Contenu du sommaire : Annoncer la mort
Revue | Questions de communication |
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Numéro | no 19, 2011 |
Titre du numéro | Annoncer la mort |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier. Annoncer la mort
- Re-présentations de la mort dans les médias d'information - Alain Rabatel, Marie-Laure Florea p. 7-28
- Dire la mort, écrire la vie - Marie-Laure Florea p. 29-52 Cet article procède à une analyse de discours énonciative des nécrologies de la presse française contemporaine, afin de montrer sous quelles formes la mort y est représentée. Il s'agit en premier lieu de montrer comment la mort est dite dans les colonnes des nécrologies : le décès y est mis en scène comme une rupture entre les vivants et le défunt, ce lien coupé étant manifesté par divers indices concordants, qu'on étudiera de façon détaillée, notamment lexique de la perte, forme négative, temps du passé, aspect accompli. Mais tout en disant cette coupure irrémédiable entre celui qui est parti et ceux qui restent, la nécrologie vise aussi à re-présenter le mort, au sens littéral, à le rendre présent à nouveau par le biais du discours, au travers de divers phénomènes tels que l'attention portée à la postérité du défunt ou encore la mise en scène d'un dialogue avec le disparu, notamment grâce au dialogisme interlocutif et aux choix de mise en page. Ce faisant, la nécrologie fait partie des rituels du deuil moderne, visant à la fois à faire mémoire au disparu et à faire société pour les vivants.This article deals with the representations of death in the obituaries appearing in contemporary french press, from the theoretical point of view of discourse analysis. It aims to point out how death is told and expressed in the obituarues: death is showed as a split between the dead and the living. This split is revealed by various marks, among them the use of the lexical field of loss, of negative form, of past tenses, of perfective aspect. But while the obituary expresses this irretrievable gap between the one who died and the ones who are still living, it also litteraly re-presents the deceased, insofar as it makes him or her present by means of various signs such as the mention of the legacy of the dead, or the staging of a dialogue with the dead, thanks for instance to interlocutive dialogism and choices of page settings. Thereby, the obituary partakes to the rituals of modern mourning, which aims at the same time at paying hommage to the dead one and at binding the community of the living ones.
- Le faire-part de décès et la confrontation avec la mort - Françoise Hammer p. 53-71 L'examen du faire-part de décès dans la presse française (2006-2009) met en évidence comment un texte, dont la fonction pragmatique est d'annoncer la mort, contourne le tabou qui frappe celle-ci. Quatre principales modalités de contournement se dégagent de l'analyse : distanciation, convocation, invocation et appropriation. Dans leur emploi, l'interdépendance de normes discursives et de conditions extratextuelles plaide pour une approche plurielle de la représentation de la mort.The aim of investigating death announcements is to show how texts whose function is precisely to publicly announce death manage to avoid direct confrontation with the subject itself. An empirical study of French newspapers (2006-2009) revealed four major distinct modalities for avoiding the topic: distancing, convocation, invocation and appropriation. These depend on socio-cultural and technical contexts and underscore the need for a pluri-disciplinary approach to the public representation of information on deaths.
