Contenu du sommaire : L'esprit et le langage

Revue Histoire, Epistémologie, Langage Mir@bel
Numéro vol.18, n°2, 1996
Titre du numéro L'esprit et le langage
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • L'esprit et le langage

    • Présentation
      - Sylvain Auroux p. 5-6 accès libre
    • Articles
      • Beauzée et le futur antérieur : les axes du temps - Henri Portine p. 7-27 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        A partir de l'étude d'un court passage de l'article Tems de Y Encyclopédie, article dû à Nicolas Beauzée (1717-1789), l'auteur met en relation l'analyse du futur antérieur en français par Beauzée et une représentation polyaxiale du temps dont le fondement est développé. Le rapport entre cette représentation et une approche psychologique ou phénoménologique est ensuite abordé. L'article se termine sur la question de la mise en relation par Beauzée de la valeur temporelle et du contexte sous une forme qui évoquerait ce que l'on peut appeler aujourd'hui l'inscription au sein d'une stratégie discursive.
        abstract : Starting out from the study of a short passage from the article headed Time in the French Encyclopédie, an article by Nicolas Beauzée (1717-1789), this paper relates the analysis of the French Future Perfect tense by Beauzée to a polyaxial representation of time, the grounds for which are put forward. The link between such a representation and a psychological or phenomenological approach is touched on. The article finally suggests that Beauzée establishes a connection between temporal value and context in a form which we might nowadays term Fitting in within a discursive strategy.
      • Le schématisme linguistique chez K.L. Reinhold - Pietro Perconti, J.-P. Palancher [Trad.] p. 29-43 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        En dépit de son image courante, la philosophie du langage de K.L. Reinhold (1757-1823) — visée par cet article — ne prépare pas le terrain au subjectivisme et à l'idéalisme. Bien au contraire, elle consiste dans un examen de la faculté cognitive humaine tenant compte des dispositifs de médiation perceptive et linguistique. Fondée sur une théorie de la sensibilité d'inspiration empiriste, elle déplace au niveau perceptif plusieurs des fonctions que l'idéalisme va attribuer au sujet absolu. Dans une telle perspective, le langage est conçu en tant que facteur de médiation (métaphorique) entre la sensibilité et le reste de l'articulation cognitive supérieure, l'auteur suggère, à la base de cette fonction, l'existence d'une interprétation linguistique du schématisme transcendantal de Kant.
        In this paper, I propose to reconsider the philosophy of language of K.L. Reinhold (1757-1823). The matter has not been explored so far, since, usually, Reinhold's work is only considered as a bridge between Kant's philosophy and the nature idealism of Fichte, Schelling and Hegel. However, Reinhold doesn't pave the way for subjectivism and absolute idealism. On the contrary, his theory is based on the perceptive and linguistic systems. According to Reinhold's idea, many cognitive functions that idealism assigns to the absolute Subject are in fact perceptive competences. In this view, oral language is considered as the faculty of the (metaphoric) connection between perception and the mental structure. In this paper, I shall try to show how the role assigned to language is based on a linguistic interpretation of Kant's transcendental schematism.
      • Relativité linguistique, relativité anthropologique - Sandra Laugier p. 45-73 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        La thèse d'indétermination de Quine est essentiellement une critique du mythe de la signification. Mais en quoi consiste exactement ce mythe ? Qu'est ce qui est critiqué par W.V. Quine (né en 1908) ? Ce n'est pas seulement la signification en tant qu'entité mentale qui est rejetée, mais très précisément l'idée d'un noyau d'invariance commun aux langues et aux cultures, dont elles ne seraient que l'habillage. L'enjeu de la thèse de W.V. Quine est donc, en un sens qu'il faudra préciser, anthropologique — mais une anthropologie qui a ses enjeux aussi bien dans l'épistémologie et dans l'histoire, et qui objecte de manière radicale à certaines formes de relativisme (l'idée de prélogicité) comme à certaines formes « pasteurisées » de rationalisme (le principe de charité), comme nous tentons de le montrer en défendant pour finir une position qui, sans être relativiste ni irrationaliste, n'en est pas moins « anti antirelativiste ».
        Quine's indeterminacy thesis is mainly a criticism of the myth of meaning. Now, what exactly is that myth ? What is being criticised by W.V. Quine (born 1908) ? It is not just signification as a mental entity which is rejected. More specifically, it is the idea of an invariant core common to all languages and cultures. What is at stake in W.V. Quine's thesis is therefore of an anthropological nature, in a sense that will have to be specified. W.V. Quine's anthropology raises issues that are epistemological as well as historical. It objects radically to certain forms of relativism (the idea of prelogicity) as well as to some « pasteurised » forms of rationalism (the principle of charity). The position held in this paper, which is neither relativist nor irrationalist, may be viewed (in Geertz's words) as « anti anti-relativist ».
