Contenu du sommaire : Pouvoir des armées, armées au pouvoir

Revue Confluences Méditerranée Mir@bel
Numéro no 122, automne 2022
Titre du numéro Pouvoir des armées, armées au pouvoir
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  • Dossier. Pouvoir des armées, armées au pouvoir

    • Pouvoir des armées, armées au pouvoir - Agnès Levallois, Elyamine Settoul p. 9-13 accès réservé
    • Les relations civilo-militaires, révélatrices du maintien des autoritarismes au Maghreb depuis 2011 - Thibault Delamare p. 15-31 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Entre 2011 et 2021, l'Algérie, le Maroc et la Tunisie ont vécu des transformations politiques suite à des mobilisations populaires massives, mais aussi la montée du terrorisme et la résurgence de la rivalité algéro-marocaine. Au cœur de ces transformations, les relations entre les institutions politiques, les armées et les forces de sécurité ont à la fois participé au déroulement des événements et évolué sous leur pression. À travers l'étude des relations civilo-militaires, cet article explique les raisons pour lesquelles ces régimes politiques ont conservé ou retrouvé leur identité propre : oligarchie politico-militaire, monarchie pluraliste et présidentialisme nationaliste-conservateur autoritaire. Ils continuent donc de s'inscrire dans un « autoritarisme durable », notamment par l'action des forces armées et de sécurité intérieure, signant l'échec des différentes mobilisations populaires aspirant à la démocratisation.
      Between 2011 and 2021, Algeria, Morocco, and Tunisia experienced political transformations following massive popular mobilisations, but also the rise of terrorism and the resurgence of Algerian-Moroccan rivalry. At the heart of these transformations, the relations between political institutions, armies and security forces have both participated in the unfolding of events and evolved under their pressure. Through the study of civil-military relations, this article explains the reasons why these political regimes have retained or regained their own identity: political- military oligarchy, pluralist monarchy and authoritarian nationalist- conservative presidentialism. They therefore continue to be part of a “durable authoritarianism”, notably through the action of the armed forces and internal security, signalling the failure of the various popular mobilisations aspiring to democratisation.
    • Les armées et les services de sécurité et de renseignement dans le monde arabe - Agnès Levallois p. 33-46 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Les services de sécurité et de renseignement jouent un rôle central dans les différents pays du monde arabe. Cet article propose de présenter leurs caractéristiques communes, la première d'entre elle étant la protection du régime basée sur une culture de l'impunité sans négliger bien évidemment les spécificités propres aux différentes aires géographiques et aux conditions dans lesquelles ces États sont nés. Il s'agira ensuite de proposer une typologie des services suivant leur place au sein du pouvoir. Enfin, nous nous pencherons sur leur rôle – ou non – lors des mouvements de contestation de 2011.
      The security and intelligence services play a central role in the various countries of the Arab world. This article proposes to present their common characteristics, the first of which is the protection of the regime based on a culture of impunity, without neglecting the specificities of the different geographical areas and the conditions in which these States were born. We will then propose a typology of services according to their place within the government. Finally, we will look at their role – or not – during the 2011 protest movements.
    • Le rôle politique de l'armée turque : des coups d'État aux partenariats stratégiques avec le gouvernement - Galip Emre Yıldırım p. 47-63 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article vise à démontrer les relations difficiles entre le gouvernement et l'armée turcs en raison de plusieurs coups d'État effectués entre les années 1960 et 2016. L'hypothèse centrale de ce travail est qu'après le coup d'État raté de 2016, les relations entre l'armée et le gouvernement marquent une rupture en faveur de ce dernier, l'armée devenant ainsi progressivement un partenaire utile du gouvernement notamment dans la gestion de ses politiques étrangères. L'armée est désormais considérée comme un levier stratégique s'attachant à créer des dynamiques de hard-power dans le processus d'élaboration des politiques selon le contexte international. Cette étude montre qu'il est néanmoins difficile d'affirmer l'établissement de relations normalisées et cohérentes car les questions idéologiques entre l'armée et le gouvernement restent toujours présentes.
