Contenu du sommaire : Espaces contrôlés
Revue | Espace Populations Sociétés |
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Numéro | no 2, 2013 |
Titre du numéro | Espaces contrôlés |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Editorial
- Le contrôle de l'espace et de ses usage(r)s : avancées technologiques et défis sociaux - Patrick Deboosere, Christian Dessouroux p. 3-11
Articles
- De la dimension spatiale du contrôle social - Fabien Guillot p. 21-34 L'objectif est d'analyser la dimension spatiale du contrôle social à partir des processus de sécurisation et de mise sous contrôle de l'espace frontalier mexicano-étatsunien. Il s'agit de discuter d'une part, des liens entre évolutions des rapports sociaux (structurés sur un impératif sécuritaire et de contrôle) et du rôle des frontières dans ces processus. Et, d'autre part, de montrer que ce qui se produit aux frontières des États-Unis traduit (et renseigne sur) un contexte social et politique où le contrôle est devenu omniprésent au sein des sociétés contemporaines, caractéristique de rapports asymétriques. Afin de rendre compte des processus et formes de la mise sous contrôle, sont analysés les différents procédés et dispositifs politiques (Homeland Security) et technologiques (Virtual fence, biométrie) qui matérialisent l'impératif du contrôle de et par l'espace des populations, au nom de la lutte contre le terrorisme et, par amalgame et dans le même mouvement, contre l'immigration. La frontière entre le Mexique et les États-Unis est un des exemples qui permet d'en prendre toute la (dé)mesure.The purpose of this article is to analyze the spatial dimension of social control based on the processes involved in making the Mexican – American border region more secure and bringing it under control. On the one hand, what is presented is a discussion of the connections between the changes in social relations (built on a requirement for security and control) and the role of borders in these processes. On the other hand, it will be demonstrated that what is happening along United States borders describes (and gives us information about) a social and political context where control has become omnipresent within contemporary societies and characteristic of asymmetric relations. In order to give an account of the processes and forms of control, the different political procedures and programs (Homeland Security) as well as technologies (Virtual Fence and biometrics) that embody the requirement for control of and by the space of the populations are analyzed. In the name of the war on terrorism, is has become, at the same time and by association, a fight against immigration. The border between Mexico and the United States is an example that permits one to see the extent (and excesses) of the consequences of these policies.
- Controlling the Mediterranean space through surveillance - Maria Gabrielsen Jumbert p. 35-48 Les efforts pour renforcer le contôle des frontières extérieures de l'Union européenne (UE) se concentrent actuellement sur l'intensification des moyens de surveillance des États membres. Le système européen de surveillance des fontières extérieures (EUROSUR), censé être opérationnel à partir d'octobre 2013, permettra aux États membres d'échanger des données relatives à la surveillance en vue d'améliore la coordination de leurs réponses. Les principaux objectifs affichés de ce système sont politiques (réduire l'immigration illégale vers l'Europe) et sécuritaires (prévenir la criminalité transfrontalière) avec au final un objectif de nature plus humanitaire (réduire le nombre de morts parmi les migrants cherchant à traverser la Méditerranée. Ces objectifs reposent sur un postulat fondamental selon lequel les technologies de surveillance sont les meileurs outils pour répondre à ces questions. Cependant, l'extraterritorialisation du contôle des frontières de l'UE effectuée au-delà de ses frontières juridiques soulève une série de dilemnes éthiques et légaux. Cet article analyse le discours de légitimisation du besoin d'une capacité de surveillance renforcée aux frontières de l'UE et examine de plus près les principaux obstacles à la mise en place de ce système. L'argument avncé ici est que la croyance fondamentale dans la capacité des technologies de surveillance à résoudre les défis qui se jouent aux frontères de l'Europe est construit de telle façon qu'on ne peut faire face aux obstacles géographiques et dilemne éthiques qu'avec un appel à plus de surveillance et davantage de partage des donnéesThe efforts to strengthen the control over the European Union's (EU) external borders currently revolve around the reinforcement of the surveillance capabilities of the Member States. The European Border Surveillance System, EUROSUR, is supposed to be operational by October 2013, and will enable the Member States to share surveillance data, with the aim of improving the coordination of their responses. The initiative is driven by political motivations (reducing irregular migration into Europe), security objectives (preventing cross-border crime) and a more humanitarian aim (to reduce the death toll at sea among migrants seeking to cross the Mediterranean), with an overarching belief in surveillance technologies as the ultimate way to solve these issues. By virtually pushing the effective border of the EU further out, this future surveillance system however raises a range of legal and ethical dilemmas. This article analyzes the discourse legitimating the need for a more robust surveillance capability at the external borders of the EU, by looking at what can be qualified as the main “drivers”, but also the main points of contention, or “obstacles”, in the process of establishing such a system. It argues that the fundamental belief in surveillance technologies as the ultimate tool to solve the challenges at play along the external border of the EU is such that it only meets the geographical obstacles and legal and ethical dilemmas with a call for more surveillance and more information sharing.