      • La notion de langage mental : problèmes récurrents de quelques théories anciennes et contemporaines - Jean-Michel Fortis p. 75-101 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        Nous nous efforçons ici de séparer plusieurs thèses distinctes qui sont enveloppées dans l'hypothèse générale qu'il existe un langage de la pensée. Nous donnons d'abord un rapide exposé des bases historiques du concept de langage mental. Nous distinguons ensuite un inscriptionnalisme matériel (et ses diverses formes), qui postule que l'individuation d'une représentation est accomplie par une structure symbolique locale — et un inscriptionnalisme sémantique, qui postule que la réalisation d'une formule mentale suffit à la doter d'un contenu. Nous nous tournons ensuite vers la gnoséologie contemporaine et montrons que ces thèses dépendent et proviennent de conceptions encore plus générales, et qui posent que (1) certaines représentations sont intrinsèquement porteuses de signification, (2) la pensée est par nature compositionnelle, (3) les énoncés d'attitudes propositionnelles expriment adéquatement le contenu des croyances. Nous mettons en doute la validité de ces conceptions. Au cours de la discussion, nous signalons quelques similarités frappantes entre certains problèmes anciens et contemporains soulevés par la notion de langage mental.
        abstract : In this paper, I attempt to disentangle several distinct claims involved in the general hypothesis that there exists a language of thought. I give first a short historical account of the grounds of the concept of mental language. Next, I distinguish between (a) a material inscriptionalism (and the various forms of it), which relies on the local instantiation of a symbolic structure in order to individuate a representation and (b) a semantic inscriptionalism, which posits that the occurrence of a mental formula is by itself sufficient to endow a representation with content. Turning then to contemporary epistemology, these claims are shown to relate to, and originate from the still more general views that (1) some representations are intrinsic bearers of signification, (2) thought is compositional in character, (3) statements of propositional attitudes adequately express the content of beliefs. I question the soundness of those views. All along the discussion, I point to significant similarities between ancient and contemporary issues related to the notion of mental language.
    • Idées et discussions
      • Vers une histoire des événements linguistiques. Un nouveau protocole d'accord entre l'historien et le linguiste - Jacques Guilhaumou p. 103-126 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        La présente réflexion d'un historien du discours, à propos de son ancrage dans le champ de la linguistique, s'efforce d'opérer une sortie du dispositif à visée méthodologique mis en place au cours des années 70 entre histoire et linguistique. Confronté à l'ampleur prise en analyse de discours du côté de l'histoire par le travail configurationnel sur les énoncés historiquement attestés, l'historien du discours propose à l'historien de la linguistique un nouveau protocole d'accord, basé sur la prise en compte du modèle empiriste des sciences du langage tel qu'il se déploie actuellement dans l'histoire des théories linguistiques. L'évolution actuelle de l'historien vers une « autre histoire sociale » prenant en compte le jugement des acteurs de l'événement et du linguiste vers une perspective historique renforcée sur les faits de langue peut permettre l'ouverture d'un nouveau champ de recherche sur l'histoire des événements linguistiques.
        This is the reflection of a specialist of the history of discourse on his place in the field of linguistics. It is a attempt to go beyond the methodological-approach set up between history and linguistics during the 70 s. Faced with the increasing extent of configurational work on historically attested utterances in discourse analysis, the historian of discourse suggests to the historian of linguistics a new working protocol which takes into account the empiricist model of the sciences of language now implemented in the history of linguistic theories. The current evolution of historians towards « another kind of social history », which integrates the judgment of the participants, and on the other hand of linguists towards a strengthened historical approach to language may open up a new field of research on the history of linguistic events.
