Contenu du sommaire : Asie centrale, un enjeu géostratégique

Revue Le Courrier des Pays de l'Est Mir@bel
Numéro no 1057, septembre-octobre 2006
Titre du numéro Asie centrale, un enjeu géostratégique
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Asie centrale, un enjeu géostratégique. Avant-propos - p. 3 accès libre
  • L'Asie centrale, terrain de rivalités - Djalili Mohammad-Reza, Kellner Thierry p. 4-16 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
    A la suite des attentats du 11 septembre 2001, Vladimir Poutine avait accepté, au nom de la lutte anti-terroriste, l'installation de bases américaines dans les ex-républiques d'Asie centrale, ce qui leur a permis de développer leurs relations avec les Etats-Unis. La Russie s'est toutefois efforcée dès le début de 2002 de reconquérir le terrain perdu, aussi bien par le développement des relations bilatérales que par le renforcement du rôle de structures multilatérales comme l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et la Communauté économique eurasiatique (CEE). Ce regain d'influence demeure cependant fragile, les pays de la région ayant tendance à se méfier de l'ex-«grand frère». La Chine, pour sa part, a cherché à renforcer les liens bilatéraux avec les Etats de la région et à développer le rôle de l'OCS. Les résultats de ses efforts se font surtout sentir sur le plan économique, le volume des échanges ayant été multiplié par trois depuis 2002.
    Central Asia. A Locus of Rivalries Following on the September 11 2001 attacks, Vladimir Putin joined the war on terror and permitted the implantation of US bases in the ex-republics of Central Asia, enabling them to develop relations with the United States. From early in 2002, Russia has been endeavouring to regain lost ground by developing bilateral relations and by strengthening the role of multilateral organizations, such as the Collective Security Treaty Organization (CSTO), the Shanghai Cooperation Organization (SCO) and the Eurasian Economic Community (EEC). However, this renewed influence remains fragile as the countries in the region tend to be wary of their former “big brother.” For its part, China has sought to reinforce bilateral bonds with the countries in the region and to develop the role of the SCO. The results of her efforts are being felt, above all, from an economic standpoint, as trade has tripled since 2002.
  • Quel rôle pour l'Union européenne en Asie centrale ? - Liamine Salvagni Alessandro p. 17-29 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
    Les évolutions politiques et économiques des dernières décennies ont fait émerger l'Asie centrale, région au cœur du continent eurasiatique, comme une zone de vives tensions. Les grandes puissances que sont les Etats-Unis, la Russie et la Chine y sont en compétition pour garantir la sécurité, chacune au nom de leur propre vision géopolitique, tout en s'assurant l'accès aux ressources énergétiques. De leur côté, les cinq Etats centre-asiatiques sont dirigés par des élites prêtes à tout pour se maintenir en place face à des oppositions nationales qui se renforcent, signant pour cela des accords en matière d'énergie et de sécurité avec des acteurs extérieurs, et reprenant à leur compte la menace terroriste pour justifier la répression contre leurs opposants. Dans ce contexte, l'Union européenne est appelée à jouer un rôle, avec des outils politiques et techniques qui lui sont spécifiques, s'inscrivant dans le cadre de ses priorités énergétiques et de sécurité. L'UE est loin de pouvoir entrer en compétition avec les acteurs en présence en se plaçant sur leur terrain − la stratégie d'influence géopolitique − mais a pour atout sa réputation d'honnête courtier, lui donnant une sorte de soft power pour arriver à ses fins : diversifier les routes de l'énergie, sécuriser ses fournitures, stabiliser une région à risques, limiter les menaces sur la sécurité européenne, développer les échanges commerciaux et ouvrir de nouveaux marchés aux firmes européennes. L'article dresse un état des lieux des relations à la lumière de ces objectifs et offre quelques pistes à suivre pour renforcer la présence européenne dans la région.
