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Revue | La Revue de l'IRES |
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Numéro | no 82, 2014/3 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Les budgets de référence : un nouveau repère dans le débat public sur la pauvreté - Pierre Concialdi p. 3-36 La publication début 2015 des budgets de référence de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale installe dans le débat public sur la pauvreté un nouveau repère dont l'objectif est de dépasser le caractère conventionnel des indicateurs usuels dans ce domaine. L'article présente la méthode de construction de ces budgets de référence et discute le sens des principales options méthodologiques retenues, notamment en les confrontant aux choix effectués dans d'autres expériences étrangères analogues. On présente ensuite brièvement les principaux résultats obtenus, lesquels montrent que, pour les ménages d'actifs, les minima sociaux existants sont inférieurs de moitié aux budgets de référence. On souligne enfin, dans une dernière partie, la fragilité des comparaisons internationales qui peuvent être menées à partir de ce nouvel indicateur.Reference Budgets: A New Point of Reference in the Public Debate on Poverty
Early 2015 saw the publication of reference budgets by France's National Observatory of Poverty and Social Exclusion, bringing a new point of reference to the public debate on poverty, the aim being to go beyond the conventional character of the standard indicators in the field. The article focuses on how the reference budgets were compiled and discusses the main methodological options chosen, comparing them to the options taken for similar projects in other countries. The article then turns briefly to the main results, which demonstrate that for working households, current minimum benefits are half the reference budgets. The article concludes by underlining the fragility of the international comparisons that can be made based on this new indicator. - Les indicateurs de législation protectrice de l'emploi au crible de l'analyse juridique - Raphaël Dalmasso p. 37-61 Cette contribution souhaite évaluer d'un point de vue juridique la notion de législation protectrice de l'emploi construite par l'OCDE dans ses Perspectives de l'emploi. Une étude de deux indicateurs (sur les définitions des licenciements individuels et collectifs) concernant trois pays (France, Italie, Royaume-Uni) permet de mettre en évidence des erreurs importantes dans la compréhension des droits, mais aussi et surtout, plus globalement, de douter de la possibilité même d'un classement rigoureux des ordonnancements juridiques nationaux. Le caractère trop incertain, en droit, de la notion de législation protectrice de l'emploi rend en effet toute notation incertaine, face au caractère souvent ambivalent des normes juridiques. Au final, il convient donc de séparer l'action de comparaison, essentielle à la compréhension des normes nationales et étrangères, qu'il faut encourager, de l'action de notation, qui ne saurait refléter la réalité des systèmes juridiques.Employment Protection Legislation Indicators: A Legal Analysis
The article sets out to provide a legal evaluation of the concept of employment protection legislation as set out in the OECD's Employment Outlook. A study of two indicators (on the definitions of individual and collective redundancies) in three countries – France, Italy, and the UK – sheds light on major errors in the understanding of rights, and more importantly, raises broader doubts about the possibility of drawing up dependable rankings for national legal systems. The concept of employment protection legislation is too legally unstable for a reliable scoring scheme, given that legal norms are often ambivalent. In the final analysis, comparing systems is vital for understanding national and foreign norms and should therefore be encouraged, but it needs to be considered separately from scoring, which cannot reflect the reality of legal systems. - L'accroissement de la durée des conventions collectives de travail québécoises depuis 20 ans : nouvelle normalité, partenariat consolidé ou manifestation du pouvoir patronal ? - Mélanie Laroche, Patrice Jalette, Frédéric Lauzon Duguay p. 63-88 En quoi la durée des conventions collectives de travail est-elle liée à leur contenu ? En se basant sur le cas du secteur privé québécois qui a vu la durée des conventions s'accroître depuis 1994, cette recherche traite des intérêts patronaux et syndicaux liés à cet enjeu dans un système de relations industrielles décentralisé. L'analyse de près de 5 300 conventions collectives met à l'épreuve trois thèses susceptibles d'expliquer cette évolution : 1) elle reflète une nouvelle normalité découlant de la volonté des parties de disposer de périodes de stabilité plus longues pour faire face à la mondialisation ; 2) elle s'accompagne de nouveaux objets de négociation de nature partenariale négociés localement et 3) elle constitue un nouveau levier de pouvoir patronal pour faire pression sur les conditions de travail des salariés. Les résultats montrent que la convention de plus longue durée s'est largement imposée comme la nouvelle « norme », mais que le rapport de force favorable aux employeurs paraît expliquer le caractère défavorable pour les travailleurs et les syndicats des conventions les plus longues.Extending the Duration of Collective Bargaining Agreements in Quebec over the Past Twenty Years: New Normality, Strengthened Partnership, or Display of Employers' Power? What link is there between the duration of collective bargaining agreements and their content ? The article focuses on the private sector in Quebec, where agreements have been growing longer since 1994, to explore the management and union points of view on this evolution in a decentralised system of industrial relations. An analysis of nearly 5,300 collective bargaining agreements offers a testing ground for three hypotheses put forward to explain this development : 1. it reflects a new normality arising from a desire on both sides to work with longer periods of stability to meet the challenges of globalisation ; 2. it is concomitant with new subjects of negotiations discussed by partners at the level of the company ; 3. it is a new lever of power used by employers to put pressure on working conditions for employees. The results demonstrate that longer conventions have broadly become the new “norm”, but that the power relations that favour employers would appear to explain why longer conventions are less favourable for employees and trade unions.
