Contenu du sommaire : Négocier sa place en montagne. Faire l'expérience de la domination et de sa contestation : perspectives radicales
Revue |
Revue de Géographie Alpine ![]() |
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Numéro | vol. 112, no 3, 2024 |
Titre du numéro | Négocier sa place en montagne. Faire l'expérience de la domination et de sa contestation : perspectives radicales |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Négocier sa place en montagne. Perspectives radicales - Mari Oiry Varacca, Léa Sallenave
- Negotiating One's Place in the Mountains: Radical Perspectives - Mari Oiry Varacca, Léa Sallenave
- Penser les conditions d'une normativité blanche, hétéro-masculine et bourgeoise dans les montagnes Rocheuses (États-Unis) - Gabrielle Saumon Cet article propose une réflexion sur les manières de penser les dominations à l'intersection des rapports de classe, de race et de genre dans les montagnes Rocheuses aux États-Unis. Nécessairement situé à l'intersection de plusieurs champs disciplinaires, le texte avance des pistes réflexives pour tenter d'identifier les mécanismes par lesquels se constitue l'hégémonie d'un corps normatif blanc, hétéro-masculin et bourgeois dans ce territoire emblématique de la wilderness et des sports de pleine nature. Dépassant l'approche par les classes sociales, il s'agit alors de soumettre, comme de nouvelles strates analytiques, des axes de réflexion complémentaires, à partir notamment d'une épistémologie renouvelée des sports de nature et des espaces de montagne grâce à des travaux éclairant les questions raciales et les questions de genre.
- Reflections on the Conditions of White, Straight, Male and Upper-Middle Class Normativity in the Rocky Mountains (USA) - Gabrielle Saumon This article reflects on forms of domination at the intersection of class, race and gender in the Rocky Mountains (USA), and is itself situated at the intersection of several disciplinary fields. The text proposes avenues of reflection in an attempt to identify the mechanisms by which the hegemony of a normative white, straight, male and upper-middle class body is constituted in the historic place of the Wild West myth. Going beyond a class-based approach, the aim is to present new analytical strata and complementary lines of inquiry, based in particular on a new epistemology of outdoor sports and mountains, drawing on work that sheds light on race and gender issues.
- Writing Black Life in Mountains: Race and Representation in an Emerging American Literary Field - Anthony Kwame Harrison In this article, I explore the emergence of a developing literary tradition focusing on African Americans living in mountainous regions. In doing this, I discuss the appearance of the term “Affrilachian”—combining African (American) and Appalachian—as a distinct Black American mountain identity. I additionally examine three post-1970s books, all written by African American authors in different decades, that illustrate important contours in the development of this literary field: David Bradley's The Chaneysville Incident (1981); Henry Louis Gates Jr's Colored People (1994); and Crystal Wilkerson's The Birds of Opulence (2016). All three books present alternative visions of how Black people belong among mountains and negotiate the racist structures that have historically worked to deny their connection to them. In tracing the differences between the three books, I underscore a steady progression towards more liberatory and affective attachments to land. Ultimately, I argue that the emergence of this new literary tradition, centering Black mountain life, both affirms and advances African Americans' longstanding connections to mountains, and opens up additional space for recognizing their contemporary place among them.mountains, Black Americans, literature, representation, Appalachia
- La vie des Noir·es dans les montagnes : race et représentation dans un domaine littéraire américain émergent - Anthony Kwame Harrison Dans cet article, je me penche sur l'émergence d'une tradition littéraire en cours de développement, axée sur les Afro-Américain·es vivant dans les régions montagneuses. Dans ce contexte, je discute de l'apparition du terme « Affrilachien·ne » - combinant Africain·e(-Américain·ne) et Appalachien·ne - en tant qu'identité montagnarde noire américaine singulière. Je passe également en revue trois livres publiés après les années 1970, écrits par des auteurices afro-américain·es au cours de différentes décennies. Ceux-ci ont été choisis car ils illustrent de manière emblématique le développement de ce champ littéraire : The Chaneysville Incident (1981) de David Bradley, Colored People (1994) de Henry Louis Gates Jr et The Birds of Opulence (2016) de Crystal Wilkerson. Ces trois ouvrages présentent des visions alternatives de l'appartenance des personnes noires aux montagnes et de la façon dont elles négocient les structures racistes qui ont historiquement œuvré pour nier leurs liens avec elles. En retraçant les différences entre les trois livres, je souligne une progression constante vers des attachements plus libératoires et affectifs à la terre. Pour finir, je soutiens que l'émergence de cette nouvelle tradition littéraire, centrée sur la vie montagnarde de la population noire, affirme et fait progresser les liens ancestraux des Afro-Américain·es avec les montagnes, et ouvre la voie à la reconnaissance de leur place contemporaine parmi elles.
