Contenu du sommaire : La réforme de l'État-providence

Revue Revue Internationale des Sciences Administratives Mir@bel
Numéro volume 79, no 2, juin 2013
Titre du numéro La réforme de l'État-providence
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial d'adieu - Christopher Pollitt p. 195-198 accès libre
  • Éditorial - Andrew Massey p. 199-201 accès libre
  • Introduction : La réforme de l'État-providence et les implications pour l'imputabilité dans une perspective comparative - Per Lægreid, Paola Mattei p. 203-207 accès libre
  • Cartographie de l'imputabilité : Concepts fondamentaux et sous-types - Staffan I. Lindberg p. 209-233 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'essor récent de « l'imputabilité » dans l'administration publique et le développement international semble s'écarter en partie de plusieurs siècles d'études conceptuelles et empiriques menées dans les disciplines connexes que sont la finance et la comptabilité et dans la science politique. Dans le présent article, nous rassemblons le sens fondamental de la notion d'imputabilité telle qu'utilisée dans des centaines d'études et tentons de mettre de l'ordre dans la litanie de sous-types présente dans cette littérature. Un système d'organisation à trois dimensions (source de contrôle, vigueur du contrôle et direction de la relation) permet d'appréhender les différents types d'imputabilité qui existent. La typologie qui en résulte indique par ailleurs que les différents sous-types présentent non seulement des acteurs et des caractéristiques différents, mais qu'ils cherchent aussi à défendre des valeurs variables et qu'ils sont confrontés à des défis différents. Ces observations ont des implications importantes pour la recherche et l(‘impossibilité) de traduire les conclusions d'un sous-type à un autre, de même que des implications pratiques pour le monde de la politique. L'imputabilité peut prendre différentes formes en fonction des acteurs (citoyens/politiciens, politiciens/bureaucrates, juges/citoyens). Ces types d'imputabilité visent à protéger des valeurs différentes et s'accompagnent de problèmes variables. L'imputabilité n'est cependant pas tout : il ne s'agit que de l'un des multiples moyens de limiter l'usage du pouvoir (ou l'abus de pouvoir). Dans le présent article, nous donnons des détails sur l'idée fondamentale d'imputabilité. Nous décrirons ensuite la gamme complète des sous-types avec leurs caractéristiques et leurs problèmes propres. Notre article sera utile aux décideurs et aux praticiens qui cherchent à faire face aux faiblesses de divers acteurs en matière d'imputabilité en prenant en considération leurs différences.
    The recent surge in popularity of ‘accountability' in public administration and international development seems in part divorced from centuries of conceptual and empirical work done in related disciplines of finance and accounting, and in political science. This article brings together the core meaning of accountability as used in hundreds of previous works, and seeks to bring order to the litany of subtypes in this literature. An organizing scheme with three dimensions (source of control, strength of control, and direction of relationship) captures all the existing varying types of accountability. The resulting typology also clarifies that varying subtypes have not only different actors and characteristics, but also seek to uphold varying values and are facing different challenges. These have important implications both for research and the (im-)possibility of translating findings from one subtype field to another; as well as practical implications for the policy world.Points for practitioners:Accountability has several different forms depending on the actors (e.g. citizens–politicians; politicians–bureaucrats; or judges–citizens). These types of accountability seek to protect different values, and are accompanied by varying challenges. Yet, everything is not accountability: it is but one of many possible ways to constrain the (mis-) use of power. This article clarifies the core idea of accountability. It then depicts the full range of subtypes with their different characteristics and problems. This can function as a guide for policy makers and practitioners when seeking to address weaknesses in accountability of varying actors based on acknowledging their differences.
