Contenu du sommaire : Faire l'événement
Revue | Sociétés & Représentations |
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Numéro | no 32, 2011 |
Titre du numéro | Faire l'événement |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier : Faire l'événement
- Faire l'événement, un enjeu des sociétés contemporaines - Pascale Goetschel, Christophe Granger p. 7-23
- Le coup médiatique : Les journalistes font-ils l'événement ? - Patrick Champagne p. 25-43 Contre les approches réalistes et nominalistes, qui ont en commun d'oublier que ce n'est pas à l'analyste de dire ce qu'est et ce que n'est pas un événement, cet article s'attache à montrer que la définition de l'événement est précisément l'enjeu d'une lutte, et que c'est cette lutte qu'il importe de prendre pour objet. Le travail scientifique en la matière consiste alors à prendre en compte l'ensemble des acteurs sociaux qui sont en lutte pour imposer une certaine idée de ce qu'est censé être un événement. En l'occurrence, la notion d'événement est devenue fortement dépendante de l'industrie des médias ; elle est inhérente au fonctionnement même des salles de rédaction au point qu'on ne sait plus très bien si la presse « met en une » les événements qui existent indépendamment des journalistes ou si c'est le fait d'être mis en une qui contribue à faire ce qu'on appelle un événement. Les journalistes en effet ne sont pas de simples intermédiaires se bornant à diffuser et à commenter des événements qui existeraient en soi, en dehors d'eux, et qui seraient aisément saisissables. Ils ont leur propre conception de l'événement qui n'est pas celle de l'historien, de l'homme politique ou du citoyen ordinaire. Ils sont de plus soumis à la pression de ceux qui, parce qu'ils estiment que c'est leur intérêt, veulent que l'on parle d'eux dans les médias, et tentent, avec l'aide de conseillers en communication, de « faire événement ». Cela signifie qu'un journaliste, ou même un journal, ne peuvent pas décider à eux seuls de ce qui doit être considéré comme un « événement » : chacun, dans le champ journalistique, y contribue seulement à la mesure de la position qu'il occupe dans cet espace. Analysant de près comment ont été « faits » plusieurs événements médiatiques récents (campagne contre l'insécurité routière de 2003, l'affaire du RER D en 2004, notamment), cette étude démontre ainsi combien l'événement est le fait d'une construction collective qu'il faut rendre à ses logiques sociales.The media coup
Contrary to realistic and nominalistic approaches which have in common to forget that it is not the analyst's role to say what an event is and is not, this article aims at showing that the definition of the event is precisely the stake of a struggle, and that it is this struggle that is interesting to study. The scientific approach of the matter consists of taking into account every social actor who strives to impose a certain idea of what is supposed to be an event. As it is, the notion of event has become highly dependent on the media industry ; it is indeed less and less clear whether the press chooses to publish on its front page events that are events regardless of journalists, or if the fact of being on the front page contributes to make it an event. Journalists are not mere intermediaries. They have their own interpretation of the event, which may differ from the idea of the historian, the politician or the ordinary citizen. They are, moreover, submitted to pressure from those whose vested interest commands that they are mentioned in the media and endeavour, with the help of media advisers, to “make the event”. This means that a journalist, or even a newspaper, is not the only actor to decide what is supposed to be considered as an “event”. Everyone can only contribute insofar as the position they occupy in the journalistic field. Based on the analysis of the “making of ” recent events, this study shows to what extend the event is the result of a collective construction reflecting its social logics. - Impasses et ruses du récit : Silences et mises en mots de l'événement au xixe siècle - Thomas Bouchet p. 45-55 Les historiens qui rencontrent la question de l'événement savent combien il est difficile de mettre en mots ce qui s'est effectivement passé. Ils doivent en particulier composer avec des lacunes, des vides, des silences. Le