- De l'espace conçu à l'espace vécu : à qui profite la « transition » des territoires touristiques pyrénéens ? Le cas des vallées d'Ax en Haute-Ariège - Emma Bardou, Jérôme Pelenc Cet article analyse les recompositions socio-spatiales d'un territoire touristique pyrénéen, les vallées d'Ax en Haute-Ariège, dans un contexte de « transition » d'un modèle économique à bout de souffle, celui des stations de ski. Au prisme de la géographie radicale, en mobilisant notamment les travaux d'Henri Lefebvre et de David Harvey, il interroge l'opportunité que peut représenter ce moment charnière pour une restructuration géographique du capital qui tend à (re)produire un espace qui lui est propre. À partir des résultats d'une enquête de terrain réalisée auprès d'habitant·es du territoire des vallées d'Ax et des acteurs et actrices de l'aménagement touristique du massif pyrénéen, cet article met en lumière le décalage existant entre l'espace conçu par les acteurices de l'aménagement et l'espace vécu par ses habitant·es. D'un côté, l'espace conçu s'apparente à une entreprise de loisirs dans laquelle le public et le privé s'associent pour réaliser les investissements nécessaires à son fonctionnement et qui tend à absorber chaque ressource pour en tirer profit. C'est aussi l'image du territoire, son « capital symbolique collectif » lié aux imaginaires touristiques, qui est exploité pour renforcer son attractivité et faire venir de nouveaux et nouvelles touristes, résident·es et entreprises des métropoles. Nous montrons ainsi comment ce territoire acquiert une certaine centralité, représentant une réserve, à la fois foncière et symbolique, de l'urbain. D'un autre côté, l'espace conçu écrase l'espace vécu en limitant les possibilités pour les habitant·es, et en particulier pour les moins favorisé·es, de s'approprier leur territoire. L'habitabilité du territoire est remise en cause par les logiques de développement touristique, notamment au regard des difficultés d'accès au logement qu'elles induisent, mais aussi du fait de l'absence de lieux permettant la création de lien social et l'organisation collective des habitant·es.
- From the Conceived Space to the Lived Space: Who Actually Benefits from the “Transition” of Pyrenean Tourism Areas? The Case of the Ax Valleys in Haute-Ariège - Emma Bardou, Jérôme Pelenc This article analyses the socio-spatial reconfigurations of a specific Pyrenean tourism area, the Ax valleys in Haute-Ariège, within a “transition” context of an economic model that is gasping for life, that of ski resorts. Through the prism of radical geography, namely relying on the works of Henri Lefebvre and David Harvey, it questions the opportunity that this pivotal moment could very well represent in terms of a geographical restructuring of capital which tends to (re)produce a space of its own. Using the results of a field survey carried out among inhabitants of the Ax valleys and actors in the Pyrenean mountains tourism development process, this article highlights the gap between the conceived space, designed by the actors of said planning, and the space that is actually lived by its inhabitants. On the one hand, the conceived space resembles a leisure business in which public and private partners join forces to make the necessary investments in order to run it while also having a tendency to absorb each resource for profit. The image of the territory, its “collective symbolic capital” linked to tourist imaginaries, is also exploited to boost its attractiveness and bring in new tourists, residents and businesses from the cities. We show how this territory acquires a certain centrality, representing a reserve for the city, both in terms of land and in a symbolic sense. On the other hand, the conceived space overrides the lived space by limiting inhabitants' opportunities to appropriate their territory, especially those who are less privileged. The logics of tourism development challenge the liveability of the territory, especially given the subsequent difficulties of access to housing, but also due to the lack of places for social bonding and collective organisation of the inhabitants.
