Contenu du sommaire : La religion sous le regard du tiers
Revue | Questions de communication |
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Numéro | no 37, 2020 |
Titre du numéro | La religion sous le regard du tiers |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier. La religion sous le regard du tiers
- Le contact et l'écart : penser la religion sous le regard du tiers - David Douyère, Philippe Gonzalez p. 7-62
- Voir la religion dans les Alpes à la fin du Moyen Âge : peintures murales et altérités culturelles - Marianne Cailloux p. 63-88 L'article traite de l'image en tant qu'espace d'expression des identités du religieux à la fin du Moyen Âge. Il analyse les réceptions et comment celles-ci montrent les ambiguïtés du fait religieux, entre une médiation que l'Église tente de maîtriser et la manifestation de croyances et pratiques divergentes et de discours susceptibles de tensions. L'étude s'appuie sur un corpus de peintures murales religieuses alpines, autour de 1 500. Favorable aux échanges culturels, la région entre Briançon (dans la France actuelle) et Suse (dans l'Italie actuelle) est le terrain d'une cohabitation de plusieurs groupes religieux. La présence des vaudois, notamment, entraîne une médiation particulière à travers l'image, en ce qu'elle manifeste des pratiques dévotionnelles hybrides. Nous verrons quelles sont les modalités de cette acculturation et comment le regard de l'autre sur les images documente des identités variées autour du religieux.This paper deals with the image as a space for the expression of religious identities. It analyzes its receptions, and how they manifest the ambiguities of the religious fact, caught between the mediation the Church tries to master and the alternative beliefs and practices, which can induce tensions. This study relies on a corpus of alpine religious wall paintings at the turn of the 15th century. The area between Briançon (France) and Suse (Italy) is favorable to cultural exchanges and is the scene of the cohabitation of several religious groups. The presence of the Waldensians brings indeed a specific mediation through images, which demonstrate hybrid devotional practices. We will see how are the modalities of this acculturation and how the gaze of otherness upon those images shows multiple identities around the religious.
- Vers une sociologie de la convocation : Ethnographier un quartier juif orthodoxe de Los Angeles - Iddo Tavory, Philippe Gonzalez p. 89-114 La communauté juive orthodoxe du quartier de Beverly-La Brea s'épanouit à quelques pâtés de maisons de la vie nocturne de West Hollywood (Los Angeles, Californie, États-Unis), à côté des images, des sons et des odeurs « impurs » qu'elle rencontre chaque jour. Mais le maintien de cette forme de vie ne repose pas seulement sur les décisions morales des acteurs sociaux : être orthodoxe, c'est se voir constamment convoqué à un type d'existence. Cette convocation transite par les sollicitations incessantes des organisations, des invitations à la prière collective, des hochements de tête d'étrangers, des bouffées de nourriture non casher flottant dans la rue ou, plus rarement, des remarques antisémites. Cette ethnographie restitue comment ces acteurs se retrouvent sans cesse convoqués dans leur vie sociale en tant que juifs orthodoxes, l'épaisseur de cet engagement communautaire pouvant aussi être vécue comme un fardeau. Cette plongée au sein d'une communauté particulière est l'occasion de développer une théorie de la convocation, offrant une meilleure compréhension de la dynamique des mondes sociaux, de l'identité, de l'interaction et du soi, non seulement à Beverly-La Brea, mais dans la société en général.The Orthodox Jewish community in the Beverly-La Brea neighborhood thrives just a few blocks from the nightlife of West Hollywood, alongside the impure images, sounds and smells it encounters every day. But maintaining this form of life is not only based on the moral decisions of social actors: to be Orthodox is to be constantly called into being. This summons comes through the incessant solicitations of organizations, invitations to collective prayer, nods of strangers, whiffs of non-kosher food floating in the street or, more rarely, Anti-Semitic remarks. This ethnography captures how these actors find themselves constantly summoned into their social life as Orthodox Jews, the thickness of this community involvement can also be experienced as a burden. This immersion in a particular community is an opportunity to develop a theory of summoning, offering a better understanding of the dynamics of social worlds, identity, interaction and self, not only in Beverly-La Brea, but in society at large.
