Contenu du sommaire : Affect et politique dans le cinéma sinophone après 1980
Revue | Monde Chinois |
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Numéro | no 57, 2019/1 |
Titre du numéro | Affect et politique dans le cinéma sinophone après 1980 |
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Dossier. Affect et politique dans le cinéma sinophone après 1980
- Éditorial : Affect et politique dans le cinéma sinophone après 1980 - Jean-Yves Heurtebise, Emmanuel Dubois de Prisque p. 5-8
- Introduction - Corrado Neri p. 9-12
- Rethinking the Sinophone - Victor Fan p. 13-24 Quelle est la pertinence du terme « sinophone » aujourd'hui ? Depuis le « Mouvement des parapluies » (26 ou 28 septembre-15 décembre 2014), les opinions et les tendances sociopolitiques des Hongkongais sont devenues de plus en plus polarisées. D'une part, le concept de la Grande Chine a été promulgué par le Parti communiste chinois (PCC) et des entreprises mondiales. D'autre part, ce concept a aliéné les jeunes localistes, désireux de trouver une identité individuelle différente de l'imaginaire « national » au sens large. Dans cet article, l'auteur affirme que le terme « sinophone » nécessite d'être repenser pour prendre en compte l'émergence d'une nouvelle relation affective entre les jeunes Hongkongais et la Chine, qui n'était pas anticipée au moment où le terme a été théorisé. Dans cet article, l'auteur discute d'abord des arguments de Shih. Il compare ensuite le concept de Shi de « sinophonie » à son propre concept d'extraterritorialité, qui fait référence à une position liminale dans laquelle des vies biopolitiques se retrouvent à la fois occupées et ostracisées par une autorité juridique, les positionnant dans une zone qui ne se trouve ni à l'intérieur ni à l'extérieur d'un territoire souverain. Enfin, il effectue une analyse du documentaire Tongzhoujie sanbaiyaoshi hao [Tungzaugaai saambaakjatsap hou ou 310 Tung Chau Street, 2016] de Jo Cheng et Wai Shing Lee afin de tester les frontières et les limites de ces termes.How relevant is the term ‘Sinophone' today? Ever since the Umbrella Movement (26 or 28 September–15 December 2014), Hong Kongers' sociopolitical opinions and affects became increasingly polarised. On the one hand, the Greater China concept was promulgated by the Communist Party of China (CPC) and global corporations. On the other hand, this very concept has alienated young localists, who are eager to individuate themselves from the larger national imagination. In this chapter, Fan argues that the term ‘Sinophone' requires active rewriting in response to the emergence of a new affective relationship between young Hong Kongers and China, which was unanticipated when the term was theorised in the early 2000s. In the chapter, Fan first engages himself in a conversation with Shih's arguments. He then compares her idea with his concept, extraterritoriality, which refers to a liminal position at which biopolitical lives find themselves at once occupied and ostracised by a juridical authority, thus rendering such a position neither inside nor outside a sovereign territory. Finally, he conducts an analysis of Jo Cheng and Wai Shing Lee's Tongzhoujie sanbaiyaoshi hao [Tungzaugaai saambaakjatsap hou or 310 Tung Chau Street, 2016] in order to test the edges and limitations of these terms.
