Contenu du sommaire : Marcel Reich-Ranicki - une critique littéraire populaire ?
Revue | Germanica |
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Numéro | no 65, 2019/2 |
Titre du numéro | Marcel Reich-Ranicki - une critique littéraire populaire ? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Marcel Reich-Ranicki - une critique littéraire populaire ? - Stephanie Baumann, Bénédicte Terrisse p. 7-16
- Marcel Reich-Ranicki et la Pologne : trajectoire et perceptions - Audrey Kichelewski p. 17-30 Cet article propose de revenir sur la trajectoire complexe de Marcel Reich-Ranicki entre la Pologne et l'Allemagne, depuis sa naissance à Włocławek en 1920 jusqu'à son émigration à Berlin à l'âge de 9 ans, son retour forcé vers la Pologne en 1938, sa survie dans et hors du ghetto de Varsovie, son engagement dans le parti communiste polonais et les fonctions qu'il occupa au sein de la police politique jusqu'à sa fuite en 1958. On s'intéressera ce faisant à la manière dont cet auteur a été perçu en Pologne, en particulier dans les années récentes où de nombreux articles sont revenus sur son parcours et ses années polonaises. Est-il vu davantage comme un homme de lettres, un traître, un Juif ou un Polonais ?This paper investigates the complex life path of German literary critic Marcel Reich-Ranicki, between Poland and West Germany, since his birth in Polish Włocławek in 1920, his emigration to Berlin at the age of 9, his forced return to Poland in 1938, his survival in and outside the Warsaw ghetto, his commitment in the Polish Communist Party and the secret police until his escape to West Germany in 1958. How does Reich-Ranicki tell about this part of his life, what does his narrative reveals about his feelings towards Poland and how is he perceived in Poland? Is he rather considered there as a literary man, a traitor, a Pole or a Jew?
- „Ein großartiger Entertainer !“ Kritik als Unterhaltung oder Unterhaltung als Kritik bei Marcel Reich-Ranicki - Caspar Battegay p. 31-46 Cette contribution part du principe que la notion de divertissement n'a pas le caractère unidi-mensionnel qui lui est souvent attribué dans les débats esthétiques. Au contraire, les cultural studies ont montré depuis longtemps que le divertissement moderne et populaire est un phénomène aux multiples facettes qui intègre la possibilité d'une réflexion créative et d'une autoréflexion tout autant qu'il autorise largement l'ironie et l'ambiguïté, sinon même les provoque. L'article montre dans quelle mesure Marcel Reich-Ranicki, en tant qu'auteur, performeur et personnage, se sert non seulement du divertissement dans sa critique mais possède également, en endossant le rôle de « divertisseur », un potentiel esthétique et critique qui se développe non pas contre le business du divertissement mais, au contraire, dans une relation performative avec celui-ci. Cette contribution étudie ce potentiel sous trois aspects : premièrement, sous l'angle de la littérature et de la critique littéraire dans le texte ; deuxièmement sous celui de la télévision en tant que média ; troisièmement à travers la représentation de l'Holocauste, c'est-à-dire la perception publique de Reich-Ranicki en tant que Juif survivant du génocide. Nous montrons, à ces trois niveaux, que la fonction critique de Reich-Ranicki est mise au service d'une société ouverte et libérale.This contribution assumes that the concept of entertainment by no means has the one-dimensionality often attributed to it in aesthetic debates. On the contrary, cultural studies have long since pointed out that modern and popular entertainment is a multifaceted phenomenon. It includes the possibility of creative reflection and self-reflection as well as allowing for, if not provoking, irony and ambiguity. The article shows to what extent Marcel Reich-Ranicki as author, performer and character not only uses entertainment in his critique, but also possesses an aesthetic and critical potential as an entertainer that unfolds not against the show business, but in his performance. The essay discusses this potential under three aspects: First, with regard to literature and literary criticism in the text; second, with regard to the medium of television; and third, with regard to the representation of the Holocaust, i.e. the popular perception of Reich-Ranicki as a Jewish survivor of the Holocaust. On these three levels, Reich-Ranicki's critique serves the liberal and open society.
- „Arno Schmidt ist ein Sonderfall“. Monitum einer Kritik Marcel Reich-Ranickis - André Kischel p. 47-64 Par quelques aspects, Marcel Reich-Ranicki et Arno Schmidt se ressemblaient beaucoup. Car bien qu'actifs en même temps dans le monde littéraire de la République fédérale, ils se sont ignorés tous les deux. Mises à part quelques évocations occasionnelles, le critique ne s'est exprimé qu'une seule fois de manière détaillée sur l'auteur. Dans l'essai qu'il consacre à Arno Schmidt, Reich-Ranicki fait le procès de l'écrivain. Dans cette critique se lit d'une part l'image que Reich-Ranicki se fait de Schmidt, d'autre part apparaissent aussi les méthodes et critères plus généraux de son travail de critique littéraire. La faible quantité de matériau présent permet ici un regard précis sur sa méthode de travail.In some aspects, Marcel Reich-Ranicki and Arno Schmidt were quite similar. For although both were active at the same time in the literature business of the Federal Republic of Germany, their work has not affected each other. Apart from occasional mentions, the critic has commented only once in detail about the author. In his Schmidt essay, Reich-Ranicki severely deals with the author. On the one hand, the Schmidt image of Reich-Ranicki can be read off, on the other hand, more general criteria and methods of his literary critical work become visible. In this case, the small amount of material present allows a close look at its operation.