- Qamis ou kasaya… « ce qui faut sous nos climats » ? : Tiers regards et regards tiers sur des costumes traditionnels musulmans et bouddhistes en France - Lionel Obadia p. 115-141 Fondé sur des observations dans les espaces publics des grandes villes françaises, l'article examine les usages et significations de deux vêtements masculins portés au sein de deux catégories de minorités ethno-religieuses installées en France : le qamis, cette longue tunique que portent ceux qui entendent signaler leur appartenance à l'islam et leur observance de ses normes, et le kasaya, cette robe monastique dont se parent ceux qui se comptent dans les rangs du bouddhisme. Ces deux vêtements suscitent des réactions différenciées, révélatrices de représentations opposées de l'Orient dans l'imaginaire collectif en France.Based on first-hand observations conducted in the ambulatory spaces of large cities of France, this paper examines the uses and meanings associated to two masculine costumes worn by two different categories of ethnic and religious minorities established in France. The first one is the qamis, a long shirt worn by those who want to disclose their belonging to Islam. The second one is the kasaya, a monastic robe in which are wrapped those who range among the adherents of Buddhism. These two costumes generate somewhat different reactions, and reveal opposed representations of the East (the Orient) in the collective imagination in France.
- La visibilité des organisations protestantes en Chine sous le regard de l'État-parti - Juliette Duléry p. 143-166 Fondé sur des enquêtes de terrain effectuées dans plusieurs villes (Pékin, Shenzhen et Changsha), l'article analyse les stratégies de visibilité des organisations protestantes chinoises. Dans un contexte où l'État-parti cherche souvent à effacer toute trace du protestantisme au sein de l'espace public, les Églises – enregistrées auprès des autorités ou souterraines – mettent elles-mêmes en scène leur disparition en proclamant leur adhésion au discours officiel. Cette allégeance de façade les conduit à sécuriser leurs activités religieuses qui se déplacent ainsi dans des sphères peu visibles, communautaires ou privées. L'analyse porte d'abord sur la visibilité de l'État dans l'espace protestant, puis, dans les deux parties suivantes, sur l'adaptation des Églises aux restrictions politiques et leurs réactions face au durcissement des directives religieuses de 2017.This article analyzes the different tactics of visibility used by protestant organizations in China, on fieldworks carried in several cities (Beijing, Shenzhen and Changsha). In a context where the Party-State often aims at erasing Protestantism from the public sphere, registered or underground churches most of the time stage their disappearance from the public sphere. By proclaiming their allegiance to the official transcript, these congregations secure their religious activities, which are relocated to the non-visible private and communitarian realms. This article first examines the overarching presence of the State in the protestant sphere; and then focuses on the adaptation of churches to these political constraints and their reactions to the new 2017 religious regulations.
- La diffusion de "Persepolis" en Tunisie comme blasphème : Comment apaiser une polémique qui exclut tout « tiers garant » ? - Smaïn Laacher, Cédric Terzi p. 167-192 Les cas de blasphème constituent des polémiques prenant forme quand les défenseurs d'une sacralité religieuse s'opposent à ceux des libertés publiques. Les « tiers » y sont pris à partie, appelés à la fois à reconnaître le caractère « religieux » de l'événement dénoncé comme sacrilège et à statuer sur la légitimité – ou non – de la profanation dénoncée. Cette dynamique est analysée à la lumière des protestations soulevées à la suite de la diffusion du film d'animation Persepolis (Satrapi et Paronnaud, 2007) par une chaîne de télévision tunisienne. On observe que des institutions étrangères – françaises et iraniennes – s'opposent d'emblée autour de l'enjeu religieux de la représentation physique de Dieu. Cette polémique finit par s'imposer en Tunisie au cours d'une procédure pénale qui, loin d'instituer la figure d'un « tiers garant », deviendra l'arène d'un affrontement entre deux conceptions antagonistes de l'identité tunisienne.Cases of blasphemy arise when defenders of any religious sacredness confront those of public liberties. “Third parties” cannot stay apart from such polemics. They are required to enrol, and both to recognize the “religious” character of the representation or event denounced as sacrilegious, and to rule on the legitimacy of the alleged profanation. This article recounts such a process basing on the protests that raised after a Tunisian television channel broadcasted the animation film Persepolis. Foreign institutions, French and Iranian, immediately focussed on the religious issue of God's figuration, starting a polemic that will finally polarize the Tunisian community during criminal proceedings. The trial, far from establishing a “third party guarantor”, will become the arena for a confrontation between two antagonistic conceptions of the Tunisian identity.