- Country City: The Representation of Taipei in the Urban Comedies by Hou Hsiao-hsien and Chen Kun-how - Wenchi Lin p. 25-34 Cet essai porte sur le style rural singulier des comédies urbaines de Hou Hsiao-hsien et Chen Kun-how. Les six films dans lesquels ils ont collaboré au début des années 1980, Love on the Wave, Cute Girl, Spring in Autumn, Play While You Play, The Girl from the South and Six Is Company, n'adoptent pas la dichotomie commune entre monde rural et monde urbain pour représenter la ville de Taipei, le lieu principal où se déroulent leurs histoires d'amour. Au lieu de cela, ils montrent la ville comme une communauté organique pas essentiellement différente de la campagne. Cet essai analyse la manière dont les films choisissent soigneusement les chansons, les lieux, les enfants et les animaux pour associer la ville de Taipei aux éléments ruraux de la nature, du passé et de l'innocence. Il sera montré également que chaque film est accompagné de chansons dont les paroles évoquent l'amour, l'amitié et la nature (le vent, les nuages, la montagne et la mer) pour lier la réalité urbaine au monde rural. En outre, les vieilles maisons et les parcs sont souvent les principaux sites de la ville où l'histoire se déroule au lieu d'espaces spécifiquement urbains et modernes. Les films intègrent également animaux et enfants à l'intrigue et la mise en scène, même s'ils n'ont pas de fonctions narratives significatives. Cet article entend montrer que la ville de Taipei est présentée dans ces comédies urbaines sous la forme paradoxale d'une ville rurale.This essay focuses on the unique rural style of country-city in the urban comedies of Hou Hsiao-hsien and Chen Kun-how. The six films they collaborated at the beginning of the 1980s, Love on the Wave, Cute Girl, Spring in Autumn, Play While You Play, The Girl from the South and Six Is Company, do not adopt the common dichotomy of country vs. city to represent Taipei city, the main location where the love stories are set. Instead, they show it as an organic community not much different from the country. This essay analyzes how the films carefully choose songs, locations, children, and animals, to associate Taipei city with rural elements of nature, the past, and innocence. It will point out that each film is accompanied by more than a song whose lyrics contain elements about love, friendship as well as the nature, such as wind, cloud, mountain, and sea to associate the city with the country. Besides, old houses and parks are chosen to be the main locations in the city instead of modern urban spaces. The films also place animals and children in the plot and mise-en-scène even though they do not have significant narrative functions. The essay will argue that Taipei city is projected in these urban comedies as a country-city.
- La représentation de Taïwan dans les années quatre-vingt : étude de deux adaptations cinématographiques - Chih-ching Gesse p. 35-46 Les années quatre-vingt semblent être une période à la fois singulière et charnière dans l'évolution de la société taïwanaise et dans le développement du nationalisme des Taïwanais. C'est pourquoi nous nous intéressons à la représentation de Taiwan dans la littérature et dans le cinéma de la décennie. Notre travail porte sur quatre œuvres, deux adaptations cinématographiques de deux réalisateurs du Nouveau cinéma taïwanais, Graines de Sésame de Wan Ren (1984) et C'est ainsi que j'ai passé toute ma vie de Zhang Yi (1985), ainsi que leurs textes d'origine. Il s'agit d'œuvres qui ont connu un succès à la fois critique et commercial et dont les actions ont lieu pour l'essentiel à Taipei et s'étendent sur une période de trente ans, du début du règne des Nationalistes (KMT) à Taiwan jusqu'au début des années quatre-vingt. Les détails sur la vie quotidienne et la société taïwanaise y abondent. Notre étude nous permet de constater, d'une part, un intérêt général pour Taiwan, son histoire et les différentes facettes de sa société, ainsi qu'un sentiment d'appartenance partagé par les cinéastes, les romanciers et leur public dans les années quatre-vingt. D'autre part, il nous semble qu'il existe bien, à propos de la représentation de Taiwan, un espace de négociation entre le régime autoritaire au pouvoir et les milieux littéraires et artistiques avant la levée de la loi martiale en 1987 et l'avènement de l'ère démocratique.The 1980s were a singular moment in Taiwan's history, and a turning point in the evolution of Taiwanese society and in the development of Taiwanese nationalism. The changes that occurred in Taiwan during this decade are demonstrated by the way in which Taiwan was represented in literature and cinema during the period. This paper focuses on four such works, two novels, i.e. Youma caizi, by Liao Huiying and Xiafei zhi jia, by Xiao Sa, and films adaptations thereof made by two Taiwan New Cinema directors, Wan Ren (1984) and Zhang Yi (1985), respectively. All critically acclaimed and commercially successful, the four works generally take place in Taipei. They cover a period of thirty years, from the start of the KMT regime in Taiwan to the early 1980s, are rich in details of everyday lives and tell us a lot about Taiwanese society. The study of these works allows us to see the formation of a sense of national identity during this time in Taiwan across different social groups and strata. The works also show that, despite the existence of martial law, the government granted the artistic and cultural community a certain amount of latitude to engage in discussions about these issues.
