Contenu du sommaire : Le développement au prisme des communs
Revue | Revue d'économie du développement |
---|---|
Numéro | volume 30, no 3, septembre 2017 |
Titre du numéro | Le développement au prisme des communs |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Introduction : Le développement au prisme des communs - Gaël Giraud, Stéphanie Leyronas, Grégoire Rota-Graziosi p. 5-7
- Biens publics mondiaux et institutions internationales : quel avenir pour la Banque mondiale ? - Ravi Kanbur p. 9-24 La Banque mondiale s'essouffle. Ou bien est-ce pire encore ? Les biens publics mondiaux (BPM) sont souvent présentés comme un moyen de revitaliser, voire de sauver cette institution dont la base financière nécessaire à ses opérations conventionnelles de prêts souverains se réduit considérablement par rapport aux besoins, dans un contexte de concurrence exercée par d'autres acteurs. La Banque mondiale offre toutefois des avantages sur lesquels la communauté mondiale pourrait compter dans le cadre des questions liées aux BPM. Elle s'est forgé une réputation d'excellence technique et bénéficie d'un pouvoir de mobilisation à même de favoriser le consensus sur un éventail de problématiques relatives aux BPM, même si cet objectif ne peut être pleinement atteint sans réformes profondes de sa structure de gouvernance. Elle a acquis une expérience dans le domaine de la gestion des ressources concessionnelles et des subventions, compétence essentielle au financement des actions liées aux BPM. Enfin, elle possède une connaissance des opérations à l'échelle des pays dans la mise en œuvre des modalités spécifiques par pays des instruments relatifs aux BPM. Ce sont là les atouts de la Banque mondiale aujourd'hui, trois quarts de siècle après sa création.Codes JEL : O1, H41, F02.The World Bank is in the doldrums, or worse. The global public goods (GPG) argument is often put forward as a way of reviving and even rescuing an institution whose financial base to support conventional sovereign loans is receding sharply relative to needs and competition from other sources. The World Bank does have certain advantages as an institution, which the global community could use to address GPG issues. It has technical excellence and convening power to help build consensus on a range of GPG issues, although this cannot be fully realized without radical reform of its governance structures. It has experience with managing concessional and grant resources, which will be central to financing GPG mechanisms. And it also has experience with country operations to implement the country specific dimensions of GPG mechanisms. That is what the World Bank is good for now, three quarters of a century after its founding.
- L'entreprise, lieu commun - Jean-Michel Severino p. 25-53 Diverses théories de la justice ont dominé l'aide publique au développement puis l'univers de l'action publique globale. Elles ont historiquement tendu à opposer l'activité privée, lucrative et égoïste, au bien public, monopole des États ou lieu d'action privilégié des philanthropes. Cette division ne rend plus compte ni de la réalité du terrain de l'action collective ni de l'état du monde. Cet article présente en revanche l'entreprise comme une institution productrice d'externalités, soit du fait de ses objectifs, soit du fait de la manière dont elle conduit ses activités. Un enjeu important devient alors de maximiser ces externalités, soit au bénéfice de la stratégie de l'entreprise, soit au bénéfice de la collectivité. D'importantes conséquences en découlent pour les entreprises elles-mêmes, mais aussi pour les gouvernements et les institutions de financement du développement, à propos de la manière de conduire les politiques de développement dans le contexte de la mondialisation, en s'appuyant sur le secteur privé, en l'utilisant ou en le dynamisant au profit du bien-être collectif.Various theories of justice have dominated official development assistance (ODA) over the decades, and then the universe of global public action. Historically, they have tended to oppose private, lucrative and selfish activity to the public good, a monopoly of states or the privileged area of action of philanthropists. This division no longer reflects either the reality of the field of collective action or the state of the world. This article, on the other hand, presents the firm as an institution that produces externalities, either because of its core business or because of the way in which the latter is delivered. An important issue then becomes to maximize these externalities, either for the benefit of the company's strategy or for the benefit of the community. Important consequences stem from this alternative vision, for the enterprises themselves, but also for governments and development finance institutions, about how to conduct development policies in the context of globalization, building on the private sector, by using it or energizing it for the benefit of the collective welfare.Codes JEL: D21, D22, F35, H41, L30, L31, L32, L33, L39, O10, O25.
