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Revue | Politiques et management public |
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Numéro | vol. 14, no 4, décembre 1996 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Sélection d'articles
- Organisation des transports dans une métropole bi-étatique: la Port Authority of New York and New Jersey, le déclin d'un mode de coordination - Dablanc L. p. 1-28 La région de New York, métropole géante et spécifique quant à sa morphologie, ses institutions et ses réseaux de transport, sert de cadre explicatif à l'émergence de la Port Authority of New York and New Jersey et à sa constitution progessive en modèle de coordination métropolitaine et bi-étatique des transports. Mais aujourd'hui, sous l'effet de crises internes et de la transformation du mode de gouvernement du grand New York, la Port Authority doit reconsidérer ses domaines de compétence et la place générale qu'elle occupe dans la coordination des systèmes de transport de la région métropolitaine, sans que la question de la fragmentation institutionnelle de la région ne soit résolue.
- La politique de subventionnement des compagnies théatrales, une illustration du management de la complexité - Langrand-Escure L. p. 29-39 Les théories de la complexité appliquées aux sciences de l'organisation permettent de dégager un certain nombre de recommandations en terme de management. Parallèlement, l'analyse du système de subventionnement des compagnies dramatiques indépendantes confirme l'inefficacité des modes de gestion normatifs dans des contextes où cohabitent des acteurs multilples aux objectifs divergents, sinon contradictoires. Bien plus, il apparaît que les mécanismes par lesquels s'opère effectivement la régulation du système de subventionnement des compagnies théâtrales coïncident avec les préconisations du management de la complexité. Si cette convergence confirme la valeur descriptive et explicative des théories de la complexité, elle pose néanmoins question quant à leur pertinence prescriptive.
- L'impot sur le revenu entre idéologie et justice fiscale: perspective de sociologie fiscale - Leroy M. p. 41-71 Cet article est consacré à l'impôt sur le revenu selon une approche de sociologie fiscale qui, en France, reste largement à construire au regard des approches dominantes du droit et de l'économie. En insistant sur la dimension cognitive de la politique fiscale, l'analyse marque les limites des déterminants structurels classiques (le clivage gauche-droite, la crise, le droit et l'économie) puis procède à un examen critique des données disponibles (rapports, matériaux historiques) et des modèles socio-politiques utiles. La logique de la taxation du revenu se conçoit alors schématiquement de la façon suivante : du côté de l'Etat, l'idéologie changeante et fractionnée de la justice fiscale se comprend comme le résultat de la fonction "sociale" (et non économique ou financière) de l'impôt sur le revenu ; du côté du citoyen-contribuable, cette logique est à lire par rapport aux figures sociologiques de la perception de l'impôt : impôt-indolore, impôt-prix, impôt-contrainte, impôt-contribution, impôt tribut...
- Compétitivité et gouvernabilité: vers une théorie de l'investissement direct étranger en situation de mondialisation - Hafsi T.,Faucher P. p. 73-100 Les déterminants de l'investissement direct étranger (IDE) étaient généralement considérés comme entièrement reliés à des éléments environnementaux sous le contrôle des gouvernements. L'ouverture des marchés et la mondialisation mettent à l'ordre du jour des comportements plus complexes. D'une part interviennent les dimensions environnementales nationales et internationales, sur lesquelles le gouvernement a encore une certaine influence. D'autre part interviennent des dimensions liées à l'industrie et surtout à la stratégie de la firme qui investit, sur lesquelles le gouvernement n'a qu'un effet réduit. Dans cet article, nous proposons que l'IDE résulte d'une rencontre spécifique entre des intérêts de compétitivité, qui sont ceux de la firme, et des caractéristiques spécifiques d'un pays qui font sa gouvernabilité. Cette conceptualisation nouvelle est présentée en trois sections : d'abord, nous proposons une présentation et une discussion des résultats de recherche sur l'IDE, ensuite une illustration de la théorie et de sa dynamique est offerte avant une discussion de son utilité au plan de la recherche et de la pratique. La conclusion est consacrée à quelques conséquences concrètes.
- Jusqu'où peut-on diaboliser le modèle américain? - Ergas J.P.,Ruffat J. p. 135-145
- Le ghetto noir de Chicago - Ergas J.P. p. 147-158 En 1995, la société américaine évolue vers deux sociétés distinctes, souvent hostiles, l'une de race blanche assimilant progressivement les nouveaux immigrants d'origine hispanique et asiatique, l'autre de race Noire. Le décrochage économique et social du ghetto de Chicago s'accentue chaque jour. En 1960, le revenu par tête des Américains vivant dans les villes était de 5% supérieur à celui des banlieues. En 1990, le revenu par tête des banlieues est supérieur de 60% à celui des villes. La désindustrialisation des grandes villes américaines, l'automatisation des postes de travail ont dramatiquement réduit depuis vingt ans le nombre d'emplois offerts aux jeunes sans formation. La résorption du ghetto Noir de Chicago - où un quart des jeunes gens de 15 à 25 ans sont en prison ou libérés sur parole - ne se fera pas sans une action concertée de très longue haleine menée par la communauté Noire elle-même, avec l'appui de Washington, des Etats et des communautés urbaines. Un "Plan Marshall" initié et appliqué de l'extérieur réduira la plaie, il ne la guérira pas. C'est d'abord en elles-mêmes que les sociétés humaines trouvent les ressources de leur survie et de bon développement. Les communautés Noires d'Amérique du Nord n'y feront pas exception non plus que les cités populaires de France. Devant l'émigration des élites Noires, qui quittent la ville pour tenter de se fondre dans les banlieues blanches, personne ne doit exclure une dégénérescence au 21ème siècle des communautés africaines-américaines implantées aux Etats-Unis, s'apparentant à celles des tribus indiennes du 19ème siècle. Alors que l'Institut Banlieuescopies sonne l'alerte sur la multiplication des fractures sociales en France, et émet un diagnostic très sombre sur l'évolution des cités populaires à La Castellane, à Garges-lès-Gonesses ou aux Grandes Bornes, la description du ghetto de Chicago peut aider à mettre en perspective les relations exacerbées entre communautés ethniques antagonistes. Administrateur à l'université catholique de DePaul à Chicago depuis 1994, la possibilité m'est donnée d'observer directement la dérive du ghetto Noir de la ville dont sont issus une partie des élèves.