- Les destinées politiques : individus et histoire dans le cinéma de Wan Jen - Matthieu Kolatte p. 47-58 Moins connu en Occident que ses confrères Hou Hsiao-hsien et Edward Yang, Wan Jen a joué un rôle important dans le développement de la nouvelle vague taiwanaise des années 1980. Son premier opus, le court métrage Le Goût des pommes contribua à forcer le barrage de la censure en provoquant un conflit entre les défenseurs de l'ordre ancien et ceux qui appelaient de leurs vœux un cinéma libéré des contraintes idéologiques. Son premier long métrage, Ah Fei, posa quant à lui un jalon important dans l'élaboration d'un langage filmique permettant d'explorer les liens entre l'individu et son environnement sociopolitique, un projet que l'on peut considérer comme constitutif de la nouvelle vague des années 1980. Plus politique que ses collègues, Wan s'attira ensuite les foudres de la censure. C'est donc dans les années 1990 seulement, à la faveur de la démocratisation de l'île, qu'il put déployer la réflexion qu'il entendait mener sur l'histoire de son pays.La filmographie de Wan apparaît marquée par une grande unité au niveau de ses préoccupations et peut être considérée comme particulièrement représentative de la manière dont la nouvelle vague et ses héritiers articulent les dimensions individuelle et collective de l'histoire à travers la représentation d'un vécu dédramatisé. C'est cet aspect de l'œuvre de Wan qui nous intéresse avant tout ici. À travers l'analyse de chacun de ses films, nous examinons dans cet article les éléments d'une réflexion portant sur le lien entre sensibilité individuelle et dimension politique de l'histoire ; nous éclairons également les procédés filmiques permettant à Wan de mettre en scène cette réflexion ; enfin, nous cherchons à déterminer la place que cette réflexion occupe dans le cinéma de l'île ainsi que son inscription dans le contexte taiwanais des années 1980 et 1990.In the West, Wan Jen never enjoyed the same attention as his colleagues Hou Hsiao-hsien and Edward Yang. Nevertheless, he did play a major role in the development of Taiwan New Cinema in the 1980s. His first movie, the short film entitled The Taste of Apples, helped knock down the wall of censorship by triggering a conflict between the followers of the old school and the proponents of a cinema freed from ideological constraints. His first feature film, Ah Fei, contributed greatly to the elaboration of a filmic language enabling to investigate the links between individuals and the sociopolitical context they live in, a project which can be considered central to Taiwan New Cinema. More vocal than his colleagues, Wan soon became the target of censorship. He had therefore to wait for the 1990s and for the political liberalization they brought forth in order to fully deploy his critical discourse on history.Wan's filmography strikes as thematically very coherent and illustrates particularly well the way New Cinema directors and their heirs combine the individual and the collective dimensions of history through a de-dramatized representation of personal experiences. It is this aspect of Wan's cinema that we explore in this article. Analyzing each of his movies separately, we examine how they bring reflection about the links between individuals and the political dimensions of history ; we also show by which cinematographic tools Wan is able to articulate this reflection ; finally, we try to situate his films in Taiwan cinema and within the context of the 1980s and the 1990s in Taiwan.
