Contenu du sommaire

Revue Travaux de linguistique Mir@bel
Numéro no 72, 2016
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Déterminants et inférences - Francis Corblin, David Nicolas p. 7-10 accès libre
  • Le même ou un autre : l'expression de l'identité et de la différence en discours - Pascal Amsili, Claire Beyssade p. 11-28 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'article porte sur le sens des adjectifs même et autre dans leurs emplois externes. En distinguant ce qu'ils assertent (l'identité ou la différence) et ce qu'ils présupposent (l'existence d'un référent de discours qui sert de point de comparaison), on peut expliquer quand et pourquoi ils se combinent avec les articles défini et indéfini. On montre aussi que c'est la force cohésive des éléments anaphoriques en général qui permet de comprendre pourquoi, dans certains contextes, le locuteur doit choisir, non pas entre les expressions un N et le N, mais entre un autre N et le N.
    This article is concerned with the meaning of the French adjectives même and autre in their sentence-external uses. By distinguishing between what they assert (identity or difference) and what they presuppose (the existence of a discourse referent serving as a reference point), it is possible to explain when and why these adjectives combine with definite and indefinite articles. It is also shown that taking into account the cohesive strength of anaphoric elements is central to understand why, in some contexts, the speaker has to choose not between the expressions un N (an N) and le N (the N) but rather between un autre N (another N) and le N (the N).
  • Une nouvelle approche de l'opposition ici/là et ovde/tu - Francis Corblin, Tijana Asic p. 29-48 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article montre que l'adverbe français là possède les propriétés interprétatives des groupes nominaux définis, y compris leurs emplois faibles, alors que ici est un déictique dont l'usage démonstratif est possible et fréquent en raison de son contenu spatial. Il relie donc l'usage de ces adverbes au fonctionnement des groupes nominaux ordinaires, munis d'un déterminant, et tente d'expliquer les différences d'emploi observées à partir des propriétés qui opposent trois grandes catégories d'expressions : les déictiques, les démonstratifs et les définis. On montre en outre que cette proposition peut être étendue à d'autres langues en discutant en détail son extension au serbe et à l'opposition tu/ovde.
    This paper claims that the French adverb là has the typical properties of regular definite NPs, including their weak readings, whereas ici is an indexical which can easily get a demonstrative use because of its spatial content. It establishes, thus, a link between the semantics of these adverbs and the semantics of regular NPs containing a determiner and a nominal head. It aims at explaining the observed differences from the properties which distinguish three types of expresssions : indexicals, demonstrative and definites. It shows, moreover, that the proposal can be extended to other languages by discussing its application to Serbian and to the opposition tu/ovde.
  • Une échelle de mesure pour la précision relative des quantifieurs : étude comparative français-grec - Francis Corblin, Evangelia Vlachou p. 49-71 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'article se propose de mesurer la précision relative des quantifieurs en s'appuyant sur des données du français et du grec et d'en déduire une échelle de précision permettant de les classer, qui utilise comme test l'usage des expressions exactement/akrivos, plus précisément-plus exactement/me pjo meghali akrivia, pour être plus précis/ja na ime pjo akrivis et des phrases interrogatives avec combien/poso. La notion de précision relative mise en évidence par ce test est d'extension beaucoup plus large que celle de force logique, puisqu'elle permet de situer dans une échelle de précision relative des quantifieurs intensionnels (beaucoup/poli, trop/ipervolika poli), et des quantifieurs extensionnels à implicature intensionnelle (plus de/pano apo, presque/sxedhon). On présente en fin d'article quelques données d'acceptabilité inattendues, y compris des différences entre le français et le grec pour le test Q1, pour être plus précis Q2, que nous suggérons de relier au statut pragmatique particulier de cette structure, laquelle pourrait être considérée comme un non-respect (provisoire) de la maxime de quantité de Grice.
