Contenu du sommaire : Grands barrages et frontières dans les pays du Sud
Revue | Bulletin de l'Association de Géographes Français |
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Numéro | no 2015/2 |
Titre du numéro | Grands barrages et frontières dans les pays du Sud |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Grands barrages et frontières dans les pays du Sud
- Grands barrages et frontières dans les pays du Sud - Marcel Bazin, Alain Gascon p. 135-140
- Hydroélectricité, pouvoirs et frontières : un GAP pour l'Éthiopie ? - Alain Gascon p. 141-153 Mälläs Zénawi, feu le Premier ministre éthiopien, a lancé le Growth and Transformation Plan (GTP). Il donne la priorité à l'industrialisation pour faire face au doublement de la population en 2050. De grands barrages sont construits sur le Nil bleu et l'Omo afin de produire une énergie abondante et bon marché qui attirera les investisseurs et dont le surplus sera vendu aux États voisins. Le Plan directeur de 25 ans – dont le Grand Barrage de la Renaissance éthiopienne (le 2e d'Afrique) est la clé de voûte – renforcera le poids régional de l'Éthiopie dans la Corne comme le GAP l'a fait pour la Turquie au Moyen-Orient.Mälläs Zénawi, the late Ethiopian Prime Minister, initiated the ambitious Growth and Transformation Plan (GTP). Because its population is going to double in 2050 Ethiopia has to industrialize rapidly. The country needs to produce plenty of cheap energy to attract industrial investment and sell surplus electricity to neighbouring countries. According to the 25-year Master Plan grand dams have been started to build on the Blue Nile and on the Omo rivers: among them the Grand Ethiopian Renaissance Dam (the 2nd in Africa). Therefore the regional position of Ethiopia will be strengthened in the Horn as the GAP did it for Turkey in the Middle East.
- Combats sur le Nil : la guerre de l'eau ? - Alain Gascon p. 154-166 Rien ne doit limiter le débit du Nil en amont du lac Nasser selon l'Égypte. Elle a, toutefois, concédé, par les accords de 1929 et de 1959, la construction de barrages au Soudan. En 2010, l'Éthiopie a lancé un plan directeur de construction de grandes retenues, notamment le Grand barrage de la Renaissance éthiopienne sur le Nil bleu. Or, ce dernier (86 % du débit à Assouan) prend sa source sur le territoire de l'Éthiopie dont la population dépasse maintenant celle de l'Égypte ! Le président Morsi a menacé de bombarder le chantier. Mais au mépris des traités, le Soudan prévoit la construction de nouveaux barrages en amont d'Assouan. Depuis la signature de l'accord de Khartoum du 23 mars 2015 entre l'Éthiopie, le Soudan et l'Égypte la menace d'une guerre de l'eau sur le Nil s'est éloignée.According to Egyptians, nothing should limit the flow of the Nile upstream from Lake Nasser. However, by the 1929 and 1959 agreements they had admitted that Sudan should construct dams on the Nile. Since 2010, Ethiopia has launched the 25-year Master Plan in order to build huge reservoirs, in particular the Grand Ethiopian Renaissance Dam on the Nile. Whereas the Blue Nile (86% of the flow at Aswan) has its source in Ethiopia (the population of which now exceeds that of Egypt!), Egyptian president Morsi threatened to bomb the building site. But, in disregard for treaties, Sudan has launched the construction of new dams upstream from Aswan. Since Ethiopia, Sudan and Egypt reached an agreement on March 23, 2015 in Khartoum, the threat of a war of water on the Nile has receded.
