Contenu du sommaire : Performance Studies
Revue | Etudes anglaises |
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Numéro | Vol. 69, no 2, avril-juin 2016 |
Titre du numéro | Performance Studies |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Foreword - Marie Pecorari p. 131-134
Articles
- Decolonizing Performance Research - Virginie Magnat p. 135-148 Cet article étudie les potentialités et les limites du paradigme anglo-américain de la performance. Il analyse les implications épistémologiques et méthodologiques du “performance turn” en sciences sociales, et prend en compte la critique que font les chercheurs indigènes des systèmes de connaissance occidentaux qui privilégient, marque d'impérialisme culturel, la pensée binaire et le dualisme entre l'esprit et le corps. L'insistance sur la dimension politique fait écho aux concepts d'archive et de répertoire, de traces matérielles et de performance non-écrite, tels qu'ils sont définis par Diana Taylor, montrant les présupposés sociaux et culturels à l'œuvre derrière l'apparente neutralité de l'archive.This essay examines the potentialities and limitations of the Anglo-American performance paradigm. It discusses the epistemological and methodological implications of the “performance turn” in the social sciences. It considers the Indigenous critique of dominant Western knowledge stems that support a form of cultural imperialism privileging binary thinking and mind-body dualism. The exploration of the strands of scholarship emphasizing the political dimension echoes Diana Taylor's dual concepts of archive and repertoire, material traces and non-written performance, exposing the social and cultural biases behind the archive's supposed neutrality.
- Saving the “Live”? Re-performance and Intangible Cultural Heritage - Diana Taylor p. 149-161 Dans cet article, Diana Taylor revient sur la distinction qu'elle opère entre archive et performance. Elle analyse les tentatives illusoires de conserver des performances qui risquent de devenir canoniques, s'opposant ainsi à un aspect fondamental du répertoire. Elle étudie les différents aspects rhétoriques qui entourent le concept mis en avant par l'UNESCO de patrimoine culturel immatériel pour montrer les ramifications politiques et économiques à l'œuvre derrière le cadre institutionnel. Elle souligne le rôle néfaste des forces économiques dans des contextes où les dimensions esthétiques et culturelles pourraient donner l'impression d'être dominantes, transformant la performance en produit. Elle révèle les stratégies de marketing dans les « re-performances » de Marina Abramović et l'installation « The Artist is Present », qui débouchent sur un résultat artistique totalement différent de ses aspirations à l'authenticité et à la présence.In this essay, Diana Taylor revisits her distinction between archive and performance. She analyses the weaknesses of attempts to keep performances alive when they risk becoming canonical, hence contradicting an essential feature of the repertoire. Retracing the rhetorical entanglements surrounding the emergence of UNESCO's concept of Intangible Cultural Heritage, she exposes the political and economic ramifications behind the institutional framing. She also acknowledges the power of disruption of economic forces in contexts where the aesthetic and cultural dimensions seem to prevail, turning performance into a product. She exposes the marketing ploys in Marina Abramović's re-performances and MoMA installation “The Artist is Present,” arriving at an artistic result far removed from its claims to authenticity and presence.
- “In theatre, as in love, the subject is disappearance”. On Absence and Archival Logic in Performance - Saini Manninen p. 162-175 Cet article aborde l'absence comme concept théorique central aux performance studies. Selon un courant de pensée influent en performance studies, « la performance n'existe que dans le présent » (Phelan 146). Mais la performance est toujours passagère et éphémère : la performance s'absente une fois terminée. Cet article étudie ce qui reste, et aborde la question de l'archive, de la documentation et de la performance à l'aide de deux études de cas. La première relève du performance art, les Connotations — Performance Images (1994-1998) de Hayley Newman, recueil de photographies prises sur une période d'une semaine en 1998 mais présentées comme les archives de quatre ans de carrière d'une artiste. Ces images constituent la performance d'un « faux » témoignant de performances qui n'eurent jamais lieu. L'étude met ensuite en regard le travail de Newman avec le film de Bill Morrison Decasia (2002). Ce film a été monté à l'aide de fragments détériorés de film orphelin sur pellicule au nitrate trouvés dans des archives anciennes (l'expression « film orphelin » désigne des œuvres abandonnées par leurs propriétaires ou ayant-droits). Le film se présente comme une disparition et surtout comme une performance de l'absence. Il met à mal certains discours sur l'absence et l'oblitération en performance studies en réutilisant une matière en désagrégation. L'article montre comment ces œuvres au format archivable se révèlent utiles à l'étude de la notion d'absence et de disparition en performance. Il défend l'idée que penser l'archive et l'absence à l'aide de ces « énergies mutuellement perturbatrices » (Schneider 15), où les morts ne sont pas complètement morts, ou les vivants pas complètement vivants, met en cause la logique d'archivage de la modernité et laisse place à des restes mimétiques.This article examines absence as a theoretical concept that is seminal to performance studies. According to an influential strand of discourse in performance studies, “performance's only life is in the present” (Phelan 146). But performance is always transient and ephemeral: once it is gone performance becomes absent. This essay explores what remains and discusses the question of archives, documentation and performance through two case studies. One of them is from performance art, Hayley Newman's Connotations—Performance Images (1994-1998), a collection of images that were taken over one week in 1998 but were exhibited as an archive of an artist's career over four years. The images are performed “fakes” of performances that never took place. The essay then contrasts Newman's work with Bill Morrison's film Decasia from 2002. It was made out of various black and white decayed fragments of orphan nitrate film which were found in old archives (called orphan film because they have been abandoned by their owners or copyright holders). The film presents itself as disappearance and performs absence at its core. It also troubles certain discourses on absence and obliteration in performance studies by reusing decaying material. The essay shows how these works in recorded media might prove useful in examining the notion of absence and disappearance in performance, arguing that thinking archive and the absent through these “mutually disruptive energies” (Schneider 15), where the dead are not completely dead or the live completely live, questions modernity's archival logic and makes room for mimetic remains.
