Contenu du sommaire : Les populations d'Asie centrale
Revue | Espace Populations Sociétés |
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Numéro | no1, 2007 |
Titre du numéro | Les populations d'Asie centrale |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Editorial
- Départs, retours et contraintes en Asie centrale post-soviétique - Frédéric Dumont, François-Olivier Seys p. 3-4
Dossier cartographique
- Petit atlas de localisation - Jacqueline Domont p. 5-8
Articles
- Comment penser l'Asie du Milieu et l'Asie du Centre ? - Svetlana Gorshenina p. 15-31 Cette étude porte sur la reconstitution du processus relatif à la formation du concept russo-soviétique de l'Asie du milieu et de l'Asie du centre et à la querelle terminologique de l'époque post-soviétique, derrière lesquels se cachent l'explosion du système soviétique, le retour du concept de Mackinder relatif à “l'aire pivot” et les préoccupations géopolitiques des nouveaux États asiatiques indépendants au sud de la Russie.This paper proposes a reconstitution of the process of construction of the Russian-Soviet concept relating to Central Asia and the terminological problems of the Post-Soviet period which reflect the crash of the Soviet system, the return of the Mackinder's concept about the “Pivot Area” and the geopolitical ideas of new Asiatic independant States South of Russia.
- Les migrations forcées en Asie centrale post-soviétique 1991-2005 - Françoise Rollan p. 33-45 La formation de nouveaux États avec des options politiques différentes ainsi que l'implosion des États sont des facteurs favorisant l'exode des populations. L'article se propose de traiter des migrations forcées dans les cinq États d'Asie centrale. Il s'agit de migrations pour raisons politiques. Par migrations forcées nous entendons des migrations non voulues, non longuement réfléchies et qui ne font donc pas partie d'un projet de migration, ni de stratégie d'installation. Nous nous proposons d'examiner les migrations internationales et les déplacements internes de population concernant ces pays. Elles peuvent résulter d'une crainte de perdre des droits depuis l'Indépendance des Républiques centrasiatiques, de la part de populations non autochtones. Elles concernent plusieurs centaines de milliers de personnes, comme les Russes, les Allemands et autres peuples déportés par Staline. Elles peuvent aussi résulter d'évènements violents comme la guerre civile au Tadjikistan qui a aussi entraîné le déplacement interne ou externe de plusieurs centaines de milliers de Tadjiks. Elles peuvent aussi être plus réduites et ne concerner que quelques centaines de migrants comme lors d'évènements politiques récents : infiltrations d'islamistes radicaux en Ouzbékistan ou au Tadjikistan, coup d'état au Kirghizstan, ou le soulèvement d'Andijan en Ouzbékistan. Dans tous ces cas, il y a une opposition pacifique ou violente au gouvernement en place que la migration soit initiée par le migrant ou par le gouvernement lui-même. Les statistiques utilisées sont celles fournies par le Haut Commissariat aux Réfugiés et par quelques ONG travaillant dans ces républiques.The formation of new states, the restructuring of existing states as well as state implosions are key factors of forced exodus. This article, which deals with “forced migration” in the sense of “forced political migration” in Central Asia from Independence in 1991 until the present day, includes externally displaced persons as well as internally displaced persons (IDPs), but excludes economic migration. Three types of political migration are considered. The first two types are examples of mass migration: one is essentially peaceful in nature, the other, violent; the third category concerns far fewer people. The more peaceful type of mass migration involves both Russian and German people trying to return to their respective homelands after Independence because, by staying on in Central Asia, they thought they would lose their rights and become second-class citizens. In fact, this was not the case; they were not in any real danger, and could choose to stay in the country in which they were born or where they had spent most of their lives, but they would have to change their way of living. The other, more violent type of mass migration studied here, comes in the aftermath of civil war, as in Tajikistan. Instead of running the risk of being killed during the fighting, they chose flight either inside or outside their country. The third, much more recent type of migration, which is triggered off by localised political events (Kyrgyzstan, Uzbekistan), is clearly not an example of mass migration: people simply fled because they were opposed to the government. Some of these people were internally displaced by their government for security reasons (Uzbekistan and Turkmenistan). We will examine various statistics concerning these three different forms of migration and highlight their main phases: crossing the border or not for the IDPs, setting up a new, initially makeshift way of life and, whenever possible, going back home.
