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Pouvoirs d'école?1

• Agrégation et ségrégation - Pierre Bourdieu, Monique De Saint Martin p. 2-50
  Agrégation et ségrégation. Considérer l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur (facultés et classes préparatoires, grandes et petites écoles, etc.) comme un champ, c'est se donner les moyens d'échapper à l'hagiographie monographique en prenant comme objet le réseau des relations objectives entre ces divers établissements. On voit alors que ce champ s'organise selon une structure homologue de celle de l'espace social, que les Grandes écoles en occupent le pôle dominant et constituent elles-mêmes un champ dont la structure est homologue à celle du champ du pouvoir. L'opposition fondamentale dans le champ des établissements d'enseignement supérieur sépare les grandes écoles des petites écoles ou des facultés, instituant ainsi, en un des points les plus stratégiques de tout l'espace social, une frontière sociale tranchée et définitive entre la grande porte et la petite porte, c'est-à-dire entre la grande et la petite bourgeoisie. Le sous-champ des grandes écoles se caractérise, lui aussi, par une opposition fondamentale, celle qui s'établit entre les écoles «intellectuelles» (l'Ecole normale supérieure surtout) et les écoles du pouvoir (École des hautes études commerciales, École nationale d'administration) et renvoie à l'opposition qui, dans le champ du pouvoir, sépare le pôle intellectuel ou artistique et le pôle économique ou politique. Ces homologies de structures indiquent assez qu'une théorie des modes de reproduction n'a rien à voir avec la notion commune de «succession» ou de «transmission héréditaire». Délaissant les études descriptives de «mobilité sociale», elle prend comme objet construit le champ des grandes écoles pour en analyser le fonctionnement en tant que structure et pour voir comment, au travers d'innombrables opérations pratiques de sélection subjectives et objectives, le système d'enseignement distribue les adolescents en classes aussi homogènes que possible et aussi différentes entre elles que possible du point de vue d'un certain nombre de critères déterminants, contribuant par là à reproduire et à légitimer l'ensemble des différences qui constituent, à chaque moment, la structure sociale.

  Aggregation an Segregation. By considering the whole set of higher education institutions (faculties, classes preparatoires, grandes écoles, and «petites écoles») as a field, one can avoid celebratory monography by studying the network of objective relationships among these different establishments. It can then be seen that the field is organised in accordance with a structure homologous to that of the social space ; the grandes écoles occupy the dominant pole and themselves constitute a field whose structure is homologous to that of the field of power. The fundamental opposition in the field of higher education institutions separates the grandes écoles from the «petites écoles» and the faculties, thereby defining a clear-cut, decisive frontier, at one of the most strategic points in the social structure, between the «royal road» and the «tradesmen's entrance», i.e. between the grande and petite bourgeoisie. The sub-field of the grandes écoles is itself shaped by a fundamental opposition between the «academic» colleges (especially the Ecole normale supérieure) and the «colleges of power» (the Ecole des hautes études commerciales, the Ecole nationale d'administration), reflecting the opposition, within the field of power, between the academic/artistic pole and the economic/ politicalpole. These structural homologies show clearly that a theory of modes of reproduction has nothing to do with the ordinary notion of «succession» or «hereditary transmission». Abandoning descriptive studies of «social mobility», it takes as its constructed object the field of the grandes écoles. It seeks to analyse the functioning of this field as a structure and to discover how, through countless practical operations of objective and subjective selection, the educational System distributes adolescents into classes that are both as homogeneous as possible and as different from each other as possible, in terms of a number of decisive criteria, thereby helping to reproduce and legitimize the set of differences which constitutes the social structure at any given moment.
• Capital culturel et patrimoine économique - Patrick Champagne p. 51-66
  Capital culturel et patrimoine économique. L'analyse factorielle des caractéristiques économiques et sociales de ménages agricoles traditionnels dont les chefs ont entre 50 et 65 ans montre que, dans une situation d'ouverture de l'espace rural, la capacité des familles à produire un successeur ne dépend pas seulement, comme tend à le faire croire le discours indigène lui-même, de la taille économique des exploitations à transmettre. Si la taille économique demeure pourtant, chez les agriculteurs, un indicateur puissant de position sociale, c'est qu'elle mesure, bien sûr, la dimension économique des exploitations mais aussi, sous une forme économique reconvertie, leur capital culturel et leur capital de relations passé et présent. On voit alors que ce que l'on appelle «capital économique» est, eh fait, le produit de la combinaison singulière d'un patrimoine économique et de la capacité, socialement conditionnée, de le mettre en valeur.

