaissance de l'ethnologie, sur la diversité des rapports des sociologues à leurs objets d'étude (qui varient entre une familiarité préalable et une altérité presque complète) ; Hughes proposera des schemes permettant aux chercheurs de terrain d'analyser et d'exercer un contrôle, sur leurs propres activités ; b) au choix de sujets d'étude d'ampleur limitée, ce qui rend possible une plus grande rigueur dans le recueil des observations et, corrélativement, dans la rédaction des comptes rendus. Les recherches de sociologie du travail accomplies par Hughes et ses élèves fournissent un exemple des analyses auxquelles peut conduire l'emploi rigoureux des recherches de terrain, quand il s'appuie sur la construction de catégories générales par la méthode comparative.Jean-Michel Chapoulie : E. C. Hughes and the development of field work in sociology. The article analyses in its social, institutional and intellectual context one of the important stages in the introduction of direct observation and field work in sociology. Referring to E. C. Hughes' (1897-1983) essays on method and other evidence, it elucidates the characteristics of the research model proposed and illustrated by Hughes at the University of Chicago. The originality of Hughes' contribution, with respect to the model of monographies inspired by Park, is due a) to his reflection, enriched by his knowledge of ethnology, on the diversity of relations between sociologists and their objects of study (ranging from an initial familiarity to a sense of almost total difference), that led him to propose schemes that enabled field researchers to analyse and control their activities, and b) to his choice of objects of study of limited dimensions, which allowed greater strictness in the collection of data and the writing of reports. The research carried out by Hughes and his students in the sociology of work provides an example of the type of analyses which can develop from a strict use of field work based on the construction of general categories by the comparative method.
- Note sur quelques indicateurs globaux de l'inégalité : C. Gini, V. Pareto, P. Lévy - Marc Barbut p. 609-622 Marc Barbut : Note sur quelques indicateurs globaux de l'inégalité : C. Gini, V. Pareto, P. Levy. Cette note n'a d'autre visée que pédagogique. Son objet est de rappeler l'efficacité, mais aussi les limites, qu'ont, pour la comparaison des inégalités économiques ou sociales, quelques instruments éprouvés : la courbe de concentration de Corrado Gini et, lorsque les distributions observées s'ajustent convenablement, le coefficient ? de Vilfredo Pareto. On indique quelques-unes de leurs propriétés mathématiques simples et l'interprétation de celles-ci. La construction de ces indicateurs est illustrée sur des données relatives à l'évolution temporelle de la scolarisation par catégories socio-professionnelles.Marc Barbut : A note on a few global indicators of inequality : ?. Gini, V. Pareto, P. Levy. The object of this note is merely pedagogical, to recall the effectiveness and also the limits of a few well-tested instruments used for comparing economic or social inequalities : Corrado Gini's concentration curve and, in cases where the observed distributions are fitted satisfactorily, Vilfredo Pareto's ? coefficient. An indication is provided of some of their simple mathematical properties and their interpretation. Data on the temporal evolution of schooling by socio-professional categories provides an illustration of the contruction of these indicators.
Crime et société
- Les réactions sociales au crime : peur et punitivité - Christiane Louis-Guérin p. 623-635 Christiane Louis-Guérin : Les réactions sociales au crime : peur et punitivité. Les résultats présentés font partie d'une recherche plus large sur les réactions de public face au crime et à ses moyens de contrôle. Un plan d'analyse contextuelle a permis de mesurer directement l'impact du crime sur les perceptions et réactions en tenant compte des variables individuelles. La peur du crime est étudiée comme une variable multidimensionnelle, incluant un ensemble d'indicateurs, cognitifs, affectifs et conatifs. Les analyses ont mis en évidence : 1) la nécessité de distinguer les différentes mesures de la peur du crime selon leur degré de généralité et leur niveau d'expressivité. Les représentations et réactions à ces différents niveaux ne sont ni les mêmes, ni déterminées par les mêmes facteurs et entraînent également des conduites dissemblables. Ceci incite à beaucoup de prudence vis-à-vis des chiffres cités dans les sondages ; 2) aucun lien significatif direct n'est apparu entre la peur ou la victimisation et la punitivité. Cette dernière dépend étroitement des orientations idéologiques qui déterminent (avec les médias) les idées et images que l'on se fait du crime en général et des criminels (qui est criminel, pourquoi l'est-on, peut-on changer et comment). Il serait donc erroné et dangereux de faire un parallèle entre la peur du crime, qui certainement augmente avec l'incidence de la criminalité, et la revendication de mesures plus répressives.Christiane Louis-Guérin : Social reactions to crime : fear and the desire to punish. The results presented here are part of a larger research into public reactions to crime and its control. A plan of contextual analysis has been used to provide a direct measure of the impact of crime on the public's perceptions and reactions while taking into account individual variables. Fear of crime is studied as a multidimensional variable, including a set of indicators that are cognitive, affective and conative. The analyses point out : 1) the need to distinguish between the various measures of fear of crime according to their degree of generality and their level of expressivity. Representations and reactions at these different levels are neither similar nor determined by the same factors, as well they provoke dissimilar behavior. Hence great caution should be exercised with regard to figures quoted in surveys ; 2) no significant link is apparent between fear or victimization and the desire to punish. The latter is closely dependent on ideological orientations which, with the media, determine the ideas a person can have of crime in general and of criminals (who is criminal, why, can a person change, and how). In consequence it would be both erroneous and dangerous to draw a parallel between fear of crime, which certainly increases with the risk of criminality, and demands for greater repression.