- « Gentrification altitudinale » et « descenseur social valléen » par le prisme de l'accès au logement dans les Alpes françaises - Quentin Benoît Guillaume Drouet, Anne Barrioz Les phénomènes de gentrification touristique, les processus de métropolisation et de migrations d'agrément identifiés dans les Alpes, invitent à s'intéresser aux rapports de domination dans les hautes vallées touristiques par une approche géographique. Existe-t-il des ségrégations spatiales entre résident·es permanent·es, saisonniè·res et résident·es secondaires au sein des communes touristiques ou dans les vallées ? La mise en perspective des données quantitatives et qualitatives recueillies au cours de deux thèses portant à la fois sur les parcours résidentiels dans les hautes vallées alpines (2019) et des communes-supports de stations touristiques (2024) mettent en lumière une mécanique de descenseur social valléen dans la dernière décennie, soit un déplacement des résident·es permanent·es vers l'aval des vallées ou ailleurs. L'hébergement touristique (la résidence secondaire, le pied à terre du ou de la résident·e originaire de la vallée, le logement saisonnier) crée un marché immobilier très concurrentiel en altitude dont la valorisation foncière peut générer des migrations résidentielles entraînant des recompositions sociales valléennes. L'étude des rapports de domination aide alors à comprendre comment les interactions entre des acteurices qui vivent et décident du développement en montagne participent à la gentrification altitudinale et provoquent l'effet de descenseur social valléen. Ces jeux d'acteurs oscillent entre, d'un côté, l'adhésion à une coalition de la croissance, la rente, la montée en gamme, et, de l'autre, le sauvetage d'une vie locale à l'année, incluant tous les groupes sociaux.The phenomena of tourist gentrification, the processes of metropolisation, and the amenity migration identified in the Alps invite us to examine the power dynamics in high-altitude tourist valleys through a geographical approach. Are there spatial segregations between permanent residents, seasonal workers, and second-home owners within tourist municipalities or in the valleys? The perspective offered by the quantitative and qualitative data collected in two Phd researches—one focusing on residential trajectories in the high Alpine valleys (2019) and the other on the resort municipalities (2024)—highlights a mechanism of valley' social descender in the past decade, specifically a movement of permanent residents downstream or elsewhere in the valleys. Tourist accommodation (second homes, the pied-à-terre of valley-born residents, seasonal housing) creates a highly competitive real estate market at high altitudes, where land value appreciation can generate residential mobility, leading to social restructuring in the valleys. The study of power relations helps to understand how interactions between actors who live in and shape the development of the mountains might contribute to altitude-based gentrification and provoke valley' social descender in the valley. The interplay between stakeholders oscilliate between, on one hand, support for a growth coalition based on profit, upgrading, and rent-seeking, and, on the other hand, efforts to preserve year-round local living standards that includes all social groups.
- “Altitudinal Gentrification” and “Social Descent in the Valley” through the Lens of Housing Access in the French Alps - Quentin Benoît Guillaume Drouet, Anne Barrioz The phenomena of tourist gentrification, the processes of metropolisation, and the amenity migration identified in the Alps invite us to examine the power dynamics in high-altitude tourist valleys through a geographical approach. Are there spatial segregations between permanent residents, seasonal workers, and second-home owners within tourist municipalities or in the valleys? The perspective offered by the quantitative and qualitative data collected in two Phd researches—one focusing on residential trajectories in the high Alpine valleys (2019) and the other on the resort municipalities (2024)—highlights a mechanism of valley' social descender in the past decade, specifically a movement of permanent residents downstream or elsewhere in the valleys. Tourist accommodation (second homes, the pied-à-terre of valley-born residents, seasonal housing) creates a highly competitive real estate market at high altitudes, where land value appreciation can generate residential mobility, leading to social restructuring in the valleys. The study of power relations helps to understand how interactions between actors who live in and shape the development of the mountains might contribute to altitude-based gentrification and provoke valley' social descender in the valley. The interplay between stakeholders oscilliate between, on one hand, support for a growth coalition based on profit, upgrading, and rent-seeking, and, on the other hand, efforts to preserve year-round local living standards that includes all social groups.