- Le citoyen face aux nouvelles pratiques sécuritaires de l'Union européenne : enjeux démocratiques d'une sécurité par les fichiers - Rocco Bellanova, Denis Duez p. 49-62 L'article examine l'implication croissante de l'Union européenne dans le contrôle de l'espace européen et dans la sécurisation des frontières extérieures de l'Union. Il s'agit d'abord d'analyser les mutations des modalités de l'action publique à l'œuvre dans le champ de la sécurité en soulignant le passage d'une logique de « police », qui repose sur la monopolisation des moyens de la coercition physique légitime, à une logique de « policing », qui suppose un recours généralisé aux techniques de contrôle social. Il s'agit ensuite de questionner l'impact des mutations à l'œuvre sur la nature du lien démocratique en prenant comme cas d'étude l'usage à des fins sécuritaires des dossiers PNR (Passenger Name Record). L'article montre que ces pratiques sécuritaires contemporaines importent les politiques de sécurité dans la vie quotidienne des citoyens et nous invitent à repenser les régimes des droits fondamentaux en vigueur, notamment au regard de la tension existant entre impératifs de sécurité et protection de la vie privée et des données personnelles.This article focuses on the growing role of the European Union in the control of the European space and the securitization of its external borders. It starts with an analysif of the changes in the modes of public action in the field of security, underlining the shift from a « police » logic – based on the monopolisation of the legitimate means of physical coercion – towards a “policing” logic – which relies on the mass use of techniques of social control. Then, we question the impact of these developments on the nature of democracy relation, using as a case study the processing of Passenger Name Records (PNR) for law enforcement purposes. This casts a light on how security practices invade citizens' daily lives, and suggests a re-evaluation of existing fundamental rights, and in particular the rights of privacy and data protection.
- Contrôle biométrique et population scolaire : variations sur le discours gestionnaire - Mélanie Fraisse p. 79-91 Contrôle et gestion sont les deux coordonnées du dispositif biométrique dans l'espace scolaire. Sur la base d'une enquête qualitative, cet article ambitionne d'expliciter les relations qu'entretiennent ces deux notions au regard du positionnement des acteurs. La stratégie de légitimation opérée par le service d'intendance pour promouvoir le système d'identification est mise en évidence ainsi que les enjeux définitionnels et analytiques qui en découlentControl and management are the two elements of the biometric systems in school. Based on qualitative research, this article aims to clarify the relationships between these notions with reference to the participants. The legitimization of the system of identification carried out by administrations is highlighted together with the issues of definition and analysis that this raises.
