Contenu du sommaire : Une théorie empiriste du droit est-elle possible ? Lectures d'Alf Ross
Revue | Droit et société |
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Numéro | no 50, janvier 2002 |
Titre du numéro | Une théorie empiriste du droit est-elle possible ? Lectures d'Alf Ross |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Hommage à Pierre Bourdieu - Jacques Commaille p. 7-9
Dossier
- Présentation - Éric Millard p. 13-18
- Alf Ross et la conception référentielle de la signification en droit - Pierre Brunet p. 19-29 La question des concepts juridiques, et particulièrement de leur défini¬tion, est au c?ur de la théorie du droit d'Alf Ross, lequel lui a consacré spécifiquement de nombreux écrits importants. Elle l'a conduit à poser les fondements pour une analyse critique du langage juridique, à partir des¬quels se sont développées plusieurs écoles théoriques actuelles. Cette interrogation l'a amené à une réflexion toujours actuelle relative à l'ana¬lyse de la signification, qui doit beaucoup aux travaux des philosophes analytiques du début du XXe siècle et notamment à ceux de Russell. Il reste que cette analyse a subi quelques évolutions non négligeables qui éloignent Ross d'une conception strictement référentielle de la signifi¬cation ; elle a fait l'objet de critiques, mais contribue à renouveler les modes d'approches des concepts juridiques en général.
- Alf Ross : droit et logique - Véronique Champeil-Desplats p. 29-42 La conception qu'Alf Ross a des rapports entre le droit et la logique est inséparable de ses présupposés ontologiques, épistémologiques et métho¬dologiques. À partir de la distinction entre les énoncés du droit formés de propositions prescriptives et les énoncés portant sur le droit formés de propositions descriptives, il met en évidence que les premiers ne peuvent pas être traités de manière logique parce que n'établissant pas des faits, alors que les seconds, décrivant ces faits, doivent nécessairement être soumis aux inférences de la logique formelle. Il est donc réservé sur la possibilité d'une logique déontique. La logique formelle apparaît ainsi dans l'?uvre d'Alf Ross comme un outil d'analyse scientifique portant sur des énoncés qui ne lui obéissent en rien.
- Ross, Kelsen et la validité - Michel Troper p. 43-57 Alf Ross a vigoureusement critiqué la conception de la validité de Hans Kelsen. Il s'agirait d'une qualité de ce qui est obligatoire non seulement juridiquement, mais aussi moralement. Kelsen ne serait donc pas, aux termes de cette analyse, un véritable positiviste, mais simplement un quasi-positiviste. On tente de montrer que cette critique est injuste : si Kelsen assimile bien validité et caractère obligatoire, l'obligation dont il s'agit n'est pas absolue, mais relative à une norme supérieure. Il existe donc une obligation juridique d'obéir à telle norme particulière, mais aucune obligation d'obéir au droit pris globalement. La critique de Ross a néanmoins le mérite d'attirer l'attention sur la difficulté de définir l'objet d'une science empirique du droit.
- Quels faits sociaux pour une science empirique du droit ? - Évelyne Serverin p. 59-69 Dans quelle mesure peut-on dire que les théories réalistes scandinaves en général, et celles proposées par Alf Ross en particulier, contribuent à apporter des connaissances empiriques sur le droit, ce qui constitue leur projet ? D'une part, on peut certes reconnaître la portée empirique d'une démarche qui définit le juge comme destinataire des règles, et qui intro¬duit ainsi la pratique du droit au c?ur de l'analyse théorique du droit. D'autre part, cependant, une telle théorie ne permet pas de saisir empiri¬quement la dimension prédictive du comportement des juges dès lors que le point de vue des acteurs sociaux demeure en dehors du champ d'investigation.
- Politique de l'empirisme ? Démocratie, technologie et socialisme chez Alf Ross - Carlos Miguel Herrera p. 69-79 Alf Ross est l'auteur d'une réflexion politique significative qui pourrait étonner de la part d'un juriste positiviste. Il est d'abord un intellectuel important et influent dans son pays, qui a longtemps accompagné la social-démocratie et qui, par ses prises de position ponctuelles dans la vie sociale comme par ses efforts de théorisation du concept même de démo¬cratie, n'a jamais cherché à rester étranger au débat d'idées, sans pour autant renoncer à ses exigences épistémologiques. Son attitude pratique comme ses réflexions philosophiques invitent ainsi à une réflexion et une claire redéfinition des relations entre positivisme et politique.
