Contenu du sommaire : Sous le prisme de l'articulation des temporalités sociales
Revue | Les Politiques sociales |
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Numéro | no 3-4, 2020 |
Titre du numéro | Sous le prisme de l'articulation des temporalités sociales |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- L'articulation des temps sociaux : une clé de lecture des enjeux sociaux contemporains - Pascal Barbier, Bernard Fusulier, Julie Landour p. 4-8
- L'espace temporel du salariat : une lecture articulée et qualitative à partir de l'enquête « Parlons Travail » - Valerya Viera Giraldo p. 9-29 L'articulation des temps sociaux est surtout approchée par la notion de « conciliation travail-famille », en réduisant parfois les enjeux à des stratégies individuelles optimisables. À l'inverse, cet article se propose d'aborder la question depuis une perspective macrosociale, afin de saisir les temporalités sociales dans leur complexité en employant une lecture en miroir des temporalités de travail salarié, et d'analyser leur articulation avec le vécu hors emploi. À l'appui d'une analyse géométrique des données de l'enquête Parlons Travail, nous présentons comment, en fonction de la marge de manœuvre temporelle et de l'intensité horaire, les configurations d'articulation varient et comment elles influencent le vécu hors emploi ; et cela notamment en jouant un rôle dans la santé des travailleurs, montrant ainsi qu'il ne s'agit pas tout à fait d'un « conflit individuel » mais d'une problématique sociale, de laquelle découlent non seulement des inégalités de genre et de classe, mais aussi des conséquences jusqu'à présent plus invisibles et qui transforment les conditions de vie dans la sphère privée.The articulation of social times is approached above all by the notion of “work-family conciliation”, sometimes reducing the stakes to optimizable individual strategies. Conversely, this article proposes to approach the question from a macrosocial perspective, in order to grasp social temporalities in their complexity by using a mirror reading of the temporalities of salaried work, and to analyze their articulation with experience outside employment. Based on a geometric analysis of the data from the “Let's Talk about Work” survey, we present how, depending on the temporal room of maneuver and the hourly intensity, the configurations of relationship vary and how they influence the experience outside employment; in particular by playing a role in the health of workers, thus showing that this is not entirely an “individual conflict” but a social problem, from which arise not only gender and class inequalities, but also consequences that have hitherto been more invisible and which transform living conditions in the private sphere.
- L'articulation travail-famille « au masculin ». Des pères empêchés de paternité ? - Myriam Chatot p. 30-44 Si les tensions organisationnelles, temporelles et subjectives vécues par les femmes concernant l'articulation travail-famille sont bien connues, celles vécues par les hommes ont été moins étudiées. L'objectif de cet article est d'explorer à quelles conditions l'activité professionnelle est vécue par les pères comme un obstacle au temps parental. À partir d'une enquête qualitative menée auprès de 34 pères actifs occupés, en couple hétérosexuel, ayant au moins un enfant de moins de trois ans, il s'agira de mettre en évidence le rapport subjectif de ces hommes à l'articulation travail-famille, à partir d'un « objet-loupe » : les horaires de travail. Dans cet article, il est montré que le « temps parental père-enfant », en ce qui concerne les tâches quotidiennes, est appréhendé par les hommes moins comme un impératif parental que comme un service conjugal.While the organizational, temporal and subjective tensions experienced by women in relation to work-family relationship are well known, those experienced by men have been less studied. The aim of this article is to explore under what conditions work is experienced by fathers as an obstacle to parenting time. Based on a qualitative survey of 34 working fathers in heterosexual couples with at least one child under the age of three, the aim is to highlight the subjective relationship of these men to the work-family interface, using a ‘magnifying glass' : working schedules. In this article, it is shown that “father-child parenting time”, as far as daily tasks are concerned, is seen by men less as a parental imperative than as a conjugal service.
- Un temps bien investi en classe préparatoire scientifique et dans une grande école d'ingénieurs - Christophe Birolini p. 45-58 Dans cet article sont examinées les normes d'emploi du temps dans les classes préparatoires scientifiques aux grandes écoles, et à l'entrée dans une grande école d'ingénieurs. Les données ont été collectées au cours d'une enquête ethnographique de quatre ans au sein de la communauté des élèves de l'École Centrale Paris (ECP). Si les activités des élèves changent entre les classes préparatoires et la grande école, certaines normes temporelles persistent : dans les deux cas, il leur est demandé d'avoir un usage rationalisé, intensif et maîtrisé de leur temps, en l'assignant à certaines activités. Ce qui change est la forme que cela prend. En classe préparatoire, il est enjoint aux élèves de consacrer leur temps au scolaire ; en grande école existent des injonctions à s'engager, en plus des activités scolaires, dans les activités associatives de l'école.This article examines time schedule's standards in scientific preparatory classes, and for entry to an engineering school. The data were collected during a four-year ethnographic survey of the École Centrale Paris (ECP) student community. While students' activities change between the preparatory classes and the engineering school, some time norms persist: in both cases, they are asked to make a rational, intensive and controlled use of their time, assigning it to specific activities. What changes is the form this takes. In the preparatory class, students are enjoined to devote their time to school; in the engineering school there are injunctions to engage, in addition to school activities, in the associative activities of the school.