- Mobilités surveillées : rôles et responsabilités des développeurs d'applications smartphone - Sarah Widmer, Francisco R. Klauser p. 63-77 Cet article avance que les applications géolocalisées pour smartphone constituent d'utiles ressources dans un processus de mobilité, mais qu'elles présentent également certains risques pour l'utilisateur. En recourant à ce service, l'utilisateur court le risque d'exposer ses données personnelles à des tiers, ainsi que d'être profilé et trié sans négociation possible par le logiciel. Le présent article aborde cette problématique au travers du regard d'acteurs centraux dans la production de ces logiciels : les développeurs d'applications mobiles. Le discours de ces acteurs, recueilli lors d'une série d'entretiens semi-directifs, nous permet d'explorer le rôle et les responsabilités de ces « experts » face aux risques que présentent leurs logiciels. L'article souligne l'autorité prégnante que détiennent ces acteurs dans la gestion de nos quotidiennetés, médiatisant nos relations à l'espace et à la mobilité au travers de leurs logiciels. L'autorité des développeurs s'ancre dans un savoir-faire spécifique, leur permettant d'agir à la fois sur le fonctionnement, les risques et les régulations des logiciels. Nos résultats soulignent toutefois l'interaction des développeurs avec d'autres sources d'autorité, constituant de complexes associations d'acteurs présidant à la production d'applications mobiles.This paper is concerned with the development and impacts of location-aware applications for smartphones. We suggest that such applications not only offer novel resources in the process of mobility, but also imply a certain number of risks for their users. Such “services” raise a series of issues in terms of privacy protection and social sorting by software, most notably. This paper approaches these issues from a viewpoint centered on one particular player in the production of location-aware software : the developers of mobile applications for smart-phones. Based on a series of semi-structured interviews with software developers, the paper explores how these “experts” understand their own role and responsibilities with regard to the risks implied by their applications. The paper highlights the central “authority” of these players in managing and mediating everyday socio-spatial relations and practices of mobility. More specifically, the authority of software designers is anchored in their technical expertise, which offers great potential to act on the functions, risks and regulation of their applications.However, our results also reiterate the complex interactions linking these software developers to various other sources of authority, thus giving rise to complex actornetworks underpinning the production of mobile applications.
- De la dimension spatiale du contrôle social - Fabien Guillot p. 21-34
Varia
- Implications de la mobilité quotidienne dans les stratégies résidentielles transfrontalières - Samuel Carpentier, David Epstein, Philippe Gerber p. 95-115 Entre 2001 et 2007, près de 8000 personnes actives ont quitté le Luxembourg pour s'installer dans une des régions frontalières, tout en continuant à travailler au Grand-Duché. Pour la très grande majorité de ces personnes, ce déménagement transfrontalier implique un éloignement vis-à-vis du travail, pouvant ainsi être assimilé à une forme de périurbanisation transfrontalière. Malgré cet éloignement les individus déclarent une certaine satisfaction résidentielle ; toutefois au-delà de cette apparente adéquation, les analyses révèlent certains paradoxes. En termes de localisation tout d'abord, il apparaît que la plupart des répondants auraient souhaité rester au Grand-Duché, mais sont dans le même temps peu nombreux à vouloir y retourner. En termes de mobilité quotidienne ensuite, les résultats tendent à montrer que la satisfaction globale est peu affectée par l'insatisfaction liée aux déplacements domicile-travail. Par ailleurs, alors que les difficultés liées au déplacement domicile/travail sont souvent invoquées par les personnes souhaitant retourner au Luxembourg, ces problèmes de mobilité sont beaucoup moins cités par les personnes étant effectivement retournées vivre au Grand-Duché. Le rôle de la mobilité quotidienne dans ces stratégies résidentielles transfrontalières s'avère donc complexe.Between 2001 and 2007, nearly 8,000 residents of Luxembourg went to live in Belgium, Germany and France though they remained employed in Luxembourg. For the vast majority of these people, this cross-border move implies a growth of commuting distance and can therefore be regarded as a particular form of cross-border suburbanization. Despite these growing distances, individuals report some residential satisfaction. However, beyond this apparent satisfaction, the analyses reveal some paradoxes. In terms of location first, it appears that most respondents would have liked to stay in the Grand Duchy, but at the same time only few of them wish to move back to Luxembourg. Then, in terms of daily mobility, the results suggest that residential satisfaction is little affected by dissatisfaction with commuting. Moreover, while the difficulties of commuting are often invoked by those seeking to return to Luxembourg, the mobility problems are much less mentioned by the people actually being returned to live in the Grand Duchy. The role of daily mobility in these cross-border residential strategies is therefore complex