Justice - La construction politique d'une Justice : le « laboratoire » de la Palestine
- Juger le politique sous l'Autorité palestinienne à l'aube de la deuxième Intifada - Laetitia Contet p. 81-101 Cet article traite du fonctionnement de l'Autorité palestinienne à la veille de la « deuxième Intifada » à travers le prisme du droit, en prenant comme objet le contrôle juridique de l'Autorité palestinienne. À partir d'une enquête de terrain effectuée en avril et mai 2000, l'auteur cherche à décrire les débats relatifs à la construction d'un État palestinien et s'intéresse plus particulièrement aux enjeux liés à la mise en place d'institutions étatiques telles que la Justice, en insistant sur le rôle des institutions financières internationales dans ce processus. Le thème abordé fournit l'occasion de se pencher sur les dénonciations d'un système politique confiné dans des pratiques arbitraires et personnelles du pouvoir.
- Juger le politique sous l'Autorité palestinienne à l'aube de la deuxième Intifada - Laetitia Contet p. 81-101
Etudes
- Doctrine juridique et science juridique - Jacques Chevallier p. 103-120 La confusion très généralement opérée entre « doctrine juridique » et « science juridique » se traduit en pratique par l'hypertrophie de la première au détriment de la seconde, confinée dans un statut marginal. En réaction contre cette confusion, on entend montrer ici que l'une et l'autre adoptent des perspectives fondamentalement différentes sur le droit : alors que la doctrine juridique est partie prenante au processus de production du droit, la science juridique se place en position d'extériorité par rapport à lui. Néanmoins, la nécessaire distinction des points de vue, indispensable à la construction d'une authentique science du droit, ne saurait déboucher sur un strict cloisonnement : s'ils sont de nature différente, savoir doctrinal et savoir scientifique sont en effet également nécessaires à la connaissance du phénomène juridique.
- La fonction psychique du droit : l'imaginaire juridique entre individu et collectif - Christopher Pollmann, Hugues Rabault p. 121-153 Si l'on considère que la réalité humaine repose sur des mécanismes psychiques, il est possible d'analyser le droit sous un angle original. En tant que phénomène psychique, il implique des représentations relatives à l'image du juriste. Dans cette perspective, la fonction psychique du droit est, notamment, de garantir la satisfaction du narcissisme des juristes dans l'accomplissement de leur fonction. C'est vrai des juristes comme communauté dans la société, dévouée au bien commun, aussi bien que comme individus (juges, avocats, bureaucrates). En ce sens, il est possible de montrer que la « science du droit » contribue aussi à remplir le rôle de satisfaire les besoins narcissiques des juristes.
- Le statut épistémologique des théories juridiques : essai de définition d'une pratique scientifique juridique - Roland Ricci p. 151-184 Le positivisme comme le jusnaturalisme confèrent aux théories juridiques un statut épistémologique a priori indépendamment de leurs contenus. L'élaboration d'une pratique scientifique juridique conduit à reconsidérer la fonction assignée aux théories. La formulation de théories juridiques et leur confrontation avec la réalité normative afin de tester leur validité constituent, en l'état de nos connaissances, l'unique possibilité d'appro¬che objective du phénomène juridique. La réalisation de ces tests empi¬riques nécessite l'élaboration de langages spécifiques et de règles prati¬ques conformément aux apports respectifs de la sémantique scientifique et du rationalisme critique.
- La persistance de l'argument légaliste : éléments pour une typologie contemporaine des registres de légitimité dans une société libérale - Olivier Corten p. 185-208 L'objet de l'étude est d'insister sur la persistance du droit comme registre décisif de légitimation du pouvoir politique, et ce par comparaison avec d'autres registres, en particulier ceux désignés comme politique et moral. La perspective part de l'élaboration d'un tableau synthétisant la littérature existante en systématisant les types d'arguments qui peuvent, au sein d'une société libérale, être avancés pour légitimer une autorité, un acte ou une décision de celle-ci. Cette typologie vise à rendre compte de l'utili¬sation effective de registres de légitimité par les autorités politiques dans des situations concrètes et, dans ce contexte, à démontrer le caractère toujours décisif de l'argument légaliste.
- Doctrine juridique et science juridique - Jacques Chevallier p. 103-120
Chronique bibliographique
- À propos de - p. 209-231
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