- Territoire et syndicalisme, entre respect des valeurs et besoins d'évolution, la démarche CGT - Martine Bernard-Roigt p. 89-110 La question du territoire est aujourd'hui incontournable. Les travaux de recherche en sciences sociales ont abondamment interrogé cette dimension mais la dimension spatiale des mobilisations est généralement peu prise en compte, car jugée subalterne.Or les acteurs – il s'agit ici des acteurs syndicaux et des salariés – font du territoire un enjeu central de leur mobilisation. En effet, la territorialisation croissante des politiques publiques ouvre de nouveaux espaces d'intervention pour les acteurs. Comment s'approprient-ils ces espaces ? Bouleversent-ils leurs pratiques dans les entreprises, les localités, les départements ? Imposent-ils aux organisations syndicales d'interroger leur mode d'organisation et de fonctionnement ? Notre article étudie deux dimensions de la démarche CGT, celle de la confédération dans son rapport au territoire et celle d'acteurs syndicaux de terrain dans un système productif local. Ce faisant, il montre les questionnements, les contradictions, les réponses que le syndicat construit pour faire face à ces nouvelles formes d'organisation du territoire et aux politiques publiques qui les guident.The issue of territory is of paramount importance these days. Research in the social sciences has explored the concept in many ways, but the spatial dimension of activism is often considered of secondary importance, and is thus overlooked. Yet territory is a key issue in determining the activism of actors – in the present case, trades unionists and employees. The increasing territorialisation of public policies is creating new spaces for actors to engage with. How do they make such spaces their own ? Do the new spaces modify their practices in companies, sites, and departments ? Do they force unions to address the way they are organised and run ? The present article looks at two aspects of the CGT's stance, in its relationship with its territory and the place of unionists on the ground in local systems of production, as a means of foregrounding the questions, contradictions, and responses constructed by the union to come to terms with new forms of territorial organisation and the public policies driving them.
- Emprise financière et internationalisation des groupes français : un premier état des lieux - Catherine Sauviat, Claude Serfati p. 111-139 Au cours des dernières décennies, les directions des sociétés mères ont renforcé les processus de centralisation et de gestion des actifs financiers au sein des grands groupes industriels français, y compris sous la forme hautement liquide de l'accumulation de trésorerie valorisée à court terme sur les marchés financiers.Cette évolution est allée de pair avec l'intensification de leur internationalisation dont témoigne la croissance de leurs investissements directs à l'étranger (IDE). Les IDE ne sont pas seulement les principaux vecteurs de transferts d'activités de production à l'étranger. Ils facilitent également une importante circulation financière interne aux groupes, source de profits qui reposent notamment sur le développement d'échanges de prestations de services et d'activités localisées dans les « centres financiers extraterritoriaux ».The Grip of the Finance and the Internationalisation of French Groups: An Initial Assessment
In recent decades, management teams in parent companies have intensified the processes of centralising and managing financial assets in France's major industrial groups, including in the highly liquid form of accumulated treasury whose value is increased on short-term financial markets. This development has been concomitant with increasing internationalisation, as reflected by a rise in foreign direct investment (FDI). FDI is not only the main vector for transferring production abroad : it also facilitates a significant flow of finance within groups to create profits based particularly on the development of exchanges of services and activities in “extraterritorial financial centres”.