Contenu du sommaire : Le patriotisme économique à l'épreuve de la mondialisation
Revue | La revue internationale et stratégique |
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Numéro | no 62, été 2006 |
Titre du numéro | Le patriotisme économique à l'épreuve de la mondialisation |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Eclairages
- La Convention sur la diversité culturelle : anatomie d'un succès diplomatique - Jean Musitelli p. 11 Avec l'adoption de la Convention sur la diversité culturelle par l'Unesco, la diplomatie française vient de remporter une victoire importante. Non seulement la France a imposé une conception qui lui est chère, à savoir celle de la diversité culturelle, en se positionnant contre l'hégémonisme auquel le marché libéral conduit ; mais elle a également réussi à fédérer la majorité écrasante des pays votant autour du principe selon lequel tout ne peut pas être « commercialisé ». Comment ce résultat a-t-il été obtenu et quels en ont été les acteurs ? Le succès résulte de la combinaison de trois facteurs : l'invention d'un concept innovant et fédérateur, la construction d'une alliance unissant une constellation de réseaux et d'acteurs, l'application d'une méthode de négociation fondée sur la maîtrise du temps, des lieux et de l'action.The Convention on Cultural Diversity : Dissection of a Diplomatic SuccessThe adoption of the Convention on Cultural Diversity by Unesco is quite an achievement for French diplomacy. Not only has France imposed cultural diversity, a notion which it holds dear, confronting the cultural hegemony which liberalism leads to, but it has also succeeded in uniting the overwhelming majority of the voting countries around the principle that everything cannot be subject to a commercial logic. How was this outcome reached and who were its architects ? This success is the result of the combination of three factors : the invention of an innovative and federative concept, the establishment of a coalition gathering a multitude of networks and actors, and the application of a negotiation method based upon a careful management of time, location and action.
- La politique étrangère du Portugal : européanisme, atlantisme, ou les deux ? - Teresa Almeida Cravo et Maria Raquel Freire p. 23 L'effondrement du régime autoritaire en 1974 a induit des changements fondamentaux dans la politique étrangère portugaise. Il ne s'est pas simplement agi d'une transition de l'autoritarisme vers la démocratie, mais d'une importante réorientation du pays, alors tourné vers l'Atlantique, vers l'intégration européenne. Auparavant négligée, l'Europe devient un élément structurant et un modèle à suivre dans l'élaboration de la politique étrangère portugaise. Loin d'être incompatible avec les intérêts portugais en dehors de l'Europe, elle accroît la portée et le poids du pays à l'extérieur. L'analyse des lignes principales de la politique étrangère de Lisbonne met en exergue l'interconnexion entre l'européanisme et l'atlantisme (États-Unis et anciennes colonies) et les options qui en résultent pour les Portugais.Portuguese Foreign Policy : Europeanism, Atlanticism or Both ?The downfall of the authoritarian regime in 1974 induced fundamental changes in the dynamics of Portuguese foreign policy. It was not simply a transition from authoritarianism to democracy, but also a major changeover from an Atlanticist orientation towards European integration. Previously neglected, the European dimension becomes a structuring vector and a guideline for Portuguese foreign policy-making. Far from being incompatible with Portugal's interests outside Europe, this evolution increases the scope of the country's foreign connections as well as its international weight. The analysis of the general outlines of Lisbon's foreign policy highlights the interconnection between its European and Atlantic dimensions (United-States and former colonies) and the opportunities for the Portuguese that arise from it.
- Une politique étrangère slovène modifiée pour l'Union européenne - Dimitrij Rupel p. 31 Après avoir obtenu son indépendance en 1991, la Slovénie est devenue, en 2004, membre de l'Union européenne (UE) et de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN). Désormais, dans un monde globalisé où les instabilités locales ont tendance à se répercuter à l'échelle régionale, la Slovénie se positionne en faveur d'une Politique européenne de voisinage active, qui œuvrerait en faveur d'une sécurité, d'une stabilité et d'une prospérité accrues des voisins de l'UE que sont les Balkans, la Turquie, l'Ukraine, la Moldavie et le Caucase méridional... Outre le fait de s'assurer un accès aux ressources énergétiques, cette politique de l'Union européenne pourrait être considérée comme un moyen de consolider des États tampons entre l'Europe et des zones d'instabilité comme le Proche-Orient et l'Asie centrale.Slovenia Adjusts its Foreign Policy to European Union's InterestsAfter obtaining its independence in 1991, Slovenia has become a member of the European Union (EU) and joined the North Atlantic Treaty Organization (NATO). Henceforth, in a globalized world in which local instabilities tend to spread on a regional level, Slovenia advocates an active European policy that would enhance security, stability and prosperity in EU neighbouring countries such as Turkey, Ukraine, Moldavia, the Balkans and South Caucasus... That policy would insure a decisive access to energetic resources, and would also help consolidating states located between Europe and risk zones, such as the Middle East and Central Asia.