- Le Lesotho Highland Water Project, ou le retour de la grande hydraulique en Afrique australe - David Blanchon p. 167-183 Le Lesotho Highlands Water Project (LHWP) est le dernier transfert d'eau interbassins internationaux conçu pendant la période d'apartheid. Selon le traité signé en 1986 entre l'Afrique du Sud et le Lesotho, une chaîne de barrages auraient dû être construits dans les montagnes du petit royaume enclavé pour transférer de l'eau via des tunnels vers la grande région métropolitaine assoiffée de Johannesburg.Ce grand transfert a été fortement critiqué pour des raisons environnementales et sociales, mais la construction continua malgré la fin de l'apartheid. Cependant, les leaders de l'ANC qui s'opposaient dans les années 1980 à ce projet, décidèrent de ne construire que deux des cinq phases prévues. Et au moment où l'Afrique du Sud post-apartheid avait décidé de fonder sa politique hydraulique sur une gestion de la ressource basée sur l'utilisation économe des ressources disponibles (water demand management), les phases ultérieures du LHWP semblaient condamnées.Mais l'apparition de nouveaux problèmes, comme les effluents acides des mines d'or (acid mine drainage) conduisirent l'Afrique du Sud et le Lesotho à se lancer dans la construction d'un nouveau barrage à Polihali pour transférer plus d'eau.L'objectif de cet article est d'identifier et d'analyser les raisons de la reprise du LHWP, de comprendre sa signification et enfin de mesurer ses conséquences sur le « complexe hydropolitique » d'Afrique australe.The Lesotho Highlands Water Project (LHWP) is the last major international interbasin transfer system that has been planned during the apartheid era. According to the 1986 treaty between Lesotho and South Africa, a chain of major dams should have been constructed in the high mountains of the landlocked kingdom in order to transfer water via tunnels to the water-stressed metropolitan region of Gauteng.The project aroused fierce environmental and social criticism, but the construction process went on after the end of apartheid. But the ANC leaders, who were against the project in the 1980s, decided to build only two (phase 1a and 1b) of the five planned phases.According to the new South African water policy, water demand management was a national priority and all the big dams and IBT should have been abandoned. This was the official policy during the first years of the 21st century. But as new problems, such the Acid Mine Drainage (AMD) issue, emerged, South Africa and Lesotho decided to build a new major dam in Lesotho, at Polihali, in order to transfer more water.This paper examine the reason of the “return of the LHWP”, its meanings and its consequences on the Southern African hydropolitical complex.
- Le Projet de l'Anatolie du Sud-Est (GAP) dans son contexte national turc et régional moyen-oriental - Marcel Bazin, Stéphane de Tapia p. 184-207 Le bassin du Tigre et de l'Euphrate est caractérisé par un transfert massif de ressources hydriques depuis un cadre montagneux vers la plaine mésopotamienne, par l'étagement des groupes ethniques, Turcs et Persans à l'amont, Kurdes en position intermédiaire et Arabes en aval et par son découpage politique récent entre quatre États qui ont chacun mené leur propre politique de l'eau. La Turquie a ainsi mobilisé les eaux de l'amont du bassin dans le Projet de l'Anatolie du Sud-Est (GAP), ambitieux programme de développement intégré, à partir de 22 barrages, de la partie la plus pauvre du pays coïncidant avec l'aire de peuplement kurde. Les résultats obtenus restent fragilisés par la guérilla du PKK et sa répression par l'armée à l'intérieur et par la situation internationale : les États de l'aval, Syrie et Irak, ont lutté pour revendiquer des volumes d'eau plus importants, avant de sombrer dans la guerre civile et la fragmentation qui en résulte.The hydrographic basin of Tigris and Euphrates is characterized by the dissymmetry of water resources, the juxtaposition of ethnic groups, Turks and Persians upstream, Kurds in the intermediate regions and Arabs in the Mesopotamian plain, and its recent division between four states having their own water management policies. Turkey has mobilized the water of the upper part of the basin in the Southeastern Anatolian Project, an ambitious multipurpose scheme based upon 22 dams and aiming integrated development of the poorest region of the country, inhabited by the Kurdish minority. In spite of the PKK guerilla and its vigorous repression by the army, significant results have been obtained but remain fragile due to the struggle of downstream states Syria and Iraq for a more abundant water supply, before their decomposition through civil war during the last years.
- Les grands aménagements hydroélectriques du Laos au cœur du bassin du Mékong - Fabrice Mignot p. 208-225 Pour sortir sa population de la pauvreté et s'engager dans le développement économique, le Laos a entrepris une politique de construction de grands barrages hydroélectriques, avec l'encouragement des institutions internationales cherchant à favoriser l'intégration régionale de cet État communiste. Dans cette voie, il a trouvé un partenaire enthousiaste, culturellement proche : la Thaïlande, qui finance et construit les plus grands barrages, et est le principal acheteur de l'électricité laotienne. Cependant, en négligeant l'avis de ses alliés politiques, le Viêt Nam et le Cambodge, sur les conséquences environnementales de ces barrages, il contribue à faire ressurgir d'anciennes fractures géopolitiques.To lift its people out of poverty and to promote economic development, Laos has undertaken a policy of large hydropower dam building, encouraged by international institutions with the aim of the regional integration of this communist state. On this path it has found an enthusiastic partner, culturally closed to it: Thailand, which finances and builds the largest dams, and which is the main buyer of Laotian electricity. However, neglecting the opinion of his political allies, Vietnam and Cambodia, on the environmental consequences of these dams contributes to revive old geopolitical divides.