choix qui se présente à eux est insatisfaisant : un récit à vocation exhaustive « recoud » (Michel de Certeau), c'est-à-dire opère une mise en continuité qui risque de déboucher sur un travestissement de l'événement d'origine ; un récit qui ne dissipe pas l'obscurité des aspects les moins lisibles de l'événement risque de conduire à un résultat peu convaincant, et frustrant. L'article porte sur cette articulation difficile entre silences et mises en mots de l'événement, à la fois sous un angle assez général – à propos du xixe siècle français – et à partir de quelques objets d'étude précis : des insurrections, un coup d'État. Il suggère aussi que des récits littéraires ou cinématographiques peuvent ouvrir sur cette question des horizons insoupçonnés.Dead-ends and tricks of historical reports
Historians know how difficult it is to put events into words. They are faced with gaps, voids, omissions. The choice is unsatisfying: a narrative aiming at exhaustiveness “resews” (as Michel de Courteau puts it), that is to say tries to build a continuity with the risk of twisting the original event; a narrative which does not bring light to the most obscure aspects of an event will prove frustrating and not convincing. The article is about that sensitive articulation between silences and wording of the event, both under a general angle —the French 19th century— and the studying of a few precise events: upheavals, a political coup. It also suggests that literature and cinema can be of unsuspected value on the matter. - Fixer l'événement : Le Mai 1968 du photojournalisme - Audrey Leblanc p. 57-76 Aujourd'hui considéré comme événement historique, Mai 68 en France est connu pour et par ses icônes photographiques. « Fixer l'événement » : l'icône survient comme sa saisie visuelle dans l'évidence de son lien avec lui ; celle restée dans les mémoires aussi, attachée parfois au nom d'un photographe désormais célèbre. Mais les photographies ainsi convoquées sont issues du photojournalisme, c'est-à-dire d'un système médiatique. Ces « images qui ont fait l'histoire » répondent aux mécanismes complexes d'un tel système ; en l'occurrence, celui de la presse magazine. Déplacer la question de la photographie au photojournalisme permet d'en décrire les instances : les photographes mais aussi les agences de photographie – productrices des images – et les rédactions presse – consommatrices. Dans le récit culturel porté par la doxa professionnelle, les différents acteurs que regroupe ce que l'on a pris l'habitude de nommer « le photojournalisme » sont mal connus et souvent ramenés à la seule figure professionnelle du photographe. La fabrication des images et leur valorisation dans les agences, comme les mécanismes qui régissent leur usage et leur gestion dans les rédactions presse restent confidentielles au milieu. Mai 68 coïncide avec les débuts d'une période aujourd'hui idéalisée par la profession. Les événements se déroulent sur plusieurs semaines et permettent d'observer les réactions médiatiques à leur égard sur une durée donnée. En tenant compte de la fragilité d'archives lacunaires, il est possible de reconstituer la chaîne professionnelle par laquelle se construisent les images des événements, avant de parvenir au lecteur, insérées dans une publication. Cette description permet de poser des jalons quant à la gestion quotidienne par les entreprises du photojournalisme, des événements des mois de mai et juin 1968 : l'événement ne se présente pas comme tel mais se construit au jour le jour, de la production de ses images à sa fixation, par la publication, d'un récit médiatique.Fixing the event
Now considered as a historical event, May 1968 in France is known for and through its photographic icons. “Fixing the event”: the icon comes as the visual capture of its obvious link with it; the picture that remains in memories too, sometimes attached to the name of a now famous photographer. But these photos come from photojournalism, therefore from a media system. The “images that made history” are part of a complex mechanism of such a system; namely the press magazine. Questioning photojournalism rather than photos, allows one to study its components: photographers, press agencies —who produce images— and press editors who use them. These actors and their methods are not widely known and tend to be confined to the