- La montagne (s)élective - Pierre Mercklé, Delphine Moraldo, Caroline Datchary, Benoît Tudoux Y a-t-il des inégalités sociales d'accès à la « montagne proche », celle des randonnées à la journée ou de quelques jours avec nuitées en tente ou en refuge ? Sont-elles si fortes que les marcheur·ses qui se croisent sur les chemins de montagne et qui se rencontrent dans et aux abords des refuges possèdent des profils sociaux extrêmement homogènes ? Ou bien la « montagne proche » amène-t-elle à se côtoyer des personnes de milieux sociaux différents, aux approches et aux représentations de la montagne potentiellement antagoniques ? Et que se passe-t-il alors ? Pour répondre à ces questions, l'article s'appuie sur les résultats d'une enquête réalisée entre 2015 et 2017 principalement dans et autour de deux refuges accessibles en quelques heures depuis les villes adjacentes, l'un pyrénéen et l'autre alpin, en mobilisant des méthodes mixtes (questionnaire, entretien, observation, analyse de corpus documentaires). La première partie montre que le maintien d'inégalités d'accès aux refuges n'exclut pas des logiques de différenciation sociale des caractéristiques des pratiquants et de leurs usages. La seconde partie explore d'abord les façons dont ces logiques articulent de manière complexe les goûts de la performance (« transpirer »), de la nature (« contempler ») et de la sociabilité (« partager »). Puis elle établit comment les rapports de domination qui produisent cet espace social particulier se perçoivent au travers de tensions entre usagèr·es, dont les discours structurés par des oppositions entre « eux » et « nous » retraduisent dans la montagne des rapports sociaux de classes élaborés dans d'autres sphères sociales et d'autres espaces. L'analyse montre finalement que du fait de la domination d'un type d'usagèr·es (appartenant aux fractions diplômées des classes favorisées) et d'un type distinctif d'usages de la montagne (mêlant ascèse sportive, ressourcement et sociabilité cultivée), celle-ci est à la fois le lieu d'une opposition entre des usages socialement différenciés, et celui du maintien d'un usage légitime dominant qui tend à occulter les autres.
- The (s)elective Mountain - Pierre Mercklé, Delphine Moraldo, Caroline Datchary, Benoît Tudoux Are there social inequalities regarding access to the ‘nearby mountain' - that is, mountain for day hikes or hikes lasting a few days with overnight stays in tents or refuges? Are they so strong that the hikers who meet on mountain paths and in and around mountain refuges share homogenous social profiles? Or does the ‘nearby mountain' bring together people from different social backgrounds, with potentially antagonistic approaches and representations of the mountains? And what happens then? To answer these questions, the article draws on the results of a survey conducted between 2015 and 2017 mainly in and around two refuges accessible in a few hours from adjacent towns, one in the Pyrenees and the other in the Alps, using mixed methods (questionnaire, interview, observation, analysis of documentary corpus). The first two parts of the article explore the differentiation logics at work in the social space of recreational uses of the mountains, to show how they articulate in a complex way the tastes for performance (‘to sweat'), nature (‘to contemplate') and sociability (‘to share'). The final section shows how the relations of domination that produce this particular social space are perceived through the tensions between users, whose discourses, structured by oppositions between ‘them' and ‘us', re-translate in the mountains social class relations developed in other social spheres and other spaces. Finally, the analysis shows that the domination of one type of user (belonging to the educated fractions of the privileged classes) and a distinctive type of use of the mountains (combining sporting asceticism, recharching one's battery and cultivated sociability) means that the mountains are at once the site of opposition between socially differentiated uses, and the site of the maintenance of a dominant legitimate use that tends to overshadow the others.
- Cohabiter en alpage : entre tensions, imaginaires et réalités de bergèr·es, gardien·nes de refuge et pratiquant·es d'activités récréatives - Myriam Ribert, Émilie Crouzat, Philippe Bourdeau, Victor Andrade, Hermann Dodier Lieu de passage et de croisement, la montagne et ses alpages sont des espaces où cohabitent une multitude de protagonistes. Ces paysages, aujourd'hui convoités par les pratiquant·es d'activités récréatives en quête de nature, de dépaysement et de déconnexion, voient leurs usages se diversifier. Dans leurs refuges et alpages, les gardien·nes et les bergèr·es se retrouvent en première ligne comme témoins de ces évolutions. Dans l'obligation de s'adapter pour composer avec le multi-usage des lieux, elles et ils deviennent, volontairement ou par défaut, des acteurices incontournables de la cohabitation en montagne, laquelle ne se produit pas sans tensions. En effet, les multiples usages et pratiques de ces espaces — récréatifs et pastoraux — peuvent se chevaucher et parfois entrer en conflit. Dans ces « lieux-mouvements » que sont les alpages, l'appropriation spatiale est précaire et constamment remise en question par de nouveaux et nouvelles arrivant·es, ce qui oblige les acteurices des alpages à renégocier leur place tout comme leurs pratiques, identités et représentations de l'espace. En explorant trois sites alpins, l'enquête1 menée en 2023 par les dispositifs Alpages Sentinelles et Refuges Sentinelles souligne la dimension conflictuelle de la cohabitation. Entre rapports de force et compromis, l'imaginaire récréatif dominant prend le pas sur une montagne pastorale méconnue et parfois invisible. Dans un contexte de pressions touristiques et climatiques qui s'accentuent, où les acteurices peuvent se sentir isolé·es, les frontières qui se dessinent risquent de s'amplifier au même titre que le besoin de dialogue et de médiation-éducation.