    • Archives et documents
      • Repères pour une histoire des connaissances linguistiques des langues africaines. [I. Du XVIe siècle au XVIIIe siècle : dans le sillage des explorations] - Emilio Bonvini p. 127-148 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        La découverte empirique des langues africaines a débuté au XVe siècle parallèlement à l'exploration progressive des côtes africaines par les Portugais. Elle a engendré une stratégie d'interprétariat, un enseignement du portugais aux Africains, un relevé géographique des langues et un comparatisme empirique. Au XVIIe siècle, dans un espace géographique limité (Angola) et pour deux langues bantu, le kikongo et le kimbundu, eut lieu une double « révolution technologique » : transfert de l'alphabet latin aux langues africaines, élaboration des premiers vocabulaires et des premières grammaires. Elle suscita un débat théorique à propos des « classes nominales » : celui de l'applicabilité aux langues africaines du modèle des cas du latin et celui de l'article. Cette période correspond à la première phase de l'histoire de la linguistique africaine, qui va du XVIe au XVIIIF siècle et que l'on peut caractériser comme « catholique et portugaise ».
        abstract : The empirical discovery of the African languages began in the 15th century as the Portuguese progressively explored the coasts of Africa. It gave rise to a strategy of interpretation, to the teaching of Portuguese to the Africans, to a geographical survey of the languages and to an empirical comparatist activity. In the 17th century, in a limited area (Angola), two Bantu languages, Kikongo and Kimbundu, were involved in a double « technological revolution » : the transfer of the Latin alphabet to the African languages and the writing of the first lexicons and grammars. The « classes of nouns » gave rise to a theoretical debate on the possibility of applying the Latin cases to the African languages and on the article. This period is the first stage of African linguistics (from the 16th to the 18th century), which may be dubbed « catholic and Portuguese ».
      • Les premières grammaires du français (1565-1799) publiées en Espagne. Modèles, sources et rôle de l'espagnol - Brigitte Lépinette p. 149-177 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        Dans cet article, nous analysons un ensemble de grammaires destinées à l'enseignement du français, éditées en Espagne entre 1565, date de publication à Madrid du premier ouvrage de ce genre et 1799 (année de parution du dernier texte du xvine siècle, époque après laquelle se multiplient ces grammaires dans la Péninsule Ibérique). Malgré l'étendue de la période de temps envisagée, le corpus est relativement homogène, les destinataires en sont tous des Espagnols apprenant le français. Nous établissons une typologie des ouvrages considérés, en fonction du modèle pédagogique et/ou linguistique choisi par les auteurs (aide-mémoire, grammaire formatrice, grammaire des observations, arts vs. grammaire générale). Nous montrons que l'adoption d'un modèle déterminé est en relation avec les sources grammaticales sur lesquelles s'appuient ces auteurs et aussi de la conception qu'ils ont de l'apprentissage de la langue étrangère. Enfin nous commentons brièvement le rôle joué par la métalangue espagnole dans l'organisation pédagogique présentée par chaque grammairien.
        In this article I analyze a set of grammars used to teach French, and published in Spain between 1565 (date of the publication in Madrid of the first such grammar) and 1799 (year of the publication of the last grammar of the 18th century, a period in which the number of these grammars greatly increases in the Iberian Peninsula). Despite the long period of time studied, the corpus is relatively homogeneous : the grammars are all aimed at Spaniards learning French. I have established a typology of the works considered using two criteria : the pedagogical and the linguistic models chosen by the authors. I demonstrate that the adoption of a particular model is related to the grammatical sources used by the authors and to their individual ideas about the learning of a foreign language. At last, I briefly comment on the role of the Spanish metalanguage in the pedagogical set-up evolved by each of the authors.
      • Saussure : cours, publications, manuscrits, lettres et documents. Les contours de l'œuvre posthume et ses rapports avec l'œuvre publiée - Johannes Fehr p. 179-199 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        L'article se compose de trois parties : (1) commentaire, (2) tableau biobibliographique, (3) bibliographie de Ferdinand de Saussure et extraits de textes. Son objet principal est de poser la question du rapport entre l'œuvre posthume de Saussure et celle publiée pendant sa vie. Dans le commentaire, le cas des notes sur les légendes germaniques est discuté à titre d'exemple. En adoptant la perspective de la science en train de se faire, l'on constate qu'il n'y a pas de démarcation nette entre la linguistique comparée et la linguistique générale d'un côté et, de l'autre, les activités et intérêts extralinguistiques de Saussure, mais que c'est à travers ces différents champs de recherche que son projet d'une science sémiologique prend forme.
        This paper is composed of three parts : (1) a commentary, (2) a bio- bibliographical table, (3) a bibliography of Ferdinand de Saussure and some quotations. Its principal object is to raise the question of the relationship between Saussure' s posthumous work and the work he published during his lifetime. In the commentary, the example of the notes on the German legends is discussed in some detail. Adopting the science in action point of view, it can be shown that there is no fixed limit between his work in comparative and general linguistics on the one hand and his so called extralinguistic interests and activities on the other. Rather, this perspective shows how his project of a science of semiology takes form through his inquiries across these different fields.
    • Lectures et critiques