- La vie des morts : jesuismort.com, entre biographie et nécrologie - Adeline Wrona p. 73-90 « Tout discours sur les morts fonde les vivants », écrit Jean-Claude Bonnet (1997 : 1831) dans les Lieux de mémoire. Guidé par cette proposition, cet article analyse une nouvelle forme d'écriture de la mort rendue possible par les médias informatisés. L'exemple choisi est celui d'un site intitulé « jesuismort.com », créé en 2005 par un développeur web qui renouvelle les formes de l'éloge post mortem en hybridant des modèles hérités avec les potentialités propres aux écrits d'écrans. Le discours tenu sur les morts détermine des gestes communicationnels qui donnent sens à l'hommage : lire une biographie, écrire une lettre, suggérer un mort, mais aussi améliorer le « score » de popularité des défunts célèbres, devenir « fan » du site sur Facebook. Tous ces possibles offerts par le site constituent autant de participations d'un nouveau genre à un rituel funéraire largement trivialisé qui est ici examiné selon trois directions successives : du point de vue de son régime temporel, de son modèle économique, enfin de ses modes de sociabilité.“Any speech on the dead found the living”, writes Jean-Claude Bonnet in Lieux de mémoire (“Commemorative sites”). Guided by this proposition, this article analyzes a new form of writing about death, made possible by the computerized media. The chosen example is the one of an site entitled jesuismort.com (“iamdead”), created in 2005 by a Web developer who renews the forms of post-mortem eulogy, by crossing inherited models with the proper potentialities of online writing. The speech held on the dead determines communicational gestures which give sense to the tribute that is paid: read a biography, write a letter, suggest somebody dead, but also improve the popularity “ranking” of the famous deceased, become a “Facebook fan” of the site – all these possibilities offered by the site constitute so many participations of a new kind to a funeral rite widely futilised, which is examined here according to three successive directions: from the point of view of its temporal regime, of its economic model, and finally, of its modes of sociability.
- Facebook mort ou vif - Sophie Pène p. 91-112 Facebook compte 500 millions d'inscrits. Au premier regard, exposition de la vie, le réseau social montre la prégnance de la mort. Trois genres d'annonces sont analysés. Les faire-part : un membre annonce la mort d'un proche ; les malaises dans la communication : quelqu'un est mort, sa page existe encore, et les commémorations consécutives à des catastrophes, à des accidents, à des crimes, à des maladies. L'étude rend compte des débats sur le statut des données numériques des morts, enjeu affectif et symbolique. Elle s'attache au rôle des mémoriaux, qui montrent à l'œuvre une morale des réseaux sociaux, la sensibilité et la responsabilité. En devenant un cimetière global, Facebook se constitue comme un lieu de socialisation numérique auquel personne ne peut se soustraire. De ce fait, les morts – sous leur forme numérique ou par leurs banques de données – constituent une force d'influence dont on peut se demander comment elle sera orientée.Three situations are analysed: Death announcement of a close relative, Issues caused by dead members' pages, “Memorial” pages. The intimate mourning is not easy to express. A “know-how” is developing. A moral code (of solidarity and responsibility) is progressing. Real digital cemeteries are constituting, imposing social networks as places of socialization. Dead people become in a way an influence group.
- Les funérailles télévisées - Benoît Lafon p. 113-141 En de rares occasions, la télévision devient « télévision cérémonielle » et interrompt le cours habituel de ses programmes pour retransmettre des funérailles. Dans cet article, il s'agit d'étudier les 52 funérailles télévisées identifiées depuis les origines de la télévision en France qui proposent aux téléspectateurs une expérience médiatique et collective des obsèques en direct. Comment ces funérailles télévisées figurent-elles les morts ? Comment impliquent-elles les vivants ? L'analyse des pratiques rituelles et médiatiques liées à la mort et aux évolutions de celles-ci permettront de mieux comprendre les procédés de « confrontation distanciée » à la mort mis en place par la télévision. Ce faisant, il s'agira d'éclairer la participation de la télévision à la production de figures tutélaires, dont les évolutions révèlent les formalisations et reformalisations – en rapport avec la question de la « déformalisation » – de rapports à la mort.On rare occasions, television creates « Media Events » and « Broadcasts the History »: it interrupts the course of its regular programs to broadcast funerals. Since the origins of French television, 52 funerals have been broadcasted. All of these programs give viewers the opportunity to experience live collective funeral. How do these programs portray dead persons? How do they involve the living ones (the viewers)? The analysis of ritual and media practices related to death and their changes will help understanding the process of « detached involvement » about death established by television. In doing so, it will help demonstrate that television constructs figureheads, which changes reveal formalizations and reformalizations (in relation to the issue of « deformalization ») related to the death.