- La Convention sur la diversité culturelle : anatomie d'un succès diplomatique - Jean Musitelli p. 11
Dossier : le patriotisme économique à l'épreuve de la mondialisation
- Introduction : la nationalité des entreprises en Europe - Susanne Nies et Sylvie Matelly p. 41
Dans une économie mondialisée, la nationalité des entreprises a-t-elle encore un sens ?
- Mondialisation et recomposition du capital des entreprises européennes - Michel Dietsch p. 53 La position de la France comme carrefour pour les investissements internationaux, la taille moyenne de son territoire et l'intégration des marchés financiers ont entraîné une progression considérable de la détention du capital des entreprises françaises par des non-résidents, principalement originaires de la zone euro et du Royaume-Uni, avec la croissance des investissements directs et des investissements en portefeuille. Les investisseurs institutionnels s'inscrivent dans une logique financière, alors que les groupes étrangers répondent à des stratégies industrielles. Le marché national devient également étroit pour les sociétés françaises qui se mondialisent et constituent des groupes européens. Or, leur développement est freiné par les barrières institutionnelles, qui pourraient être dépassées par la convergence des modèles européens d'entreprise.European Companies' Capital Readjustment to a Globalized EnvironmentFrance is a crossroads for international investment, but has an average-sized territory ; in this context, the integration of financial markets caused a considerable progression of foreign shareholding in French companies' capital. Most of the newcomer investors are non-French residents, essentially originating from the Eurozone and the United Kingdom, who reverberate the general growth of both direct and portfolio investment. Institutional investors function in a financial logic, whereas foreign groups obey to industrial strategies. The national market is narrowing for French companies, which globalize their activities and regroup in European conglomerates, but their development is kept in check by institutional obstacles, which could be overcome if there was a convergence of European corporate models.
- La nationalité des entreprises et le patriotisme économique sont-ils solubles dans la mondialisation ? - Dominique Plihon p. 65 Les politiques françaises de privatisation des secteurs industriel et financier ont entraîné une modification radicale de la propriété des grandes entreprises, aujourd?hui très largement entre les mains d?investisseurs étrangers. En conséquence, la logique actionnariale s?impose dans les entreprises, avec la recherche de la maximisation de leur valeur boursière et du respect des principes de gouvernance, destinés à assurer le contrôle des investisseurs sur les dirigeants. Dans ce contexte, la possibilité pour un gouvernement de prendre des mesures contre les OPA sont très faibles. Les principaux moyens d?amener les acteurs économiques et financiers à respecter les impératifs nationaux, notamment en matière d?emploi, sont de limiter la circulation internationale des capitaux et de renforcer le contrôle des travailleurs dans les entreprises.Can Companies? National Identity and Economic Patriotism Survive Financial Globalisation ?The French privatization policies in both industrial and financial sectors have led to a radical modification of the big companies? ownership. They now widely belong to foreign investors. Consequently, the ?shareholders? logic grows on firms, bringing about pursuit of stock market value maximization and respect of the principles of governance, in order to insure the investors? control over corporate executives. In this context the possibility of taking measures against takeover bids is very weak for a government. The most effective means of pushing economic and financial actors into respecting national imperatives, especially in terms of employment, are to limit the international capital circulation and to reinforce the workers? influence in companies.
- Patriotisme économique, action publique et marchés stratégiques - Bernard Carayon p. 75 Sur certains marchés stratégiques (télécommunications, armement, énergie...), favoriser la concurrence libre et non faussée est dangereux. Au contraire il est légitime que l'État intervienne dans ces secteurs, comme le font toutes les nations quelles soient libérales ou pas. Or, le capitalisme français et européen souffre d'un manque de vision stratégique et de l'absence de « patriotisme économique » en faveur des entreprises stratégiques. Ayant trop appliqué le principe de la concurrence, l'Union européenne s'est elle-même handicapée face aux autres pays industrialisés qui mènent tous des politiques volontaristes et soutiennent par tous les moyens leurs entreprises dans la conquête de marchés stratégiques.“Economic Patriotism”, Public Intervention and Strategic MarketsIt can be hazardous to promote free and flawless competition in certain strategic markets. State intervention is legitimate in these sectors ; it is practised by most nations, whether they are liberal or not. And yet, French and European capitalism suffers from a lack of global vision and “economic patriotism” in favour of strategic companies. By excessively stressing the application of the free competition theory, the European Union has handicapped itself in the race with other industrialized countries, which all implement interventionist policies and support their companies by all means in the bid for strategic markets.
- Mondialisation et recomposition du capital des entreprises européennes - Michel Dietsch p. 53
Vers un patriotisme économique à l'échelle européenne ?