- „Marcellus non papa ex cathedra“ Zwei Begegnungen zwischen Hans Blumenberg und Marcel Reich-Ranicki - Dorit Krusche p. 65-78 Cette contribution retrace deux conflits entre Hans Blumenberg et Marcel Reich-Ranicki qui n'ont jamais été rendus publics bien qu'ils n'aient pas été sans importance pour les deux auteurs concernés. À travers la controverse qui opposa le critique littéraire et le philosophe – souvent par l'intermédiaire de leur éditeur commun, Siegried Unseld – les personnalités de chacun apparaissent particulièrement clairement. En 1985, Hans Blumenberg avait écrit un commentaire moqueur en réaction à une argumenta-tion illogique publiée dans une recension de la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Marcel Reich-Ranicki refusa de publier cette lettre de lecteur pour des raisons formelles. Deux ans plus tard, les deux protagonistes croisèrent de nouveau le fer à propos d'un poème de Goethe pour lequel il existe plusieurs versions. La question qui se pose alors est de savoir si ou de quelle manière il faut faire accepter à l'opinion publique des connaissances scientifiques qui vont souvent à l'encontre de ses habitudes de lecture.The article traces two conflicts between Hans Blumenberg and Marcel Reich-Ranicki, which never came to the public's attention, but were not without significance for the participants. In the dispute between the literary critic and the philosopher – often mediated by the joint publisher Siegfried Unseld – the personalities of both appear particularly clearly. In 1985, Hans Blumenberg reacted with a mocking gloss to an illogical argumentation in a review published in the Frankfurter Allgemeine Zeitung. Marcel Reich-Ranicki refused to publish Blumenberg's letter to the editor for formal reasons. Two years later, the two had widely differing opinions about a poem by Goethe that existed in different versions. This raises the question of whether and how to make the public accept scientific knowledge that often goes against their reading habits.
- Peter Rühmkorf, Marcel Reich-Ranicki, eine Polemik. Über Literaturkritik und mediale Öffentlichkeit in der Nachwendezeit - Stephanie Baumann p. 79-96 Le texte intitulé Ich habe Lust, im weiten Feld de Peter Rühmkorf est au centre de cette con-tribution. Cet écrit se présente comme une réaction à la fameuse critique illustrée par la photo de la « une » du Spiegel devenue également célèbre, montrant Marcel Reich-Ranicki en train de déchirer le roman post-réunification de Günter Grass, Ein weites Feld (1995, Toute une histoire). Elle se déroule sur fond de débats identitaires, politiques et sociaux mis en branle à la fin des années 1980 avec la « querelle des historiens allemands ». La polémique sur le lien entre critique littéraire et interprétation politique traitée dans l'article s'avère exemplaire du fait que l'enjeu ne se limite pas ici à mettre en évidence les lignes de fracture de l'opinion publique politico-médiatique dans les années qui suivent la chute du Mur. Elle renvoie aussi au rôle essentiel joué par Marcel Reich-Ranicki dans la fabrication d'un espace de ce genre.The present article focuses on Peter Rühmkorf's text Ich habe Lust, im weiten Feld. The latter stands as a response to a famous critical piece illustrated with the now notoriously well-known cover of the newspaper Spiegel on which Marcel Reich-Ranicki is shown tearing in two Günter Grass's post-reunification novel Ein weites Feld (1995). This particular moment is set against the backdrop of heated debates around political, social and identity issues sparked towards the end of the 1980s by what is referred to as the “dispute of German historians”. The polemical relationship between literary critics and politics broached in my essay is a case in point inasmuch as that the events were not limited to drawing lines of divide in the public opinion or in politics and in the media during the period of time after the fall of the Berlin Wall, but this very same dispute actually has become a landmark manifestation of the part played by Marcel Reich-Ranicki in the construction and fostering of such a critical space in German society.