    What Role for the European Union in Central Asia ? Political and economic developments over the past decades have contributed to dramatically raise the profile of the Central Asian region – the heart of the Eurasian continent. Major world powers, including the US, Russia and China, are currently competing for influence over the five Central Asian states to secure geopolitical control of the region and gain access to its energy resources. In their turn, Central Asian states have developed a policy based on protecting their national power in the face of growing domestic opposition by striking energy and security deals with the external actors and endorsing the terrorist threat argument to justify internal repression against dissidents. It is in this context that the EU is called to play its role using political and technical instruments at its disposal to pursue its energy, security and trade priorities. The EU is far from being able to compete with other actors in terms of geopolitical strategic influence, but its reputation of being an honest broker gives it a soft power of influence capable to pursue its priority goals of diversifying energy routes and find a partial solution to the EU energy security supply, of stabilising a difficult region and limit the incidence of security threats on the EU, and of promoting trade and give new business opportunities to European firms. The aim of this article is to describe the current relations between the European Union and Central Asia and provide conclusions on how to improve the impact of EU policy in the region.
  • L'Asie centrale, plaque tournante du trafic de drogue - Mili Hayder p. 30-45 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
    C'est une véritable chaîne du crime qui s'est mise en place en Asie centrale, région de transit et de plus en plus de consommation, de l'héroïne venue d'Afghanistan : la culture du pavot dans ce pays y est en forte hausse, malgré les tentatives d'éradication, la production d'opium représente désormais 90 % du total mondial, sa transformation s'effectue pour l'essentiel sur place dans des laboratoires clandestins, grâce à des importations de substances réactives d'Inde, de Chine et de Russie. Le marché de la drogue représenterait la moitié du PIB afghan et aurait rapporté 2,14 milliards de dollars en 2005, aux trafiquants afghans. La drogue est transportée le long de trois itinéraires principaux, dont la «route de la Soie», pour atteindre la Russie, puis l'Europe occidentale (principal marché), en passant par les Balkans ou l'Europe centrale. Le premier pays concerné est le Tadjikistan, à la frontière afghane, mais aussi le Kazakhstan, la région-clé du trafic se situant au sud du Kirghizstan dans la région d'Och et la vallée du Ferghana. A ce trafic sont intrinséquement liés celui des êtres humains, des armes, la prostitution et les actions des groupes «terroristes», dont on sait que les incursions et les attentats sont le plus souvent situés sur les routes de la drogue. Ces activités gangrènent des institutions déjà faibles, au pire criminalisent les milieux politiques, favorisent la corruption à tous les niveaux, sur fond de grande pauvreté, développent une économie parallèle qui étouffe les secteurs officiels, au point que certains experts évoquent un risque de déstabilisation totale de la région, d'ici cinq ans pour les plus pessimistes, si rien n'est entrepris. La coopération régionale en la matière est faible, malgré les intentions déclarées de l'OTSC et de l'OCS, et seuls le Kazakhstan et la Russie sont parvenus à des résultats. De même les institutions internationales peinent à imposer un début de contrôle des trafics, dans des régions montagneuses et désertiques aux milliers de km de frontières. Last, but not least, on constate une forte montée des cas de VIH/Sida, liée à celle de la consommation locale de drogue par injection, alors que les systèmes sanitaires sont généralement délabrés.
    Central Asia, the Hub of the Narcotics Trade A veritable crime network has been set up in Central Asia, a transit point and increasingly a consumer of heroin from Afghanistan : there has been a sharp rise in poppy cultivation in this country and despite attempts at eradication, opium production now represents 90 % of the total world output, and it is processed in situ in clandestine laboratories using reactive substances imported from India, China and Russia. It is believed that in 2005, the drug market counted for half of the Afghan GDP and brought in $2.14 billion for Afghan traffickers. Drugs are transported through three main routes, including the “Silk Road”, to Russia and Western Europe (the main market) through the Balkans or Central Europe. On the Afghan border, Tajikistan is the first country concerned, but so is Kazakhstan, as the key trafficking region lies south of Kyrgyzstan in the Osh region and the Ferghana Valley. Linked to this traffic is traffic in human beings and arms, prostitution and actions by terrorist groups, as it is well known that incursions and attacks are usually located on drug routes. These activities undermine already decrepit institutions, at worst by criminalizing political groups, supporting corruption at all levels, on a stratum of sub-stantial poverty, and developing a parallel economy which chokes the official sectors to the extent that some experts look to a risk of complete regional destabilization within, for the most pessimistic, the next five years if no remedial measures are undertaken. Regional co-operation on the matter is weak, despite the declarations of the CSTO and the SCO, and only Kazakhstan and Russia have obtained any positive results. Similarly, international institutions are struggling to control traffic in the mountains and deserts with borders thousands of kilometers long. Last but not least, a sharp rise in cases of HIV/AIDS has been noted due to local consumption of intravenous drugs, while medical systems are generally dilapidated.
