Contenu du sommaire : Les animaux
Revue | Pouvoirs |
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Numéro | no 131, 2009/4 |
Titre du numéro | Les animaux |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Comprendre l'homme à partir de l'animal ? - Despret Vinciane p. 5-17 Comment aborder la question de « l'animal modèle pour l'homme » en évitant à la fois de donner du crédit à l'idée de l'exception humaine comme à celle selon laquelle l'homme ne serait qu'un animal comme les autres ? Trois voies, fondées sur le travail de quelques scientifiques, sont explorées. La première redistribue tout autrement la question de l'exception, ce sont les animaux qui sont exceptionnels, ce qui limite fortement la possibilité du modèle. La deuxième envisage, d'un point de vue critique, la question de savoir de qui l'on parle dans les recherches focalisées sur la construction de modèles de compréhension : de l'animal ou de l'homme ? La troisième propose d'en revenir à une autre conception du modèle, fondé sur la mètis, en invitant à le redéfinir sur le régime de l'invention.How should the question of “the animal as a model for man” be approached, while avoiding giving credit to both the idea of human Exceptionalism and the idea that man is simply an animal like any other ? Three approaches, based on the research of a number of scientific scholars, are presented here. The first approach reframes the notion of Exceptionalism by stating that in fact animals are exceptional, which sets limits to the very idea of a “model”. The second approach critically questions the notion of who is taken into account in research focusing on models or understanding : is it the animal or is it man ? The third approach proposes to adopt a different conception of the model, based on the mètis, and invites us to redefine it in term of invention.
- L'Homme et l'animal : anthropocentrisme, altérité et abaissement de l'animal - De Fontenay Élisabeth p. 19-27 Déconstruire la tradition théologique et métaphysique du « propre de l'homme », c'est concevoir le passage de l'animalité à l'humanité comme un continuum, et rejeter ainsi cet anthropocentrisme radical, propre à la modernité occidentale, qui nie aux animaux la possession d'une âme et les ravale ainsi au rang de choses. Avec les conséquences que l'on sait. Une réflexion qui s'inspire notamment de l'École de Francfort et de la philosophie française contemporaine (Deleuze, Lyotard, Derrida, Foucault).
- Quelques étapes du droit animalier : Pie V, Schoelcher et Clemenceau - Hardouin-Fugier Élisabeth p. 29-41 Selon le régime juridique dont dépend l'animal dans la pensée dite occidentale, la bête est considérée soit comme coupable, soit comme objet, soit comme victime. Dans la pratique de la zoophilie sexuelle, on lui assigne successivement chacun de ces rôles. À propos des bullfightings, les anti- esclavagistes anglais obtiennent la première loi, le Martin's Act en 1822, qui fonde le droit animalier national, lentement développé en Europe. Parmi bien des personnages illustres, un pape, un anti-esclavagiste, un dirigeant politique, y apportent leur contribution.According to the legal regime applied to animals in the so-called Western system of thought, the animal is considered either as a culprit, an object or a victim. In case of sexual zoophilia it is assigned each of these three roles. The British campaigners against slavery obtained the first law concerning bullfighting, the Martin's Act of 1822, which provided the basis for the national animal law regime slowly extended to Europe. Among many famous figures, a pope, a leading antislavery campaigner and a political leader, contributed to it.
- Quel droit pour les animaux ? Quel statut juridique pour l'animal ? - Desmoulin-Canselier Sonia p. 43-56 Par-delà la diversité des animaux, des activités qui les utilisent et des textes qui leur sont consacrés, les solutions juridiques visant à protéger les animaux dessinent une image de l'animal en droit. Ces dispositions suscitent cependant des interprétations différentes. Les divergences doctrinales sont d'autant plus fortes que la controverse autour du statut de l'animal est riche de choix moraux. Elle dépasse les questions de technique juridique. Ces dernières ne doivent cependant pas être négligées. En présentant les différentes thèses juridiques qui s'affrontent, et spécialement l'opposition entre courants subjectiviste et objectiviste, l'article entend éclairer le débat et montrer que, pour le trancher adéquatement, il importe de prendre aussi en considération la place du droit parmi les modes de régulation sociale.Beyond the diversity of animals, of activities using animals and of texts regarding them, the legal solutions aiming to protect animals have contributed to the drawing of a legal image of the animal. However, these legal provisions have elicited different interpretations. Doctrinal differences are all the more important as the dispute over the status of the animal is laden with moral choices. It goes beyond questions of legal technique, although the latter should not be ignored. By discussing the various legal theses present in the debate, in particular the opposition between the subjectivist and objectivist currents, the article seeks to highlight the dispute and to show that, in order to resolve it adequately, it is also important to take into account the role of law in the various modes of social regulation.