  • Analyse de l'évolution de l'imputabilité dans les administrations axées sur le marché de l'emploi ? d'une concentration vers un partage des responsabilités ? - Bastian Jantz, Werner Jann p. 235-258 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans la présente étude, nous analysons la façon dont la récente évolution dans la gouvernance des services d'emploi survenue dans trois pays d'Europe (Danemark, Allemagne et Norvège) a influencé les relations d'imputabilité. L'idée générale présentée dans la littérature de plus en plus abondante sur l'imputabilité est que le nombre d'acteurs participant aux mécanismes d'imputabilité est en hausse, que les relations d'imputabilité deviennent plus nombreuses et plus complexes et que ces évolutions risquent de se traduire par des relations d'imputabilité contradictoires et, au final, par des « problèmes d'imputabilité multiple ». Nous allons tenter d'étudier ces idées en analysant les différents acteurs concernés et les informations demandées dans les nouveaux mécanismes de gouvernance dans les trois pays. Nous verrons que les évolutions considérables qui surviennent dans les structures organisationnelles et les informations managériales plus nombreuses demandées et fournies ont donné naissance à des formes d'imputabilité davantage partagées. Nous n'avons cependant pas observé d'évolution claire vers une réduction de l'imputabilité politique ou administrative. Dans de nombreuses régions, les organisations publiques rencontrent et utilisent des mesures d'imputabilité de plus en plus sophistiquées pour contrôler et améliorer leur performance. Beaucoup de citoyens les considèrent cependant encore comme n'étant pas suffisamment responsables. Ces problèmes d'imputabilité sont normalement traités en recommandant et en établissant des structures d'imputabilité nouvelles et plus nombreuses, faisant intervenir plus d'acteurs et d'obligations en termes d'informations, convaincu que l'on est que ces systèmes vont améliorer la production et les résultats. Parallèlement à cela, nombreux sont ceux qui craignent que ces nouvelles structures d'imputabilité partagées et fragmentées affaiblissent l'imputabilité et la légitimité politiques établies. Nous allons étudier ces évolutions en comparant les changements observés en matière d'imputabilité dans les administrations responsables du marché de l'emploi de trois pays et allons voir que les responsabilités sont davantage partagées, mais sans pour autant affaiblir l'imputabilité politique et administrative.
    The article explores how recent changes in the governance of employment services in three European countries (Denmark, Germany and Norway) have influenced accountability relationships. The overall assumption in the growing literature about accountability is that the number of actors involved in accountability arrangements is rising, that accountability relationships are becoming more numerous and complex, and that these changes may lead to contradictory accountability relationships, and finally to ‘multi accountability disorder'. The article tries to explore these assumptions by analyzing the different actors involved and the information requested in the new governance arrangements in all three countries. It concludes that the considerable changes in organizational arrangements and more managerial information demanded and provided have led to more shared forms of accountability. Nevertheless, a clear development towards less political or administrative accountability could not be observed.Points for practitioners:Public organizations in many areas are confronted with and are using ever more and more sophisticated accountability measures to monitor and improve their performance.But many citizens still perceive them as being not accountable enough. These accountability problems are normally treated by recommending and establishing new and more accountability structures with more actors and information requirements and the assumption that these systems will lead to better output and outcome. At the same time there is a widespread fear that these new shared and fragmented accountability structures weaken established political accountability and legitimacy. The article explores these developments by comparing changes in accountability in labour market administration in three countries and finds that there is more shared accountability but at the same time no weakening of political and administrative accountability.