- La perception de la violence par l'opinion publique - Hugues Lagrange p. 636-657 Hugues Lagrange : Perception de la violence par l'opinion publique. L'analyse d'une série mensuelle constituée par les réponses des Français s'agissant de la violence et de la criminalité montre : 1 ) que les fluctuations de l'inquiétude manifestée par l'opinion ne sont par corrélées avec celles des crimes ou délits tels qu'ils sont enregistrés par les statistiques judiciaires ; 2) que les pointes d'inquiétude qui hérissent la courbe de l'opinion correspondent assez systématiquement avec des événements violents de caractère impressionnant dont la presse et la télévision se sont emparées et dont les victimes sont des gens « ordinaires » auxquels chacun peut s'identifier.Hughes Lagrange : Public perception of violence. An analysis of a monthly series of answers given by French people on the subject of violence and criminality shows : 1) that there is no correlation between the fluctuations of public anxiety and the statistical fluctuations of recorded offences ; 2) that there is a fairly systematic correspondence between high points of public anxiety and striking violent events when they are exploited by the media and the victims involved are "ordinary" people with whom everyone can identify.
- Les magistrats et la loi pénale - Claude Faugeron, Patrick Jakubowicz p. 658-683 Claude Faugeron et Patrick Jakubowicz : Les magistrats et la loi pénale. Comment les débats publics sur la justice pénale se réfractent-ils chez les magistrats, alors que l'idéologie juridique suppose un accord relatif entre la norme juridique et les « normes » en vigueur dans notre société ? Ces débats concernent davantage le mode d'emploi des institutions que la réprobation attachée à certains comportements; cela a été masqué par des méthodes d'analyse utilisant des indices de tendance centrale et non pas la dispersion des réponses. L'enquête menée auprès d'un échantillon stratifié de magistrats français montre que deux grands clivages, se conditionnant l'un l'autre, partagent le corps : désaccords sur la répression des infractions liées aux modes de vie et au droit de disposer de soi et sur la répression de la délinquance économique et financière. Ces désaccords sont liés à un effet de génération ainsi qu'à une pénétration différentielle du discours du Syndicat de la magistrature, et portent en fait sur un conflit en matière d'allocations de ressources.Claude Faugeron and Patrick Jakubowicz : Magistrates and penal law. How are public debates on penal justice reflected among magistrates when the legal ideology supposes a relative harmony between legal norms and those in effect in our society ? These debates focus more on the use of penal institutions than on the blame attached to certain types of behavior, but this fact has been obscured by methods of analysis which use indications of major trends rather than the diversification of answers. The survey carried out among a stratified sample of French magistrates shows that this corps is divided on two major issues (which condition each other) : repression of offences related to life styles and the right to dispose of oneself, and repression of economic and financial delinquency. These divergences are related to differences between the generations as well as to the differential impact of the thinking of the magistrates' union; in actual fact they revolve around a conflict over the distribution of resources.
- Les réactions sociales au crime : peur et punitivité - Christiane Louis-Guérin p. 623-635
Note critique
- Déviance, criminalité, répression : coups de sonde - Jean-René Tréanton p. 684-690
Les livres
- Cusson Maurice, Le contrôle social du crime. - Didier Lapeyronnie p. 691-695
- Delmas-Marty Mireille, Modèles et mouvements de politique criminelle. - Denis Szabo p. 696-700
- XXIe Cours international de criminologie. Connaître la criminalité : le dernier état de la question. - Jean-Claude Chesnais p. 700-702
- Irvine J., Miles I., Evans J. (éd.), Demystifying social statistics. - Jean-René Tréanton p. 702
Parcours
- Note de la rédaction - p. 703-704
- Parcours III : Hugues Patrice, Le langage du tissu. - Michel Verret p. 705-708
- Parcours IV : Dubost Françoise, Côté jardins. - Michel Verret p. 708-710
- Résumés (français, anglais, allemand, espagnol) - p. 711-720
- Tables 1984 - p. 721-725