    On the basis of French and Greek data, the paper aims to provide a tool that allows us to measure the degree of precision of quantifiers. More precisely, it proposes a precision scale and, by doing this, introduces a new way of classifying them. The compatibility of the quantifier with expressions such as exactement/akrivos (‘exactly'), plus précisément-plus exactement/me pjo meghali akrivia (‘more precisely'), pour être plus précis/ja na ime pjo akrivis (‘to be more precise') and interrogatives with combien/poso (‘how much'/‘many') holds as the main type of test used throughout. The notion of relative precision highlighted by the test is larger than the notion of logical force, since it allows to include in a relative precision scale intensional quantifiers (many, too much) and extensional quantifiers with intensional implicatures (more than, almost). Some unexpected data, including differences between French and Greek, are presented in the last part of the paper, with respect to the acceptability of Q1, to be more precise Q2. We suggest to ascribe these findings to the special pragmatic status of this structure, which might be seen as an explicit (provisional) violation of the Gricean Maxim of Quantity.
  • Certains ne dispose-t-il que d'une lecture forte ? - Lucien Kupferman p. 73-87 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Une lecture faible d'un quantifieur installe un sous-ensemble de l'ensemble notionnel. Une lecture forte installe un sous-ensemble d'un ensemble réel (= repéré indépendamment du contenu de la proposition). On veut montrer que le quantifieur certains a une lecture faible en plus de sa lecture forte. Pour ce faire, sept propriétés sont rappelées ou bien mises en évidence pour les deux types de lecture des quantifieurs en général, qui départagent, dans un sens positif ou négatif, et appliquées à certain en particulier qui est : 1) potentiellement présent dans la portée d'un opérateur négatif ; 2) présent dans des arguments de prédicats de niveau de phase ou d'individu ; 3) dans une position d'arguments de prédicats existentiels 4) dans des arguments de prédicats à sujet non thématique 5) face à des objets détachés à droite ; 6) face à des extrapositions de relatives restrictive ; 7) à des extrapositions de génitif.La conclusion veut aussi très brièvement élargir le propos et inscrire certains dans un carré lexical, adapté de Gondret [1976], sous le double paramètre de quantitatif / distinctif et discréisant / compactant, en contraste avec plusieurs, quelques, et divers / différents.
    A weak readings of a quantifier is a function of a subset from a notional set. A strong reading sets up a subset of a real set (= as defined independently from the clausal content). Our purpose is to show that the French quantifier certains has a weak reading alongside its strong one. In order to achieve that aim, seven properties are mentioned from the literature, or new cases are made for distinguishing the two kinds of readings – as a general matter. Then, those properties are applied to the particular case of certains : 1) occurring in the scope of a negative operator; 2) occurring in arguments of stage – or individual – predicates; 3) in argument-position of existential predicates; 4) in non thematic subject positions; 5) in rightward-dislocated objects; 6) in front of extraposed restrictive clauses; 7) within extraposed genitives.The conclusion extends, briefly, the issue by including certains in a lexical square inspired by Gondret [1976]. Certains is defined by means of two parameters : quantitative /distinctive and discretizing/compacting, in contrast with the other so-called adjectival quantifiers.
  • Conditions d'assertion de chaque et de tout et règles de déduction du quantificateur universel - Alda Mari, Christian Retoré p. 89-106 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans cet article, nous soutenons qu'il y a une différence d'usage entre les quantificateurs universels tout et chaque et que la sémantique en termes de preuves permet d'en rendre compte. Un énoncé prescriptif requiert l'emploi du quantificateur tout, tandis que chaque s'utilise plutôt dans les énoncés descriptifs. Du point de vue des preuves, les énoncés prescriptifs correspondent bien à la règle de quantification universelle des systèmes déductifs, dite de généralisation, déjà présente chez Aristote : si une propriété est établie pour une variable dont nul ne sait rien, alors on peut affirmer qu'elle est vraie de tout individu. En revanche, l'assertion d'un énoncé descriptif universel nécessite de connaître précisément le domaine de quantification et d'explorer, pour chacun des individus du domaine, la vérité de l'énoncé : il s'agit donc d'une conjonction. La quantification avec tout exprime une règle dont la validité entraine de facto la vérité de ce même énoncé formulé avec chaque – aussi la validité de l'énoncé descriptif est-elle conséquence de l'énoncé prescriptif, tandis que le contraire n'est pas vrai. Cela explique que les énoncés obtenus en remplaçant tout par chaque soient plutôt acceptables, tandis que le contraire n'est pas vrai.