- Un survol de la théorie des biens communs - Jean-Louis Combes, Pascale Combes-Motel, Sonia Schwartz p. 55-83 Cet article propose un survol de la théorie des biens communs. La notion de bien commun et la possible surexploitation de ce type de ressource sont tout d'abord exposées. Ensuite, plusieurs illustrations sont apportées telles que le réchauffement climatique, la déforestation, la congestion urbaine et le déficit budgétaire. À chaque fois, les moyens d'éviter la tragédie des communs sont présentés. Il s'avère que dans chacun des cas, ce sont essentiellement des solutions étatiques qui sont privilégiées, contrairement à des arrangements institutionnels ou des solutions de marché.This article proposes a review of the economic theory of common goods. The conditions under which the “Tragedy of the commons” prevail are examined. The several examples of the Tragedy such as the climate change, the deforestation, the urban congestion and the fiscal deficit are scrutinized. In each case, public policies are more often considered than institutional agreements between stakeholders or market approaches.Codes JEL : Q54, Q58, R41, R48, Q23, Q28, H63, H77.
- Les mini-réseaux électriques comme exemple d'application des thèses d'Elinor Ostrom sur la gouvernance polycentrique de la tragédie des communs - Jean-Claude Berthélemy p. 85-106 Cet article met l'accent sur les questions de gouvernance à résoudre pour progresser dans l'Objectif du développement durable n° 7 sur l'accès à l'énergie. Le point de départ de l'analyse est le constat de problèmes majeurs de gouvernance dans les grands réseaux électriques des pays en retard en matière d'accès à l'électricité. Ces problèmes de gouvernance, qui induisent des coûts élevés pour les utilisateurs du réseau, relèvent de l'interprétation d'Elinor Ostrom sur la tragédie des communs. Les projets de mini-réseaux, dont la faisabilité technico-économique a été renforcée ces dernières années du fait des progrès en matière de production d'électricité à partir de sources renouvelables, constituent une réponse possible réaliste à ces défis, dès lors qu'une gouvernance polycentrique permettrait, comme envisagé par Elinor Ostrom, de résoudre la tragédie des communs. Quelques retours d'expérience à partir de l'observation de projets récents d'électrification rurale permettent d'identifier les facteurs clés de la réussite de ces projets.This paper focuses on the governance issues that need to be addressed in order to make progress towards the goal of sustainable development n° 7 on access to energy. The starting point of the analysis is the observation of major problems of governance in the electricity grids of countries lagging behind in access to electricity. These governance problems, which incur high costs for network users, are part of Elinor Ostrom's interpretation of the tragedy of the commons. Mini-grid projects, whose technical and economic feasibility has been strengthened in recent years by advances in renewable sources electricity generation, are a realistic response to these challenges. Polycentric governance, as envisaged by Elinor Ostrom, would resolve the tragedy of the commons. Some lessons learnt from recent rural electrification projects help identify the key factors for the success of such projects.Codes JEL : L94, O18, Q42.