- Cohabitation in Mountain Pastures: Tensions, Fantasies and Realities of Shepherds, Hut Caretakers and Outdoor Recreationists - Myriam Ribert, Émilie Crouzat, Philippe Bourdeau, Victor Andrade, Hermann Dodier Mountains and their alpine pastures are places of passage and intersection: spaces where a multitude of actors coexist. Coveted by outdoor enthusiasts on a quest for nature and disconnection from daily life, these landscapes are undergoing profound changes and diversification of their uses. In mountain huts and alpine pastures, caretakers and shepherds have a front row seat to these changes. With no other choice but to adapt and come to terms with these new diverse uses, they are playing a key role – willingly or because they have no other option – in a new and contentious form of cohabitation of the mountains. The multiplication of uses and practices, recreational and pastoral, in these mountain environments can overlap and sometimes be in conflict with one another. In mountain pastures, or so-called “movement spaces”, claims to space can be precarious and are constantly called into question by new arrivals, requiring historical actors to defend and renegotiate their claims as well as their very identities, practices and perceptions. Our fieldwork1, carried out in three different alpine sites in the context of the Sentinel Alpine Huts and Pastures programs, underscores the conflictual dimension of new patterns of cohabitation. Ranging from power struggles to compromise, increasingly dominant recreational practices and perceptions are replacing more traditional pastoral land-use, which tends to be both poorly understood and at times invisible for outdoor recreationists. With shepherds facing isolation and mounting pressure from both tourism and climate change, rifts between actors are expanding as is the need for dialogue, education and mediation.
- Contrôles des corps et résistances par le soin dans la production de l'espace frontalier haut-alpin du Briançonnais - Daphné Velay, Camille Chassouant, Léna Malbrunot Les contrôles aux frontières avec l'Italie ont été renforcés par la France à partir de 2015 dans la région de Briançon, ville des Hautes-Alpes. Des patrouilles mobiles en montagne sont chargées de repérer, interpeller et éloigner les personnes exilées considérées « ESI » (étranger·es en situation irrégulière), la fonction de filtrage de la frontière alpine se traduisant par une politique de ciblage et d'expulsion des corps migrants illégalisés. Les moyens colossaux dédiés à ce dispositif de contrôle migratoire pressent les exilé·es à affronter les conditions hostiles de la montagne pour échapper aux refoulements systématiques et à la violation de leurs droits. Les conditions climatiques et topographiques particulières de cet espace frontalier permettent à l'administration d'invoquer les « risques » encourus pour se prévaloir d'une mission de mise à l'abri, adoptant une rhétorique sécuritaire/humanitaire ambivalente pour justifier cette mission de contrôle. Cependant les conditions effectives d'accès aux soins pour les personnes exilées interpellées demeurent arbitraires et les conséquences des passages de la frontière sur la santé s'avèrent importantes : cette frontière blesse et épuise les corps. S'opposant à la violence de la frontière, les pratiques du secours et du soin, qu'elles s'affirment en montagne pendant les maraudes ou à Briançon aux Terrasses solidaires, contestent le biopouvoir que l'État s'arroge sur la vie des exilé·es illégalisé·es. L'occupation et l'appropriation de l'espace par les maraudeur·euses participent ainsi à redéfinir la frontière, interrogeant dans le même temps un ensemble de rapports de domination qui façonnent l'espace frontalier. Au cœur des relations conflictuelles entre les forces de l'ordre et les soignant·es bénévoles de Médecins du Monde se trouvent les diagnostics posés par ces dernier·es et les décisions de prise en charge médicale et de mise à l'abri des personnes exilées rencontrées dans la montagne. Lorsque ces décisions se heurtent aux contrôles policiers, les soignant·es se retrouvent alors à devoir négocier, argumentant la vulnérabilité des personnes et leur droit à bénéficier de soins.