professional milieu. The May 68 events coincided with the beginning of a period that is today idealized by the profession. The events took place during several weeks and therefore allows to observe the media reactions in the long run. While taking into account the fragility of incomplete archives, it is possible to retrace the professional process from the picture to the reader, via the publisher. This description helps to put milestones along the everyday management by photojournalism companies, of the events that took place during the months of May and June 1968: the event is being constructed day after day, from the production of images to its fixation, once published, as a media narrative. - Le réclamisme : Naissance de l'événement médiatique en 1900 - Benoît Lenoble p. 77-96 L'événement médiatique contemporain est le résultat d'un processus d'élaboration, de diffusion et de légitimation dans le temps, le quotidien et les représentations des sociétés. Sa construction par les médias modernes et son insertion dans le monde social s'observent, en France durant la seconde moitié du XIXe siècle, à travers les manifestations réclamistes des journaux parisiens et régionaux de grande diffusion. Ces derniers expérimentent et améliorent des pratiques renouvelées de vente et de promotion, des jeux-concours aux prix conséquents, des lancements de romans-feuilletons à coups d'affiches illustrées et de fascicules gratuits, des compétitions sportives, des souscriptions publiques, des manifestations populaires ou de relations publiques. Ces opérations autopromotionnelles sont montées de toutes pièces par des quotidiens à bon marché qui cherchent à établir ou renforcer leur position commerciale et leur notoriété médiatique. Enchaînées et croisées, faisant parler d'elles dans et autour des espaces imprimé et social, montant en puissance médiatique et culturelle, elles font événement dans la presse de grande diffusion et deviennent événements dans le monde social. Leur normalisation, à un moment d'extension de la culture de masse, est travaillée par les journaux, qui se concurrencent, et leurs rédacteurs qui les grossissent dans leurs récits, en justifient l'existence et en exagèrent la portée. Chemin faisant, ces manifestations frappent les lecteurs et les populations qui s'habituent et participent à ces opérations, qui les intègrent dans leur façon de comprendre le monde et la société. À la fois dynamiques et matricielles, elles rythment le temps et structurent l'espace public en tant qu'événements.The emergence of the media event in 1900During the second half of the 19th century, Parisian and regional news papers of wide circulation, experimented and improved methods of promotion, such as games and contests offering expensive rewards to winners, serial stories advertized on illustrated posters and free booklets, sports competitions, public subscriptions, popular shows or public relations. These self-promoting operations started to be more and more important, and finally became events in the social world. Their standardisation, when mass-culture expanded, was polished by competing newspapers and their editors who put them forward, justified their existence and exaggerated their impact. Readers got used to these events; it became part of their apprehension of the world and society at large. Both dynamic and matrix, they brought rhythm to time and structure to the public space.
- « Faire » un événement naturel ? : L'orage du 13 juillet 1788 et la tempête de décembre 1999 - Anouchka Vasak p. 97-109 L'événement naturel, en l'occurrence météorologique, ne nous parvient que médiatement. En comparant l'orage du 13 juillet 1788 et la tempête de décembre 1999, on mesure, par-delà l'évidente singularité de chacun de ces événements, l'écart entre les médias qui les couvrent : mémoires de l'Académie des sciences (1788), presse souvent grand public mais recourant aux paroles d'« experts » (1999). Pourtant, on est surtout frappé par la parenté de discours, au sens linguistique, dans le traitement médiatique de ces deux événements. Cette parenté révèle leur fonction symbolique : l'intuition collective, dans l'un et l'autre cas, de la fin d'un monde s'exprime par le sentiment irrationnel d'une catastrophe imminente, éventuellement renforcé par une critique de la vacance du pouvoir.“To make” a natural event?