- Les embarras de la parole religieuse - Joan Stavo-Debauge p. 193-216 Dans cet article, je m'intéresse aux embarras de la parole religieuse, distingués selon trois axes (énonciation/réception, christianisme/islam, versions libérale/conservatrice de la foi), sur deux terrains (l'espace discursif des théories post-séculières et des émissions radiophoniques). Je montre que les embarras ne sont pas également distribués entre le pôle de l'énonciation et celui la réception quand on prend en compte l'axe qui distingue le fondamentalisme du modernisme : les paroles les plus conservatrices et dogmatiques sont loin d'être les plus embarrassées, même si elles sont les plus embarrassantes (du moins pour un démocrate scientifiquement éduqué), et l'islam n'est aussi pas le plus mal logé.In this article, I look at the embarrassments of the religious speech, distinguished along three axes (enunciation/reception, Christianity/Islam, liberal version/conservative version of the faith) and on two fields (the discursive space of post-secular theories and radio broadcasts). I show that the embarrassments are not equally distributed between the pole of enunciation and the pole of reception when we take into account the axis that distinguishes fundamentalism from modernism: the most conservative and dogmatic utterances are far from being the most embarrassed, even if they are the most embarrassing (at least for a scientifically educated democrat) and Islam is also not the most badly lodged.
Échanges
- Le chercheur et le discours de ses objets - Wolf Feuerhahn p. 217-234 Le chercheur en sciences humaines et sociales n'arrive jamais en terrain vierge. Ses objets (acteurs, institutions) se nomment, se qualifient, se pensent avant qu'il ne s'intéresse à eux. Que doit-il faire dès lors ? Considérer ces discours comme un obstacle épistémologique ? Cela supposerait de postuler que notre propre théorie de la connaissance scientifique échappe elle-même à l'histoire. Je souhaite au contraire les prendre au sérieux et émettre, sur la base de travaux antérieurs, trois suggestions : enquêter sur les noms donnés aux savoirs par les acteurs ; sur l'historiographie qu'ils produisent ; et, enfin, sur la pratique de l'historicisation elle-même. Ces propositions réflexives ne prétendent pas dégager un sol premier fondateur et anhistorique permettant d'asseoir les sciences humaines et sociales pour l'éternité, mais assumer leur historicité et à ce titre aussi celle de ces lignes.The social sciences and humanities researcher never arrives into virgin territory. His objects (actors, institutions) name, describe and define themselves before he is interested in them. What should he do then? Consider these discourses as epistemological obstacles? This would imply that his own theory of scientific knowledge escapes history. On the contrary, I intend to take them seriously and, on the basis of previous research, make three suggestions: to investigate the names given by the actors to the knowlege they produce; the historiography produced by the actors; and finally the practice of historicisation itself. These reflexive proposals do not claim to give rise to a founding and ahistorical ground that would allow the human and social sciences to be established for eternity, but to recognize their historicity, which also applies to this particular article.
- Le chercheur et le discours de ses objets - Wolf Feuerhahn p. 217-234
Notes de recherche
- L'explication entraîne-t-elle l'excuse ? : Rapports du discours sociologique au champ axiologique - Hervé Glevarec p. 235-252 L'explication des actions d'un individu excuse-t-elle les actes ainsi expliqués ? Pour répondre à cette interrogation, d'une part, il convient d'expliciter ce que signifie expliquer. La distinction ancienne entre expliquer et comprendre une action humaine est pour cela heuristique. D'autre part, il faut montrer le rapport de ces deux opérations épistémiques à la responsabilité, aux règles morales et aux lois. Explication et règle morale sont hétérogènes et indifférentes, tandis que compréhension et règle morale sont contiguës du fait que la compréhension se mène sous la description d'une règle connue et partagée par l'acteur et l'analyste (le sociologue dans le cas examiné). Il s'avère que, si l'explication est fondamentalement indifférente à la règle morale, la compréhension inclut, elle, ce rapport sans pour autant exclure l'excuse quand il y a adhésion au discours rapporté de l'acteur. La vertu de la réflexion est de pousser chaque sociologue à expliciter la posture épistémologique qu'il adopte dans sa pratique de la discipline.Does the explanation of an individual's actions justify the explained acts? To answer this question, on the one hand, it is necessary to clarify what an ‘explanation' means. The old distinction between explaining and understanding human action is heuristic. On the other hand, it is necessary to show the relationship of these two ways of analyzing responsibility, moral rules and laws. Explanation and moral rule are heterogeneous while understanding and moral rule are contiguous because understanding is acted under a description of a rule known and shared by people and sociologists alike. It turns out that, if the explanation is fundamentally indifferent to the moral rule, understanding includes justification without excluding the excuse when there is agreement to the people's reported speech. This article develops a reflection sparked by the French Prime Minister, M. Valls, when he stated in 2016 that sociological explanations excuse people's actions. The virtue of reflection caused by this reflection is to urge each sociologist to explain the epistemological posture he adopts in his practice of the discipline.