      This article aims to demonstrate the difficult relationship between the Turkish government and the military due to several coups carried out between the 1960s and 2016. The central hypothesis of this work is that after the failed coup of 2016, the relationship between the army and the government marks a break in favour of the latter, with the army gradually becoming a useful partner of the government especially in foreign policies. The army is now seen as a strategic lever for creating hard-power dynamics in the policy-making process according to the international context. This study shows that it is nevertheless difficult to affirm the establishment of normalised and coherent relations because ideological issues between the army and the government are still present.
    • Quand l'armée sort de sa caserne : recompositions des rapports politico-militaires dans la Tunisie post-2011 - Audrey Pluta p. 65-76 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article revient sur le processus de politisation de l'armée tunisienne depuis janvier 2011. Il montre comment le contrôle politique évolue, d'une subordination stricte de l'armée au politique sous Bourguiba et Ben Ali à son immixtion dans les tiraillements politiques à travers ses officiers. La position de la haute hiérarchie militaire dans la reprise en main autoritaire du pouvoir par Kaïs Saïed conforte cette dynamique de politisation.
      This article reviews the process of politicization of the Tunisian army since January 2011. It shows how the political control evolves from a strict subordination of the army to politics under Bourguiba and Ben Ali to its interference in political disputes through its officers. The position of the senior military hierarchy in the authoritarian takeover of power by Kaïs Saïed reinforces this dynamic of politicization.
    • L'armée algérienne face à la revendication d'un « État civil, non-militaire » - Massensen Cherbi p. 77-98 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      À partir du printemps 2019, dans le contexte du « Hirak » algérien, le refus du chef d'État-major, le général Ahmed Gaïd Salah, d'accéder à une transition démocratique au-delà de la Constitution autoritaire en vigueur, fit émerger la revendication d'un « État civil, non-militaire », corollaire de celle de « souveraineté populaire ». Si ce slogan tire ses racines au plus profond de la guerre d'Algérie, il n'en fut pas moins diabolisé par les autorités militaires, jusqu'à consacrer l'armée en tant que gardienne des « intérêts vitaux et stratégiques du pays » (art. 30, al. 4), à l'occasion de la révision constitutionnelle de 2020, soit la négation même de l'une des revendications majeures du Hirak.
      From the spring of 2019, in the context of the Algerian “Hirak”, the refusal of the Chief of Staff, General Ahmed Gaïd Salah, to accept a democratic transition beyond the current authoritarian Constitution, led to the emergence of the demand for a “civilian, non-military state”, a corollary of that of “popular sovereignty”. Although this slogan has its roots deep in the Algerian war, it was nonetheless demonised by the military authorities, to the point of consecrating the army as the guardian of the “vital and strategic interests of the country” (art. 30, para. 4), on the occasion of the constitutional amendment of 2020, in other words, the very negation of one of the Hirak's major claims.
    • L'armée libanaise, une légitimité fragile à l'épreuve d'une crise multidimensionnelle - Nayla Moussa, Joseph Sawaya p. 99-113 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      « Al jaych houwa al hall » [« L'armée est la solution »] : porté par des officiers de l'armée, ce slogan illustre la place centrale occupée par l'institution militaire au sein de l'État libanais. Mais si l'armée est la « solution », notamment à travers l'élection de son commandant à la présidence de la République, c'est principalement parce que les hommes politiques ont perdu leur légitimité et que, dans un État désormais au bord de la faillite, elle apparaît comme la seule institution pouvant apporter de la stabilité. Cet article s'intéresse aux sources de la légitimité de cette institution et aux défis que représente la crise que traverse actuellement le Liban pour elle.
      “Al jaych houwa al hall” [“The army is the solution”]: this slogan highlights the crucial role occupied by the military institution within the Lebanese State. But if the army is the “solution”, particularly through the election of its commander-in-chief as President of the Republic, it is mainly due to the lack of legitimacy of the political elite. In a State that is on the verge of collapse, it appears as the only institution that can provide stability. This article looks at the sources of the institution's legitimacy and at the challenges that it faces due to the current crisis in Lebanon.