  • La réorganisation de l'imputabilité publique : les réformes hospitalières en Allemagne, en Norvège et au Danemark - Paola Mattei, Mahima Mitra, Karsten Vrangbæk, Simon Neby, Haldor Byrkjeflot p. 259-282 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Notre article entend enrichir la littérature sur la gouvernance à niveaux multiples des services de santé et l'imputabilité publique dans le contexte des récentes réformes européennes des hôpitaux. C'est en nous intéressant à l'évolution de la dynamique entre la gouvernance régionale et la gouvernance centrale des hôpitaux en Allemagne, en Norvège et au Danemark que nous allons examiner les questions de réorganisation des mécanismes d'imputabilité publique traditionnels. Nous soutenons que sous l'effet du renforcement des pressions financières, la corporatisation et la professionnalisation ont eu pour effet de retirer progressivement leur pouvoir décisionnel aux organes politiques régionaux dans le domaine du financement et de la planification des hôpitaux. Les gouvernements nationaux ont renforcé leur influence sur la trajectoire globale de leurs systèmes hospitaliers, mais ils ont aussi transféré des responsabilités considérables vers l'échelon des hôpitaux. Ces évolutions sont à la base de nouvelles relations d'imputabilité publique, des relations davantage managériales ou professionnelles intégrées dans des formes de gouvernance à niveaux multiples.Notre étude laisse entendre que si les réformes sont des réponses aux pressions stratégiques, les changements qui les accompagnent dans les relations et les mécanismes d'imputabilité contribuent quant à eux à transformer les pressions et les contraintes qui forment le contexte de l'activité administrative, managériale et professionnelle. À mesure que les réformes mises en œuvre dans les soins de santé norvégiens, danois et allemands renforcent la corporatisation, la centralisation et l'économisation, on peut s'attendre à ce que les choses sur lesquelles les responsables doivent s'expliquer, et la façon de le faire, évoluent et creusent l'écart entre les objectifs stratégiques et la performance managériale et professionnelle réelle.
    The article contributes to the literature on multi-level welfare governance and public accountability in the context of recent European hospital reforms. Focusing on the changing dynamics between regional and central governance of hospitals in Germany, Norway and Denmark, we raise concerns about the reshaping of traditional public accountability mechanisms. We argue that, triggered by growing financial pressures, corporatization and professionalization have increasingly removed decision-making power from regional political bodies in hospital funding and planning. National governments have tightened their control over the overall trajectory of their hospital systems, but have also shifted significant responsibility downwards to the hospital level. This has reshaped public accountability relationships towards more managerial or professional types embedded within multi-level forms of governance.Points for practitioners:Our study may be taken to suggest that if reforms are responses to policy pressures, the accompanying changes in accountability relationships and arrangements in turn contribute to altering the pressures and constraints that form the context for administrative, managerial and professional work. As reforms in Norwegian, Danish and German healthcare contribute to corporatization, centralization and economization, there is reason to expect that what officials are held accountable for, and how, is also likely to change and to accentuate the span between policy aims and actual managerial and professional performance.
  • L'imputabilité des services d'immigration ? Comparaison des crises en Norvège, au Danemark et en Allemagne - Johannes Reichersdorfer, Tom Christensen, Karsten Vrangbæk p. 283-304 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'imputabilité peut être comparée à des mécanismes institutionnalisés obligeant les acteurs à justifier leur action auprès de différentes instances, habilitées à poser des questions et à imposer des sanctions. Dans le présent article, nous analysons différentes « crises » survenues dans les politiques d'immigration en Norvège, au Danemark et en Allemagne dans le cadre d'un cadre descriptif portant sur cinq types d'imputabilité : l'imputabilité politique, administrative, légale, professionnelle et sociale. Les échanges d'information, les débats et les conséquences entre un acteur et une instance sont des éléments déterminants pour comprendre comment l'action politique-administrative est mise en œuvre dans les situations critiques. Premièrement, la dynamique de l'imputabilité met en avant les normes et les valeurs conventionnelles en ce qui concerne la modification des politiques et, deuxièmement, la responsabilité politique formelle ne se traduit pas toujours par des conséquences politiques telles que des démissions de ministres en cas de comportement inapproprié. Les conséquences sont en grande partie déterminées par la façon dont la dynamique de l'imputabilité intervient. Les responsables politiques et administratifs, de même que les agents de l'État sont confrontés à plusieurs exigences de la part du grand public et de leurs pairs internes ou externes. Il existe un lien entre les acteurs et les instances, qui est important pour comprendre la façon dont l'administration publique fonctionne. On peut qualifier ce lien de « dynamique de l'imputabilité ». En cas de crise, cette dynamique peut annuler ou maintenir les pratiques et les procédures administratives quotidiennes. Notre cadre d'imputabilité propose un mécanisme systématique permettant d'identifier cinq relations d'imputabilité devant être prises en considération lors des processus de réorganisation ou des initiatives de révision des politiques.
