Contenu du sommaire : Grammaires Médiévales
Revue | Histoire, Epistémologie, Langage |
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Numéro | vol.12, n°2, 1990 |
Titre du numéro | Grammaires Médiévales |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Grammaires Médiévales. Irène Rosier [Dir.]
Articles
- Avant-Propos - Irène Rosier p. 5-14
- L'Art Mineur français et le curriculum grammatical - Brian Merrilees p. 15-29 II y a huit versions en ancien et moyen français de Y Ars minor de Donat, toutes destinées à l'enseignement du latin. Cet Art mineur est préservé dans sept manuscrits dont quatre (et en partie un cinquième) contiennent un ensemble de textes qui suggère un programme grammatical cohérent et planifié; deux autres manuscrits rattachent Y Art mineur à des lexiques importants. Les textes grammaticaux se divisent en deux paliers d'instruction, l'élémentaire basé sur Donat qui est presque exclusivement en français, l'avancé qui est en latin et qui reflète l'influence de Priscien et des notions grammaticales plus théoriques. Des textes de lecture font aussi partie du programme.There are eight extant versions of Donatus's Ars minor in Old and Middle French, all intended for the teaching of Latin. This Art mineur is preserved in seven manuscripts, four of which (and in part a fifth) contain a grouping of texts which point to a planned and coherent grammatical program. The grammatical texts can be divided into two instructional levels, the elementary which is mostly in French and based on Donatus, the advanced which is in Latin and reflects the influence of Priscian and a growing interest in theory. Elementary and advanced reading texts are also part of the program.
- Ad auctorum expositionem: Syntactic theory and interpretative practice in the twelfth century - Suzanne Reynolds p. 31-51 Les gloses syntaxiques sont un excellent moyen pour situer et caractériser l'étude des textes littéraires par rapport à l'art grammatical. Au douzième siècle, les gloses et les grammaires s'intéressent également à deux problèmes fondamentaux : l'ordre des mots (ordo) et le gouvernement syntaxique (regimen). Le problème de l'ordre est visé par les gloses et les grammaires à travers un modèle explicatif de contiguité. Quant au regimen, il semble que les glosateurs l'entendaient au sens large, afin d'y inclure toutes sortes de relations syntaxiques. Cet élargissement de la perspective est à mettre en rapport avec la fonction des gloses au niveau empirique de l'enseignement grammatical.Syntactical glosses on literary texts provide an excellent means of situating and characterising the role of literature in the art of grammar. In the twelfth century, glosses and grammars shared the same syntactical concerns of word order (ordo) and government (regimen). Complex word order is dealt with by glossators and grammarians through the explanatory model of proximity. Syntax glosses extend the grammarians' strict notion of regimen to include a wide range of syntactical relationships. This expansion is a function of the glosses' operation at the data-oriented levels of grammatical teaching.
- The Priscian commentary from the second half of the twelfth century: Ms Leiden BPL 154 - Karin Margareta Fredborg p. 53-68 Les commentaires sur Priscien du 1150 au 1230 sont peu connus. Le témoignage du ms Leiden, B.U., BPL 154, ff. 41r-123v, témoigne de l'importance de l'école de Gilbert de la Porrée, à qui l'auteur anonyme s'oppose. Ce commentaire Parisien des années 1168-80 traite de questions grammaticales logiques : la distinction, le sujet grammatical proprement dit et le sujet du discours, entre la signification des pronoms et leur référence (PRONOMINATIO). Il établit des parallèles avec le français vernaculaire, sans accepter l'idée d'une grammaire universelle, au sens de Roger Bacon. Il relève à la fois de la tradition humaniste, par sa profonde connaissance des auteurs classiques, et de la tradition scolastique, par son intérêt pour les questions de sens et de vérité.Th MS Leiden, Univ. Bibl., BPL 154, contains an interesting anonymous Parisian commentary from c. 1168-80, dealing with both grammatical and logical problems : the difference between the purely grammatical subject and the extra-linguistic subject of discourse, between the reference of pronouns (PRONOMINATIO) and their signification. It draws parallels to the vernacular French, without accepting an universel grammar in Roger Bacon's terms. It belongs both to the humanist tradition with its profound knowledge of classical authors and to the scholastic tradition, keen on precise semantic and truth -related problems- including an overt launch of attack on the school of Gilbert de la Porrée.