- Des vocations techniques « désintéressées » ? Le cas du spectacle vivant en Suisse à l'épreuve de l'articulation des temps sociaux - Robin Casse p. 59-74 Dans cet article, l'auteur s'intéresse à des métiers composant les mondes de l'art mais qui ont été jusqu'ici peu étudiés : les technicien·ne·s du spectacle. Il y retrace le déroulement de deux carrières, celle d'un « technicien d'accueil » et celle d'une « technicienne de compagnie », pour examiner la pluralité des formes d'engagement dans le travail technique et les ressorts de celles-ci. Pour ce faire, il compare les conditions d'entrée et de maintien – ou de navigation – entre les différents secteurs professionnels de la technique en Suisse romande, et il analyse la tension entre « l'art et le métier » qui structure cet espace professionnel. Par l'étude des articulations des temps sociaux différenciées chez les technicien·ne·s, cette comparaison montre que le « don de soi » désintéressé propre aux vocations artistiques ne permet pas de caractériser l'ensemble des carrières techniques.In this article, the author focuses on trades that make up the worlds of art but which have so far been little studied: entertainment technicians. He retraces the development of two careers, that of a “reception technician” and that of a “performance company technician”, to examine the plurality of forms of involvement in technical work and their springs. To this end, it compares the conditions of entry and retention - or navigation - between the different technical professional sectors in French-speaking Switzerland, and analyses the tension between “art and profession” which structures this professional field. Through the study of the articulations of differentiated social times among technicians, this comparison shows that the disinterested “self-sacrifice” specific to artistic vocations does not allow us to characterize all technical careers.
- Concilier emploi et famille en temps de pandémie : les résultats d'une recherche au Québec - Diane-Gabrielle Tremblay, Sophie Mathieu p. 75-93 Au Québec, le contexte de pandémie de Covid-19 s'est traduit par des transformations radicales de l'organisation du travail. On est passé d'un taux d'environ 15 % d'organisations proposant le télétravail à 40 % en mai 2020. Comment les parents ont-ils vécu leur situation de conciliation travail-famille dans cette province où promor ? Comment les employeurs se sont-ils comportés face à leurs salariés en situation de télétravail ? Est-ce que le soutien organisationnel offert, en termes de réduction des attentes et du niveau de compréhension de l'employeur, est différent selon le genre, le type d'organisation et la catégorie d'emploi ? Afin de répondre à ces questions, nous analysons les données d'une enquête effectuée en mai 2020 auprès de 2 293 travailleurs québécois qui ont des enfants.In Quebec, the context of the Covid-19 pandemic has resulted to radical transformations in the organization of work. From a rate of about 15% of organizations offering telework, the number of teleworkers has risen to 40% by May 2020. How have parents experienced their working time-family life conciliation in this province where family policy promotes women's activity? How have employers behaved towards their employees in a teleworking situation? Does the organizational support offered, in terms of reducing the employer's expectations and level of understanding, differ according to gender, type of organization and job category? In order to answer these questions, we analyze data from a survey conducted in May 2020 among 2,293 Quebec workers who have children.
- Heur et malheur des familles confinées en France : une analyse exploratoire de l'expérience du confinement à domicile - p. 94-113 De mars à juin 2020, du début du confinement aux premières phases de déconfinement, un collectif de sociologues a suivi dix-huit familles françaises lors de télé-entretiens réguliers, afin de comprendre les vécus de cette situation inédite et la manière dont ces familles ont réorganisé leurs activités alors qu'elles étaient repliées dans un seul espace : le lieu de résidence. Les auteur·e·s distinguent trois rapports au confinement (heureux, malheureux et mitigé), et observent que si les conditions matérielles d'existence jouent un rôle déterminant dans l'expérience du confinement, elles ne suffisent pas à elles seules à expliquer sa tonalité générale. La répartition sexuée des tâches, l'autonomie dans l'organisation de l'activité professionnelle, et plus globalement le degré de maîtrise de l'emploi du temps, sont des dimensions structurantes de cette expérience, tout comme la place accordée à la vie familiale dans le projet de vie des personnes et des couples.From March to June 2020, from the beginning of the lockdown to the first steps in easing lockdown, a collective of sociologists followed eighteen French families during regular tele-interviews, in order to understand the experiences of this unprecedented situation and the way in which these families reorganized their activities while they were taking place in a single space: the place of residence. The authors distinguish three relationships to lockdown (happy, unhappy and mixed feeling), and observe that although material conditions of existence play a determining role in the experience of lockdown, they are not sufficient on their own to explain the different positions. The gendered distribution of tasks, autonomy in the organization of professional activity and, more generally, the degree of control over the use of time are structuring dimensions of this experience, as is the place given to family life in the life plans of individuals and couples.
The authors distinguish three relationships to confinement (happy, unhappy and mixed), and observe that although material living conditions play a decisive role in the experience of confinement, they are not sufficient on their own to explain its general tone. - Recensions - p. 123-124
- Hommage à Cécile Wéry - p. 125-126