  • Crise écologique sans frontières en Asie centrale - Genté Régis p. 46-56 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
    Les remèdes à la crise écologique qui frappe l'Asie centrale, en continuité avec celle qui prévalait durant l'époque soviétique, sont encore loin de pouvoir être appliqués. Le modèle de développement économique, associé à la nature autoritaire et clanique des régimes politiques, adopté depuis l'indépendance des cinq républiques, ne fait que l'entretenir, voire l'aggraver. Pour des raisons en grande partie dues à l'urgence de faire tourner la machine, au début des années 1990, les nouveaux dirigeants, en fait issus du sérail soviétique, n'ont eu d'autres solutions que de relancer l'extraction et la production des matières premières (coton, minerais, pétrole et gaz). Toutes activités pourtant à l'origine d'une profonde crise sanitaire et environnementale, faute de prise de conscience, de connaissance des dangers ou d'application de normes strictes. Les plus choquants et visibles sont sans doute les stocks chimiques et déchets radioactifs abandonnés, depuis parfois des dizaines d'années, quasiment à l'air libre. Sans compter la mer d'Aral sacrifiée sur l'autel de la culture extensive du coton et l'intense gaspillage de l'eau en général. La gravité de cette crise est accentuée par le contexte chaotique de la transition : manque de moyens financiers, départ des cadres russes, corruption, irresponsabilité, chômage et grande pauvreté, indifférence à la misère humaine ont conduit à systématiquement faire passer développement durable sinon l'écologie même au second plan, voire à les ignorer. Quant aux victimes, déclarées ou potentielles, elles ont, comme autrefois, peu droit à la parole, contrairement à ce que laisse entendre le discours ambiant en Asie centrale, volontiers repris en Occident. Ces dommages sont aussi le fait de compagnies étrangères, qui, en position de force, négocient souvent des «rabais» environnementaux...
    An Ecological Crisis without Borders in Central Asia Measures to combat the ecological crisis facing Central Asia, a continuity of conditions prevailing during the Soviet period, are far from applicable. With the authoritarian and clanic nature of the regimes in power, the economic development model in place since the five republics declared independence has maintained, if not worsened the situation. In the early 1990s, faced with the urgency of keeping their countries functioning, the new leaders, recruited from those of the Soviet era, had no other choice than to resume raw materials extraction and production (cotton, ore, oil and gas). This contributed to a profound sanitary and environmental crisis through a lack of understanding and awareness of the dangers. Undoubtedly more shocking and visible are the abandoned stocks of chemical and radioactive waste left practically out in the open, often for over a decade. This is without counting the Aral Sea sacrificed by extensive cotton farming and intense water wastage. The gravity of this crisis has worsened within the context of a chaotic transition, a lack of financial resources, the departure of Russian management, corruption, irresponsibility, unemployment, substantial poverty, and an indifference to human misery which has relegated sustainable development, if not ecology, to non priority status, or even ignored them. As before, real or potential victims have few rights to speak out, despite what has been implied by the current discourse prevailing in Central Asia and readily accepted by the West. The damage continues in Central Asia due also to the foreign oil and gas companies, who, in many respects, are in position to obtain “environmental arrangements”.