- Quelques enjeux autour de la notion de "nationalité des firmes" - Claude Serfati p. 79 À mesure que l'activité des sociétés transnationales se mondialise, leur nationalité devient difficile à déterminer ; car les critères sont plus nombreux (origine, lieu de production, réglementation, nationalité des actionnaires...) et souvent inadaptés. Cette évolution réduit la marge d'action des États, qui invoquent la préservation de la sécurité nationale pour justifier leurs interventions en faveur d'entreprises nationales, et préconisent de renforcer le poids de l'actionnariat institutionnel national en leur sein. Pourtant, quelle que soit la nationalité des actionnaires, la logique actionnariale reste financière et non patriotique. La prégnance de la finance implique le développement de politiques d'attractivité et conduit à s'interroger sur l'interférence entre la globalisation financière et la localisation des entreprises.Redefining the Notion of “Corporate Nationality”As transnational companies keep on intensifying their foreign activities, determining their nationality becomes more difficult. Most of the possible criteria (origin, production sites, applicable jurisdiction, shareholders' or managers' nationalities,...) eventually turn out to be inadequate or obsolete. This evolution limits the scope of governmental interventions. Some states put forward the preservation of national security to justify their actions in favour of national companies, and advocate a reinforcement of national shareholding within these firms. However, the shareholders' motivations remain purely monetary and will never be patriotic. The ascendancy of finance implies a necessary elaboration of attractiveness policies, and leads to examine the interferences between financial globalization and companies' localization.
- Des entreprises en Europe ou des entreprises européennes ? Les politiques industrielles, de la concurrence et de l'innovation de l'Union européenne face à la mondialisation - Gilles Le Blanc p. 93 Le processus de globalisation invite à reconsidérer les relations entre entreprises et territoires. Se pose en particulier la question de l'Europe en tant que dimension géographique pertinente (ou pas) des décisions des firmes ? Le bilan du rôle de l'Union européenne vis-à-vis des entreprises dans ses trois dimensions les plus critiquées (politique de la concurrence, de l'industrie et de l'innovation) suggère que le problème n'est pas l'inexistence des actions communautaires mais plutôt l'absence de cadre politique offrant légitimité, cohérence, et prévisibilité aux entreprises. Dès lors, construire un champ d'intérêt commun entre entreprises et politiques publiques en Europe, afin de préciser ce qu'est une « entreprise européenne », devient un chantier urgent qui nécessite un engagement politique déterminé.Companies in Europe or European Companies ? Industrial, Competition and Innovation Policies in the European Union in a Globalizing EnvironmentThe globalization process invites us to reconsider the relation between companies and territory. It becomes a central issue to determine whether the European dimension is relevant in corporate decision-making. This article offers an assessment of the three most controversial dimensions of the European Union's action towards companies : its industrial, competition and innovation policies. The inexistence of communitary actions turns out to be less problematic than the absence of an institutional framework that would provide legitimacy, coherence and foreseeability to companies. Finding common ground between companies and European public policies becomes urgent, and requires a determined political implication in order to specify what a “European company” is.
- Une issue européenne au débat ? Le point sur le statut d'entreprise européenne - Susanne Nies, Michael Diekmann et Guillaume Sanchez p. 103 La mise en place d'une Societas Europaea (SE) pourrait constituer une issue à la crise autour du patriotisme économique. Ce statut existe depuis 2004, mais n'a été adopté pour l'instant que par l'entreprise allemande Allianz, qui, suite à sa fusion avec RAS est devenue une Société européenne, Allianz Societas Europaea. La SE vise à réduire le décalage entre le cadre légal appliqué aux entreprises (le droit national) et l'évolution des entreprises au sein d'une économie mondialisée. Elle simplifie l'organisation des groupes, en concentrant les pouvoirs autour d'une société mère européenne. Cette structure juridique a mis du temps à entrer en vigueur, car elle était perçue comme une remise en cause des acquis sociaux des législations nationales. Elle est aujourd'hui encore souvent considérée comme une manœuvre permettant d'alléger les contraintes des entreprises au détriment des salariés.The European Enterprise Status : a Communitary Solution to the Debate ?The creation of a Societas Europaea (SE) status could offer a solution to the “economic nationalism” crisis in Europe. This status was introduced in 2004, but it has only been adopted by one company yet. This first European company, Allianz Societas Europea, was born after completion of the merger between Allianz and RAS. The SE label aims to reduce the incompatibilities of national legal frames with the evolution of companies in a globalized economy. It simplifies the organization of conglomerates by allowing a centralization of decision-making in a European parent group or holding company. This legal structure took a long time to become effective, because it was perceived by employees as a challenge to existing social rights in national legal systems. It is still often considered a way of favouring companies to the detriment of workers.
- Quelques enjeux autour de la notion de "nationalité des firmes" - Claude Serfati p. 79
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