- Les animaux et le droit administratif - Pauliat Hélène p. 57-72 The relations between animals and administrative law are placed under the sign of anthropocentrism in as much as, most of the time, animals are not regarded as having a particular status, but only as intermediaries for human activities, which are regulated by administrative law. Yet, the active participation of animals to the understanding of some key concepts of administrative law, public service and public authorities should allow them to be granted a special status, aiming mostly to their protection as is the case in constitutional law.
- La mouvance animalière. Des « petites dames de la protection animale ». À la constitution d'un mouvement qui dérange - Burgat Florence p. 73-84 Depuis la création de sa première institution au milieu du XIXe siècle en France (la Société protectrice des animaux), le mouvement de la protection animale a considérablement évolué. Face à l'emprise croissante sur le monde animal et l'extension des domaines où les animaux sont utilisés à des fins qui nécessitent presque toujours souffrance et mise à mort (élevage industriel, pêche, expérimentation), il s'est spécialisé et structuré ; ses préoccupations se sont élargies, notamment aux animaux sauvages (chasse). Il s'est aussi radicalisé dans ses revendications sous l'influence d'une réflexion théorique sur le droit de vie et de mort sur les animaux. Deux courants cohabitent aujourd'hui dans ce mouvement : l'un réformiste, qui souhaite limiter la souffrance des animaux au cours de leur utilisation, l'autre abolitionniste, qui met en cause le principe même de cette utilisation.Since the creation of the first institution in France in the nineteenth century (the Society for the Protection of Animals), the movement for the protection of animals has considerably changed. Given the growing control over the animal world and the extension of domains in which animals are used in ways that almost always lead to suffering and death (factory farming, fishing, experimentation), the movement has become more specialised and structured and its concerns have come to include wild animals (hunting). Its demands have also become more radicalised under the influence of a theoretical reflection about the right of life and death over animals. Today two currents coexist within the movement : a reformist one which tries to limit the suffering of animals as they are being used by men, and an abolitionist one, which questions the very principle of the use of animals by men.
- Du radicalisme à l'extrémisme animalier - Utria Enrique p. 85-96 Peter Singer claims that human beings have at least a duty to be vegetarians, given their moral duty to maximise general utility. Tom Regan thinks that “subjects-of-a-life”, be they humans or animals, have the right to live and not to suffer damages, and our duty is to respect them. Steven Best and Mark Bernstein justify direct actions for the liberation of animals and economic sabotage in the name of legitimate defence and the just war doctrine.
- Raisons et déraisons. Des revendications animalitaires. Essai de lecture anthropologique et politique - Digard Jean-Pierre p. 97-111 Trois types de rapports aux animaux caractérisent aujourd'hui la société occidentale : 1. des relations effectives d'élevage et d'utilisation d'« animaux de rente », qui sont le fait de professionnels (agriculteurs, éleveurs, etc.) devenus minoritaires dans la société française ; 2. des relations effectives, à dominante affective, avec des « animaux de compagnie », fait d'amateurs, majoritaires ; 3. des relations fictives, imaginées et conçues comme un idéal à atteindre par des militants « animalitaires » ultraminoritaires mais hyperactifs, qui se présentent indûment comme les porte-parole d'une majorité silencieuse, réussissant ainsi à abuser certains établissements publics, médias et décideurs. En réalité, il n'existe aucune raison objective de céder aux pressions animalitaires, qui reposent sur une imposture intellectuelle consistant pour l'essentiel à donner des apparences scientifiques à des choix purement éthiques.Three types of relationship with animals characterize contemporary Western society. 1. Effective relationships of breeding and using “productive animals” pertaining to professionals (farmers, stock breeders, etc.) that have become a minority in French society. 2. Effective relationships with an affective dimension with pets, pertaining to amateurs, who are a majority ; 3. Fictional relationships, imagined and seen as an ideal to be reached by animal rights activists who, though forming a very small minority, are hyper-active and unduly claim to speak for a silent majority. They have succeeded in abusing some public institutions, the media and decision-makers. In reality, there is no objective reason to give in to the animal rights activists' pressures which are based on an intellectual fraud consisting mainly in giving a scientific veneer to purely ethical choices.