The natural event —in this instance weather caused catastrophe— only reaches us through the media. In comparing the storm of July 13th 1788 and the tempest of December 1999, one measures, beyond the obvious singularity of each event, the difference between the media that reported them: memoirs of the Academy of sciences (1788) and popular press quoting “experts”. One is mostly surprised, however, by the similarities in the reports, in the linguistic sense and in the media treatment of these two events. These similarities reveal their symbolic function: the collective intuition in both cases, of the approaching end of the world is expressed by the irrational foreboding feeling of an imminent catastrophe, sometimes reinforced by critics of the government's shortcomings. - Le match et la grève, ou les usages militants de l'événement (années 1970) - Christophe Granger p. 111-134 Les années 1970 forment en France un âge d'or des luttes. Dans les usines notamment, la décennie, marquée par une densification des conflits, inaugure de nouvelles manières de faire grève qui, aux formes plus traditionnelles, mêlent les journées « portes ouvertes », les sit-in, les visites médiatisées de l'usine occupée, les concerts ou encore les manifestations sportives. Destinées à faire de la grève un événement, ces opérations témoignent à leur façon de l'avènement d'une véritable morale événementielle de l'action collective, tout entière travaillée par le souci de se rendre maître des représentations publiques du conflit, et de faire de lui une cause, propre à toucher, à concerner ou à mobiliser « l'opinion ». Marquée par l'exemple accompli de Lip, la longue grève des métallos de l'usine Rateau à La Courneuve (janvier-avril 1974), menée sous l'aiguillon de la CGT, constitue un bon laboratoire. Les archives du conflit témoignent de l'horizon événementiel que les grévistes ont alors donné à la conduite de leur lutte. Dans et hors de l'usine, mobilisant les ressorts locaux et nationaux de l'indignation, ils multiplient les performances publiques : manifestations de rue, bien sûr, mais aussi conférences de presse, exposition, match de football et concert de soutien. Faisant en sorte qu'il se passe toujours quelque chose et prenant soin de conformer leur action aux sensibilités événementielles du moment, ils s'emploient à faire parler de la grève et à lui donner du prix sur le marché des faits médiatiques. La grève des Rateau invite ainsi l'historien sur les traces d'une culture militante de l'événement ; elle autorise aussi de dessiner les contours d'une séquence historique qui voit l'événement s'affirmer parmi les modes d'organisation privilégiés du monde social.The match and the strike, or the militant use of events (1970's)The 1970's, in France, is the golden age of struggles. In factories, notably, the decade, marked by the densification of conflicts, invents new ways to go on strike, mixing traditional ways with “open doors” days, sits-in, media-covered visits to occupied factories, concerts or even sports competitions. These operations, intended to make an event of the strike, bear witness of a true event-making approach to collective action, determined to have control over the representations if the conflict, in order to gain sympathy and support from the public opinion. The long metallurgists strike in the Rateau factory in La Courneuve (January-April 1974), is a good laboratory for research. The archives of the conflict reflect the strikers' determination to get media coverage for their struggle. Inside and outside the factory, they appeal to the people's capacity for indignation; they multiply public “performances”: street demonstrations, of course, but also press conferences, exhibitions, a football match and a support concert. Aware that something must always be happening, they strive to advertise the strike and to give value to it on the media market. The Rateau strike challenges the historian to study an activist culture of the event; it also draws the outlines of a historical sequence that sees the notion of event making assert itself as a privileged mode of organisation of society.