- Re-Presentations of Death in the Information Media - Alain Rabatel, Marie-Laure Florea
Echanges
- Interdisciplinarité, interdisciplinarités (2) - Béatrice Fleury, Jacques Walter p. 143-154 Prolongeant le débat engagé dans la livraison précédente, Jérôme Bourdon, historien et chercheur en sciences de l'information et de la communication, Jean-Paul Resweber, philosophe, et Laurent Vidal, anthropologue, discutent le point de vue que défend Patrick Charaudeau (2010) sur l'interdisciplinarité. Deux idées principales – largement étayées par chacun – ressortent des contributions : la science est le résultat d'une maturation des idées, méthodes et théories, ce qui conduit à formuler l'hypothèse selon laquelle l'interdisciplinarité est au fondement même de la naissance des disciplines ; elle est aussi au cœur d'enjeux qui ne sont pas seulement scientifiques. Parmi les « familles » d'arguments développés, nous en retiendrons deux : celles ayant trait à ce qui concerne le cadre et les conditions de fabrication de la science ; celles concernant la dimension politique dont peut être investie l'interdisciplinarité. De la sorte, nous verrons que, d'une part, l'interdisciplinarité est une donnée structurante des disciplines et que, d'autre part, l'invoquer ou la rendre « obligatoire » peut témoigner d'attendus et d'enjeux autres que ceux seulement relatifs à la connaissance.To extend the debate which figured in the previous delivery, Jerome Bourdon, historian, researcher in information and communication sciences, Jean-Paul Resweber, philosopher, and Laurent Vidal, anthropologist, are discussing the view that Patrick Charaudeau (2010) defends on interdisciplinarity. We can find two main ideas - widely supported by everyone: science is the result of a maturation of ideas, methods and theories, which leads to the hypothesis that interdisciplinarity is the very foundation of the birth of disciplines and it is also at the heart of issues that are not just scientific ones.
- L'interdisciplinarité n'existe pas - Jérôme Bourdon p. 155-170 L'interdisciplinarité est une notion d'apparence sympathique, brandie fréquemment comme un fétiche d'ambition scientifique, de surcroît appréciée des autorités universitaires et des agences qui donnent des crédits. Pourtant, pour parler d'interdisciplinarité, il faudrait que nous disposions de disciplines clairement définies. Or, nous n'avons aucun critère clair de ce qui constitue une discipline (la tension entre le domaine social considéré – avec les aléas historiques et épistémologiques du découpage) est insoluble. Les disciplines sont souvent des conglomérats d'intérêts instables, ayant eux-mêmes grand besoin de dialogue intra-disciplinaire. De plus, les luttes de pouvoir entre disciplines sont légion ; elles considèrent volontiers leurs rivales comme des « préalables » ou des « sciences auxiliaires » pour leur propre travail. On pourrait, à la rigueur, parler de petite interdisciplinarité, ou plus modestement, d'interméthodologie, comme objectif souhaitable (et souvent nécessaire au sein d'une discipline donnée). Ce sont des méthodologies que nous combinons avec fruit, et cela au sein d'une discipline spécifique. Abandonnons donc l'interdisciplinarité, concept qui ne sert qu'à lutter et/ou qu'à obscurcir (au mieux, à décrocher des crédits de recherche).“Interdisciplinarity” is, at face value, a sympathetic notion, smacking of scientific ambition, appreciated by universities managers and providers of grants. We should be wary of it. First, we have no clear definition of the “disciplines”, between which we need to connect. We still do not know whether a discipline is mostly about area(s) of social life and time, method(s), or set(s) of basic concepts. Seen from inside, many disciplines, and communication studies in particular, look like loose mixtures of all these ingredients, created for reason of convenience, and badly in need of intradisciplinarity. In addition, relations between disciplines are mostly about power, not collaboration. Many disciplines treat their neighbours as mere “prerequisites” or, even worst, “auxiliary sciences”, for the “real work” they have to do. It would be better, and more modest, to talk about intermethodology: we do combine methodologies fruitfully, for specific projects, although this often happens within a single discipline. We could well do without the notion of interdisciplinarity, which obscures debates and hides competitions and struggles between so-called disciplines, is at best useful for grant-hunting, but not much more.
