Contenu du sommaire : Citoyennetés, Laïcités et Religions autour de la Méditerranée
Revue | Pensée Plurielle |
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Numéro | no 47, 2018 |
Titre du numéro | Citoyennetés, Laïcités et Religions autour de la Méditerranée |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial. Citoyennetés, laïcités et religions autour de la Méditerranée - Maurice Blanc, Tom Storrie p. 7-18
1re partie : La diversité des ancrages religieux
- La citoyenneté fragmentée - Bilal Shafei p. 19-31 Ce texte montre d'abord la complexité des images mentales véhiculées au Proche-Orient par les termes : citoyenneté, citoyen et laïcité ; puis leur influence sur la vie des Palestiniens à travers 50 ans de changements progressifs ; enfin le rôle de la religion dans ces transmutations. Nous élaborons finalement une nouvelle approche de ces concepts, basée sur le respect de la diversité ethnique, sociale, culturelle et religieuse des peuples de la région.Fragmented Citizenship
The main aim is to show both the complexity of the mental images of the different terms (citizen, citizenship, and secularism) used in the Middle-East and their implication on the Palestinian life. Then, we demonstrate the progressive changes in the perception of these terms during the last 50 years and the influence of religion on that. Finally, we present a new approach that could help to overcome these difficulties and to respect the racial, social, cultural, and religious diversity of the people living in the region. - Les Algériennes, citoyennes à part entière ? - Cherifa Bouatta p. 33-48 Ce texte rend compte des luttes menées par les féministes algériennes en vue d'obtenir des lois égalitaires. Le Code de la famille – promulgué en 1984 – attribue un statut inférieur aux femmes. À travers leurs associations, les féministes algériennes rejettent ce code en s'appuyant sur la Constitution algérienne qui stipule l'égalité entre tous les citoyens et les droits universels. Ce combat est mené contre le régime algérien et contre les islamistes qui revendiquent des lois inspirées de la chari'a. Être citoyenne, c'est revendiquer les mêmes droits pour les femmes et les hommes, dans un État de droit qui promeut la justice sociale, l'égalité devant le droit et l'indépendance de la justice.Algerian Women, Full citizens?
This paper reports on the struggles of Algerian feminists to obtain equal treatment within the law. The Family Code, adopted in 1984, clearly attributes to women an inferior status. Algerian feminists, through their associations, reject this Code which is in contradiction with the Algerian Constitution, stipulating equality and universal rights among all citizens. This fight is directed both against the Algerian regime and the Islamists claiming laws inspired by Shari'a. Being a citizen is not only fighting for equal rights between women and men but also for a state promoting social justice, equality before the law and the independence of the judiciary. - Citizenship in question: a minority perspective on Palestine - Julia Droeber p. 49-59 J'examine dans ce texte si la citoyenneté, telle que je l'ai observée en Palestine, est de nature inclusive ou exclusive. J'interroge d'abord la définition et la nature de la citoyenneté, à partir de mes expériences comme « étrangère » de longue date, membre d'une communauté religieuse minoritaire. Mes observations personnelles confirment la vision savante de la citoyenneté comme un concept qui ne peut être défini qu'en lien avec sa mise en pratique. Les définitions concises et bien tranchées de la citoyenneté sont éloignées de la complication des pratiques et des notions de citoyenneté observables sur le terrain.Dans le cas de la Palestine, la citoyenneté n'est pas rattachée à un État existant aujourd'hui. Je propose quelques réflexions sur le projet de citoyenneté palestinienne dans la perspective de l'établissement de cet État, dans un avenir plus ou moins proche. Je commence par la représentation fausse de la citoyenneté – mais fréquente parmi les gens que j'ai rencontrés, en Palestine et ailleurs – d'une citoyenneté qui accorde des droits, mais pas de devoirs. C'est évidemment un obstacle majeur au bon fonctionnement d'une citoyenneté palestinienne, puisque la