Contenu du sommaire : Nouvelles recherches : de l'Europe à l'Extrême-Orient

La fermeture des archives jusqu'aux années 1990 a contribué à figer l'histoire de la politique extérieure tsariste dans une vulgate qui associe deux traits dominants : la prééminence de la question d'Orient dans sa balance stratégique et sa prétendue « neutralité bienveillante » à l'égard de la politique de puissance prussienne, l'une devant expliquer l'autre. Tel est le schéma d'interprétation que cette contribution souhaite passer au crible de la critique, en se concentrant sur le principe d'équilibre centre-européen, fondement de la géostratégie russe depuis 1814. Est-il abandonné dans les années 1860 ? Les tenants, au sein du pouvoir tsariste, du tropisme oriental l'emportent-ils sur ceux d'une politique européenne classique ?

Le travail de la Commission des épidémies en Pologne fait partie des histoires « heureuses » de la SDN. Cet article comporte deux parties. La première porte sur les acteurs de la politique sanitaire internationale ; la deuxième examine la mise en place de la Commission des épidémies et la naissance de l'Organisation internationale d'hygiène de la SDN. Cet article démontre que l'établissement de la Commission des épidémies de la SDN a été une réponse ad hoc à une urgence humanitaire précise. De plus, la recherche d'une solution à ce problème sanitaire a servi de précédent pour établir les bases et la nature des activités de l'Organisation internationale d'hygiène de la SDN.

A la fin du XIXe siècle, l'⁰glise catholique romaine est confrontée à une diversification des acteurs humanitaires et à la montée en puissance du Comité international de la Croix-Rouge. En 1929, les Conventions de Genève inscrivent dans le droit la prédominance du CICR en lui attribuant notamment l'initiative de la création d'une agence centrale destinée à récolter et à transmettre les informations relatives aux prisonniers de guerre. Durant la Seconde Guerre mondiale, CICR et Vatican se retrouvent ainsi sur un terrain commun : le second ne souhaitant pas renoncer à l'œuvre d'information, le premier défendant son quasi-monopole sur celle-ci. Notre article fournit des pistes de recherche sur les relations développées entre les deux institutions dans ce cadre donné et sur l'attitude des ⁰tats belligérants à leur égard.

L'article traite des personnes déplacées (DPs) polonaises dans les zones françaises d'occupation en Allemagne et en Autriche et des incidences de leur présence sur les relations franco-polonaises entre 1945 et 1949. En 1945, deux gouvernements représentent la Pologne, celui de Londres et celui de Varsovie : quel va être l'interlocuteur officiel des autorités françaises sur la question des DP's ? D'autre part, les autorités françaises voient dans les DPs une source de main-d'œuvre ; ces visées sont-elles compatibles avec celles de la Pologne qui appelle au retour de tous ses ressortissants de l'étranger ? La France est ainsi tiraillée entre ses intérêts nationaux, les réalités du terrain et les impératifs diplomatiques dictés par le contexte de début de guerre froide.

Pendant ses années passées comme secrétaire général à la tête des Nations Unies entre 1953 et 1961, Dag Hammarskjöld développa une amitié intime avec le diplomate et poète français exilé Alexis Léger (nom de plume Saint-John Perse). Léger était aussi un adversaire résolu du général de Gaulle. La correspondance entre Hammarskjöld et Léger donne un aperçu fascinant de la détérioration des relations entre le secrétaire général et la France du général de Gaulle, qui atteignit son paroxysme lors de la crise de Bizerte en 1961. L'article analyse la combinaison de poésie et de politique dans la relation entre Hammarskjöld et Léger, et le rôle qu'a alors joué Léger dans les relations entre Hammarskjöld et la France.

La guerre du Vietnam a favorisé l'essor des Peace Studies ; l'étude des processus de paix et, en particulier, de leurs interactions avec les relations transnationales. Cet article explore, précisément, la dimension franco-américaine et informelle du processus de paix au Vietnam dans la deuxième moitié des années 1960. Quelques personnalités françaises et américaines issues de la société civile ont, en effet, nourri des réseaux transnationaux très actifs contre la guerre. En certaines occasions, elles ont même contribué à faciliter les contacts secrets puis officiels entre représentants des gouvernements américain et vietnamien. Indéniablement servie par la politique de la France dans le conflit, la relative efficacité de ces intermédiaires met en valeur l'importance de ce qu'il est convenu d'appeler la multi-track diplomacy.

Vu d'Europe, la République populaire de Chine n'a que peu de visibilité sur la scène afghane. Pourtant, depuis 2001, elle a été très active dans ce pays. Pékin a très tôt mis en place une politique d'engagement pragmatique à destination de la nouvelle administration de l'Afghanistan. Les contacts et les liens qu'il a développés ont rapidement commencé à porter des fruits. En s'appuyant sur son statut international, mais aussi sur l'essor des relations politiques, sur l'assistance à la reconstruction, les échanges économiques, les investissements et le renforcement des voies de communications, la Chine a tranquillement réussi ces dernières années à s'imposer comme un acteur de poids à Kaboul. Ce développement inédit ne fait que refléter la montée en puissance plus générale de la Chine au cœur de l'Eurasie, un fait avec lequel il faudra dorénavant compter.