    This paper studies the meanings and uses of two universal quantifiers in French, tout and chaque. It proposes a semantics based on proofs, accounting for the correlation between the use of tout and prescriptivity and the use of chaque and descriptivity. From the perspective of proof theory, prescriptive statements correspond to universal quantification rules of deductive statements already present in the work of Aristotle: if a property is settled for a variable of which nothing special holds, then it holds for any individual. The assertability of a descriptive statement, instead, relies on a precise knowledge of the domain of quantification and the verification for each of the individuals in the domain of the truth of the statements. The universal quantification thus relies on conjunction. The quantification via tout expresses a rule whose validity implies the validity of the same rule expressed by a chaque-statement, as the validity of the descriptive statements is a consequence of the validity of the prescriptive one. The contrary does not hold. This explains that tout can be replaced by chaque, but chaque cannot be replaced by tout.
  • Interprétons-nous de la même manière les expressions deux pommes et deux pommes et demie ? - David Nicolas p. 107-119 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Interprétons-nous de la même manière les expressions deux pommes et deux pommes et demie ? Étudiant leurs équivalents anglais two apples et two and a half apples, Liebesman (2015) a récemment proposé que l'interprétation des deux expressions implique une forme de mesure, distincte du simple compte. Je commence par présenter les arguments de Liebesman concernant l'anglais. Puis j'analyse le cas du français. Je défends les thèses suivantes : l'interprétation de deux pommes implique bien le compte usuel avec les nombres entiers, tandis que l'interprétation de l'expression deux pommes et demie implique une forme d'ellipse et, dans certains cas, une réinterprétation du nom pomme.
    Do we interpret in the same manner the expressions deux pommes and deux pommes et demie? Studying their English equivalents two apples and two and a half apples, Liebesman (2015) has recently proposed that the interpretation of both expressions involves a form of measure, distinct from simple counting. I first present Liebesman's arguments concerning English. Then I analyze the case of French. I defend the following theses: the interpretation of deux pommes does use ordinary counting with natural numbers, while the interpretation of deux pommes et demie involves a form of ellipsis and, in some cases, a reinterpretation of the noun pomme.
  • Sur les indéfinis singuliers génériques en français et en serbe - Veran Stanojević, Ljubica Đurić p. 121-133 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans ce travail, nous nous intéressons aux phrases génériques du français et du serbe dont le sujet est un syntagme nominal indéfini singulier (un N / jedan N). En adoptant l'analyse des indéfinis singuliers génériques en termes de points de vue (Mari, 2008a, 2008b, 2011), nous étudions les contraintes qui pèsent sur l'emploi des indéfinis avec jedan en position de sujet en serbe en les comparant au français. Nous constatons que le point de vue dit des « normes sociales » joue un rôle essentiel dans le choix du déterminant jedan en serbe, alors qu'en français tous les points de vue rendent possible l'emploi de l'article indéfini.
    The article focuses on French and Serbian generic sentences with an indefinite singular noun phrase in subject position (un N / jedan N). Following the analysis of the so-called IS generics in terms of « respects » (« points of view ») developped by Alda Mari (Mari, 2008a, 2008b, 2011), we examine the constraints on the indefinites with jedan in Serbian and contrast them with those that hold for indefinite singulars in French. We conclude that the choice of the determiner jedan in Serbian crucially depends on the sentence being considered as true in respect of « social norms », whereas in French no such restriction holds.
  • Le type Ratio parmi les configurations distributives - Lucia M. Tovena p. 135-151 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article discute les propriétés des expressions de ratio et, ce faisant, les positionne à l'intérieur du panorama des configurations distributives. Une esquisse de classification sémantique est donnée en termes de quatre notions, à savoir la clé de tri et la part distribuée traditionnelles, auxquelles sont ajoutées l'unité de clé et la somme des parties.
    In this paper, the linguistic expression of ratios is discussed and positioned within the framework of a general semantic classification of distributive configurations. The notions of sum-key and share-unit (Choe, 1987), completed by their counterparts sum-share and key-unit, are used to spell out differences in the instances of distributivity, depending on whether they are overt or covert.