- Mother's Suffering and the Politics of Tears in Mama, Love Me One More Time - Wendy Xie p. 59-69 En juin 1990, à l'occasion du premier anniversaire de l'incident du 4 juin, un film taïwanais, Mama, Love Me One More Time, a commencé à être projeté dans des salles de cinéma de Chine continentale. De manière assez inattendue, ce mélodrame familial à petit budget est devenu un énorme succès commercial. Basé sur le récit The Mad Woman's 18 Years, un article de journal relatant les conflits émotionnels d'une femme abandonnée par son mari, le film constitue un exemple exceptionnel de la tradition chinoise du kuqing xi 苦情戲 (drames d'émotions amères). Se concentrant sur les épreuves et les tribulations de l'héroïne-victime, en particulier sur sa folie, cet essai examine le cadre mélodramatique du film et sa « stratégie des larmes ». Alors que le sentimentalisme du film a souvent été ridiculisé par des critiques élitistes, cet essai voit dans le croisement du personnel et du politique la réappropriation délibérée de thèmes universels, tels que l'amour maternel, la perte, le chagrin et le chagrin. En examinant les relations entre la structure affective du film et le contexte sociopolitique dominant en Chine continentale à la suite de l'incident du 4 juin, je soutiens que le film a été un espace de socialisation où les effets du silence sur le public en tant que sujets politiquement réprimés étaient temporairement suspendus. De plus, en mettant l'accent sur les souffrances de la mère, le film a mis en évidence les expériences et les émotions féminines, marquant ainsi le début d'une nouvelle ère où les femmes ont commencé à occuper une place centrale dans l'histoire culturelle chinoise.In June 1990, on the one-year anniversary of the June 4th Incident, a Taiwanese film Mama, Love Me One More Time, started screening in mainland Chinese theaters. Rather unexpectedly, this low budget family melodrama became a huge commercial success. Based on The Mad Woman's 18 Years, a newspaper story about the intensified emotional conflicts of a woman abandoned by her husband, the film presents an exceptional example of the Chinese kuqing xi 苦情戲 (dramas of bitter emotions) tradition. Focusing on the trials and tribulations of the victim-heroine, especially on her madness, this essay examines the film's melodramatic framework and its tactics of tears. While the sentimentalism of the film has often been ridiculed by elitist critics, this essay sees the intersection of the personal and the political in the film's deliberate re-appropriation of universal themes, such as maternal love, loss, grief and heartache. By investigating the interrelationship between the film's affective structure and mainland China's prevalent social-political milieu in the aftermath of the June 4th Incident, I argue that the film served as a space of socialization where the silencing effects on the audience as politically repressed subjects could be temporarily erased. In addition, by focusing on the mother's suffering, the film gave prominence to feminine experiences and emotions, thus signaled the beginning of a new era where women started occupying the center stage in Chinese cultural history.
- Portraits de femmes dans la Chine des réformes : une analyse des films de Li Yu et Ning Ying - Bérénice M. Reynaud p. 70-84 Cet article part du nouvel idéal féminin issu des discours dominants de la Chine des réformes tel qu'il a été relevé par Harriet Evans (Evans 1997) pour étudier quelles sont les nuances et les ruptures possibles de cet idéal au sein même de ces discours, plus précisément au cinéma. Nous nous intéresserons ainsi à trois films de deux réalisatrices : Fish and Elephant (2001), Lost in Beijing (2007) de Li Yu, et Perpetual Motion (2005) de Ning Ying. Ces films présentent tous des profils de femmes inhabituels pour l'industrie du cinéma chinois : des lesbiennes, des travailleuses migrantes et des 女强人 nüqiangren de l'élite culturelle et d'affaires de la capitale. Chacun à leur manière, ces personnages féminins viennent bousculer cet idéal féminin dans les thématiques respectivement du mariage, de la maternité et de l'adultère. A travers une analyse scénaristique et formelle, l'auteur avance que ces films relèvent d'un cinéma féministe, un cinéma de femmes tel que le définit Alison Butler : comme un cinéma mineur, qui se situe au sein d'une production dominante mais qui représente un groupe marginalisé, ici les femmes (Butler 2002).This paper starts from the new feminine ideal that comes from dominant discourses in the reform era in China, as noted by Harriet Evans (Evans 1997), in order to study what are the possible disruptions of this ideal within discourses, especially in cinema. Thus we will study three films by two women filmmakers : Fish and Elephant (2001), Lost in Beijing (2007) by Li Yu, and Perpetual Motion (2005) by Ning Ying. These films all portray unusual figures of women in the Chinese cinematic industry : lesbians, migrant workers, and 女强人 nüqiangren from the business and cultural elite in Beijing. Each in their own way, these female characters unsettle this feminine ideal in respectively the following themes : marriage, maternity and adultery. Through both a screenplay and formal analysis, the author argues that these films are part of a feminist cinema, a women's cinema as Alison Butler defines it : as a minor cinema that is produced within a dominant context but that stands for a marginalized group, here women (Butler 2002).