majorité semble plus intéressée par ce qu'elle pourrait recevoir que par ce qu'elle pourrait donner à cette communauté des citoyens.Une citoyenneté inclusive et dialogique – la forme de citoyenneté que je souhaite – devrait nécessairement fournir à tous un espace commun et l'égalité des chances, indépendamment du genre, de l'ethnicité, de la classe sociale ou de la religion. C'est indissociable d'un ordre démocratique. Le genre et la religion sont particulièrement importants, même si les relations de genre ne sont pas l'interrogation centrale dans ce dossier. Sur la religion, quelques remarques préalables sont nécessaires. Les musulmans sunnites forment la majorité de la population de la rive occidentale (West Bank) du Jourdain. La majorité des décideurs économiques et politiques en Palestine fait partie de cette majorité musulmane. Ceci veut dire que, selon toute probabilité, elle sera en mesure de définir à quoi ressemblera la future citoyenneté. En d'autres termes, les droits de la citoyenneté des minorités religieuses en Palestine dépendront de la bonne volonté de la majorité sunnite.Actuellement, la politique et les sentiments nationalistes renforcent des passions profondes dans la population, ce qui passe avant tout débat sur la citoyenneté. Comme les Palestiniens ne disposent pas de leur propre pays, la lutte nationaliste pour l'indépendance passe avant toute réflexion sur les droits et les devoirs des citoyens demain. Le discours nationaliste définit aussi la place et le rôle des minorités religieuses en Palestine. Le combat nationaliste a été mené dans des termes inclusifs : quiconque se définit comme « Palestinien » était dans l'obligation de participer à la lutte, indépendamment des divisions religieuses, ethniques et de classe. Mais ce combat s'est peu à peu « islamisé », la Palestine étant souvent dénommée « Palestine musulmane » (falastiin al-muslima). Cette nouvelle rhétorique a pour effet d'exclure du combat les membres des minorités religieuses (chrétiens et samaritains). De plus en plus, les minorités religieuses sont accusées d'être une « cinquième colonne » et de trahir la cause palestinienne.Les modérés (vraisemblablement la majorité des musulmans palestiniens) sont très fiers de la coexistence pacifique entre musulmans, chrétiens et samaritains ; par contre, les fondamentalistes – sur le plan politique ou sur celui de la vie quotidienne – ont beaucoup de mal à imaginer une Palestine multireligieuse et/ou multiculturelle. Jusqu'à maintenant, les Palestiniens sont unis par un « ennemi » commun, l'occupant israélien. Si, à l'avenir, cette occupation devait disparaître et si la création d'un État palestinien exigeait un régime de citoyenneté qui succède aux pratiques et sentiments nationalistes, il n'est pas du tout sûr que cette citoyenneté soit inclusive et dialogique.La citoyenneté en question : la Palestine au prisme de ses minorités
In this contribution I investigate the practice of citizenship in different national contexts with particular focus on Palestine. I do this from a minority perspective because, in the case of minorities, the philosophy and practice of citizenship undergoes its litmus test. I argue that the practice of true citizenship must be inclusive and democratic, prerequisites that continue to be in their infancy in Palestine (and elsewhere). And while the idea of citizens' rights is alive and well in most places of the world, including Palestine, the concept of citizens' duties is largely underdeveloped. Religious minorities have an active role to play in the future development of citizenship practices and philosophies. - Citoyennetés, laïcités et religions, un « triangle » en permanence sous tension - Maurice Blanc p. 61-76 Je suis né dans une famille divisée par la religion catholique : d'un côté, une vision ritualiste et individualiste, de l'autre, une vision sociale. J'ai choisi un catholicisme social, coopérant avec des non-chrétiens et m'opposant à la droite catholique. Les discours sur les valeurs sont secondaires pour moi, l'épreuve de vérité est leur mise en pratique concrète. Je me suis éloigné des religions (y compris celle de la laïcité), passant d'une vision sociale à une vision politique : il faut agir sur les causes structurelles des