- Les flux migratoires des Russes entre Asie centrale et Russie - Sébastien Peyrouse p. 47-57 Cet article étudie les flux migratoires post-soviétiques des Russes d'Asie centrale en direction de la Russie. Il tente de définir les motivations d'émigration, le profil sociologique du migrant, de dissocier les déclarations d'intention des actes, et s'interroge sur le rapport ambigu des migrants envers leurs deux « patries », l'Asie centrale et la Russie. Depuis 1991, au moins les deux tiers des Russes du Turkménistan et du Tadjikistan, plus de la moitié des Russes d'Ouzbékistan, et plus d'un tiers des Russes du Kazakhstan et du Kirghizstan ont quitté leur pays. Ces flux migratoires démontrent que les liens entre Russie et Asie centrale ne sont pas appelés à s'effacer aussi rapidement que certains observateurs l'avaient estimé lors de la disparition de l'URSS.This article examines post-Soviet ethnic Russian migration from Central Asia to Russia. It tries to define the motives for emigration and the sociological profiles of the migrants, to dissociate declarations of intent from the actual acts, and to reflect on the migrants' ambiguous relations with their two “motherlands”, Central Asia and Russia. Since 1991, 80% of the Russians of Tajikistan, at least two thirds of the Russians of Turkmenistan, more than the half of the Russians in Uzbekistan, and more than one third of those in Kazakhstan and Kyrgystan have left. This out-migration demonstrates that the links between Russia and Central Asia will not disappear as quickly as some observers suggested after the fall of the Soviet Union.
- Itinéraires du déracinement - Julien Thorez p. 59-71 Suite à la disparition de l'URSS, la détérioration des conditions socio-économiques a incité les populations autochtones d'Asie centrale à modifier leurs pratiques territoriales. Enracinées pendant la période soviétique, ces populations majoritairement rurales élaborent des stratégies de développement fondées sur la circulation internationale des hommes. Les migrations, qui sont polarisées par la Russie, mobilisent plusieurs centaines de milliers de travailleurs qui organisent des transferts de fonds essentiels dans l'économie domestique des villages et villes du Kirghizstan, d'Ouzbékistan et du Tadjikistan. Elles résultent de la mobilisation d'institutions sociales traditionnelles mais bouleversent les pratiques familiales et locales. À l'échelle internationale, la structuration du champ migratoire produit de nouvelles relations entre la Russie et les républiques centre-asiatiques, entre souveraineté politique officielle et dépendance économique et sociale.Since the collapse of USSR, national populations of Central Asia are changing their territorial practices because of the socio-economic crisis. Deep-rooted in their regions during the Soviet period, these populations, which are mainly rural, are now migrating, particularly to Russia. Migrations concern hundreds of thousands workers from Kyrgyzstan's, Uzbekistan's and Tajikistan's towns and countries. They mobilize the traditional social institutions but damage the familial and local society. However these workers transfer to their households a crucial capital for the domestic economy. At the international level, the migrations develop new relations between Russia and central-Asian republics, characterized at the same time by official political sovereignty and socio-economic dependence.
- Migration Patterns of the Population in Kyrgyzstan - Martin Schuler p. 73-89 La République kirghize dispose avec le recensement de la population de 1999 d'un outil statistique précieux et de qualité pour l'analyse et la structure des migrations. Par ailleurs, les registres de la population fournissent depuis des décennies de données annuelles sur le mouvement de la population. Cet article propose une lecture sur l'évolution des migrations internationales et internes à l'échelle régionale par oblast et rayon depuis l'indépendance jusqu'en 2005. Tandis que les migrations internationales se caractérisent largement par leur composante ethnique et affectent essentiellement les villes ainsi que les régions rurales et industrielles du nord, les mouvements internes se dirigent vers Bishkek et partent des régions de montagne du nord du pays qui commencent à se dépeupler.Population Census 1999 of the Kyrgyz Republic is a very useful and precise statistical tool for the analysis of the structure of migration and its spatial orientation. In addition, since several decades, the State Population Register provides annual data of demographic changes. This article gives an overview of the evolution of international migration as well as internal movements on a regional scale by oblast and rayon from the independence until 2005. International migration is characterized by its ethnic pattern and concerns all towns and some rural and mining settlements in the North of the country. Internal migration shows strong movements to the capital Bishkek and affects the mountainous regions of the North where depopulation is starting.