    Accountability can be conceptualized as institutionalized mechanisms obliging actors to explain their conduct to different forums, which can pose questions and impose sanctions. This article analyses different ‘crises' in immigration policies in Norway, Denmark and Germany along a descriptive framework of five different accountability types: political, administrative, legal, professional and social accountability. The exchanges of information, debate and their consequences between an actor and a forum are crucial to understanding how political-administrative action is carried out in critical situations. First, accountability dynamics emphasize conventional norms and values regarding policy change and, second, formal political responsibility does not necessarily lead to political consequences such as minister resignations in cases of misbehaviour. Consequences strongly depend on how accountability dynamics take place. Points for practitioners: Political and administrative leaders as well as civil servants are faced with several demands from the wider public and from internal or external peers. There is a relationship between actors and forums that is important in understanding how public administration works. This relationship can be described as accountability dynamics. In cases of crises, these dynamics can overcome or sustain daily administrative practices and routines. Our accountability framework offers a systematic scheme to recognize five accountability relations which should be considered during reorganization processes or policy changing initiatives.
  • L'imputabilité, une technologie stratégique : la responsabilisation des performances dans l'enseignement en Europe - Jenny Ozga p. 305-323 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans le présent article, nous analysons l'étude de l'imputabilité dans différents contextes nationaux dans le domaine de l'éducation en Europe, un domaine d'action de plus en plus important et en rapide évolution. Nous nous appuyons sur des recherches récentes et en cours pour examiner ce que nous dit l'évolution des pratiques d'imputabilité dans l'enseignement sur l'évolution de la gouvernance de l'enseignement (et, par extension, d'autres domaines de politique publique) dans des espaces stratégiques en pleine évolution. Nous soutenons en outre que l'imputabilité dans l'enseignement est de plus en plus définie comme une imputabilité technique, basée sur des mesures comparées de la performance internationales et nationales, si bien que l'imputabilité politique a été remplacée et la « performativité » contribue à la multiplication des problèmes de baisse de confiance dans les systèmes d'enseignement.Dans le présent article, nous situons l'évolution des mesures comparatives de la performance dans l'enseignement et dans d'autres services publics dans un cadre critique qui attire l'attention sur la réduction de l'imputabilité politique qui accompagne l'explosion des mesures de la performance. Notre article souligne à quel point la mesure comparative de la performance non seulement évince des formes plus complexes d'évaluation de la performance, mais crée aussi des relations de méfiance entre les professionnels de l'éducation et les pouvoirs publics. Les professionnels qui travaillent dans le secteur de l'éducation sont encouragés à examiner minutieusement le fonctionnement de technologies telles que PISA et à s'informer sur leurs conséquences politiques et leurs principes.
    This article discusses the investigation of accountability in different national contexts in the rapidly developing and increasingly important policy field of education in Europe. It draws on recent and current research to argue for a focus on what changing practices of accountability in education tell us about changes in governing education (and by extension, other public policy areas) within and across shifting policy spaces. The article further argues that accountability in education is increasingly defined as technical accountability through international and national comparative measures of performance, so that political accountability has been displaced, and performativity contributes to growing problems of diminished trust across and within education systems.Points for practitioners:This article seeks to place the development of comparative measures of performance – in education and in other public sector provision – in a critical frame that draws attention to the reduction in political accountability that accompanies the explosion of performance measurement. The article underlines the extent to which competitive measurement of performance both drives out other, more complex forms of assessment of performance and creates relations of mistrust between education professionals and governments. Professionals working in the education sector are encouraged to scrutinize the operation of technologies like PISA and to be informed about their political effects and assumptions.