défaillances du système social.Dans la vie quotidienne, la citoyenneté active admet les religions dans le débat politique, mais dans une stricte égalité avec les autres participant(e)s. Dans cette laïcité inclusive, « la loi de Dieu » est soumise à la loi de l'ensemble des hommes et des femmes. Cette dernière s'élabore collectivement, en faisant des compromis sans compromission pour parvenir au bien commun. Ce processus de transaction sociale vise, sans supprimer la tension, à concilier les valeurs et les intérêts de tous.Citizenship, Laicity and Religion: A Permanently under Tension “Triangle”I am born in a family divided by the catholic faith: a ritualist and individualist vision vs. a social Catholic vision. I chose to be a social Catholic; I had to co-operate with non-Christians and to firmly object to the catholic Right. I came to the conclusion discourses on values are cosmetic and the litmus test on their soundness is their practical implementation. I broke with any religion (including the religion of laicity) and I shifted from a simple social vision to a political one. The issue is to suppress the structural causes of the social system failures. “Active citizenship” in everyday life admits religions within the political sphere, but as stakeholders equal to others. In this “inclusive laicity”, the so-called “God's Law” is lower than the Human Law, the only one relevant when debating issues related to our common good. Framing this law is a process of compromises which are not at all dishonest, but social transactions in a spirit of conciliating the opposed values and interests of every stakeholder.
- La France et la religion : comment peut-on être musulman ? - Bruno Michon p. 77-88 À partir de son expérience personnelle et professionnelle, l'auteur propose une réflexion générale sur le rapport que la France entretient avec l'islam. Cette réflexion autour du tabou français de la religion, permet à l'auteur d'aborder la place du chercheur et de l'expert dans l'arène publique.France and Religion: How is it Possible to be Muslim?
From his personal and professional experiences the author reflects upon the relationship between France and Islam. The French taboo regarding religion raises the issue of the place of researchers and experts in the public arena. - Citoyenneté et religion : une perspective britannique - Tom Storrie p. 89-104 Pour discuter la double problématique de citoyenneté et religion, l'auteur pose un regard rétrospectif sur son trajet de vie depuis les années 1930 ; il indique les événements qui lui semblent personnellement pertinents, en évoquant des phénomènes britanniques, culturels et historiques. Il identifie deux phases : d'abord le mouvement lent de dilution de l'hégémonie chrétienne qui, à partir de la Deuxième Guerre mondiale, a fait place à la modernisation industrielle, aux nouvelles politiques des droits humains et aux mouvements socio-culturels comme l'anti-sexisme, l'antiracisme et le féminisme ; ils donnent naissance à une nouvelle citoyenneté modernisante qui s'étend au-delà des frontières des États-nations et embrasse l'Union européenne. Deuxièmement, l'irruption de l'affaire Salman Rushdie a annoncé le retour des religions fondamentalistes et agressives au centre des tensions socio-politico-culturelles au niveau global. Les religions ont leur place dans l'espace public, mais dans un cadre étatique laïque.Citizenship and Religion: A British Perspective
This contribution sets out to explain the personal development of the author throughout his life with regard to the double problematic of citizenship and religion. The references to British history and culture are chosen, not in order to present an “objective” assessment of this history and culture, but in order to explain the author's present position with regard of this double problematic which seemed to be tending steadily towards secularisation and its widening embrace of the European Union. The Salman Rushdie Affair brutally heralded the totally unexpected irruption of fundamentalist and aggressive religion into the centre ground of global politics. The author's view is that religions have their legitimate place in the public domain as does any other social association but within the framework of a secular state.