- Des dispositifs de captation de la colère ? : Le cas des fury rooms à l'heure de la marchandisation des émotions - Pauline Hachette p. 253-273 Les fury rooms offrent au client un lieu pour détruire divers objets afin d'évacuer ses frustrations ou son stress. L'étude analyse ce dispositif et le discours qui l'accompagne pour interroger, dans un contexte de marchandisation des affects, la spécificité de cet îlot d'expérience et affects négatifs ici captés. À partir de là, il s'agit de questionner, en termes sémiotiques, la dialectique entre programmation et ajustement potentiellement à l'œuvre dans ce dispositif, afin de comprendre comment l'expérience mise en avant dans ce cadre peut tendre vers diverses formes d'aliénation. En effet, tant la scénarisation émotionnelle que le dispositif de traitement ex situ d'affects perturbateurs et la modélisation du rapport à l'environnement auxquels invitent les fury rooms semblent contredire l'expérience promue, conduisant à redéfinir les promesses de subjectivisation liées à celle-ci et à interroger la normalisation émotionnelle et comportementale du geste de destruction.Fury rooms offer the client a place to destroy various objects in order to relieve frustration or stress. Our study analyzes this device and the discourse that accompanies it in order to question, in a context of commodification of affects, the specificity of this island of experience and the negative affects captured here. The aim is then to question, in the terms of the semiotics of practices, the dialectic between programming and potential adjustment in this system, in order to understand how the experience put forward in this framework can tend towards various forms of alienation representative of affective capitalism. The emotional scriptwriting and the extraction of affects from their original context but also the modelling of the relationship to the environment that takes place there seem to contradict the promoted experience, leading to a redefinition of the promises of subjectivisation linked to this experience and to question the emotional and behavioral normalization of the gesture of destruction.
- Socio-sémiotique des représentations genrées d'un dispositif médiatique particulier : les retransmissions de compétitions sportives - Natacha Lapeyroux p. 275-296 L'article propose un cadre méthodologique pour effectuer une analyse socio-sémiotique des représentations genrées dans le dispositif médiatique des retransmissions de compétitions sportives (à partir des outils théoriques et méthodologiques offerts par les queer studies). Il analyse les représentations des sportives de haut niveau au sein des retransmissions de compétitions sportives à l'intersection des rapports sociaux de genre, ethnoraciaux, de sexualités et de « l'identité nationale ».This article proposes a methodological framework to carry out a socio-semiotical analysis of gender representations within a particular apparatus TV sport broadcasting (Lochard, 2010) (using the theoretical and methodological tools offered by Queer studies). It analyzes the representations of female athletes in TV sport broadcasting at the intersection of social relations of gender, race, sexuality and “national identity”.
- La réactivation d'un événement passé : outil d'affirmation territoriale et politique en contexte d'évolution institutionnelle : Le cas du 50`supbe`/supb anniversaire des Jeux olympiques de Grenoble - Marie Lyne Mangilli Doucé p. 297-316 En prenant pour appui la célébration du cinquantenaire des Jeux olympiques de Grenoble qui s'est déroulée en 2018, l'article montre en quoi et comment la réactivation d'un événement passé se voit instrumentalisée comme réponse à la nécessité pour les collectivités de naturaliser leurs compétences en contexte d'incertitude législative. En effet, qualifiées d'« au milieu du gué » (Duranthon, 2017), les dernières reformes de réorganisation de l'administration territoriale française laissent les différents échelons que sont les communes, les départements, les régions, mais aussi les intercommunalités dans l'incertitude quant à l'étendue de leur compétence à venir notamment. Après une présentation du contexte et du cadre théorique dans lequel s'inscrit cette étude, l'autrice explore comment la célébration mémorielle devient instrument d'affirmation politique et territoriale pour ensuite démontrer comment s'opère un effacement du passé au profit des seuls enjeux présents. La dernière partie propose l'expression anamnèse naturalisante pour définir cet agencement de faits communicationnels par lequel un passé se voit soudainement réactivé et capitalisé au profit, ici, de la justification d'un leadership territorial et politique présent et à venir.Taking as support the celebration of the fiftieth anniversary of the Olympic Games in Grenoble, which took place in 2018, the article proposes to explore, in what way and how, the reactivation of a past event is instrumentalized, as a response to the need for municipalities to naturalize their skills in the context of legislative uncertainty. After having presented the theoretical framework, and the context in which this study is inscribed, the article proposes to explore how event celebration becomes an instrument of political and territorial affirmation and to demonstrate how an erasure of the past in favor of only present issues. The third part proposes the expression “naturalizing anamnesis” to define this assemblage of communicative facts by which a past is suddenly reactivated and capitalized in favor of, here, the justification of a current territorial and political leadership and its future.