- Infrastructures de stockage agricole (ISAC) dans la zone soudano-sahélienne du Cameroun : conditions de gouvernance d'un bien commun pour la sécurisation alimentaire - Eric Joel Fofiri Nzossie, Ludovic Temple, Joseph Pierre Ndamè p. 107-127 Face au risque permanent d'insécurité alimentaire dans la zone soudano-sahélienne du Cameroun, l'action publique nationale et internationale est davantage polarisée par la promotion du stockage collectif comme trajectoire d'innovation pour la régulation du marché céréalier. L'infrastructure de stockage, soumise à des règles opérationnelles de gestion parfois contradictoires et exposée à des visions dichotomiques quant à sa finalité entre promoteurs et bénéficiaires, acquiert ainsi la qualité de ressource commune au sens d'Ostrom. Elle porte par conséquent, dans ce manque de mise en cohérence, le germe de l'échec des politiques d'appui à la sécurisation alimentaire et d'aide au développement. L'article interroge les conditions de mutualisation des politiques qui structurent les trajectoires d'innovation sur le stockage ainsi que les résultats de l'action de la diversité d'acteurs. Il analyse la pertinence de ces trajectoires au regard de leur impact relatif sur la saisonnalité historique de l'offre céréalière et l'instabilité des prix domestiques. La méthodologie mobilise des données secondaires auprès des institutions et organismes qui produisent l'information sur le stockage (SODECOTON, PAM, Office céréalier, ministère de l'Agriculture, ONG) et le suivi des prix sur les marchés (INS). L'exploitation de ces données est complétée par une enquête réalisée auprès d'une centaine d'organisations de producteurs (OP) bénéficiaires des appuis institutionnels (ONG, projets étatiques), sur leur participation à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques liées au système de stockage collectif.Faced with the permanent risk of food insecurity in the Sudano-Sahelian zone of Cameroon, national and international public action is more focus by promoting collective storage as innovation trajectories for the regulation of the cereal market. The storage infrastructure, which is subject to sometimes contradictory operational management rules and is exposed to dichotomous visions as to its purpose between promoters and beneficiaries, acquires the quality of a common resource in the sense of Ostrom. As a result, this lack of coherence leads to the failure of policies to support food security and development assistance. The article questions the conditions for the pooling of policies that structure the innovation approach on storage and the results of the action of the diversity of actors. It analyzes the relevance of these approaches in terms of their relative impact on the historical seasonality of cereal supply and the instability of domestic prices. The methodology uses secondary data from institutions and organizations that produce storage information (SODECOTON, WFP, Cereal Office, Ministry of Agriculture, NGOs), and market price monitoring (INS). The use of these data is complemented by a survey of about a hundred producer organizations (POs) benefiting from institutional support (NGOs, state projects), their participation in the development and implementation of policies related to the collective storage system.Codes JEL: D49, R29, O12, Q11.
- Un cadre d'analyse pour la gouvernance des ressources naturelles. Le cas des eaux souterraines - Stéphanie Leyronas, Dominique Rojat, Frédéric Maurel, Gaël Giraud p. 129-148 La gestion des eaux souterraines interroge le cadre dans lequel s'est élaboré le concept de « bonne gouvernance » depuis les années 1990. Nous montrerons que dans des contextes marqués par une pluralité d'instances de pouvoir, l'exploitation des ressources naturelles nécessite des modes de gouvernance hybrides, qui associent la coordination des actions individuelles, imposée ou impulsée par l'État, et les formes de l'action collective d'intérêt public ou d'intérêt communautaire. Des articulations originales entre ces différents modes d'action restent souvent à imaginer. Elles sont rendues nécessaires par le constat, sur le terrain, de l'échec conjugué d'arrangements institutionnels purement marchands ou purement publics. En partant de l'exemple de la nappe souterraine d'Azraq en Jordanie, nous montrerons en quoi une gestion locale et des règles négociées, de type « communs », permettent de renforcer mutuellement action collective et action publique par une reconnaissance réciproque de leurs légitimités et de leurs échecs ou difficultés.The issue of groundwater management challenges the paradigm along which the concept of good governance has developed since the 1990s. We show that in contexts involving multiple power structures, the exploitation of natural resources requires hybrid modes of governance that combine the coordination of individual actions imposed or promoted by the state with forms of collective action in the public or community interest. Original forms of coordination between these different modes most often remain on the drawing board. However, the failure in the field of purely market-based or purely public institutional arrangements makes them necessary. Taking the Azraq aquifer in Jordan as an example, we show how local management and negotiated rules of a “commons” type makes it possible to mutually strengthen both collective and public action through the reciprocal recognition of their legitimacy and of their failures or difficulties.Codes JEL: H41, H82, O13, Q11, Q15, Q21, Q25.