- Les enjeux de l'interdisciplinarité - Jean-Paul Resweber p. 171-200 L'auteur souligne trois aspects dont l'article de Patrick Charaudeau sur l'interdisciplinarité (2010) fait l'économie. D'abord, l'interdisciplinarité se situe sur un parcours qui va de la pluridisciplinarité à la transdisciplinarité. En effet, elle transforme en un milieu dialogique, à la fois de type polémique et herméneutique, l'écart de l'interprétation ouvert par la pluridisciplinarité et s'accomplit dans la transdisciplinarité (« trans » signifie à travers et au-delà) qui implique une visée anthropologique et éthique focalisant les savoirs et leur donnant sens. Ensuite, elle se trouve « commandée » par les pouvoirs politiques administratifs et économiques qui contrôlent, planifient et évaluent les processus d'organisation des savoirs. Enfin, elle renvoie à la fonction opératoire de la subjectivité et, dans les sciences humaines et sociales, mobilise implicitement un modèle spécifique de la subjectivité inséparable de l'agirThe author underlines three aspects which the article of Patrick Charaudeau (2010) saves. At first, the interdisciplinarity is situated on a route which goes of the multidisciplinarity to the transdisciplinarity. Indeed, it transforms into a dialogical environment, at the same time of polemical and hermeneutic type, the distance from the interpretation opened by the multidisciplinarity and comes true in the transdisciplinarity (“trans” mean through and beyond) which implies an anthropological and ethical aim focusing on the knowledge and giving them sense. Then, it is “commanded” by the administrative and economic political powers which check, plan and estimate the processes organizations of knowledge.
- La focale anthropologique : l'interdisciplinarité à travers la « fabrique » de la discipline - Laurent Vidal p. 201-214 À partir de recherches anthropologiques menées en Afrique dans le domaine de la santé, ce texte prolonge la réflexion de Patrick Charaudeau (2010) en considérant le décryptage de la fabrique de la recherche comme un lieu cardinal pour penser non seulement l'anthropologie mais aussi l'interdisciplinarité. Après avoir discuté les limites de la notion de sous-discipline et le risque d'une « disciplinarisation » de l'interdisciplinarité, nous prenons l'exemple de deux projets de recherche menés en Afrique pour montrer ce que peut apporter l'étude de leur fabrique. Ceci via deux thématiques : le rapport à la « demande » de l'anthropologue travaillant des équipes de recherche pluridisciplinaires ; l'explicitation de la scientificité de sa démarche à des interlocuteurs peu familiers de celle-ci, et le maintien de celle-ci lorsqu'il s'agit de vulgariser les résultats de sa recherche. On en déduit d'abord que c'est dans la mécanique des relations entre le chercheur et le cadre dans lequel s'inscrit sa démarche que se crée ou se perd son autonomie face à la « demande » ; le chercheur doit donc négocier avec des contextes qu'il côtoie ou qu'il contribue à générer, et que c'est dans cette confrontation-là que naissent des espaces d'autonomie mais aussi de possibles blocages. S'agissant du débat sur la scientificité de nos démarches corrélée à l'importance de la vulgarisation, nous montrons que la difficulté n'est pas seulement de trouver les mots pour être entendu des autres, mais aussi – et peut-être surtout – d'utiliser ceux qui nous permettent d'exprimer une position, une analyse anthropologiquement fondée. En se penchant sur cette fabrique de l'anthropologie, le moment de la recherche s'érige alors en objet d'analyse et donne forme à des réflexions, des explications sur l'action, le développement, l'implication de l'anthropologue ainsi que sur la nature d'une discipline et de l'interdisciplinarité.From anthropological research conducted in Africa in the field of health, this text extends the discussion of Patrick Charaudeau. He regards the decryption of the making of research as a central place to think not only anthropology but also interdisciplinarity. After discussing the limitations of the concept of sub-discipline, and the risk of “disciplinariszation” of interdisciplinarity, we take the example of two research projects in Africa to show how can the study of their making contribute. We have two themes: the report at the “demand” of the anthropologist working in multidisciplinary research teams; the explanation of the scientific approach of anthropology to an audience unfamiliar with it, and keeping it when it comes to popularize the results of his research. We find that it is in the relationship mechanics between the researcher and the context in which his approach is used, that is created or lost its autonomy from the “demand”; also, the researcher has to negotiate with contexts that he encounters or creates, and areas of autonomy but also potential blockages arise from this confrontation. About the debate on the scientific nature of our methods and the importance of scientific popularization, we show that the difficulty is not only to find the words to be heard from other, but also to use those that allow us to present a real anthropological analysis. In focusing on the making of anthropology, research becomes an object of analysis and gives form to thoughts, explanations of action, development, involvement of the anthropologist, as well as the nature of discipline and interdisciplinarity.