  • Articles et documents

    • L'euroisation au Monténégro. Une expérience inédite - Sokic Alexandre p. 58-68 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
      Bien que n'étant ni membres de l'UE, ni même candidats à l'adhésion, le Monténégro et le Kosovo, territoire sous administration internationale, ont décidé de faire de l'euro la seule monnaie à cours légal. Ces deux cas sont inédits en ce qui concerne l'euro, mais ils s'appuient sur un schéma souvent observé et étudié : la dollarisation, qu'elle soit officielle, unilatérale (sans négociations préalables avec le pays/ zone dont la monnaie a été adoptée) ou non officielle. Dans la majorité des cas, le choix en faveur de la dollarisation/euroisation unilatérale a pour objectifs de restaurer la crédibilité des autorités monétaires dans un contexte de forte instabilité des prix et de la monnaie et d'enclencher un processus de désinflation. Mais cette option a pour contrepartie de retirer à la Banque centrale sa fonction d'émission, ainsi que son rôle de prêteur en dernier ressort, et de priver les dirigeants de la possibilité de mettre l'instrument monétaire au service de leur politique économique. De plus, le caractère unilatéral de cette démarche fait que le pays concerné n'est pas associé à l'élaboration et à la conduite de la politique monétaire du pays/ zone dont il a adopté la monnaie. L'euroisation au Monténégro s'est déroulée en trois étapes : mise en circulation, le 2 novembre 1999, du DM parallèlement au dinar : décision, en janvier 2001, de faire du DM la seule monnaie ayant cours légal dans le pays ; conversion en euros, du 1er janvier au 31 mars 2002, des pièces et billets en DM. Cette politique s'est avérée particulièrement efficace en ce qui concerne la stabilité des prix, puisque l'inflation est désormais proche du taux de référence de la BCE, mais les taux d'intérêt demeurent plus élevés que dans la zone euro, car ils incorporent une prime de risque de défaut importante. Enfin, une fois le Monténégro intégré à l'UE, quelle institution le représentera au sein de la zone euro, puisqu'il ne dispose pas de véritable Banque centrale ?
      The Euroisation of Montenegro A Novel Experiment While not EU members or candidates, Montenegro and the Kosovo (under international administration) have decided to make the Euro their only legal tender. These two cases are new for the Euro, but they are based on an often examined and studied model : dollarisation, whether this be official, unilateral (without preliminary negotiations with the country/area whose currency was adopted) or unofficial. In the majority of cases, the choice of unilateral dollarisation/euroisation aims at restoring the credibility of the monetary authorities within a context of great price and currency instability and to reduce inflation. On the other hand, this option means the withdrawal of the Central Bank's right to issue money and its role as a lender in the last resort, as well as to deprive leaders of the possibility of using their monetary instrument in the service of their economic policy. Moreover, the unilateral character of this measure means that the country concerned cannot be involved in the development and control of the monetary policy of the country/zone whose currency it has adopted. Montenegro's Euroisation took place in three phases : putting the DM into circulation along with the dinar on November 2,1999 ; the January 1,2001 decision to make the DM the country's only legal tender ; the conversion of DM coins and bills into Euro on between January 1 and March 31,2002. This policy proved particularly effective with regard to price stability, as inflation is now close to the ECB reference rate, although interest remains higher than in the Euro zone as it incorporates a substantial default risk allowance. Lastly, once Montenegro has joined the EU, one may ask which institution will represent it within the Euro zone as it no longer has a real Central Bank.
    • L'agro-industrie en Russie - Anfinoguentova Anna p. 69-78 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
      Le secteur agro-industriel continue à jouer un rôle important dans l'économie russe et connaît depuis 1998 une croissance positive, après la chute sévère enregistrée dans les premières années qui ont suivi l'éclatement de l'URSS. Il bénéficie d'une hausse continue des investissements, en particulier étrangers. La baisse du niveau de l'équipement technique, la réduction des surfaces cultivées et les problèmes d'emploi ont cependant motivé un soutien accru de l'Etat et l'inscription du secteur parmi les priorités nationales. Il importe en effet pour les autorités russes de développer la sécurité alimentaire du pays en le rendant moins dépendant des importations dont la part sur le marché dépasse actuellement les 30 %. Les subventions de l'Etat devraient permettre le développement du leasing, la création accélérée de PME et de banques coopératives afin de faciliter l'accès des agriculteurs au crédit à des taux avantageux. Les économies d'énergie et l'utilisation plus rationnelle des engrais et des produits phytosanitaires devraient également améliorer la rentabilité des entreprises du secteur.
      The Russian Agro-Industry A Poor Relation Makes Good The agro-industrial sector continues to play an important role in the Russian economy and, after the sharp drop recorded during the years following the break-up of the USSR, has experienced positive growth since 1998. It enjoys a continuous rise in, particularly foreign, investments. The decline technical equipment standard, a reduction of cultivated land, and employment problems have made increased state support necessary and made this sector one of the nation's priorities. It is particularly important for Russian authorities to develop the country's sufficiency in foodstuffs by making it less dependent on imports, which now account for over 30 % of the market. State grants should permit the development of leasing, accelerated SME creation and cooperative banks to facilitate farmers' access to credit at favourable rates. Energy saving and the more rational use of manure and phytosanitary products should also improve the profitability of companies within the sector.
  • Portrait

  • Repères