- Le Tribunal pénal international doit-il faire l'événement ? : Ou les paradoxes d'une Justice pour l'Histoire - Victoria Vanneau p. 135-153 C'est dans le contexte du conflit de l'ex-Yougoslavie dans les années 1990 que s'institue le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). Héritier des principes posés une cinquantaine d'années plus tôt aux procès de Nuremberg (1945), il vient incarner ce « rêve universaliste » d'une justice qui implique non plus seulement la communauté mondiale, mais bel et bien la communauté internationale. Sa mission est double : assurer la paix et œuvrer à la réconciliation des peuples par le droit. Ainsi né de la pression des médias et du trouble de l'opinion publique, hanté par le souvenir du génocide nazi, investi du principe kantien de publicité, le Tribunal porte, dans son existence même, l'exigence de rendre justice mais aussi de se rendre maître des usages publics et des effets symboliques que son activité produit. Autrement dit, pour mener à bien ses objectifs, juges et procureurs doivent dépasser le strict cadre de leurs prérogatives judiciaires pour donner une visibilité particulière à leur action démocratique. Le Tribunal s'entoure alors de moyens de communication importants (site Internet, retransmission des procès, etc.), destinés autant à informer qu'à sensibiliser et à se rendre présent sur les scènes internationale et nationale. En s'efforçant de faire événement au moyen d'un ambitieux programme de sensibilisation du public, en déployant une pédagogie événementielle pour forger un espace commun d'intellection et d'appropriation de son activité justicière, le TPIY a su s'imposer comme une « Justice pour l'Histoire », pesant ainsi sur le façonnement de la mémoire collective et, à partir d'elle, sur la reconstruction des identités nationales.Should the International Criminal Court do event?
The International Criminal Court for the former Yugoslavia (ICTY) has been established in the context of the conflict in 1990's. As heir to the principles laid down some fifty years earlier at the Nuremberg trials (1945), ICTY embodies the dream of universal justice that would involve the international community. Its mission is twofold: to enforce peace and work towards the reconciliation of the peoples via the law. Born from the pressure of the media and from the uneasiness of the public opinion, haunted by the memory of the Nazi genocide, invested by the Kantian principle of publicity, the ICTY bears the responsibility to see justice done, but must also have control over the public usages and the symbolic effects produced by its activity. In other words, to carry out its objectives, judges and prosecutors must exceed the scope of their judicial prerogatives to give special visibility to their democratic action. The ICTY uses important means of communication (website, broadcasting of trials), designed to inform as well as to raise awareness and to be present on the international and national scene. In seeking to event through an ambitious Outreach Program, deploying pedagogy of events to forge a common area of intellection and ownership of its vigilante activity, the ICTY has established itself as a “Justice for History”, thus weighing on the making of a collective memory and working for the reconstruction of national identities. - Voir l'événement : Roman graphique et narration historique - Christophe Granger p. 155-166 Appliqué par métier à faire parler les événements passés, l'historien, on le sait, a coutume de procéder avec du récit. Compagnon obstiné des mots, il n'est pas mal inspiré, toutefois, pour saisir tout l'impensé de l'écriture dont il fait profession, d'observer d'autres manières de représenter l'histoire. À ce jeu, le roman graphique offre de sérieuses pistes d'exploration. Quelle capacité ces bandes dessinées pour lecteurs adultes ont-elles de parler d'histoire ? Suivant quels procédés parviennent-elles à articuler une compréhension du passé qui n'est pas celle de l'historien ? Et plus encore, quel genre d'intelligibilité des événements historiques produisent-elles ? Attaché à retracer l'histoire d'un événement fondateur, celui, sombre et mythique, que constitue l'installation de la première colonie anglaise en Virginie (1607) et, à travers elle, la fondation des États-Unis, le Jamestown de Christopher Hittinger (2007) se prête à merveille à cet exercice de subversion des évidences. Loin de tout souci de réalisme, à partir de grandes planches noires et blanches, très denses, il fait travailler le récit, desserre le fil des causalités, fait une place à l'incertitude des hommes, insinue de l'aléa dans la grande récitation de l'événement et réintroduit le point de vue de l'absent. Bref, à partir du récit lui-même, il démythifie l'événement, explore les façons dont les anciens l'ont vu et, à partir des formes de narration qu'il se choisit, interroge les manières de faire exister les événements passés dans le présent.Seing the event