- Les barrages du Rio Madeira : géopolitique d'une intégration transfrontalière Brésil-Bolivie-Pérou - Céline Broggio, Marcio Cataia, Martine Droulers, Juan-Pablo Pallamar p. 226-243 La reprise de la construction des barrages hydroélectriques en Amazonie brésilienne relance la question des relations transfrontalières et de la coopération avec les pays du bassin amazonien, en particulier la Bolivie et le Pérou. Si les barrages brésiliens de Santo Antonio et Jirau sur le fleuve Madeira État du Rondônia) suscitent des conflits sociaux et environnementaux, ils contribuent aussi à poser les bases d'une coopération transfrontalière en construction sur le plan régional.The relaunch of hydroelectric dams construction in the Brazilian Amazon reopens the question of cross-border relations and cooperation with the countries of the Amazon basin, particularly Bolivia and Peru. If the Brazilian dams Santo Antonio and Jirau on the Madeira River (Rondônia) create social and environmental conflicts, they also create the opportunity for laying the foundations of a cross-border cooperation at a regional level.
- Grands barrages, frontières et intégration en Amérique du Sud - Marie Forget, Sébastien Velut p. 244-257 Dans un contexte de tension énergétique, principalement liée à la croissance de la consommation, la construction de barrages de grandes dimensions a été relancée en Amérique latine depuis une dizaine d'années, dans le prolongement des projets menés par les dictatures dans les années 1970. Ces projets pharaoniques qui naissent sur des cours d'eau parmi les plus grands fleuves du monde comme l'Amazone, le Paraná, le Marañon ou le Madeira, se localisent préférentiellement dans les territoires frontaliers, à la fois périphériques et inexploités. Assurer l'approvisionnement en énergie des grandes métropoles nationales est le principal objectif, mais ces barrages permettent aussi d'intégrer des territoires marginaux aux territoires nationaux en s'assurant une mise en valeur des ressources naturelles et favorisent le développement de coopérations transfrontalières, entre rivalités et intégrations.In a context of energy tension, mainly due to rising consumption, the construction of large dams was resumed in Latin America ten years ago, as a follow-up to projects carried out by dictatorial governments in the 1970s. These huge projects, which take place on the world's largest rivers such as the Amazon, the Paraná, the Marañon or the Madeira, are preferentially located in peripheral and unexploited border areas. Securing energy supplies for the main national cities is the first objective, but these projects also allow the integration of marginal territories to national territories, the development of natural resources and the promotion of cross-border cooperation, with results ranging from rivalry to integration.
Article varia
- Les sports de nature comme ressource de développement territorial durable d'une ville-moyenne Française : le cas de Pau - Jean-Christophe Coulom p. 258-276 La mondialisation et l'attention portée aux métropoles s'accompagnent d'un regard nouveau sur les villes moyennes. Les acteurs politiques, bien conscients des intérêts qu'ils ont à en tirer, tentent d'en développer l'attractivité. Appuyés sur les capacités d'actions des Établissements Publics de Coopération Intercommunale autour desquelles ils sont formés, ces acteurs tentent aussi d'en accroître la singularité pour réformer l'identité de leur territoire. Voyons comment, sur un champ axé sur les loisirs sportifs de nature, une ville moyenne française et son agglomération politique, Pau, tentent d'obtenir une reconnaissance nouvelle, en œuvrant pour une nouvelle habitabilité de l'urbain.Globalization and the attention given to metropolises leads to a fresh look on medium-sized towns. Political actors, well aware of their possible benefits, try to develop their attractiveness. Using the competencies of the “Public Establishments for Intercommunal Cooperation” around which they are based, these actors also try to improve their singularity in order to recreate the identity of their territory. In this case study, we focus on nature sports recreation, in a medium-sized town and it political conurbation, Pau, which endeavours to get a new recognition by working to a new habitability of the urban realm.
- Les sports de nature comme ressource de développement territorial durable d'une ville-moyenne Française : le cas de Pau - Jean-Christophe Coulom p. 258-276