- Les Polonais du Kazakhstan entre l'intégration et la Patrie rêvée… - Catherine Poujol p. 91-100 Parmi les 128 nationalités recensées en 1999 au Kazakhstan pour 15,6 millions d'habitants, outre les 53% de Kazakhs et les 30% de Russes, figurent des communautés de plus ou moins grande ampleur dont certaines sont bien connues, telles les Allemands de la Volga, les Ouïgours, les Coréens. Les Polonais du Kazakhstan constituent un cas particulier de diaspora de l'exil forcé dont la formation en tant que groupe coïncide avec l'histoire douloureuse des relations entre l'Empire russe et la Pologne, puis de l'URSS dans son règlement de la « question polonaise » pendant la Seconde Guerre mondiale. Leurs tentatives de préserver leur identité en s'organisant activement depuis la fin de la période soviétique pour ceux qui préfèrent rester au Kazakhstan, ou en choisissant le retour vers la « mythique Patrie », sont d'autant plus intéressantes à mettre en évidence. Le but de cet article est de faire le point sur cette population peu connue de la mosaïque ethnique kazakhstanaise dont 20 000 sur les 61 000 recensés en 1989 sont partis en Russie, en Pologne et dans d'autres pays d'Europe depuis quinze ans. Faible numériquement, et subissant un nouveau processus d'intégration à la souche dominante du pays, les Kazakhs, après avoir été « ukrainisée » puis russifiée, elle peut toutefois conserver une certaine influence à travers la stratégie de concorde religieuse développée par le pouvoir kazakh pour renforcer la stabilité de sa politique intérieure et faire reconnaître sa spécificité interconfessionnelle dans l'arène internationale.Among the 128 nationalities quoted in the 1999 census in Kazakhstan, amounting 15,6 millions inhabitants (among which 53% are ethnic Kazakhs, 30%, Russians), appear more or less numerous communities, some of them being well known such as the Volga Germans, Ouïgours, Coreans. The Poles of Kazakhstan represent a special case of a constraint diaspora. Its formation as a social group is largely connected with the painful history of the relationships between Poland and the Russian Empire, then, Soviet Union, in its attempt to solve the Polish question during the World War II. Their attempts to preserve their identity, by self organization since the collapse of the Soviet Union for those who prefer to stay in Kazakhstan, or by choosing to come back to their mythical Motherland, are dramatically interesting to point out. The aim of this article is to put some light on this unknown population part of the ethnic puzzle in Kazakhstan. 20 000 out of the 61 000 quoted in the 1989 census have left Kazakhstan to Russia, Poland or other European countries since 15 years. Although being numerously weak, and enduring a new process of kazakhization after «ukranization» and russification, it might be able to keep some influence through the strategy of religious concord developed by the Kazakh power to settle its political stability and in order to be recognized as a specific inter-confessional country in the international arena.
- Ouzbékistan, le paradoxe de l'enracinement rural - Alain Cariou p. 101-112 L'Ouzbékistan contemporain se présente comme un monde où les campagnes structurent encore l'espace et la société. Non seulement la population du pays est rurale à plus de 60 % mais cette ruralité n'a cessé de se renforcer depuis deux décennies. Le paradoxe de cette évolution à contresens de la tendance mondiale s'explique par plusieurs facteurs. En raison du statut de périphérie agricole cotonnière que lui avait conféré la planification soviétique, la population a été fixée de manière coercitive à la terre. Or cette politique n'a pas été remise en cause par l'Ouzbékistan indépendant qui exerce un contrôle strict sur sa population. L'exode rural reste donc aujourd'hui pratiquement inexistant car le régime ouzbek entend préserver son indispensable manne cotonnière et redoute la déferlante de millions de paysans sans terre vers les villes. Mais cette inertie du mode de peuplement rural s'explique aussi par les valeurs identitaires que les populations accordent au village. Cette situation ne fait qu'aggraver la surcharge des espaces ruraux où les tensions pour l'eau et la terre s'exacerbent. La multiplication des émeutes ainsi que l'esquisse de nouveaux flux migratoires clandestins en direction de la Russie sont les signes d'un monde trop plein.Modern Uzbekistan is a land where space and society are still structured by rural way of life. For the past two decades, the Uzbek rural population kept growing to reach more than 60% of the total population today. This evolution goes against the global tendency and can be explained by multiple factors. During the Soviet planning era, Uzbekistan was assigned the function of a peripheral cotton-producing country and the Uzbek population was constrained to an agricultural way of life. Nowadays, as an independent country, Uzbekistan has not invalidated this rural orientation but aims now at controlling the migratory patterns of its own population to prevent rural exodus. By keeping a rural exodus down to almost nought, the Uzbek regime intends to preserve its indispensable and providential cotton production and wants to avoid the rushing of millions of peasants without lands towards the cities. But the inertia of rural population dynamics can also be explained by the identity values that people traditionally assign to life in villages. This tendency leads to the aggravation of the population overload in rural areas, where tensions for water and land build up. The multiplication of local conflicts and the outline of new clandestine migratory fluxes toward Russia are the signs of an overcrowded world.