- Les petites mains des « grands » débatteurs : La programmation des universitaires en sciences humaines et sociales sur les plateaux de "C dans l'air" et de "Ce soir (ou jamais !)" - Claire Ruffio p. 317-334 Qui décide d'inviter des universitaires en sciences humaines et sociales à participer à une émission télévisée de débat d'actualité ? Comment sont-ils identifiés, sélectionnés et contactés ? L'analyse du rôle et des pratiques professionnelles des journalistes-programmatrices chargées de solliciter les chercheurs en SHS des émissions télévisées de débat C dans l'air et Ce soir (ou jamais !) permet de mettre au jour le poids des contraintes commerciales et des rapports hiérarchiques sur la production de ces plateaux. Essentielle à la bonne réalisation de l'émission, l'activité des programmatrices constitue un journalisme doublement dominé au sein du champ médiatique, confié à des femmes en raison de sa forte composante logistique et de sa position subalterne au sein de la rédaction.Who decides to invite scholars specialized in the humanities and social sciences to be part of a TV talk show? How are they identified, selected and contacted? An analysis of the role and professional practices of the journalists specifically in charge of soliciting SHS scientists for the debate programmes C dans l'air and Ce soir (ou jamais !) reveals the weight of commercial pressures and hierarchical relationships on the production of these TV shows. Essential to the successful production of the programme, the role of women programmers constitutes a form of journalism that is doubly dominated within the media field, entrusted to women because of its strong logistical component and its subordinate position within the editorial staff.
- L'explication entraîne-t-elle l'excuse ? : Rapports du discours sociologique au champ axiologique - Hervé Glevarec p. 235-252
En VO
- Présentation - Angeliki Monnier p. 335-336
- What Makes a Reporter Human? : A Research Agenda for Augmented Journalism - Carl-Gustav Lindén p. 337-351 L'objectif de cet article est d'établir un programme de recherche, appelé « journalisme augmenté », pour explorer l'avenir du journalisme dans le contexte de l'intelligence artificielle (IA). L'article cherche à déterminer les composantes épistémiques essentielles de ce nouveau paradigme. Le « journalisme augmenté » met l'accent sur l'interaction homme-machine en posant la question fondamentale « Qu'est-ce qui fait qu'un journaliste est humain » ? Une approche interdisciplinaire des capacités humaines est nécessaire, puisant non seulement dans les sciences sociales, en particulier la sociologie, les études journalistiques et la psychologie, mais aussi dans les compétences techniques (informatique et user design), ainsi que dans le contexte opérationnel (économie des médias et études de gestion). La thèse présentée ici est le fruit d'années de recherche sur la pratique du journalisme, les outils d'IA pour les actualités, les modèles économiques des médias d'information et les travaux de la Silicon Valley. La logique sous-jacente est que l'avenir du journalisme réside dans sa capacité à créer de la valeur pour les différents secteurs des parties prenantes, des consommateurs aux décideurs politiques. Le projet explorera ce qui fait la valeur du travail des journalistes, la partie propre aux capacités « humaines » et la manière dont l'AI peut améliorer le travail d'information afin que celui-ci reste pertinent, mais efficace.The objective of this article is to lay out a research agenda, named “Augmented Journalism”, to explore the future of news journalism in the context of Artificial Intelligence (AI). The article will determine what the critical epistemic components of this novel paradigm would be. “Augmented journalism” puts the focus on human-machine interaction, and the main question that arises from this context is “What makes a reporter human?” A broad intradisciplinary approach to human capabilities is needed, not just in the social sciences, in particular sociology, journalism studies, and psychology, but also in technical skills (computer science and user design), as well as in the operational context (media economics and management studies). The vision presented here stems from years of research into journalism practice, AI tools for news, news media business models and the Silicon Valley mindset. The underlying logic is that the future of journalism lies in its capacity to create value for the various sectors of stakeholders, from consumers to policy makers. The project will explore what makes the work of journalists valuable, what part consists of “human” capabilities, and how news work can be augmented with AI in order to stay relevant, but efficient.