- La citoyenneté fragmentée - Bilal Shafei p. 19-31
2e partie : La lenteur des changements
- Laïcité(s) et démocratie : entre liberté de conscience et émancipation - Bruno Michon p. 105-125 L'auteur aborde les relations entre laïcité et démocratie à partir d'une définition sociologique de la laïcité. Cette définition applique le concept de laïcité à une pluralité de contextes nationaux. L'auteur illustre ce concept à l'aide d'une enquête réalisée auprès d'adolescents français et allemands, portant entre autres sur leurs représentations de l'islam et plus spécifiquement du foulard islamique. L'auteur distingue quatre conceptions différentes de la laïcité : la première est tournée vers la liberté de conscience, la seconde vers l'émancipation ; la troisième est culturelle et la dernière théologique. Chacune de ces conceptions détermine un rapport particulier entretenu entre la laïcité et la démocratie.Laicity and Democracy: Between Liberty of Conscience and Emancipation
The author examines the relationship between laicity and democracy from a sociological definition of laicity. This definition allows the concept of laicity to be applied to a plurality of national contexts. The paper provides an illustration of this concept based on a research carried out among French and German teenagers bearing particularly upon their representations of Islam and specifically with regard to the Islamic headscarf. From this the author identifies four different conceptions of laicity: the first focuses on freedom of conscience and religion, the second on emancipation, the third is cultural and the last is theological. Each of these conceptions entails a particular relationship between laicity and democracy. - « Islam does not belong to Germany ». Rediscovering religion for Germany's citizens - Julia Droeber p. 127-138 Cette contribution cherche d'abord à comprendre pourquoi la religion refait surface dans le débat sur la citoyenneté en Allemagne ; ensuite, à montrer comment l'islam est compatible avec la citoyenneté allemande. L'appartenance religieuse a été progressivement déconnectée de la citoyenneté. Si, d'une certaine manière, l'Allemagne a dépassé la fracture historique entre catholiques et protestants, un nouveau clivage religieux apparaît maintenant entre musulmans et non-musulmans. L'installation durable d'une population musulmane qui a de plus en plus confiance en elle-même, ainsi que l'arrivée récente d'un grand nombre de réfugiés musulmans en Allemagne, ont provoqué un nouveau débat sur le lien entre appartenance religieuse et citoyenneté, particulièrement dans le discours populiste. La communauté musulmane établie de longue date a commencé à revendiquer les droits de la citoyenneté, notamment le droit, garanti par la Constitution, à une éducation religieuse islamique dans les écoles publiques. En d'autres mots, depuis les années 1990, l'islam et les musulmans sont devenus de plus en plus « visibles » dans le débat allemand sur la citoyenneté. Le point culminant a été le vaste débat public pour savoir si l'islam « appartient » (ou devrait appartenir) à l'Allemagne.Selon le contexte, cette question reçoit des réponses différentes. Dans quelques cercles populistes et d'extrême droite, la réponse est un « non » très ferme. La réponse du gouvernement fédéral – présente aussi dans le discours libéral et de gauche – est un « oui » prudent. Ces deux réponses peuvent se réclamer de la même tradition historique qui définit la citoyenneté à partir d'un « citoyen universel » et libéré des barrières religieuses. Cette émancipation de la religion est interprétée par les seconds comme la reconnaissance à tous des mêmes droits constitutionnels, indépendamment des attaches religieuses ; pour les premiers, « le citoyen universel allemand » est nécessairement « chrétien » (mais sans distinction d'une Église particulière).L'éducation religieuse islamique officielle est un outil pour intégrer les musulmans allemands dans la société allemande et dans la compréhension qu'elle donne de la citoyenneté. Le droit à l'éducation religieuse islamique, garanti par la Constitution, va de pair avec la citoyenneté. Pour le gouvernement fédéral, l'introduction de l'éducation religieuse islamique dans le programme des écoles publiques de quelques États fédérés (Länder) est une tentative très prudente d'accorder aux musulmans allemands les mêmes droits qu'à leurs compatriotes non musulmans. Ce n'est pas pour autant une offre désintéressée : le gouvernement vise à exercer un certain contrôle sur ce qui est enseigné aux citoyens musulmans en Allemagne. C'est une forme spécifique d'islam soutenu par l'État et qui appartient à l'Allemagne : un « islam musulman allemand ». L'islam « importé » est souvent enseigné par des imams étrangers ; cet islam n'est pas celui que l'administration allemande appelle de ses vœux quand elle déclare que « l'islam appartient à l'Allemagne ». L'éducation religieuse islamique officielle est un outil pour intégrer les musulmans allemands dans la société allemande et dans sa compréhension de la citoyenneté. Le droit à l'éducation religieuse islamique, garanti par la Constitution, va de pair avec l'acceptation de cette Constitution ; les adversaires de cette éducation religieuse accusent d'ailleurs les musulmans d'ignorer cette contrepartie. La religion est ainsi redevenue un moyen (discursif) pour inclure ou exclure certains groupes religieux du « bien sacré » des droits de la citoyenneté allemande.This contribution examines two related issues: why religion has resurfaced in the citizenship debate in Germany? Is there a place for Islam and Muslims in this citizenship regime? I show that religious affiliation has gradually become disconnected from citizenship. However, with the arrival of large numbers of Muslim refugees in Germany, this link between religious affiliation and citizenship has been questioned again, particularly in popular discourse. The official answer to the question about Islam/Muslims belonging to Germany and German citizenship has been mainly “Yes”, except for some right-wing politicians. This “yes” is particularly reflected in the establishment of Islamic Religious Education as a regular subject in state schools.
