Contenu du sommaire : Apparences, politique et Révolution
Revue | Annales historiques de la Révolution française |
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Numéro | no 409, juillet-septembre 2022 |
Titre du numéro | Apparences, politique et Révolution |
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Introduction
- Apparences, politique et Révolution - Jean-Pierre Lethuillier, Dominique Godineau p. 3-10
Articles
- Le remodelage du vestiaire et du corps à la fin du XVIIIe siècle en Angleterre - Peter McNeil p. 11-40 Dans la dernière décennie du XVIIIe siècle, l'influence « révolutionnaire » de l'anglophilie et des nouveaux modes vestimentaires anglais a influencé une grande partie de l'Europe occidentale. En Angleterre, de nombreuses tensions autour des attitudes à l'égard de l'habillement et des apparences sont apparues autour de la figure du « macaroni », un type de dandy évoqué dans nombre de textes, d'images, de pièces de théâtre, entre 1760 et 1780. Les vêtements indiquant des affiliations politiques, sociales ou patriotiques étaient une vieille une tradition anglaise. Le politicien whig Charles James Fox (1749-1806) est un exemple particulièrement significatif de l'évolution vestimentaire de la fin du XVIIIe siècle, passant délibérément de l'élégance au négligé pour signifier son parcours politique. Après la Révolution française, la réaction burkéenne a réactivé de nombreuses oppositions anglo-françaises plus anciennes, dans lesquelles l'habillement et les apparences étaient considérés comme des expressions de la différence du caractère national des deux pays.The « revolutionary » influence of Anglophilia and new English modes of dressing influenced much of Western Europe at the time of the French Revolution. In England, many of the tensions around attitudes toward dress and appearances coalesced around the figure of the « macaroni », a type of fop who was prominent in a range of written, visual and theatrical traditions, 1760-1780. England had a tradition of varied clothing types that might indicate party-political, sociable or patriotic affiliations. Whig politician Charles James Fox (1749-1806) provides a case of a particularly significant late-eighteenth century clothing evolution from foppery to deliberate shabbiness. Following the French Revolution, a Burkean reaction restated many older Anglo-French dualities, in which dress and appearances were considered to be expressions of national-character difference.
- Savoir-faire et savoir être : coiffures, perruques et perruquiers pendant la Révolution - Catherine Lanoë p. 41-63 Depuis la fin des années 1980 jusqu'à une date récente, plusieurs historiens se sont consacrés aux vêtements et à la mode de la capitale française à l'époque de la Révolution. Si certains d'entre eux ont inféré des événements et des idées politiques des effets concrets sur les apparences, la question des coiffures et des perruques n'a été finalement que peu traitée. Elle mérite d'être réexaminée, à la lumière d'un positionnement historiographique ancré non pas seulement dans l'histoire de la mode, mais aussi dans celle des soins du corps. Croisée à l'analyse des sources institutionnelles et iconographiques, l'exploitation des actes de la pratique des professionnels – perruquiers, coiffeurs, marchands de cheveux et de modes – est ici privilégiée. Elle permet de faire un tableau nuancé des effets de la Révolution sur les gestes et les représentations de la coiffure, de dessiner les contours d'un marché en pleine restructuration et d'interroger la question de la politisation des perruques.Since the late 1980s, several historians have focused on clothing and fashion in the French capital during the Revolution. If some among them have observed the influence of political events and ideas on the culture of appearance, the specific subject of hairstyles and wigs has received little scholarly treatment. Thus, it deserves examination in light of an historiography inspired not only by the history of fashion, but also by that of body care. In addition to the analysis of institutional and iconographic sources, the practice of professionals - wigmakers, hairdressers, hair and fashion merchants - is given special attention. This approach allows a nuanced picture of the effects of the Revolution on gestures and representations of hairdressing, as well as the demarcation of the contours of a market in full evolution. And it also raises the question of the politicization of wigs.