    • Teşkilat, une série sécuritaire au service de la communication politique sur les opérations militaires de la Turquie en Syrie - Solène Poyraz p. 115-128 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article vise à démontrer la place que les séries peuvent prendre dans l'arsenal de communication développé par l'État turc, notamment après la tentative de coup d'État du 15 juillet 2016. Alors que l'entreprise de recherche et consultation Konda qualifie la société turque de « société à télévision » et que les séries constituent une interface entre le domaine public et la vie privée, une série d'espionnage diffusée sur TRT1 et mettant en scène les forces armées turques en Syrie n'est pas anodine. Il s'agit de légitimer les interventions, et plus généralement la politique syrienne de la Turquie, tout en montrant la réorganisation de l'appareil sécuritaire en faveur des services de renseignement. Finalement, la série « Teşkilat » est une mise en scène sérielle du Nouveau Concept de Sécurité qui rassure et familiarise le public avec une rhétorique basée sur un récit historique, et normalise des pratiques violentes autorisées par l'état d'exception permanent instauré depuis 2016.
      This article aims to investigate the role played by TV series in the communication apparatus developed by the Turkish State, particularly after the attempted coup of July 15th, 2016. While the research and consulting firm Konda describes Turkish society as a “television society” and series constitute an interface between the public domain and private life, a spy series broadcast on TRT1 featuring the Turkish armed forces in Syria is not insignificant. The aim is to legitimise the interventions, and more generally Turkey's Syrian policy, while showing the reorganisation of the security apparatus in favour of the intelligence services. Finally, the “Teşkilat” series is a a serial staging of the New Security Concept that reassures and familiarises the audience with a history-based rhetoric, and normalises violent practices authorised by the permanent state of exception established since 2016.
    • The Egyptian army in the political and economic fields since 2013: a neo-military society - Sara Tonsy p. 129-142 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Après l'arrivée au pouvoir en 2014 de l'actuel président égyptien Abdel Fattah al-Sisi, ancien général des forces armées, l'armée a gagné en puissance, en dominant encore plusieurs domaines, notamment l'économie, la politique et le récit national. À partir de matériaux primaires et de travail ethnographique, tels que les journaux et le discours politique des politiciens et des médias en Égypte, cet article répondra aux questions suivantes : Quels sont les changements politiques, économiques et discursifs mis en avant par Sisi depuis 2014 ? Comment cela a-t-il investi dans la construction d'une société militaire dominante ? En utilisant la description et l'analyse d'Anouar Abdel-Malek, de Gamal Abdel Nasser et de la société militaire des officiers libres, nous répondons aux questions susmentionnées tout en décrivant les processus et les procédures qui ont conduit à la domination actuelle de l'armée malgré la promesse initiale de Sisi que cela n'arriverait pas. Nous soutenons que le régime de Sisi a essayé d'incorporer l'appareil militaire dans tous les aspects de la vie sociale, économique et politique, tout en essayant de construire une société néo-militaire qui hégémonise ces domaines. En utilisant le discours de Sisi, et ceux de personnalités politiques et médiatiques, nous fournissons des preuves discursives pour notre argumentation et notre analyse. Le travail de terrain étant presque impossible depuis 2013 en Égypte, nous mobilisons du matériel ethnographique collecté en ligne et à travers de nombreuses visites dans le Grand Caire.
      Ever since the current Egyptian president Abdel Fattah al-Sisi, a former general in the armed forces, came to power in 2014, the military has been gaining power, dominating several areas, including the economy, politics and the national narrative. Using primary material, such as newspapers and the political discourse of politicians and government representatives and media in Egypt, this paper will answer the following questions: What political, economic and discursive changes has Sisi made since 2014? How has this contributed to building a dominant military society? Using Anouar Abdel-Malek's description and analysis of Gamal Abdel Nasser and the military society of Free Officers, I answer the above-mentioned questions while outlining the processes and procedures that led to the current domination of the military despite Sisi's initial promise that this would not happen. I argue that Sisi's regime is attempting to incorporate the military apparatus into all aspects of social, economic and political life, while attempting to build a neo-military society that hegemonizes these areas. Using Sisi's discourse, and that of political and media figures, I provide evidence for my argument and analysis. As fieldwork has been almost impossible since 2013 in Egypt, I mobilize ethnographic material collected online and through numerous visits to Cairo, Egypt since 2014 and until 2021.