- L'ambiguïté langagière du terme citoyenneté dans sa relation à la religion dans le monde arabe et musulman - Bilal Shafei p. 139-150 Nous expliquons l'ambiguïté langagière engendrée par l'utilisation abusive des termes citoyenneté, laïcité, droits de l'homme et démocratie, et comment les différentes classes politiques, religieuses, intellectuelles et étatiques s'en servent pour leurs propres intérêts dans le monde arabe et musulman. Nous proposons des termes qui dépassent la problématique actuelle produite par cette utilisation et mettent en valeur l'objectif principal de la citoyenneté qui est l'égalité et l'équité pour tous devant la loi.Linguistic Ambiguity of the Term Citizenship in its Relation with Religion in the Arabic and Islamic ContextWe explain the linguistic ambiguities resulting from the abusive use of the terms citizenship, secularism, human rights and democracy, and how the different political, religious, and intellectual classes try to put these concepts in the Arabic and Islamic contexts in order to serve their own interests. Furthermore, we provide some terms that could go beyond the problematic use of the current concepts and terms, with a focus on the main objectives of citizenship: equality and equity for all in front of law.
- À partir de Kamel Daoud : essentialisme et universalisme contre désir de citoyenneté figée - Cherifa Bouatta p. 151-160 Kamel Daoud est un chroniqueur algérien qui soulève les questions les plus épineuses et les plus sensibles, voire les tabous, de la société algérienne. Il s'autorise à critiquer le religieux, à s'exprimer sur la sexualité et l'hypocrisie qui l'entoure, ainsi que sur les frustrations qui en découlent. Il a écrit une chronique (Le Monde, 31 janvier 2016) sur ce qu'on a appelé « les événements de Cologne » où il dénonce les comportements des migrants soupçonnés d'être les auteurs des agressions sexuelles contre des femmes occidentales. Il a été vilipendé, accusé d'essentialisme par des intellectuels occidentaux bien-pensants et voué aux gémonies par des intellectuels algériens, l'accusant de trahison. Ce texte discute les thèses développées par Kamel Daoud et celles des tenants de la morale dominante, tout en contextualisant leurs propos et en ouvrant des pistes de réflexion sur l'essentialisme et l'universalisme (ou l'universalisable).From Kamel Daoud: Rigid Essentialism and Universalism vs. Desire for Citizenship
Kamel Daoud is an Algerian columnist. He raises the most sensitive and difficult issues, even the taboos, arising into the Algerian society. He allows himself to criticize religion, to discuss sexuality, its surrounding hypocrisy and the frustrations related to it. In a column in the French newspaper Le Monde (31st January 2016) – about what was called “the Cologne events” – he denounced the behaviour of migrants suspected of being the perpetrators of sexual assaults against German women. He was vilified, accused of “essentialism” by some Western intellectuals and doomed to grievances by Algerian intellectuals, accusing him of being a traitor. This text offers a discussion of the arguments developed by Kamel Daoud and the proponents of the dominant morality while contextualizing his remarks and opening up avenues of reflection on essentialism and universalism (or universalizable). - « C'est la culture, idiot ! ». Les cultures empêchent d'échapper à leur emprise - Tom Storrie p. 161-177 Cette contribution affirme la primauté du séculier, ou de la laïcité, sur la théocratie. Elle attire l'attention sur le pouvoir énorme exercé par les cultures sur les communautés, pour maintenir le « sens commun » sous la coupe de leurs hégémonies. Dans le Royaume-Uni, la difficulté à surmonter cette