  Cultural Capital and Economic Assets. Factonal analysis of the economic and social characteristics of traditional farming households, where the head of the household is aged 50 to 60, shows that, as the rural space opens up, the capacity of families to produce a successor does not depend solely on the economic scale of the farms to be transmitted, as the actors' own discourse tends to suggest. If, within the farming community, economic scale does remain a powerful indicator of social position, this is because it measures not only the sheer economic magnitude of the holdings but also, in a converted economic form, the farmers' cultural capital and their capital of past and present relationships. It can thus be seen that what is called «economic capital» in fact represents a particular combination of economic assets with the socially conditioned capacity to exploit them.
• Juifs et luthériens dans le système scolaire hongrois - Victor Karady p. 67-85
  Juifs et luthériens dans le système scolaire hongrois. Les inégalités sociales devant l'école ont toujours pris la forme d'inégalités confessionnelles dans la Hongrie pré-socialiste. Cet article est plus particulièrement consacré au comportement des juifs et des luthériens dans le champ scolaire et aux facteurs de leur sur-scolarisation relative qu'on peut analyser comme des formes de réaction à la situation marginale qui leur a été historiquement imposée dans les rapports de force confessionnelle. L'excellence scolaire et l'intensité particulièrement forte de la fréquentation scolaire à tous les niveaux d'enseignement qui caractérisent les juifs et les luthériens tout au long de la période de modernisation historique (depuis 1867) se rattachent à des variables socio-morphologiques (structure territoriale du système scolaire et implantation géographique de cette population scolaire), aux caractéristiques des réseaux d'établissements confessionnels, aux effets directs des cultures religieuses, enfin aux stratégies spécifiques de mobilité sociale et d'orientation professionnelle liées aux différents types de marginalité religieuse qui marquent le statut des juifs et des luthériens.

  Jews and Lutherans in the Hungarian School System. Social inequalities in education in pre-socialist Hungary always took the form of religious inequalities. This article is more particularly concerned with the behaviour of Jews and Lutherans in the educational field and the factors behind their relative over-schooling, which can be analysed as forms of reaction to the marginal situation historically forced on them in denominational power relations. The scholastic excellence and particularly high rate of enrolment at all levels of education which characterised Jews and Lutherans throughout the period of historical modernisation (from 1867) are related to socio-morphological variables (the territorial structure of the school System and the geographical distribution of the school population), the characteristics of the network of denominational establishments, the direct effects of the religious cultures, and the specific social mobility and occupational strategies linked to the different types of religious marginality which define the status of Jews and Lutherans.
• A l'école de l'entreprise - Gabrielle Balazs, Jean-Pierre Faguer p. 86-92
  A l'école de l'entreprise. Séparées du monde scolaire, les écoles d'entreprise constituent un mode de formation et de sélection permettant d'attacher à l'entreprise par un baccalauréat préparé dans le milieu industriel une main-d'œuvre «diplômée» qui possède des qualités sociales et professionnelles obtenues d'ordinaire dans le milieu artisanal par l'apprentissage sur le tas ; elles regroupent des élèves dont les parents travaillent dans l'industrie ou le secteur privé, des enseignants anciens techniciens de l'entreprise, et constituent ainsi un milieu de formation favorisant les contacts avec le personnel et la transmission de l'esprit maison.

  At the Firm's School. Schools run by firms are eut off from the rest of the educational System and constitute a mode of training and selection through which, with the aid of a baccalauréat prepared for in the industrial milieu, the firm can win the loyalty of a«qualified» workforce with social and occupational qualities that are normally obtained in the apprenticeship milieu, through apprenticeship «on the job». These schools, bringing together pupils whose parents work in industry or the private sector and teachers who are former technicians of the firm, thus provide an educational environment favouring contact with the personnel and the transmission of the spirit of the firm.
• Graphique et science d'entreprise - Louis Pinto p. 93-97