- Mortality in Kyrgyzstan since 1958: Real Patterns and Data Artifacts - Michel Guillot p. 113-126 Les niveaux, tendances, et différentiels de mortalité en Asie centrale ex-Soviétique font l'objet d'une grande incertitude. Cet article utilise des données brutes non-publiées portant sur le Kirghizstan depuis 1958, afin d'examiner les incohérences apparentes présentes dans les données enregistrées au niveau national, et de formuler de nouvelles conclusions quant aux tendances réelles de la mortalité dans la région. Sur la base de comparaisons internes par ethnicité et résidence urbaine/rurale, cet article montre que l'augmentation de la mortalité infantile enregistrée au niveau national pendant la période 1958-75 est factice, et émet des doutes au sujet de la baisse de la mortalité infantile enregistrée depuis 1991. En revanche, l'excédent de mortalité aux âges adultes des hommes russes vivant au Kirghizstan, par rapport aux Kirghizes, semble bien réel. Ce désavantage est présent malgré le statut socio-économique plus élevé des Russes, ce qui suggère l'existence d'un “paradoxe” de mortalité. D'autre part, il est montré que les Russes vivant au Kirghizstan, aussi bien hommes que femmes, ont subi une plus grande augmentation de la mortalité aux âges adultes que les Kirghizes depuis 1991. Différentes explications pour ces tendances sont présentées.There is much uncertainty about levels, trends and differentials in mortality in former Soviet Central Asia. This article uses unpublished raw mortality data for Kyrgyzstan since 1958, to address apparent inconsistencies in national-level reported data and bring new evidence regarding actual mortality patterns in the region. On the basis of internal comparisons by residence and ethnicity, this article shows that national-level increases in infant mortality recorded during the 1958-75 period are spurious, and raises doubts about recorded decreases in infant mortality since 1991. However, the data provides support for the existence of a real mortality disadvantage among adult Russian males living in Kyrgyzstan, compared to their Kyrgyz counterparts. This disadvantage occurs in spite of higher socio-economic status among ethnic Russians, which suggests the presence of a mortality “paradox”. Also, it is shown that ethnic Russians, both males and females, have experienced greater increases in adult mortality than ethnic Kyrgyz since 1991. Possible explanations for these patterns are discussed.
- Comment penser l'Asie du Milieu et l'Asie du Centre ? - Svetlana Gorshenina p. 15-31
Comptes rendus d'ouvrages
- Analyse comparative des politiques d'accueil et d'intégration des migrants dans les États membres de l'UE - Vincent Houillon p. 127-127
- Christophe Bergouignan, Chantal Blayo, Alain Parant, Jean-Paul Sardon, Michéle Tribalat (Édition préparée par) : La population de la France : évolutions démographiques depuis 1946 - Sylvie Letniowska-Swiat p. 132-133
- Michel Bruneau, L'Asie d'entre Inde et Chine, logiques territoriales des États - Yves Boquet p. 129-130
- Guy Di Méo, Pascal Buléon : L'espace social. Lecture géographique des sociétés - Jean-Pierre Bondue p. 130-132
- La famille entre production de santé et consommation des soins - Alain Vaguet p. 132
- Grands ensembles et banlieues – Témoignages d'histoire urbaine, Villes en parallèles - Sylvie Letniowska-Swiat p. 132-133
- Bertrand Montulet, Michel Hubert, Christophe Jemelin, Serge Schmitz : Mobilités et temporalités - Jean-Pierre Bondue p. 133-135
Comptes rendus d'articles
- Comptes rendus d'articles - p. 137-149