- Affect in Jia Zhangke's 24 City (2008) - Grace Y.S. Cheng, Louis Lo p. 85-103 Le documentaire 24 City (2008) de Jia Zhangke est constitué d'entretiens des personnes ayant vécu des événements difficiles, voire traumatisants. Ces expériences personnelles sont racontées dans des entretiens mis en scène, juxtaposés à certaines images : images de la démolition d'une grande usine, de travailleurs posant pour un portrait devant la caméra, ou de séquences du processus de démolition et de transformation d'une usine-ville (« Usine 420 ») en un complexe immobilier (dénommé « Ville 24 ») à Chengdu en Chine. Considérant que ces personnes interrogées sont ce qu'Ackbar Abbas appelle des sujets « socialistes posthumes », cet article examine la structure affective du film, en particulier les contenus affectifs condensés dans des éléments non narratifs tels que les intertitres.Jia Zhangke's documentary-like 24 City (2008) comprises interviews of personages who have gone through harsh or even traumatic events. Personal experiences are told in staged interviews juxtaposed with images of the demolition of a large factory, workers standing in front of the camera as if posing for portraits, and footages of the process of the demolition and transformation of a city-scale factory (Factory 420) to a real estate property development (24 City) in Chengdu, China. Recognizing these interviewees as what Ackbar Abbas terms “posthumous socialist” subjects, this paper examines the affective structure of the film, in particular the affective contents condensed in non-narrative elements such as intertitles.
- This Moment, Back then: retro imaginary, nostalgia and memories in contemporary Taiwan visual culture - Corrado Neri p. 104-116 De nombreuses œuvres récentes et réussies (tant du point de vue des recettes commerciales, que de la diffusion et de la visibilité internationale) de la culture populaire taïwanaise expriment une forme problématique de nostalgie. Cet article contextualisera et analysera deux films qui confirment la « tendance rétro » actuelle ; chacun d'entre eux se faisant l'écho d'une atmosphère nostalgique diffuse : Wo de shaonü shidai / Our Times (Chen, 2015) et Women de nashi cike쐠 / The Moment (Yang, 2016). Le premier est un film de fiction situé dans les années 1980 : accompagné d'un livre du même auteur publié la même année, il s'agit d'un documentaire célébrant les 50 ans du Festival du film Golden Horse. Tout en étant liés à différentes formes de imaginaire rétro, en obligeant les spectateurs à revenir au passé récent de Taiwan, en demandant au public de lire le « passé en nous » et en évaluant la « véracité de de la représentation de l'histoire », ces films relèvent d'une forme spécifique de pensée historiographique. Our Times et The Moment traduisent la puissante nostalgie induisant présente dans les films contemporains qui renforcent de façon spectaculaire la construction contemporaine d'un « être taïwanais » (une mémoire collective, une expérience commune) basée sur la mémoire personnelle, une expérience culturelle partagée et leur combinaison singulière dans la perception des spectateurs contemporains.Many recent, successful – in terms of selling, but also in terms of diffusion and international visibility – works of Taiwanese popular culture dwell in a problematic form of nostalgia. This paper will contextualise and analyse two films that confirm the “retro-trend” in 2015 and 2016, each of them resonating with a diffuse nostalgic atmosphere: Wo de shaonü shidai/Our Times (Chen, 2015) and Women de nashi cike쐠/The Moment (Yang, 2016). The former is a fiction film situated in the nighties; the latter – which is accompanied by a book by the same author published the same year – is a documentary celebrating the 50s anniversary of Golden Horse Film Festival. While engaging different forms of retro imaginary, compelling the spectators to go back to Taiwan recent past, asking audience to read the “past within us” and evaluating the representation's “truthfulness to history”, these films engage a specific form of historiographical thinking. Our Times and The Moment are powerful nostalgia inducing contemporary movies that enhance dramatically the contemporary construction of a “taiwanesness” (a collective memory, a common experience) based on personal memory and shared cultural experience – and their specific combination in the perception of contemporary spectators.