  • L'imputabilité en Europe centrale et orientale : Entre concept et réalité - Arno?t Veselý p. 325-343 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Le présent article traite de l'imputabilité dans les nouveaux États membres de l'Union européenne (UE-10). Nous commencerons par passer en revue les différentes définitions de la notion d'imputabilité. Nous analyserons ensuite l'imputabilité dans l'UE-10 dans le cadre de trois perspectives théoriques (les déficits d'imputabilité, la surcharge d'imputabilité et les pièges de l'imputabilité). Nous nous intéresserons ensuite au caractère particulier du régime d'imputabilité dans l'UE-10, ainsi qu'aux explications possibles. Nous soutenons que le régime d'imputabilité dans l'UE-10 est caractérisé par un décalage entre l'existence formelle d'une série de mécanismes d'imputabilité et leur mise en œuvre effective (« imputabilité dormante »). Cela peut s'expliquer par le contexte dans lequel les mécanismes d'imputabilité sont intégrés (niveau élevé de corruption, de clientélisme, faible niveau de confiance), par les changements fréquents qui surviennent dans la représentation politique et l'administration publique et par l'absence de personnes averties et impartiales envers qui on est responsable. Nous conclurons en présentant les implications pour les recherches comparatives empiriques et la théorie.L'imputabilité a beau être l'un des concepts les plus importants dans l'administration publique, rares sont les analyses empiriques qui lui sont consacrées, en particulier dans les pays d'Europe centrale et orientale (PECO). Les recherches empiriques doivent se baser sur des propositions ayant une pertinence pratique. Nous formulons trois propositions de ce type – le déficit d'imputabilité, la surcharge d'imputabilité et l'asymétrie de l'imputabilité. Cela passe par une prise en considération des contextes plus larges dans lesquels l'imputabilité est intégrée, par l'analyse des relations d'imputabilité au fil du temps et par une distinction clairement établie entre l'imputabilité de jure et l'imputabilité de facto.
    This article deals with accountability in EU new member states (the EU-10). First, the different meanings of the concept of accountability are reviewed. Second, accountability in the EU-10 is analysed in terms of three theoretical perspectives (accountability deficits, overloads and traps). Then the specificity of the accountability regime in the EU-10 is discussed as well as its possible explanations. It is argued that the accountability regime in the EU-10 is characterized by discrepancy between the formal existence of many accountability mechanisms and their actual performance (‘sleeping accountability').This might be explained by the context in which accountability mechanisms are embedded (the high level of corruption, clientelism, low level of trust), frequent changes in political representation and public administration and the lack of knowledgeable and impartial accountees. The article concludes with implications for empirical comparative research and theory-building.Points for practitioners:Accountability is one of the most important public administration concepts, but its empirical investigation is underdeveloped, especially in Central and Eastern European countries. Empirical research must be led by propositions that have practical relevance. Three such propositions – the accountability deficit, overload and asymmetry – are suggested. This includes considering the broader contexts in which accountability is embedded, analysing accountability relations over time, and carefully distinguishing between de jure and de facto accountability.
  • Analyse du rôle des cabinets ministériels en Italie : L'héritage et la temporalité dans l'étude des réformes administratives - Fabrizio Di Mascio, Alessandro Natalini p. 345-364 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans le présent article, nous examinons les transformations dont font l'objet les cabinets ministériels en tant que structures consultatives bien établies dans l'exécutif italien depuis le début des années 90, lorsque le système de partis s'est effondré et qu'un cycle permanent de réformes de la gestion publique a été mis en place. Nous allons examiner comment l'influence des conseillers ministériels s'est peu à peu renforcée dans la coordination de l'exécutif, en venant combler le vide laissé en termes de capacité de gouvernance par l'institutionnalisation manquée du nouveau système des partis. Notre analyse empirique épingle ainsi la constellation d'acteurs qui ont reproduit les cabinets ministériels en tant qu'héritage du passé dans la structure actuelle du système italien, entravant au final l'innovation visée par les structures de gouvernance conformes aux normes internationales.Le présent article entend enrichir la littérature sur le développement du personnel ministériel en tant que manifestation essentielle de la politisation grandissante de la fonction publique. Grâce à son explication plus nuancées de l'héritage, axée sur l'identification des mécanismes causaux qui relient les systèmes institutionnels et les choix des acteurs dans les processus de réforme, notre article peut également enrichir les débats généraux sur le rôle du temps dans la gestion publique. Il porte également un regard intégré sur les différentes politiques de réforme de la fonction publique afin d'analyser les interrelations des évolutions administratives.