The historian's profession is to make past events “talk” through a narrative process. As a loyal friend of words, he is, however, well inspired to observe and study other means of representing History. In that view, the graphic novel offers exiting mines to explore. What capacity do these comic books for adults have to treat History? What methods do they use to articulate an understanding of the past so different from the historian's? And, above all, what sort of intelligibility of historical events do they produce? In trying to picture a founding event —dark and mythical— of the first English settlement in Virginia (1607) —and ultimately of the founding of the United States— Christopher Hittinger's “Jamestown” (2007) is a perfect example of subversion of evidence. With no regard to realism, with large sheets in dense black and white, he makes the narrative work, unties the threads of causalities, gives way to the uncertainty of men, introduces random within the main narrative of the event, and gives room to the point of view of the absents. In short, he demystifies the event, explores the different perceptions of the elders and, through self chosen forms of narrative, questions the means to weave past events into the present. - « L'événement, c'est ce qui advient à ce qui est advenu... » : Entretien avec Pierre Laborie - Pascale Goetschel, Christophe Granger p. 167-181
Lieux et ressources
- La Cinémathèque de Toulouse : Questions à Christophe Gauthier et Natacha Laurent - Évelyne Cohen, Pascale Goetschel p. 183-192
Regards croisés
- Annette et Jean-Jacques Becker, deux regards sur la Grande Guerre : Entretien réalisé par Évelyne Cohen et Pascale Goetschel, le 22 septembre 2011 - Évelyne Cohen, Pascale Goetschel p. 193-216
Trames
- Les objets du poison de l'antiquité à nos jours - Lydie Bodiou, Frédéric Chauvaud, Myriam Soria p. 217-240 Le poison et ses crimes fascinent, inquiètent et soulèvent quantité d'interrogations depuis les temps les plus anciens. Incarnés par des coupables dont les gestes et les intentions funestes ont monopolisé l'attention des observateurs, leurs mystères résident aussi dans les objets qui les entourent. Or l'histoire matérielle de l'empoisonnement tend à révéler que, même si chaque période se caractérise par un ensemble d'objets lui donnant une coloration unique et un sens particulier, les instruments du poison sont ceux qui peuplent le quotidien des empoisonneurs comme de leurs victimes. Si la banalité de l'objet empoisonné renforce le caractère sournois du crime, elle s'oppose aussi à l'originalité et à la puissance des objets qui le détectent ou le dénoncent, inscrits entre magie et sciences. Quelques détours historiques dans le territoire des choses empoisonnées, de l'Antiquité grecque à nos jours, montrent ainsi que la confrontation de la matière à la chair témoigne autrement des calculs qui précèdent et accompagnent l'empoisonnement, mais aussi des craintes et de la compréhension des dangers qui animent les victimes potentielles et leurs défenseurs.The objects of poison
Poison related crimes are fascinating, disturbing, and have raised a number of questions since the remotest times. The culprits and their evil intentions have been the observers' object of attention, but the objects of crime are also mysterious. The material history of poisoning tends to demonstrate that, even if each period of time is characterized by a group of objects that gives a colour and a particular meaning to it, the instruments of poison are as familiar to the criminal as to their victims. If the banality of the poisoned object reinforces the devious character of the crime, it is also confronted to the originality and the power of the objects that detect or denounce it, between magic and science. A few historical detours in the territory of poisoned things, from ancient Greece to today, show that that the confrontation between matter and flesh testifies of the calculations that precede and accompany the poisoning, but also of the fears and the understanding of the dangers suffered by potential victims and their defenders.
- Les objets du poison de l'antiquité à nos jours - Lydie Bodiou, Frédéric Chauvaud, Myriam Soria p. 217-240
Retours sur...
- La « Eisnerin » et les écrans démoniaques - Laurent Mannoni p. 241-251
Actualités
- Autour des expositions Tous cannibales, Vaudou et Dogon - Pascal Dibie p. 253-258
Grand entretien
- Dessinateur et caricaturiste : Entretien avec Plantu - Bertrand Tillier p. 259-268
Hors cadre
- Noisot, Rude et Napoléon : le pouvoir de résurrection de la sculpture - Bertrand Tillier p. 269-284