Focus
- Sur "La Religion industrielle. Monastère, manufacture, usine. Une généalogie de l'entreprise" de Pierre Musso - Pierre Mœglin p. 353-369 Qu'est-ce que l'industrie ? À cette question l'ouvrage de Pierre Musso apporte une réponse originale et intéressante : pour lui, l'industrie est une religion. Et cette religion, qui associe le mystère de l'incarnation des idées dans les choses et la rationalité de la science calculatrice, est née bien avant l'apparition des réalisations industrielles elles-mêmes. L'état d'esprit industriel, ce qu'il appelle « l'industriation », se forge et se propage, en effet, dès qu'une organisation sociale, quelle qu'elle soit, se pense ou est pensée en tant que système productif. D'une grande utilité pour les spécialistes des enjeux communicationnels du phénomène religieux, pour les théoriciens des industries culturelles et créatives, pour les chercheurs en communication organisationnelle et pour ceux qui, plus généralement, travaillent en sciences humaines et sociales, cette thèse présente néanmoins une faiblesse : elle oublie que, si cohérente soit-elle, la religion industrielle n'a pas forcément l'influence qui lui est prêtée sur les pratiques réelles. C'est pourquoi nous suggérons que l'histoire de cette religion devrait être complétée par la contre-histoire de ses opposants.What is Industry? Pierre Musso's book provides an original and interesting answer to this question: for him, Industry is a religion, which combines the mystery of Incarnation (of ideas in things) and the rationality of calculating Science, was born long before industrial achievements themselves. Thinking Industry, what he calls industriation, is forged and propagated, in fact, as soon as any social organization, whatever it may be, thinks or is thought of as a productive system. This thesis is very useful for specialists in the communication issues of religious phenomena, for theorists of cultural and creative industries, for researchers in organizational communication and for those who, more generally, work in the human and social sciences. However, it has one weakness: it forgets that, however coherent it may be, industrial religion does not necessarily have the influence it is believed to have on actual practices. This is why we suggest that this history of the idea of industry should be supplemented by the counter-history of the opponents of this idea.
- Sur "L'Artiste, l'institution et le marché" de Raymonde Moulin - Alain Quemin, Clara Lévy p. 371-384 L'Artiste, l'institution et le marché constitue l'ouvrage le plus abouti de la sociologue de l'art française Raymonde Moulin. Paru au début des années 1990, il s'intéresse à la constitution de la valeur de l'art, qui se construit à l'articulation du marché et du musée. Cette analyse repose sur une multitude de données empiriques de première et seconde mains concernant principalement le domaine des arts visuels en France dans les années 1980. Ces données sont examinées avec une grande finesse, en dehors de tout dogmatisme conceptuel et théorique. C'est ce qui a permis à l'ouvrage de bénéficier d'une réception très positive au moment de sa parution, tout particulièrement dans le monde de l'art, mais qui s'est encore élargie au fil des décennies jusqu'à en faire un classique incontournable de la sociologie de l'art.L'Artiste, l'institution et le marché (unpublished in English version) represents the most accomplished book of French sociologist Raymonde Moulin. Published at the beginning of the 1990's, it analyses the creation of art value, at the junction of institutions and of the market. The purpose is based on multiple first hand and second hands empirical data that deal mostly with the French context of the 1980's. The data is very acutely analyzed, far beyond any conceptual or theoretical dogmatism. This trait largely explains why the book was so acclaimed when it was initially published, especially in the art world and also why, along time, it became a classic in the sociology of art domain.