- La furie américaine dans la communication (dans le prolongement de la dérèglementation) - Ruffat J. p. 159-185 Le développement technique de l'Amérique s'est fait dans le prolongement immédiat de la révolution industrielle britannique, dont les inventions furent très vite transposées et assimilées par son industrie naissante dès la fin du 18ème siècle, tout naturellement dans le textile et la métallurgie. En même temps l'Amérique s'est elle même montrée très inventive ("yankee ingenuity", comme on dit là-bas), ainsi sa contribution, parfois décisive, a beaucoup des premiers développements de l'électricité (en particulier avec Thomas Edison), du téléphone (avec Graham Bell), puis ensuite dans l'automobile et dans l'industrie manufacturière de façon générale, et, plus tard, dans l'aviation, comme dans la chimie, puis dans la pharmacie, etc., sans parier de l'espace et de l'informatique. En fait, il y avait déjà furie américaine dans les techniques dès le milieu du 19èrne siècle. Mais si les produits agricoles (blé, coton, tabac, etc.) ont rapidement traversé l'Atlantique d'Ouest en Est dans des volumes de plus en plus importants, les produits industriels (et leurs fabricants) ont très peu passé l'océan jusqu'à, pratiquement, la deuxième guerre mondiale (sauf pour quelques exceptions, comme Singer, Ford, General Motors ou Michelin). Quant aux services, ils n'ont pris le grand large que très récemment, en pratique au cours des vingt dernières années, sauf bien sûr la banque et l'assurance, qui ont été de toutes les aventures depuis quasiment la renaissance. En conséquence la problématique des relations économiques, des rapports de force et des échanges entre l'Europe et l'Amérique a considérablement évolué au fil du temps. Aussi courons-nous toujours le risque de les analyser avec les grilles de lecture et d'analyse relevant de la guerre précédente. Les facteurs géo-politiques ont également pesé lourdement, au cours du 20ème siècle, sur la nature et l'importance de ces échanges. Ainsi, par deux fois au cours de ce siècle, l'Amérique a incarné l'espoir pour une Europe déchirée. Elle fut, dit-on, 'l'arsenal des démocraties". Il en est résulté des flux monétaires, des transferts technologiques (et ce faisant culturels) et des flux de marchandises de très grande ampleur. Depuis, l'Amérique a voulu se redynamiser, en particulier au cours des vingt dernières années, en explorant de nouveaux gisements de valeur économique (notamment dans le domaine des technologies de l'information), qui ont périmé beaucoup des anciens gisements, pour eux comme pour les autres peuples. Mais le résultat, c'est qu'après l'espoir, l'Amérique inspire aujourd'hui la crainte, celle, pour les européens, d'être bousculés dans le confort qu'elle les avait aidé à construire pendant les Trente glorieuses, en particulier grâce au Plan Marshall, par tarissement des gisements de valeur sur lesquels ils avaient assis leur prospérité (et ce faisant les droits acquis par sa population) depuis la deuxième guerre mondiale. Après le lifting en profondeur qu'a produit la déréglementation dans le secteur des télécommunications, le véritable raz de marée (Bill Gates parle de 'sea change") qui emporte le monde de la communication vers des rivages incertains est en effet lourd de menaces pour l'Europe, si elle ne savait pas s'adapter rapidement à la nouvelle donne. Mais la peur est mauvaise conseillère en matière de stratégie. Aussi faut-il d'abord analyser la dynamique à l'œuvre dans le champ de la communication et se demander dans quelle mesure elle nous concerne directement. Ensuite seulement se pose la question de l'adéquation de nos réponses collectives. Sont-elles, en effet, les plus pertinentes et les plus appropriées, eu égard aux nouveaux rapports de force tels qu'ils s'organisent et se profilent, en dynamique, dans l'économie mondiale ; surtout compte tenu de la vitesse du jeu tel qu'il est mené actuellement par les américains? Cette dynamique renouvelle en profondeur l'assise même de nos économies et périme beaucoup des cadres d'analyse anciens. Il en résulte de sérieux malentendus et erreurs d'appréciation dans la sphère du politique en ce qui concerne les ressorts profonds et le métabolisme de l'économie, et surtout les leviers et les marges d'action réels des politiques (de tous bords) sur ces économies.