- La protection internationale et européenne des animaux - Dubos Olivier, Marguénaud Jean-Pierre p. 113-126 Placer les animaux dans le champ d'application du droit international et des droits européens paraît devoir les élever à un niveau supérieur correspondant à celui de ces sources externes du droit. Il s'agit donc de vérifier s'ils parviennent à briser les traditions et les archaïsmes au nom desquels la seule sensibilité des animaux domestiques mérite une protection toujours sur le point d'être oubliée quand ils sont considérés comme des produits de masse.To place animals within the jurisdiction of international and European law seems to elevate them to a superior status corresponding to that of the external sources of the law. It is therefore necessary to check whether they manage to overcome the traditions and archaisms according to which only domestic animals deserve a system of protection easily forgotten when they are considered as mass products.
- Protection des animaux et universalisme des droits de l'homme : une incompatibilité de principe ? - Bellivier Florence p. 127-134 Malgré les apparences, la cause animale n'est pas nécessairement antinomique avec la lutte pour la défense des droits de l'homme. Les avancées éthiques, philosophiques et juridiques en matière de devoirs des humains envers les animaux n'aboutissent pas forcément à un renversement de valeurs humain/animal, craint par certains, souhaité par d'autres. Il n'en reste pas moins que la cause animale s'accommode mal de l'universalisme inhérent aux droits de l'homme.Despite appearances, the defence of animal rights and the struggle for Human rights are not necessarily antinomic. Ethical, philosophical and legal progress in the domain of man's duties toward animals do not inevitably lead to a reversal of human/animal values, feared by some and hoped for by others. Yet, it is still the case that the cause of animals does not fit very well with the universal dimension of human rights.
- Des conséquences juridiques et morales de l'inexistence de l'animal - Wolff Francis p. 135-147 Le droit français actuel ne reconnaît aucun statut juridique à l'animal mais distingue différents régimes en fonction du type de relation qui lie les animaux aux hommes. Certains mouvements de « défense des animaux », sous l'influence de doctrines philosophiques anglo-saxonnes, tentent de faire reconnaître des « droits de l'animal » ou d'introduire dans notre code civil une nouvelle personnalité juridique, celle de l'animal « être sensible ». Nous nous efforçons de montrer l'incohérence conceptuelle et les risques, pour une éthique humaniste, de ces innovations. Au lieu d'un statut moral unique conféré à l'« animal », qui n'est qu'une fiction idéologique, il convient de distinguer les devoirs que nous avons vis-à-vis des animaux de compagnie, ceux que nous avons vis-à-vis des animaux domestiques et ceux que nous avons vis-à-vis des animaux sauvages. Nous dégageons les fondements philosophiques de ces obligations morales différenciées.Current French law does not grant animals any legal status, but establishes a distinction between different regimes according to the type of relations between animals and men. Under the influence of Anglo-Saxon philosophical doctrines, certain movements for the defence of animals are attempting to push for the recognition of “animal rights” and to introduce a new legal status for the animal as a “sensible being” in our Civil Law. We attempt here to show the conceptual inconsistency of such an innovation and the risks it represents for a humanist ethic. Instead of granting animals a unique moral status, which is simply an ideological fiction, it is important to distinguish between the duties we have toward pets, domestic animals and wild animals. In conclusion, we present the philosophical foundations of these differentiated moral obligations.
Chroniques
- Le populisme de Berlusconi ou les recettes de la popularité durable - Ravaz Bruno p. 149-161
Repères étrangers
- Repères étrangers (1er avril ? 30 juin 2009) - Astié Pierre, Breillat Dominique, Lageot Céline p. 163-177
Chronique constitutionnelle française
- Chronique constitutionnelle française. (1er mai ? 30 juin 2009) - Avril Pierre, Gicquel Jean p. 179-202