    The article explores the transformations which have occurred in ministerial cabinets as entrenched advisory structures in the Italian executive since the early 1990s when the party system collapsed and a permanent cycle of public management reforms was introduced. It examines how ministerial advisers have acquired a greater role in executive coordination filling the void of governing capacity left by the failed institutionalization of the new party system. In doing so, the empirical analysis identifies the constellation of actors that reproduced ministerial cabinets as a legacy of the past in the present set-up of the Italian system, eventually hindering the innovation of governance structures according to international standards.Points for practitioners:This article seeks to contribute to the literature on the development of ministerial staff as a key manifestation of increasing public service politicization. With its more nuanced type of legacy explanation, focused on the identification of causal mechanisms that link institutional arrangements and actor choices in reform processes, the article can also contribute to general debates on the role of time in public management. It also recommends an integrated focus on the different policies of civil service reform in order to map interrelations of administrative changes.
  • Entre agents de l'État et professionnels libéraux : Analyse empirique de la réforme des notaires portugais - António F. Tavares, Miguel A. Rodrigues p. 365-387 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Depuis les années 80, on fait de plus en plus appel aux mécanismes de marché en tant que solution alternative à la prestation de service public. La présente étude s'intéresse à une fonction singulière de la fonction publique – les notaires – et tente d'analyser les facteurs qui ont conduit à la formation de structures de marché différentes suite au choix opéré par certains notaires, qui ont préféré suivre la voie de la privatisation au lieu de conserver leur statut de fonctionnaire. Le gouvernement portugais a autorisé les notaires à opter pour le privé et prévu un numerus clausus de notaires par circonscription. Depuis la fin de la réforme, différentes structures de marché sont présentes dans les 278 arrondissements notariaux. Notre principale hypothèse est que des marchés comportant plusieurs agents se sont formés dans les arrondissements où les actes notariés et juridiques sont plus nombreux et plus rentables et assurent la survie financière et le profit. En revanche, des monopoles se sont formés sous l'effet de l'absence perçue d'opportunités commerciales et de demande. Pendant la période 2010-2011, nous avons recueilli des données émanant de statistiques officielles du système notarial, que nous avons complétées par des données sur les caractéristiques économiques et démographiques de chaque arrondissement. Nous avons effectué une régression logistique multinomiale pour vérifier l'hypothèse principale concernant la structure du marché dans les 278 arrondissements notariaux du Portugal continental. La tendance à la dérégulation de la profession notariale risque de continuer à progresser dans les pays de l'Union européenne. Des enseignements peuvent être tirés de l'expérience portugaise, où l'abandon du statut de fonctionnaire n'est pas encore obligatoire pour tous les notaires, mais où la privatisation semble être l'option inévitable compte tenu des contraintes financières et des pressions budgétaires.