- Arts du discours et sacra pagina dans le De tropis loquendi de Pierre le Chantre - Luisa Valente p. 69-102 Pierre le Chantre (+ 1197) utilise dans le De tropis loquendi des instruments d'analyse textuelle empruntés aux arts libéraux afin de résoudre les contradictions apparentes et les ambiguïtés des textes bibliques et liturgiques aussi bien que celles des propositions théologiques. Le traité suit l'articulation de lafallacia d'équivocation (homonymie) telle qu'elle se présente dans les traités logiques du XIIe siècle sur les raisonnements fallacieux, en y intégrant des subdivisions dérivées des traditions grammaticale et rhétorique. Parmi les points traités se trouvent : la varia significatio, i.e. la distinction entre les différents sens du même terme (y compris les termes syncatégorématiques, par exemple les prépositions) ; la varia demonstratio et la vario relatio, i.e. les cas de déixis et d'anaphore ambiguës, analysés au moyen de notions rhétoriques (les tropes) ; la varia cotisignificaîio , i.e. la même forme phonétique avec des valeurs morphologiques distinctes ; la varia suppositio, i.e. les différentes dénotations du même mot dans des contextes différents.Peter the Chanter (+ 1197) uses in the De tropis loquendi devices of textual analysis derived from the liberal arts in order to solve apparent contradictions and ambiguities of biblical and liturgical texts as well as of theological propositions. The treatise follows the articulation of the fallacy of equivocation as presented in the 12th century logical treatises on fallacies, integrated through subdivisions derived from the grammatical and the rhetorical traditions. Among the topics dealt with are the varia significatio, i.e. the distinction between different meanings of the same term (also syncategorematical terms, as v.g. prepositions, are taken into account) ; the varia demonstratio and varia relatio, i.e. cases of ambiguous deixis and anaphoras, analysed by means of rhetorical items (tropf) ; the varia consignificatio, i.e. the same phonetic form for different morphological values ; the varia suppositio, i.e. the different denotations of the same word in different contexts.
- Aperçus sur la notion de personne dans des grammaires des Xlle et XIIIe siècles - Christine Brousseau-Beuermann p. 103-120 Cet article propose des repères pour l'histoire de la notion de personne et de questions afférentes (sauf pour la construction (in)transitive), aux XIIe et XIIIe siècles. La notion simple de Priscien se complexifie avec le développement de la sémantique ; notamment, la personne conserve sa définition antique de sujet de l'interlocution mais on distingue les instances de discours, du suppôt individuel qui les occupe. Les recherches syntaxiques conduisent certains Modistes à considérer que la personne appartient d'abord à la substance seule, substituant ainsi à l'ordre de 1 '"invention" des parties du discours, un ordre fondé sur un discours déjà construit.This paper presents some key notions for the history of persona and related problems (except for (in)transitive construction), in Xllth and XHIth cy. The single concept from Priscian is further analysed, as semantics gets refined ; for instance, the individual suppositum is distinguished from the interlocutor. Syntactic research leads some Modists to affirm that the personal property is prior in substance than in verb, thus reversing the order in which parts od speech were said to have been invented, and substituting syntactic order, i.e. based on actual speech.
- Can est be used impersonally, a clue to the understanding of the verbum substantivum - Mary Sirridge p. 121-138 On analyse ici trois textes relevant de la tradition grammaticale "Baconienne" ou "intentionaliste", qui traitent d'un ensemble de questions autour de l'usage impersonnel de est : le commentaire sur Priscien Mineur et les Sophismata Grammaticalia de Robert Kilwardby, la Summa Grammatica de Roger Bacon. On notera que ces textes utilisent une méthode commune et développent une doctrine similaire, et l'on attirera l'attention sur certaines divergences significatives.I consider three works from the "Baconian" or "intentionalist" grammatical tradition as they deal with a nexus of issues surrounding the impersonal use of est : Robert Kilwardby's Commentary on Priscian Minor and Sophismata Grammaticalia, and Bacon's Summa Gramatica. I note the common method and uniform doctrine of these works and draw attention to significant variations among them.
- On mediaeval syntactic thought with special reference to the notion of construction - C.H. Kneepkens p. 139-176 Cet article retrace l'histoire de la notion de construction dans la grammaire spéculative du Xlle siècle à la fin du XIVe siècle. 1 Contructio' est un terme souvent utilisé, bien que mal défini, par les grammairiens de l'Antiquité, qui fut dès le départ confondu avec 'oratio'. A comme notion grammaticale indépendante, peuvent être observés. L'utilisation de constructio pour indiquer le composant formel de l'énoncé, et la distinction entre constructions binaires, entre deux termes, et constructions se situant au niveau de l'énoncé. La notion de dépendance, introduite au XIIIe siècle dans la théorie de là construction, renforça l'analyse en terme de construction binaire. Les deux aspects de l'analyse convergèrent chez les Modistes, qui ne retinrent que les constructions binaires. Les grammairiens nominalistes du XIVe siècle rejetèrent l'idée que la construction puisse être quelque chose distinct des mots construits. Selon eux, la construction n'était pas une propriété ou une relation, mais 'les constructibles construits ensemble".This paper outlines the history of the notion of construction from the 12th c. to the end of the 14th c. in speculative grammar. 1 Constructio' frequently used, but not defined by the grammarians of Antiquity, was originally intermingled with 'oratio'. From the 12th c. onwards two trends vital for its development as a separate grammatical notion, can be observed : the use of constructio to indicate the formal component of the sentence, and the distinction between binary and sentential constructions. The notion of dependency, introduced in the 13th c. into the doctrine of construction, furthered the attention for the binary construction. Both lines converged on the grammar of the Modistae, who paid only attention to binary constructions. The nominalist grammarians of the 14th c. rejected 'constructio' as something distinct from the words in construction. For them construction was not a property or a relationship, but the 'constructibles mutually constructed1.