- Quatre interprétations de la trilogie amoureuse de Wong Kar Wai (le cinéma Sinophone après 1980 ou l'invention de l'Image-émotion) - Jean-Yves Heurtebise p. 117-131 Qu'est-ce qu'il y a de spécifique au cinéma sinophone après 1980 ? Afin de répondre à cette question, nous allons proposer quatre interprétations de la trilogie amoureuse de Wong Kar Wai en réponse à la question : qu'est-ce qu'une analyse philosophique d'un film ? L'affirmation de Deleuze selon laquelle « la philosophie est la discipline qui consiste à créer des concepts » ne peut avoir qu'une seule signification : le cinéma n'est pas la philosophie, les films n'impliquent pas la création de concepts. Étrangement, le nom de Deleuze a souvent été associé à l'idée opposée : les films sont philosophiques ; film et philosophie ne font qu'un. Dans cet article, nous proposerons quatre lectures de la « trilogie de l'amour » de Wong Kar-wai : sociologique, géopolitique, existentialiste (en référence aux concepts de Kierkegaard) et proprement philosophique (au sens deleuzien, en termes de catégorie sémiotique). Une lecture véritablement philosophique de la trilogie de l'amour de Wong Kar-wai demande de voir ses films comme la révélation cinématographique des catégories spatio-temporelles qui encadrent notre perception/interaction de/avec la « réalité ». En introduisant la catégorie de l'Image-émotion, nous soutiendrons que la trilogie de Wong Kar Wai produit de nouveaux « phatosignes » qui expriment la réalité de notre âge en lequel la valeur même de ce que nous avons n'est reconnue qu'au moment même où nous savons qu'elle est perdue.Deleuze's affirmation that “philosophy is the discipline that involves creating concepts” can have only one meaning : Cinema is not Philosophy, films are not involving the creation of concepts. Strangely, the name of Deleuze has been often associated with precisely the opposite idea : Films are philosophical ; film and philosophy are one and the same. In this paper, we will propose four readings of Wong Kar-wai's “trilogy of love” : sociological, geopolitical, “existentialist” (with reference to Kierkegaard's concepts) and properly philosophical. We will contend that in a truly philosophical reading of Wong Kar Wai's trilogy of love, his films should be understood as a cinematographic disclosing of the spatial-temporal categories framing our present perception of (and interaction with) “reality”. More precisely, introducing the category of the Image Emotion, we will contend that Wong Kar Wai's trilogy produce new “pathosigns” denoting this feeling of something lost in the very process through which it is given – a cinematographic category which expresses adequately our current condition in which the sheer value of what we have (the Earth) is acknowledged in the very moment we know it is lost.
Traduction
- Après les Lumières : la vie intellectuelle chinoise après 1989 - David Bartel p. 132-134
- Le Destin des Lumières : Vingt ans dans la sphère intellectuelle chinoise (1978-1998) - Xu Jilin p. 135-151
Varia
- La Chine, la France et la Première Guerre mondiale : du symbole à l'histoire - Xu Bo p. 152-160 La venue en France de 140 000 travailleurs chinois durant la Première Guerre mondiale pour participer à l'effort de guerre au côté des alliés et un épisode méconnu de l'histoire des relations franco-chinoises. Sa mémoire devrait cependant contribuer à permettre aux relations entre ces deux pays d'entrer dans une nouvelle ère plus fraternelle.The arrival in France of 140,000 Chinese workers during the First World War to participate in the war effort alongside the allies is an unknown episode in the history of Franco-Chinese relations. This memory, however, should help relations between these two countries to enter a new, more fraternal era.
- La société japonaise et la question du déclassement - Frédéric Burguière p. 161-172 La société japonaise est confrontée depuis plus de 25 ans à un environnement de non croissance. Si sa situation socio-économique reste favorablement orientée, le ressenti exprimé par la population est lui plutôt négatif sous une forme en apparence similaire à ce que l'on observe dans les pays occidentaux. Les situations sont effectivement comparables sur certains points, mais le « sentiment de déclassement » observé au Japon semble d'une nature particulière, ce qui a pour conséquence des réactions sociales et politiques très différentes de celles observées en Europe ou aux Etats-Unis.For more than 25 years, the Japanese society has been confronted with an environment of no growth. If its socio-economic situation remains favorably oriented, the feeling expressed by the population is rather negative in a form apparently similar to that observed in Western countries. The situations are indeed comparable on some points, but the “feeling of declining social status” observed in Japan seems of a particular nature, which results in social and political reactions very different from those observed in Europe or the United States.
- La Chine, la France et la Première Guerre mondiale : du symbole à l'histoire - Xu Bo p. 152-160
Notes de lecture
- Notes de lecture - p. 173-182
Cinéma
- Cinéma - Inès Cavalli p. 183-184