- Se costumer : des comédiens entre vie privée et exercice professionnel - Philippe Bourdin p. 65-91 Pour créer l'illusion, les comédiens doivent d'abord compter sur leurs propres garde-robes. Seuls les théâtres principaux permettent de les compléter par les richesses de leurs magasins. La Révolution voit aboutir en partie un débat du siècle sur l'historicité et la vraisemblance des costumes, tout en continuant à proposer des stéréotypes pour représenter l'étranger. Elle impose brièvement sur scène, d'abord pour les comédiens les plus engagés au service de leurs nouveaux droits civiques, les cocardes, les tenues du quotidien, l'image du sans-culotte. Mais les inventaires après décès, ceux des magasins de costumes nous prouvent que les mutations vestimentaires portées par la décennie demeurent marginales sur scène. La rapidité des événements, les problèmes financiers des troupes et des artistes, la prédominance des reprises sur les pièces nouvelles en sont autant d'explications.To create an illusion, actors had to rely first on their own wardrobes. And it was only the largest theaters, with their own rich collections, that could furnish additional accoutrements. The Revolution was to see the end, in part, of a century-long debate on the historicity and verisimilitude of costumes, while continuing to propose stereotypes to represent the foreigner. This was manifested on the stage, first among those actors most committed to the new civic rights, by the display of cockades, the use of ordinary clothes, the image of the sans-culotte. Yet the examination of death inventories, those detailing the available stock contained in costume shops, demonstrates that the variations in clothing worn on stage during the Revolutionary decade remained fairly minor. The pace of events, the financial problems of acting troupes and artists, the predominance of repeat performances compared with new plays are so many explanations for this phenomenon.
- Costume, apparence et identité politique des citoyennes (1789-1794) - Dominique Godineau p. 93-116 L'article analyse les rapports entre costume, apparence et identité politique des citoyennes et les luttes symboliques qui y sont attachées en 1789-1794. Dans un premier temps, on recherche les éventuelles transformations du costume féminin dans la presse de mode, puis dans les archives policières et l'iconographie. On s'intéresse ensuite à des symboles politico-vestimentaires : l'obligation de porter la cocarde (septembre 1793) est une reconnaissance de l'identité politique des citoyennes ; les incidents provoqués par le bonnet rouge (octobre 1793) sont utilisés pour rappeler la nécessité de maintenir les différences, politiques et vestimentaires, entre hommes et femmes, et renvoyer celles-ci à une frivolité non politique. Une dernière partie traite du refus de la parure, énoncé lorsque des femmes font don de leurs bijoux en 1789, puis dans des discours qui présentent les ornements vestimentaires comme des symboles de l'Ancien Régime et des instruments de servitude des femmes.This article analyzes the relationship between costume, appearance, and the political identity of female citizens and the symbolic struggles associated with them during the years 1789-1794. The author looks for possible transformations in female costumes as recorded in the fashion press, in police archives, and in contemporary iconography. She also examines political symbols in clothing; the obligation to wear the cockade (September 1793) is a sign of the political identity of female citizens, and the incidents provoked by the bonnet rouge (October 1793) serve as a reminder of the need to maintain differences, political as well as in clothing, between men and women, but for women to relegate them to a non-political frivolity. The last part of the article deals with the repudiation of adornment, initiated when women donated their jewels in 1789, and later stated in speeches deprecating clothing ornaments as symbols of the Old Regime and reflections of women's servitude.
- Les modes du Directoire et la politique - Jean-Pierre Lethuillier p. 117-144 L'article cherche à distinguer, en s'appuyant sur l'image, la presse et des rapports de police, des groupes définis, sous la Convention thermidorienne et le Directoire, par des pratiques vestimentaires et des positions politiques : Muscadins, Incroyables, Merveilleuses, « collets » de l'an V. La politisation du vêtement, déjà forte dans les premières années de la Révolution, loin de s'essouffler, trouve un moment de paroxysme sous le Directoire. Les opposants aux Jacobins puis au Directoire multiplient les signes politiques dans la construction de leur apparence en sollicitant, non des cocardes, mais des éléments habituels du paraître (coiffures, collets, etc.). La police finit par s'inquiéter des renouvellements de la mode. Les audaces vestimentaires des Merveilleuses signalent une liberté du corps et des mœurs qui est d'autant plus facilement dénoncée qu'elle renverrait à la corruption, à l'immoralité, supposées être des tares du Directoire.This article seeks to differentiate by the use of images, newspapers, and police reports, the distinctive political groups under the Thermidorian Convention and the Directory according to their clothing practices and political positions : « Muscadins », « Incroyables », « Merveilleuses », and the « collets » of the year V. The politicization of clothing, already strong in the first years of the Revolution, far from running out of steam, reached its climax during the Directory. The adversaries of the Jacobins, and then of the Directory, increased the political elements in the construction of their appearance by deploying, not cockades, but the usual elements of appearance (hair styles, collars, etc.). The police became concerned about such changes in fashion. The provocative clothing worn by the « Merveilleuses » signaled a freedom of the body and morals all the more easy to condemn as it seemed to symbolize the corruption and the immorality often supposed to be among the defects of the Directory.