    • Les armées du Golfe, entre dépendances et autonomie - Jean-Loup Samaan, Elyamine Settoul, Agnès Levallois p. 143-152 accès réservé
    • Émirats arabes unis, la « Petite Sparte » - Hicham Mourad p. 153-166 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      L'armée des EAU a fait une progression impressionnante ces vingt dernières années. Cette évolution tient à deux raisons principales. La première est la détermination des dirigeants à faire face aux menaces à leur régime provenant des tendances hégémoniques de puissants voisins et à défendre les intérêts économiques de leur pays en tant que plaque tournante commerciale et logistique régionale. La deuxième est le Printemps arabe, qui a accentué la perception des menaces à la sécurité du régime résultant de la montée en puissance de l'islam politique et de l'expansion de l'influence régionale de l'Iran. La modernisation de l'armée s'est basée sur plusieurs piliers, en tête desquels la conclusion de partenariats de défense avec les puissances occidentales, l'accroissement des achats d'armes de pointe, la mise en place d'une formation solide, l'instauration du service militaire et l'introduction de programmes d'éducation civique destinées aux adolescents et préadolescents pour les encourager à s'enrôler dans l'armée.
      The UAE army has made an impressive progress over the past twenty years. There are two main reasons for this development. The first is the determination of the leaders to counter threats to their regime coming from the hegemonic tendencies of powerful neighbors and to defend the economic interests of their country as a regional trade and logistics hub. The second is the Arab Spring, which has accentuated the perception of threats to the regime's security resulting from the rise of political Islam and the expansion of Iran's regional influence. The modernization of the army was based on several pillars, at the top of which the conclusion of defense partnerships with the Western powers, the increase in purchases of advanced weapons, the establishment of solid training, the introduction of military service and civic education programs aimed at adolescents and pre-adolescents to encourage them to enlist in the army.
    • L'armée israélienne en danger de « théocratisation » ? - René Backmann p. 167-182 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      L'armée israélienne, officiellement nommée Forces de défense d'Israël, est à la fois le bouclier de l'État juif contre un environnement régional hostile et aussi le creuset de la nation et l'épine dorsale de la société. Forte de près de 160000 hommes et 425000 réservistes, mais aussi 2600 chars d'assaut, 400 avions de combat, 200 hélicoptères et la possession, jamais officiellement admise, de l'arme nucléaire, c'est aujourd'hui la plus puissante armée de la région et, sur le plan technologique, l'une des plus avancées de la planète. Elle bénéficie également, depuis des décennies de l'aide des États-Unis en matière de recherche et développement. Dans les domaines du renseignement en temps réel, des télécommunications cryptées, des lasers et de la cyberguerre, elle a très peu d'équivalent. Grâce à la réputation de ses forces spéciales, elle est aussi devenue exportatrice de savoir-faire, en particulier dans le Tiers-monde. Fondée sur le principe de la conscription des jeunes des deux sexes, elle joue un rôle considérable dans la société notamment sur la scène économique et politique. Quatre des quinze premiers ministres qui se sont succédé depuis la fondation de l'État, sont d'anciens généraux. Mais cet ancrage au sein de la société a conduit l'armée à partager les travers et les dérives de cette dernière. Notamment son glissement à droite, et une violence croissante et impunie à l'encontre des Palestiniens en raison de l'influence croissante en son sein des colons ultranationalistes et des extrémistes religieux
      Officially called Israel defense forces, the Israeli army is at the same time the shield of a Jewish State surrounded by enemies, the melting pot of the newborn nation and the backbone of the Israeli society. Strong of 160000 soldiers and 425000 reservists, 2600 tanks, 400 fighter jets, 200 helicopters, an operational nuclear weapons capability, never officially acknowledged, it is today the strongest army in the Middle East, and on the technological field, one of the most advanced in the world. In real time intelligence gathering and analysis, in cyber war and telecommunication, it has very few equivalents. Due to the high reputation of its special forces units, it has also become an exporter of military and security knowhow mainly in the Third World. Since dozens of years, it has built a very close security relationship with the USA in research and development and their joint effort has contributed to improvements among others on the F-15, and some breakthrough on the high energy laser weapons and the Arrow system of anti-missile considered as more effective than the US made Patriot. Based on the principle of conscription of men and women since its creation, it plays a prominent role in the Israeli society due to its influence, namely on the political and economic scene. Four of the 15 prime ministers who headed the government since the birth of the State in 1948 were former generals. But, because of this very important role it must also share the failing or drifting of the Israeli society, namely its sliding towards the right, the unpunished violence against the Palestinians because of the growing influence of the ultra-nationalist settlers and religious extremists.