- Sur "La Religion industrielle. Monastère, manufacture, usine. Une généalogie de l'entreprise" de Pierre Musso - Pierre Mœglin p. 353-369
Notes de lecture
- Carmelo Bene, "L'Esthétique du déplaisir" : Éd. et trad. de l'italien par Laetitia Dumont-Lewi, Dijon, Éd. Les Presses du réel, coll. La Petite Collection ArTec, 2019, 76 pages - Ilham Bougroum p. 388-389
- Marianne Bloch-Robin, Carlos Saura. "Paroles et musique au cinéma" : Lille, Presses universitaires du Septentrion, coll. Arts du spectacle. Images et sons, 2018, 334 pages - Pietsie Feenstra p. 389-390
- Michel Chion, "Des sons dans l'espace. À l'écoute du space opera" : Bordeaux, Éd. Capricci, 2019, 112 pages - Martin Barnier p. 390-393
- Andrea Del Lungo et Pierre Glaudes (dirs), " Balzac, l'invention de la sociologie" : Paris, Éd. Classiques Garnier, coll. Rencontres, 2019, 345 pages - Jacques-Philippe Saint-Gérand p. 393-395
- Benoît Glaude, "La Bande dialoguée. Une histoire des dialogues de bande dessinée (1830-1960)" : Tours, Presses universitaires François-Rabelais, coll. Iconotextes, 2019, 391 pages - Philippe Paolucci p. 396-398
- Nathalie Heinich, "Le Pont-Neuf de Christo. Ouvrage d'art, œuvre d'art ou comment se faire une opinion" : Vincennes, T. Marchaisse, 2020, 184 pages - Emmanuel Gleyze p. 398-401
- SelimKrichane, "La Caméra imaginaire" : Genève, Georg, coll. Emprise de vue, 2018, 464 pages - Julien Péquignot p. 401-402
- Patrick Paillet, "Qu'est-ce que l'art préhistorique ? L'Homme et l'image au Paléolithique" : Paris, CNRS Éd., coll. Le Passé recomposé, 2018, 352 pages - Alain van Cuyck p. 402-405
- Norman Ajari, "La Dignité ou la mort. Éthique et politique de la race" : Paris, Éd. La Découverte, coll. Les Empêcheurs de penser en rond, 2019, 324 pages - Jean Zoungrana p. 406-411
- Jean-ClaudeCaron et Nathalie Ponsard (dirs), "La France en guerre. Cinq « années terribles »" : Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. Histoire, 2018, 420 pages - Benjamin W. L. Derhy Kurtz p. 411-414
- Germaine Goetzinger, SonjaKmec, Danielle Roster et Renée Wagener (éds), "Mit den Haien streiten. Frauen und Gender in Luxemburg seit 1940/Femmes et genre au Luxembourg depuis 1940" : Luxembourg/Mersch, CID | Fraen an Gender/Capybarabooks, 2018, 390 pages - Myriam Sunnen p. 414-416
- Frédéric Graber et Martin Giraudeau (dirs), "Les Projets. Une histoire politique (XVIe-XXIe siècles)" : Paris, Presse des Mines, coll. Sciences sociales, 2018, 314 pages - Véronique Pillet-Anderlini p. 417-419
- Luca Greco, "Dans les coulisses du genre : la fabrique de soi chez les Drag Kings" : Limoges, Lambert-Lucas, coll. Linguistique et sociolinguistique, 2018, 172 pages - Luc Schicharin p. 419-422
- Joshua Greene, "Tribus morales. L'émotion, la raison et tout ce qui nous sépare" : Trad. de l'anglais (États-Unis) par Sylvie Kleiman-Lafon, Genève, M. Haller, coll. Condition humaine, 2017, 555 pages - Éric Le Ray p. 422-424
- Pierre-EmmanuelGuigo, "Mitterrand, un homme de paroles" : Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, coll. Libre Cours, 2017, 144 pages - Damien Deias p. 424-426
- TristanLeperlier, "Algérie, les écrivains dans la décennie noire" : Paris, CNRS Éd., coll. Culture et société, 2018, 344 pages - Eldjamhouria Slimani p. 426-429
- Judith Lyon-Caen, "La Griffe du temps. Ce que l'histoire peut dire de la littérature" : Paris, Gallimard, coll. NRF Essais, 2019, 304 pages - Antonino Sorci p. 429-431
- Jean-Max Noyer, "Les Intelligences collectives dans l'horizon du trans et posthumanisme" : Londres, Iste Éd., coll. Systèmes d'information, web et société, série Technologies intellectives, 2017, 226 pages - Tiphaine Zetlaoui p. 431-432
- David Rieff, "Éloge de l'oubli. La mémoire collective et ses pièges" : Trad. de l'anglais (États-Unis) par Frédéric Joly, Paris, Éd. Premier Parallèle, 2018, 222 pages - Murielle El Hajj p. 432-435
- Irmtraud Behr et FlorenceLefeuvre (éds), "Le Genre bref. Des contraintes grammaticales, lexicales et énonciatives à une exploitation ludique et esthétique" : Berlin, Frank & Timme, coll. Sprachwissenschaft, 2019, 238 pages - Alexandra Cuniţǎ p. 435-438