- Du zarif au galant. Modes et Corps à l'âge des révolutions dans les pays roumains (1780-1830) - Constanţa Vintilǎ p. 145-168 Cet article examine les rapports entre vêtements et révolution, à travers des sources privées, diplomatiques et visuelles. Les pays roumains, entre 1780 et 1830, connaissent en effet de multiples transformations qui impliquent les apparences et le mode de vie. Le contexte géopolitique stimule le passage de la mode « à la turca » à une mode « à la franca », grâce à une importante et permanente présence russe et française dans les villes, à la diffusion d'un esprit révolutionnaire, mais aussi par une ouverture à ces idées venues de l'Empire ottoman. Le processus est complexe avec des allers et retours, conditionné par le progrès de l'éducation, l'investissement économique et culturel dans un autre goût, et surtout par les changements politiques arrivés dans l'Europe du Sud-Est.This article examines the relationship between clothing and revolution, using private, diplomatic, and visual sources. The Romanian countries between 1780 and 1830 underwent several transformations that affected appearances and lifestyle. The geopolitical context inspired the transition from fashion « à la turca » to fashion « à la franca », because of the large and permanent Russian and French presence in cities, as well as the diffusion of a revolutionary spirit, which signaled an openness to these ideas coming from the Ottoman Empire. The process was complex, with backward and forward developments, influenced by the progress of education, the economic and cultural investment in another taste, and above all by the political changes that have occurred in Southeast Europe.
- « Fiez-vous donc aux apparences ! » : mascarades, miroirs et souvenirs vestimentaires de la Révolution sous la Restauration - Richard Wrigley p. 169-188 Un aspect de la culture politique révolutionnaire est l'utilisation de la tenue vestimentaire pour signifier les identités et les fidélités nouvelles. Cet usage a survécu à la Révolution et s'est perpétué jusqu'à nos jours sous la forme de l'écharpe tricolore municipale. Cependant, ce qui a également survécu, c'est une profonde dualité dans les idées sur la lisibilité des apparences : la volonté de reconnaître l'affiliation politique d'une personne à partir de ses vêtements se heurte à la reconnaissance d'une manipulation « contre-révolutionnaire » des symboles extérieurs superficiels. Cet article étudie la manière avec laquelle un discours aussi fracturé a informé les attitudes à l'égard de l'habillement, en tant que forme de langage politique sous la Restauration.One aspect of the new political culture of the Revolution was the use of dress to signal new identities and allegiances. This usage outlived the Revolution, surviving into the present in the form of the municipal écharpe tricolore. However, what also survived was a profound duality in ideas about the legibility of apparences : the desire to be able to recognise someone's political affiliation from their outward clothing being undermined by recognition of « counter-revolutionary » manipulation of superficial exterior symbols. This article explores how such a fractured discourse informed attitudes to dress as a form of political uniform in the Restoration.
- Le remodelage du vestiaire et du corps à la fin du XVIIIe siècle en Angleterre - Peter McNeil p. 11-40
Sources
Position de thèse
- Le régime mixte chez Condillac et Mably : éléments du républicanisme libéral dans le XVIIIe siècle français - Edern De Barros p. 199-206
Comptes rendus
- Comptes rendus - p. 207-243