- Interdisciplinarité, interdisciplinarités (2) - Béatrice Fleury, Jacques Walter p. 143-154
Notes de recherche
- Le déplacement : une dimension d'analyse et une modalité pour comprendre les relations entre nature, science et société - Igor Babou p. 215-234 L'objet de cet article est la notion de « déplacement » et la manière dont elle peut être articulée aux concepts de territoire, de champ, de légitimité et de médiation. Il s'appuie, d'une part, sur une lecture des utilisations du déplacement comme analyseur ou comme méthode dans la littérature sociologique et communicationnelle, d'autre part, sur un ensemble de recherches empiriques portant sur les relations entre sciences et société, ainsi que sur des problématiques environnementales. Le déplacement fournit à l'enquête ethnographique un objet pour l'analyse, mais aussi les modalités de sa mise en œuvre. Par ailleurs, il constitue une dimension de l'analyse communicationnelle des discours. Dans ces deux cas, il a pour enjeu d'unifier une diversité de phénomènes tout en évitant les métaphores textuelles ou narratologiques qui aplatissent l'hétérogénéité de ces phénomènes, en particulier dans la sociologie de la traduction.This paper deals with the idea of “displacement” and tries to articulate it with the concepts of territories, of “field” (Bourdieu) of legitimacies and of mediations. After a survey of the sociology and communication fields where one can find a use of the displacement, the author refers to a whole range of personal research in the field of science and society, or in the field of sociology of the Environment. Displacement brings to ethnographic inquiry an object, but also a methodology. Displacement can also provide a dimension for speech analysis. Its aim is to unify a diversity of phenomenons, but at the same time it intends to escape the trap of textual metaphors of the actor-network theory.
- Du terrain neutralisé aux espaces négociés - Frédérique Jankowski p. 235-253 Cet article interroge les phénomènes interactionnels et communicationnels qui émergent d'un « terrain » singulier : le milieu naturel de primates étudiés par les éthologues. Afin d'observer au plus près les animaux, les scientifiques doivent les habituer à leur présence. Si le processus d'habituation permet le rapprochement entre observateur et observés, il participe aussi de la définition d'un contexte d'observation scientifiquement acceptable. Il s'agit moins d'habituer des primates à la présence d'un observateur que de neutraliser cette dernière. D'une situation où chacun est supposé faire face à des objets (les éthologues mais aussi les primates), l'attention est portée sur la manière dont humains et simiens ajustent leurs comportements à partir de saillances physiques et comportementales. Le terrain en éthologie apparaît alors moins comme un contexte d'observation que de négociation de sens des objets pertinents pour chacun des acteurs impliqués.This paper questions interactional and communicational phenomena emerging from a particular field: the natural environment of primates studied by ethologists. In order to observe primate behavior at close range, scientists have to habituate animals to their presence. If the process of habituation allows one to observe wild animals from a short range, it participates in the definition of a scientifically acceptable context of observation. Hence, it is less a question of habituating primates to the observer's presence than of neutralizing his presence. From a situation in which humans and simians are supposed to face objects, we describe the way in which they adjust their behaviors to one another with physical and behavioral affordance. The ethological field appears less as a context of observation than a context of negotiation about the situation and the sense of various objects for the different actors.