- Le plafonnement de la mobilité des citadins : changements de comportement ou effets de structure ? - Irving Tapia-Villareal, Jean-Loup Madre, Yves D. Bussière p. 117-134 La tendance observée en France et dans d'autres pays industrialisés montre une désaffection des jeunes pour le permis de conduire et une stagnation de la mobilité quotidienne des citadins. S'agit-il de changements de comportements liés à la conjoncture ou d'effets de structure ? Pour tenter de répondre à cette question nous avons analysé le cas des habitants de la Communauté Urbaine de Lille (LMCU) en ajustant un modèle de projection démographique Âge-Cohorte calé sur trois enquêtes ménages déplacements (1987, 1998, 2006) qui permet d'isoler des effets structurels d'âge et de génération liés au cycle de vie. Le vieillissement de la population n'explique cependant qu'une part des évolutions observées et on assiste à des changements de comportement significatifs. À l'horizon 2030, la proportion d'adultes titulaires du permis de conduire devrait stagner. En calant le modèle successivement sur 1987 1998, puis sur 1998 et 2006 pour la distance journalière parcourue par habitant, nous obtenons des projections très contrastées : d'une croissance ralentie dans le premier cas au prolongement de la diminution amorcée en 2006 dans le second. L'analyse par mode de transport montre, au-delà de la renaissance des transports en commun observée dans les années 2000, que la croissance de leur utilisation entre 2000 et 2030 pourrait aller de +18 % d'après le calage 1987-1998, à +38 % en calant le modèle sur les deux dernières enquêtes. Le modèle Âge-Cohorte, sur l'exemple de Lille, permet de montrer que le vieillissement de la population ne rend compte que partiellement du plafonnement de la mobilité observée dans les années 2000. Cependant le vieillissement qui donne moins de poids aux jeunes, amplifie le phénomène de plafonnement. Les différences significatives observées entre les comportements prévalant jusqu'aux années 90 et dans les années 2000 expliquent bien le retournement de tendance observé, et conduisent à des projections divergentes.Recent trends in France and other developed countries such as a reduction in drivers' license ownership and stagnation of daily urban mobility suggest that « peak travel » within urban areas may have been reached. Are we assisting to cyclical or structural changes ? We tried to answer to this question by applying a prospective demographic Age-Cohort model to the Metropolitan Area of Lille, calibrated from household travel surveys conducted in 1987, 1998 and 2006. The model permits to isolate age and generation effects linked to the life cycle. Population ageing explains only partially the decline of daily traveled distance per person. Indeed there are significant changes in behavior. According to the model the proportion of adults with a driver's license should remain almost constant till 2030. Forecasts derived from the Age-Cohort model show a slowdown of travel distance increase, when the model is calibrated on 1987 and 1998 surveys, while it shows a slow decline from 2000 to 2030 when calibrated on the two most recent surveys. Concerning the revival of public transport observed around the year 2000, calibrated with the 1987-1998 surveys, the model shows an increase by 18 % between 2000 and 2030, and it could reach +38 % when calibrated with the 1998 and 2006 surveys.The Age-Cohort model, based on the case study of Lille, shows that population ageing explains only partially the saturation in daily mobility observed in the 2000's. However, ageing, which gives less weight to the younger generations, amplifies the phenomenon. The significant differences observed in the behaviors until the 90's and in the 2000's, explain well the reversal of tendency observed which leads to diverging projections.
- Implications de la mobilité quotidienne dans les stratégies résidentielles transfrontalières - Samuel Carpentier, David Epstein, Philippe Gerber p. 95-115
Comptes rendus d'articles
- Comptes rendus d'articles - p. 135-141