    • Vers une hybridation idéologique au sein de l'armée turque ? - Sümbül Kaya p. 183-196 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      L'article porte sur les changements idéologiques en cours au sein de l'armée turque, en analysant le rôle central joué dans ce processus par les réformes organisationnelles post-2016. La mise en conformité idéologique des armées avec le gouvernement de l'AKP se traduit notamment par une institutionnalisation graduelle de l'islam au sein des Forces Armées. Nous soulignons ainsi les changements dans le quotidien des forces armées : prières, takbir, fin de certaines discriminations, place nouvelle accordée à la piété. Pour autant, cette place nouvelle de l'islam au sein de l'armée ne signifie pas une rupture totale avec l'héritage nationaliste kémaliste, qui perdure notamment dans les formations. Cette institutionnalisation, si elle est le fruit d'une pratique autoritaire du pouvoir, doit également se comprendre comme la déconstruction d'une armée jugée trop kémaliste, au profit d'une convergence vers les valeurs et les pratiques religieuses de la majorité.
      This article focuses on the ongoing ideological changes within the Turkish military, analysing the central role played in this process by the post-2016 organizational reforms. The ideological alignment of the military with the AKP government is reflected in the gradual institutionalisation of Islam within the Armed Forces. We thus highlight the changes in the daily life of the military: prayers, use of takbir, end of certain discriminations, new status given to piety. However, this new place of Islam does not mean a total break with the Kemalist nationalist heritage, which persists in particular in the training courses. This institutionalisation, if it is the result of an authoritarian practice of power, must also be understood as the deconstruction of an army judged to be too Kemalist, in favour of a greater convergence towards the religious values and practices of the majority.
  • Variations

    • La construction d'une utopie kurde dans l'histoire. Analyse à partir d'empreintes d'archives - Didier Le Saout p. 199-212 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Comment une utopie kurde peut se former et se maintenir dans l'histoire dans des configurations territoriales et politiques les plus variées ? A partir des documents produits par les acteurs kurdes et conservés dans les centres d'archives en France, la construction d'une utopie kurde est étudiée dans trois contextes distincts. Tout d'abord, le règlement de la Première Guerre mondiale qui organise le démembrement de l'Empire ottoman est interprété par les nationalistes kurdes comme une reconnaissance du droit de disposer d'un Etat. Ensuite, la République du Kurdistan proclamée en Iran en 1946, renouvelle l'imaginaire kurde en rendant concrets les objectifs d'autonomie et d'indépendance kurde. Enfin, durant les années soixante, les différents mémorandums rédigés par Mustafa Barzani et ses partisans en Irak révèlent les transformations induites par des contextes où la lutte armée alterne avec des négociations entre Kurdes et dirigeants irakiens. Plutôt que de considérer que l'utopie kurde aurait muté au cours du vingtième siècle d'une vision programmatique révolutionnaire en une vision réformiste à des fins d'intégration politique, il importe de mettre en avant la souplesse de la production symbolique adaptée à des contextes dans lesquels les Kurdes résistent par la force armée ou cherchent à s'affranchir de l'intégration politique au sein des Etats-nations.
      How can a Kurdish utopia be formed and maintained in history in the most varied territorial and political configurations? Based on documents produced by Kurdish actors and preserved in French archival repositories, the construction of a Kurdish utopia is studied in three distinct contexts. First of all, the settlement of the First World War, which organized the dismemberment of the Ottoman Empire, was interpreted by Kurdish nationalists as a recognition of state. Then, the Republic of Kurdistan, proclaimed in Iran in 1946, renewed the Kurdish imagining by making concrete the objectives of Kurdish autonomy and independence. Finally, during the 1960s, the various memoranda drafted by Mustafa Barzani and his supporters in Iraq reveal the transformations induced by contexts in which the armed struggle alternated with negotiations between Kurds and Iraqi leaders. Rather than considering that the Kurdish utopia mutated during the twentieth century from a revolutionary programmatic vision to a reformist one for the purpose of political integration, it is important to highlight the flexibility of symbolic production adapted to contexts in which Kurds resist by armed force or seek to free themselves from political integration within nation states.