- Amir Biglari (éd.), "Regards croisés sur le langage. Entretiens avec N. Chomsky, A. Culioli, M. Halle, B. Pottier, A. Rey, J. Searle, H. Walter" : Paris, Éd. Classiques Garnier, coll. Domaines linguistiques, 2018, 180 pages - Jacques-Philippe Saint-Gérand p. 438-441
- Amir Biglari (dir.) et Nathalie Roelens (collab.), "La Sémiotique en interface" : Paris, Éditions Kimé, coll. Sémiotique, 2018, 672 pages - Jacques-Philippe Saint-Gérand p. 441-446
- Cécile Canut, Félix Danos, ManonHim-Aquilli et Caroline Panis, "Le Langage, une pratique sociale. Éléments d'une sociolinguistique politique" : Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, coll. Annales littéraires, série Linguistique, Sémiotique, Communication, 2018, 388 pages - Jean-Baptiste Atsé N'Cho p. 446-448
- Pierre Frath, "Linguistique anthropologique et référentielle" : Préf. par Georges Kleiber, Reims, Sapientia Hominis 2020, 315 pages - Michelle Lecolle p. 448-450
- Roselyne Koren, "Rhétorique et éthique. Du Jugement de valeur" : Paris, Classiques Garnier, coll. L'Univers rhétorique, 2019, 324 pages - Jérôme Bourdon p. 450-452
- Pierre Rézeau, "Les Mots des Poilus dans leur correspondance et leurs carnets" : Strasbourg, Éd. de linguistique et de philologie, 2018, 970 pages - Liana Pop p. 452-454
- Benoît Verdier et Anne Parizot (dirs), "Du Sens à l'expérience. Gastronomie et œnologie au prisme de leurs terminologies" : Reims, Éd. et Presses universitaires de Reims, 2018, 370 pages - Jacques-Philippe Saint-Gérand p. 454-459
- Mark Briggs, "Manuel de journalisme. Blogs, réseaux sociaux, multimédia, info mobile" : Trad. de l'anglais (États-Unis) par C. Robert, Paris, Éd. Eyrolles, 2e édition, 2019, 321 pages - Sylvie Bardou-Boisnier p. 459-461
- Évelyne Deprêtre et German A. Duarte (dirs), "Transmédialité, bande dessinée et adaptation`" : Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal, coll. Graphèmes, 2019, 312 pages - Marie Kondrat p. 461-463
- Milad Doueihi et Jacopo Domenicucci (dirs), "La Confiance à l'ère du numérique" : Paris, Éd. Rue d'Ulm/Berger-Levrault, coll. Au fil du débat, 2018, 283 pages - Marie-Sylvie Poli p. 463-464
- Anaïs Theviot, "Big Data électoral. Dis-moi qui tu es, je te dirai pour qui voter" : Lormont, Éd. Le Bord de l'eau, coll. Territoires du politique, 2019, 200 pages - Camila Pérez Lagos p. 464-466
- Gérard Derèze, "Méthodes empiriques de recherche en information et communication" : Préf. par J. Walter, éd., Louvain-la-Neuve, De Boeck, coll. INFO&COM, 2019, 285 pages - Jean-François Tétu p. 467-468
- Laurent Gervereau, "Voir, comprendre, analyser les images" : 5e éd., Paris, Éd. La Découverte, coll. Grands Repères, 2020, 189 pages - Jean-François Tétu p. 468-469
- Nathalie Heinich, "La Cadre-analyse d'Erving Goffman. Une aventure structuraliste" : Paris, CNRS Éd., 2020, 168 pages - Albert Ogien p. 469-472
- Isabelle Pierozack, Marc Debono, Valentin Feussi et Emmanuelle Huver (dirs), "Penser les diversités linguistiques et culturelles. Francophonies, formations à distances, migrances" : Limoges, Lambert-Lucas, coll. Linguistique et sociolinguistique, 2018, 440 pages - Pierre Fandio p. 472-475
- Dinah Ribard, "1969 : Michel Foucault et la question de l'auteur. « Qu'est-ce qu'un auteur ? ». Texte, présentation et commentaire" : Paris, H. Champion, coll. Textes critiques français, 2019, 110 pages - Charles Djungu-Simba K. p. 475-477
- François Ric, Dominique Muller, "La Cognition sociale. La construction de la réalité sociale et ses conséquences" : Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, coll. Psycho +, série Psychologie sociale, 2017, 159 pages - Éric Le Ray p. 477-480
- Emmanuël Souchier, Étienne Candel, Gustavo Gomez-Mejia, avec la collab. de Valérie Jeanne Perrier, "Le Numérique comme écriture. Théories et méthodes d'analyse" : Paris, A. Colin, coll. Codex, 2019, 358 pages - Jean-François Tétu p. 481-483
Livres reçus
- Livres reçus - p. 485-488