- L'atelier, l'opérateur et les TIC - Yanita Andonova p. 253-268 Nous proposons une analyse des processus sociaux qui se mettent en œuvre dans le cadre d'une formation-métier à la lumière des questions de l'appropriation, la justification et l'estime sociale. Sont donc étudiés les actes de communication : les « dire » (discours et récits produits dans et par l'organisation) et les « faire » (les pratiques, les activités quotidiennes) que les individus au travail engagent dans l'action. Plusieurs processus sociaux émergent. L'idéalisation des tic dans les discours concourt à la légitimation institutionnelle de celles-ci, en même temps qu'à la valorisation des opérateurs et à l'appropriation des nouveaux dispositifs. En retour, l'usage quotidien des tic justifie leur présence dans l'atelier tout en améliorant l'estime de soi à laquelle aspirent les hauts fournistes. Entre enjeux stratégiques, attentes de valorisation et recherche d'estime sociale, les opérateurs ont su trouver un compromis : devenir hauts fournistes en s'auto-formant aux tic. Ainsi ont-ils doublement réussi leur formation qualifiante qui a été l'occasion d'acquérir des compétences liées à leur métier, mais aussi, pour les uns, de s'auto-former à l'usage d'un ordinateur et, pour d'autres, de s'auto-perfectionner à celui des tic.In this article, we propose an analysis of the social processes, implemented as a part of a job-training in the light of appropriation, justification and social esteem questions. Here are analyzed the acts of communication: the “say” (speech and narratives produced in and through the organization) and the “do” (practices, daily activities) that working individuals engage in the action. Several social processes are emerging in this framework. The idealization of the ict in the speech contributes to their institutional legitimacy, and, at the same time, to the operator's valorization and the new devices appropriation. In return, the everyday use of ict justifies their presence in the workshop while improving the self-esteem aspired by the operators on the blast furnace. Between strategic issues, expectations of appreciation and seeking out the social esteem, the operators succeeded to find a compromise: become a blast furnace operator by self-training in the ict. That way, they managed their successful training, which was an opportunity to develop skills related to their profession, for someone, a self-training in computer and for others to improve their knowledge to the ict sector.
- Les classes sociales dans la communication publique - Matthieu Grossetête p. 269-290 Alors que les campagnes de « sécurité routière » sont ouvertement plus réalistes depuis le tournant des spots « chocs » en 1999, les accidents et les accidentés visibles dans les spots sont paradoxalement les plus rares statistiquement. Les composantes masculines, jeunes, célibataires et rurales des classes populaires, dont les chances objectives de mourir sur la route sont les plus grandes, n'apparaissent pas dans les films de prévention. À l'inverse, les membres des catégories sociales les plus élevés y figurent largement alors que leur probabilité de mourir au volant est la plus faible. L'accueil que réservent les conducteurs aux campagnes est lui aussi sélectif. Ces derniers appréhendent les dangers de la route en fonction de leur rapport pratique à la conduite, lequel diffère sensiblement selon leurs caractéristiques tant sociales que culturelles.« Road safety » public state campaigns are not lucky to be efficacious, according to the sense given by its producers. If we provisionally admit that public communication cans change individual behaviors, then road safety spots are not uppermost addressed to popular classes, populations which are most exposed to road related mortality, but to upper classes which are not lucky to die on the road. Public state campaigns are socially oriented, that's why the way they are received by people is lucky to be selective too.