- Performing Black Queerness in the U.S. South: Ethnographic Performance and the Blurring of Presence in E.P. Johnson's Sweet Tea - Xavier Lemoine p. 176-193 L'artiste et universitaire E. Patrick Johnson questionne de façon radicale la représentation des homosexuels noirs du sud des États-Unis avec la mise en scène de son livre Sweet Tea: Black Gay Men of the South (2008). Cette anthologie d'entretiens suggère la naissance d'une nouvelle catégorie identitaire tout en développant une réflexion critique qui contrecarre les effets de réification de cette catégorie. En analysant le trope du « coming out » (révélation publique de son homosexualité) et les enjeux de la notion de présence à la fois sur scène et sur la page, cet article tente de montrer dans quelle mesure le spectacle ethnographique « seul en scène » aide à produire l'incarnation des noirs queer invisibilisés jusque-là. En outre, cet essai explore les défis relevés par la stratégie représentationnelle de Johnson qui s'appuie sur une co-création entre témoins, acteurs et spectateurs. Afin de déjouer les pièges normatifs de la visibilité, le travail de Johnson met en avant les instabilités queer qui entremêlent les fils de la race, de la classe, du genre et de la sexualité grâce à l'oscillation entre présence et absence. Ainsi, Sweet Tea permet une perception hybride politique et poétique qui permet de mieux saisir les processus fluides de subjectivation au cœur d'une société spéculaire.Artist and scholar E. Patrick Johnson raises radical questions about the representation of black gay men in the staging of his book Sweet Tea: Black Gay Men of the South (2008). This collection of interviews suggests the invention of a new identity category while deploying a critical framework to thwart its reification. By focusing on the coming out trope and the issues of presentness both on the stage and page, this essay intends to suggest how Johnson's ethnographic solo performance can help produce the embodiment of invisibilized black queerness. It further explores the challenges of Johnson's representational strategies which rely on a co-creative performance between witness, performer, and audience. In order to eschew the normative traps of visibility Johnson's work highlights queer instabilities enmeshed in race, class, gender and sexuality through oscillation between presence and absence. As a result, Sweet Tea offers hybrid political and poetical perceptions so as to grasp more fully the fluid processes of subjectivation at the heart of a specular society.
- Making up (for) the Great Man: Impersonation and Cosmetics in Suzan-Lori Parks's Topdog/Underdog - Marie Pecorari p. 194-205 Dans la pièce Topdog/Underdog (2001), Suzan-Lori Parks accomplit le destin onomastique de deux frères noirs baptisés Lincoln et Booth — le premier, comme son homonyme historique, meurt sous les coups du second. « Linc » gagne aussi sa vie à rejouer l'assassinat du Président américain. Vêtu d'un costume d'époque et le visage maquillé en blanc, il attend dans une salle d'arcade que les clients tirent sur lui à l'aide de balles à blanc, avant de s'effondrer. L'usage du maquillage dans la performance du personnage a jusqu'ici peu attiré l'attention de la critique : on l'interprète souvent comme un renversement de la tradition performative du blackface. Je défends l'idée qu'en s'intéressant au destin du corps du Lincoln historique, on peut lire la présence du whiteface comme une référence à la dépouille du Président assassiné. L'intention ici est de mettre en avant un événement issu de l'histoire sociale et dont le rapport avec la pratique théâtrale est habituellement passé sous silence, pour faire le lien avec la performance présentée dans la pièce, afin d'ajouter un niveau interprétatif aux explications déjà validées.In the play Topdog/Underdog (2001), Suzan-Lori Parks fulfils the onomastic destiny of two black brothers named Lincoln and Booth—the former, like his historical namesake, dying at the hands of the latter. “Linc” also earns a living reenacting the assassination of the American President he is named after. Dressed up in period costume and wearing white make-up, he waits for customers at an arcade to fire blanks at him before collapsing. Little critical attention has been paid to the use of make-up in the routine: it is commonly interpreted as a reversal of the performance tradition of blackface. I argue that by looking at the fate of the historical Lincoln's corpse, the use of whiteface can be read as a reference to the murdered President's body. The intention here is to draw on an event from cultural history whose connection to performance practice is usually overlooked, and connect it to the routine presented in the play, in order to add another interpretive strand to received explanations.
- Decolonizing Performance Research - Virginie Magnat p. 135-148
Étude critique
- Remembering Geoffrey Hartman and Wordsworth's Poetry - Richard Anker p. 206-213
Comptes rendus
- Comptes rendus - p. 214-254