inertie culturelle est démontrée par le développement aveugle et lent résultant de la Réforme protestante. Ce mouvement était au début une « théologie de la libération », déclenchée par Martin Luther qui – comme premier « lanceur d'alerte » global – a défié la corruption de l'Église catholique. Seule corporation multinationale existant à cette époque, elle exerçait un monopole de contrôle à travers l'Europe, pénétrant profondément et avec malveillance dans la vie quotidienne. La conclusion pose la question : l'islam est-il sur le point de s'engager dans une « théologie de la libération » qui lui soit propre ?It's the Culture, Stupid! Cultures Maintain a Strong Hold on their Members
While this contribution continues to assert the value of secularity over theocracy in the promotion of citizenship, the focus is now on the enormous power of cultures to hold communities within the “common sense” of their own hegemonies. The difficulty of overcoming such cultural inertia is demonstrated in Britain by the slow and often blind development of civil society and citizenship over centuries resulting from the Protestant Reformation. This was initially a “liberation theology” triggered by Martin Luther who – as the first global “whistle blower” – challenged the corruption of the Catholic Church as the single multinational corporation then in existence and exercising a monopoly of economical and spiritual control penetrating deeply and malevolently into daily life across Europe. A final question posed is whether Islam is now on the verge of its own liberation theology reform movement. - L'islam dans une France et une Europe laïques : comment déjouer les pièges de l'extrémisme prétendu musulman ? - Maurice Blanc p. 179-200 Ce texte analyse la place de l'islam en France et en Europe. Il distingue ses formes pacifiques et ses tendances extrémistes et meurtrières. Il soutient que l'islam devrait avoir les mêmes droits et les mêmes devoirs que les religions chrétiennes, en France et dans l'Union européenne (UE). Il considère que les explications de l'extrémisme islamiste par les conditions socio-économiques locales, par les séquelles de la colonisation, ou par l'islam, sont complémentaires et ne s'excluent pas mutuellement. L'extrémisme islamiste est à la fois exogène et endogène à la France et à l'UE. Il y a beaucoup à faire en matière de dés-endoctrinement et le système carcéral est inadapté, particulièrement en France. La collaboration de tous les échelons de l'État avec la société civile est requise, dans une démocratie participative repensée et élargie.Islam in a Secular France and European Union. How to Thwart the Traps of the so-called Islamist Extremism?The paper analyses the place of Islam in France and in the European Union (EU). The distinction between its pacific forms and its extremist and murderous tendencies is essential. Islam should receive the same rights and duties as Christian religions in France and in the EU. The explanations of Islamist extremisms, either by local socio-economic conditions, or as a consequence of colonisation, or of Islam itself, are intertwined and do not exclude each other. Islamist extremism is both endogenous and exogenous in France and in the EU. In the field of dis-indoctrination, the needs are huge. The prison regime is unfit, specifically in France. The co-operation of central and local governments with civil society is required in an enlarged and renewed democracy.
- Laïcité(s) et démocratie : entre liberté de conscience et émancipation - Bruno Michon p. 105-125
Postfaces
- Laïcités, égalité des sexes et démarche d'objectivation. Dialogue avec Chérifa Bouatta - Jean Baubérot p. 201-215
- Postface - Michel Deneken p. 217-220