- Le déplacement : une dimension d'analyse et une modalité pour comprendre les relations entre nature, science et société - Igor Babou p. 215-234
Notes de lecture
Culture, esthétique
- Nicole Boireau, Jean-Frédéric Chevalier, Pierre Degott, éds, Réécriture des sources biographiques et construction du personnage de théâtre - Laurence Beck-Chauvard p. 295-296
- Marine Branland, David Mastin, dirs, « De la guerre dans l'art, de l'art dans la guerre. Approches musicales et plastiques au XXe siècle », Textuel, 63 - Laurence Campa p. 296-297
- Philippe Coulangeon, Sociologie des pratiques culturelles - Jérémie Nicey p. 297-300
- Thierry Crépin, François Hache-Bissette, dirs, Les presses enfantines chrétiennes au XXe siècle - Vincent Hecquet p. 300-303
- Jean Delsaux, Pascale Weber, dirs, De l'espace virtuel, du corps en présence - Nathalie Nadaud-Albertini p. 303-304
- Catherine Gravet, Alexis Curvers, Journal (1924-1961)Sabrina Parent - p. 304-306
- Anne Herschberg-Pierrot, Jacques Neefs, dirs, Savoirs en récits - Christophe Ippolito p. 306-308
- Jean-Marc Leveratto, Cinéma, spaghettis, classe ouvrière et immigration - Barbara Laborde p. 308-310
- Franck Salaün, L'Autorité du discours. Recherches sur le statut des textes et la circulation des idées dans l'Europe des Lumières - Nicolas Brucker p. 306-308
Histoire, épistémologie
- Violaine Appel, Hélène Boulanger, Luc Massou, dirs, Les dispositifs d'information et de communication. Concepts, usages et objets - Michael Palmer p. 311-313
- François Bérard, Denis Feissel, Nicolas Laubry, Pierre Petitmengin, Denis Rousset, Michel Sève, Guide de l'épigraphiste - Élise Louviot p. 313-314
- Hans Blumenberg, L'imitation de la nature et autres essais esthétiques │ Denis Trierweiler, dir., Hans Blumenberg. Anthropologie philosophique - Tanguy Wuillème p. 314-317
- Jean-Luc Deshayes, Didier Francfort, dirs, Du barbelé au pointillé : les frontières au regard des sciences humaines et sociales - Philippe Hamman p. 317-319
- Marco Filoni, Le philosophe du dimanche. La vie et la pensée d'Alexandre Kojève │ Alexandre Kojève, Identité et réalité dans le « Dictionnaire de Pierre Bayle » - Tanguy Wuillème p. 319-321
- Emilio Gentile, L'apocalypse de la modernité. La Grande Guerre et l'homme nouveau - Tanguy Wuillème p. 322-324
- Mechtild Gilzmer, Mémoires de pierre. Les monuments commémoratifs en France après 1944 - Anthony Michel p. 324-326
- John Horne, dir., Vers la guerre totale. Le tournant de 1914-1915 - Tanguy Wuillème p. 326-329
- Tony Judt, Retour sur le XXe siècle. Une histoire de la pensée contemporaine - Tanguy Wuillème p. 329-331
- Pierre Manent, Le regard politique. Entretiens avec Bénédicte Delorme-Montini - Tanguy Wuillème p. 331-334
- Pierre Manent, Les métamorphoses de la cité. Essai sur la dynamique de l'Occident - Tanguy Wuillème p. 334-337
- Julius Margolin, Voyage au pays des Ze-Ka - Tanguy Wuillème p. 337-340
- Jacques Walter, coord., « Faux témoins » │ Béatrice Fleury, coord., « L'aveu » - Yeny Serrano p. 340-344
- Nurçay Türkoğlu, Iletişim bilimlerinden ‘Kültürel Çalışmalar'a, toplumsal iletişim - Kutay Kayapinar p. 344-346
Médias, journalisme
- Meltem Ahiska, Radyonun Sihirli Kapısı : Garbiyatçılık ve politik öznellik [Magie de la radio : occidentalisme et subjectivité politique] ׀ Meltem Ahiska, Occidentalism in Turkey : Questions of moderni - Kutay Kayapinar p. 346-347
- Christophe Bigot, « Médias et vie privée » - Gilles Boenisch p. 347-349