- Émotion et évaluation : le cas des adjectifs affectifs dans les critiques de Marcel Reich-Ranicki - Dominique Dias p. 97-110 Cette contribution propose de revenir sur l'affirmation selon laquelle la critique littéraire de Marcel Reich-Ranicki serait émotionnelle. Partant de l'étude des adjectifs affectifs, l'objectif est de montrer le rapport qui existe entre émotion et évaluation. L'approche se veut, dans un premier temps, lexicale afin de mieux comprendre ce que le sémantisme des adjectifs affectifs implique en termes d'évaluation. Puis nous proposons une analyse à l'échelle textuelle à partir du cas de l'expression de la surprise pour observer la façon dont les adjectifs affectifs peuvent structurer leur environnement textuel. Le corpus d'étude est constitué des textes rassemblés dans Lauter Verrisse (1970) et Lauter Lobreden (1985).This paper proposes to revisit the statement that Marcel Reich-Ranicki's book reviews are emotional. The starting point of the study is the analysis of emotional adjectives for a better understanding of the connection between emotion and evaluation. The approach is initially intended to be lexical in order to better understand what the semantic of affective adjectives implies in terms of evaluation. Then we propose a text analysis based on the case of the expression of surprise to observe how emotional adjectives can structure their textual environment. The corpus consists of the texts collected in Lauter Verrisse (1970) and Lauter Lobreden (1985).
- Der „Popstar des Literaturbetriebes“ ist tot. Marcel Reich-Ranicki in Nachruf-Texten deutschsprachiger Tages- und Wochenzeitungen - Ursula Klingenböck p. 111-126 Cette contribution analyse un corpus de nécrologies représentatif, parues dans des quotidiens et hebdomadaires de langue allemande au moment du décès de Marcel Reich-Ranicki. Nous nous intéresserons d'une part aux paramètres de la nécrologie relevant de la linguistique textuelle (accent mis sur le contenu, la taille, la construction et l'élocution) et de la pragmatique textuelle (construction d'une identité et d'une mémoire) dans le contexte médiatique dans lequel elle est située, et d'autre part à une forme de « populaire », telle qu'elle a été attribuée à Reich-Ranicki en raison de ses critiques littéraires journalistiques depuis les années 1960, et en particulier depuis ses apparitions télévisuelles lors du Literarisches Quartett. L'analyse se concentre, d'un côté, sur « le » populaire dans les nécrologies de Marcel Reich-Ranicki – du point de vue quantitatif et qualitatif, du point de vue des principaux procédés de sa construction ou mise en scène, ainsi que de l'ambivalence avec laquelle est jugé son rapport à la tradition de critique et de médiateur littéraire –, de l'autre, sur les nécrologies comme instrument de popularisation. La double adresse de cette sorte de texte qu'est la ‘nécrologie' est à ce titre particulièrement intéressante, car elle ne reconstitue pas seulement la popularité du défunt et de son activité de critique littéraire ainsi que de diffuseur et passeur de littérature, mais elle l'assure également pour l'avenir.The paper discusses a representative sample of obituaries on Marcel Reich-Ranicki in ger-man-speaking daily and weekly newspapers. On the one hand it inquires to textlinguistic (main field of attention, extent, structure and linguistic formulation) and -pragmatic (construction of identity and memory) parameters of the obituary in its situational and media context; on the other hand it is interested in the phenomenon of ‚the‘ popular which was attributed to Reich-Ranicki due to his critical reviews in newspapers since the 1960ies and especially to his subsequent television appearance in Das literarische Quartett. The survey focuses both on the popular in obituaries on Marcel Reich-Ranicki – it describes its quantitative and qualitative features, the techniques of its construction/staging and the ambivalence of its valuation in the tradition of literary critics and -transfer – and on obituaries as an instrument of popularization. A deep interest is directed towards the twofold orientation of the obituary, which not only reconstructs a broad popular appeal for the deceased and his literary critics, his practices of distribution and conveyance, but also constitutes his popularity for the future.
- Heinrich Heine, le génie de l'amour-haine - Marcel Reich Ranicki p. 127-138
- « Heinrich Heine, le génie de l'amour-haine », une critique révélatrice. Réflexions autour d'une constellation textuelle et d'un mode de lecture - Bénédicte Terrisse p. 139-144
- Literaturkritik als Denkraum. Ijoma Mangold im Gespräch mit Stephanie Baumann und Bénédicte Terrisse - Stephanie Baumann, Bénédicte Terrise p. 147-160
Actualité littéraire
- « Un incorruptible lanceur d'alerte » : Günter Kunert (1929-2019) - Martine Benoit p. 161-168
(Re)lectures
- La crise économique au théâtre. L'esthétique du transitoire et le néoréalisme dramatique (Zeller, Marks, Berthiaume) - Hanna Klessinger p. 169-178
Comptes rendus de lecture
- Alexander Verlag, She She Pop, Sich fremd werden. Beiträge zu einer Poetik der Performance - Florence Baillet p. 179-183
- Benoît Ellerbach, L'Arabie contée aux Allemands. Fictions interculturelles chez Rafik Schami, Würzburg, Königshausen und Neumann - Christine Meyer p. 183-187
- Marie-Claire Méry, Rudolf Kassner et l'art de l'essai à Vienne (1900-1906) - Françoise Willmann p. 187-189
- Norbert Waszek (Hrsg.), G. W. F. Hegel und Hermann Cohen. Wege zur Versöhnung - Andrée Lerousseau p. 189-192