- The Role of Bodily Control and Resistance through Care in the Making of the French-Italian Alpine Border near Briançon - Daphné Velay, Camille Chassouant, Léna Malbrunot Since 2015, France has stepped up controls at its border with Italy in the area near Briançon, a town in the Hautes-Alpes. Mobile patrols in the mountains are tasked with spotting, arresting and removing migrants considered to be ‘ESI' (illegal foreign nationals), with the filtering role of the Alpine border reflected in a policy of targeting and expelling the bodies of illegalised migrants. The colossal resources dedicated to this migration control apparatus mean that migrants have to brave the hostile conditions of the mountains to avoid systematic pushbacks and violation of their rights. The particular climatic conditions and topography of this border space allow the authorities to invoke the “risks” incurred in order to present themselves as pursuing a sheltering mission, adopting an ambivalent securitisation/humanitarian rhetoric to justify these controls. But the conditions under which arrested migrants are granted access to healthcare remain arbitrary, and border crossings have a significant impact on health: the border is an exhausting and injuring space. In opposition to this border violence, the practices of rescue and care, whether they are asserted via maraude outreach patrols in the mountains or at the Terrasses Solidaires centre in Briançon, challenge the biopower that the state claims for itself over the lives of illegalised migrants. The occupation and appropriation of the space by maraude volunteers is helping to redefine the border, while at the same time challenging the relations of domination that shape the border space. The conflictual relations between the police and Médecins du Monde volunteer health workers centre on the diagnoses made by the latter, and decisions to provide medical care and shelter to the migrants they meet in the mountains. When these decisions clash with police controls, health workers find themselves having to negotiate, and to emphasise the vulnerability of these people and their right to receive care.
- Se rendre in/visible dans les espaces touristiques alpins : les stratégies visuelles de résistance des personnes en migration à la frontière franco-italienne - Sarah Bachellerie Cet article s'intéresse à l'in/visibilité comme rapport de pouvoir dans les espaces touristiques alpins à la frontière franco-italienne (le littoral azuréen de Menton-Vintimille, et les stations de ski hautes-alpines de Montgenèvre et Clavière). Le contrôle migratoire mis en place à la frontière repose sur un profilage social et « ethno-racial », par les forces de l'ordre, des personnes qui fréquentent cet espace. Les inégalités sociales et raciales qui structurent l'espace alpin, rendant hypervisibles les minorités « non-blanches » et les pratiquant·es « non-légitimes » de l'espace touristique, favorisent le ciblage policier des étrangèr·es originaires du « Sud global ». Pour éviter les contrôles, les personnes en migration ciblées tentent de se rendre invisibles en se cachant dans la montagne ou en mobilisant la stratégie du passing, qui consiste à se faire passer pour un·e voyageureuse légitime. Les stratégies de résistance au régime frontalier de la part des personnes en migration montrent leur capacité à analyser les rapports sociaux de classe et de « race » qui se jouent dans les espaces touristiques alpins pour déjouer les entraves à leur mobilité, subvertir l'ordre socio-racial imposé par la frontière et exercer leur liberté de circulation.
- Making Oneself In/Visible in Alpine Tourist Areas: Migrants' Visual Strategies of Resistance on the French-Italian Border - Sarah Bachellerie This article looks at the dynamics of in/visibility as a power relation in Alpine tourist areas along the French-Italian border, specifically the Côte d'Azur coastline of Menton–Ventimiglia and the Alpine ski resorts of Montgenèvre and Clavière. Migration control in these regions relies on social and “ethno-racial” profiling by law enforcement officers. The structural social and racial inequalities in the Alpine region render “non-white” minorities and “non-legitimate” tourists hypervisible, resulting in the disproportionate targeting of foreigners from the “Global South.” To evade control, targeted migrants adopt strategies of invisibility, such as hiding in the mountains or using the “passing” strategy, which involves presenting themselves as legitimate travelers. These strategies of resistance against the border regime demonstrate the migrants' nuanced understanding of the social relations of class and race at play in Alpine tourist areas. By circumventing obstacles to mobility and challenging the social-racial order imposed by the border, the migrants exercise their freedom of movement despite the restrictive border practices.