- Claire Blandin, Le Figaro Littéraire. Vie d'un hebdomadaire politique et culturel (1946-1971) - Jean-François Tétu p. 349-351
- Josette Brun, dir., Interrelations femmes-médias dans l'Amérique française - Sophie-Hélène Goulet p. 351-353
- David Buckingham, La mort de l'enfance. Grandir à l'âge des médias - Justine Houyaux p. 353-355
- Fabrice d'Almeida, Christian Delporte. Histoire des médias, de la Grande Guerre à nos jours - Tiphaine Zetlaoui p. 355-356
- Gilles Delavaud, L'art de la télévision - Gilles Boenisch p. 356-357
- Gilles Delavaud, dir., Nouveaux médias. Nouveaux contenus - Gilles Boenisch p. 357-359
- Christian Delporte, Denis Maréchal, Caroline Moine, Isabelle Veyrat-Masson, dirs, La guerre après la guerre. Images et construction des imaginaires de guerre dans l'Europe du XXe siècle - Anthony Michel p. 359-361
- François Jost, Le culte du banal. De Duchamp à la télé-réalité - Gilles Boenisch p. 361-362
- Bertrand Labasse, Une dynamique de l'insignifiance. Les médias, les citoyens et la chose publique dans la « société de consommation » - Gilles Boenisch p. 362-363
- Laurence Leveneur, Les travestissements des jeux télévisés, histoire et analyse d'un genre protéiforme - France Garat p. 363-366
Société
- Christian Agbobli, dir., Quelle communication pour quel changement ? Les dessous du changement social - Sophie-Hélène Goulet p. 366-367
- Luc Boltanski, De la critique. Précis de sociologie de l'émancipation - Jérôme Bourdon p. 367-370
- Pascal Boniface, Football et mondialisation - Amina Lasfar p. 370-372
- Daniel Castillo Durante, Les dépouilles de l'altérité - Gilles Boenisch p. 372-373
- Jérôme Denis, David Pontille, Petite sociologie de la signalétique. Les coulisses des panneaux du métro - Daniel Jacobi p. 374-376
- Norbert Elias, Au-delà de Freud. Sociologie, psychologie, psychanalyse - Tanguy Wuillème p. 376-379
- Micheline Frenette, en collab. avec Marie-France Vermette, La recherche en communication. Un atout pour les campagnes sociales - David Hoff p. 379-380
- Laurence Guyard, Aurélia Mardon, éds, Le corps à l'épreuve du genre, entre normes et pratiques - Aurélie Olivesi p. 380-382
- Christian Le Bart, L'individualisation - Claude Poissenot p. 382-383
- Thierry Libaert, Communication et environnement. Le pacte impossible - Béatrice Jalenques-Vigouroux p. 383-385
- Raphaël Micheli, L'émotion argumentée. L'abolition de la peine de mort dans le débat parlementaire français - Benoît Sans p. 385-387
- José Ortega y Gasset, La révolte des masses - Tanguy Wuillème p. 387-389
- Philippe Poirrier, dir., Politiques et pratiques de la culture - Hélène Bourdeloie p. 389-391
- John B. Thomson, Merchants of Culture - Gaël Villeneuve p. 391-392
Nouvelles technologies
- Philippe Bouquillion, Jacob T. Matthews, Le Web collaboratif. Mutations des industries de la culture et de la communication - Gilles Boenisch p. 392-393
- Nick Dyer-Witheford, Greg de Peuter, Games of Empire: Global Capitalism and Video Games - Laurent Di Filippo p. 392-393
- Jean-Marie Lhôte, Le symbolisme des jeux - Boris Solinski p. 395-397
- Jean-Marc Manach, La vie privée, un problème de vieux cons ? - Gilles Boenisch p. 397-399
- Pierre Merklé, Sociologie des réseaux sociaux - Gilles Boenisch p. 399-400
- Pierre Musso, Saint-Simon, l'industrialisme contre l'État. Essai - Jean-François Tétu p. 400-402
- Ivan Toulouse, Daniel Danétis, dirs, Eurêka, le moment de l'invention. Un dialogue entre art et science - Gilles Boenisch p. 400-402