    The use of market mechanisms has been progressively introduced as an alternative solution to public service delivery since the 1980s. This work addresses an uncommon public service function – civil law notaries – and seeks to analyse the factors that led to the formation of diverse market structures as a result of the choice of the privatization path over civil service status by public notaries. The Portuguese government gave public notaries the choice of becoming private, and regulated a numerous clausus of notaries by district. Since the reform was completed, a diversity of market structures have prevailed throughout the 278 notarial districts. Our key hypothesis is that markets with multiple agents formed in jurisdictions having a larger and more profitable number of notary and legal acts that provided financial survival and profit. In contrast, monopolies formed as a result of a perceived absence of market opportunities and demand. During the period 2010–11 we collected data from official statistics of the notary system supplemented by data on the economic and demographic features of each jurisdiction. Multinomial logistic regression is used to test the key hypothesis regarding market arrangements in the 278 notarial districts of continental Portugal.Points for practitioners:The trend in the deregulation of the notary profession is likely to continue to sweep European Union countries. Lessons can be drawn from the Portuguese experience, where the change from civil service status is not yet mandatory for all notaries, but financial constraints and fiscal pressures indicate privatization as the inevitable path.
  • Entre offre et demande : Les limites du développement participatif en Afrique du Sud - Chris Peter Tapscott, Lisa Thompson p. 389-407 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    La littérature sur le développement participatif s'intéresse en grande partie au côté « demande » et à la mesure dans laquelle les citoyens parviennent à pousser l'État à offrir les services de base. Les auteurs s'intéressent moins au côté « offre » du développement participatif, à savoir à la manière dont les institutions publiques mettent en œuvre les politiques de développement. L'Afrique du Sud d'après l'apartheid regorge de politiques et autres lois en faveur des processus participatifs. Dans la pratique, pourtant, ces mesures sont rarement à la hauteur des idéaux visés. Dans le présent article, nous examinons les programmes de logement social dans les communautés pauvres dans trois municipalités d'Afrique du Sud et soutenons qu'il existe un décalage entre la façon dont ceux qui formulent la politique interprètent la participation et la façon dont la question est interprétée par les communautés bénéficiaires et les représentants locaux. Nous en concluons qu'il faut s'intéresser bien plus aux raisons pour lesquelles les représentants ne parviennent pas à traduire les politiques nationales en actes si l'on veut que la démocratie participative obtienne une certaine légitimité parmi la population au sens large. La participation effective des citoyens dans les processus décisionnels est le facteur déterminant dans les programmes de développement participatifs. Une législation et une politique favorables sont des éléments essentiels dans ce cadre, mais qui ne suffisent pas à eux seuls pour garantir la participation. Les programmes participatifs doivent par conséquent prendre en considération la capacité des communautés à s'organiser et ils doivent prévoir les moyens et le temps nécessaire pour développer leur capacité à associer la population efficacement. Les agents à la tête des projets de développement participatifs doivent suivre une formation formelle pour bien comprendre que la manière dont les bénéficiaires participent est tout aussi importante que les activités proprement dites auxquelles ils sont associés.
    Much of the focus in the literature on participatory development has been on the demand side and on the extent to which citizens succeed in pressuring the state to deliver basic services. Less attention has been focused on the supply side of participatory development, namely on how state institutions give effect to development policies. Post-Apartheid South Africa is replete with policies and legislation supporting participatory processes and yet in practice this has seldom lived up to the ideals espoused. This article examines the delivery of public housing in poor communities in three municipalities in South Africa and argues that there is a mismatch between how the formulators of policy understand participation and how it is interpreted by beneficiary communities and local officials. It concludes that considerably more attention needs to be focused on why officials fail to translate national policies into action if participatory democracy is to attain any legitimacy in the population at large.Points for practitioners:Effective citizen engagement in decision-making processes is the key factor in participatory development programmes. Enabling legislation and policy is essential to the process but it is not sufficient to ensure participation. The design of participatory programmes will thus need to take into account the capacity of communities to organize themselves and will need to factor in the means and time to develop their ability to engage effectively. Officials managing participatory development projects need to undergo formal training so that they understand that the manner in which beneficiaries participate is as important the actual activities in which they are involved.
  • Compte rendu de livre : GEORGAKAKIS Didier (dir.), Le champ de l'Eurocratie. Une sociologie politique du personnel de l'UE, Paris, Économica (coll. Études politiques), 2012, 356 p. ISBN9782717861327 - Françoise Dreyfus p. 409-411 accès libre