Contenu du sommaire : L'Égypte entame sa longue marche

Revue Les Cahiers de l'Orient Mir@bel
Numéro no 108, automne 2012
Titre du numéro L'Égypte entame sa longue marche
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial - Antoine Sfeir p. 3-5 accès libre
  • L'Égypte entame sa longue marche

    • Le dessin d'Avoine - Paul Avoine p. 10 accès libre
    • Introduction - Tewfik Aclimandos p. 11-32 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Une présentation développée des enjeux pour introduire ce dossier sur la révolution égyptienne.
      A developed presentation of the stakes to introduce this special issue on the Egyptian revolution.
    • La Révolution égyptienne et la crise de légitimité - Sherif Younes p. 33-46 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Une analyse des facteurs sociaux, économiques et politiques contemporains qui conduisirent à la révolution du 25 janvier dans le cadre d'une histoire plus longue et d'une analyse de la transformation des idéologies politiques. Tandis que plusieurs observateurs sont tentés d'établir un parallèle entre 2011 et 1952, année du coup d'État des Officiers libres, voire considèrent que 2011 représente un prolongement de 1952, l'auteur montre que la révolution de 2011 marque au contraire la fin de l'ère nassérienne, de l'État sécuritaire-identitaire instauré par le régime de juillet, et du règne des valeurs véhiculées par l'État et le discours nassériens. On passe de l'ère où la glorification du nom du peuple est solidaire de l'assujettissement du peuple réel, à celle où le peuple affirme sa souveraineté, ne serait-ce que dans l'expérience révolutionnaire.
      A thorough analysis of the contemporary social, economical and political factors that led to the January 25 revolution, set in a longer timeframe and a study of the changing political ideologies. While several observers may be tempted to draw a parallel between 2011 and 1952, the year of the Free Officers coup d'état, or perhaps even consider that 2011 represents an extension of 1952, the author shows that the 2011 revolution is quite the reverse: an end to the Nasserian era, to the law-and-order, identity-based policy State set up by the July regime, and to the rule of values conveyed by the Nasserian State and discourse. Egypt has gone from an age where the glorification of the people's name was interdependent with the subjection of the real people, to a new stage where the people asserts its sovereignty, if only in going through another revolution.
    • La Révolution du 25 janvier : forces révolutionnaires, forces réactionnaires - Saïd Okasha p. 47-65 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Un tableau des rapports de force inédits sur une scène politique égyptienne en mutation accélérée, analysant les enjeux du bras de fer entre ces courants d'opposition émergents et les forces politiques traditionnelles (les anciens partis politiques clients du régime) et conservatrices (le CSFA et les Frères musulmans). Montrant que ni les uns ni les autres ne peuvent atteindre leurs objectifs sans l'appui de la « majorité silencieuse » et de groupes marginaux ou volatiles, et insistant sur la puissance des mouvements contestataires, aussi inorganisés soient-ils pour le moment, l'auteur prévoit la poursuite de la confrontation si les exigences révolutionnaires ne sont pas satisfaites.
      A picture of the original balance of power on an Egyptian stage undergoing a radical transformation, and an analysis of the tussle stakes between these emerging opposition trends and the traditional political forces (the political parties formerly clients of the regime) and the conservative ones (the SCAF and the Muslim Brothers). The author shows that neither of them can reach their goals without the support of the “silent majority”, and of marginal or volatile groups, insists on the power of protesting movements, as unorganized as they might be for the time being, and predicts the continuation of the confrontation in case the revolutionary demands are not met.
    • Al Azhar dans un monde troublé : la crise et les politiques d'adaptation - Nabil Abdel Fattah p. 67-80 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'Université d'Al Azhar est confrontée à une crise de légitimité et de représentation, mais aussi à l'inadaptation des cadres politique, juridique et théologique, ou à celle des structures régissant le champ de la fatwa, qui définissaient et encadraient son statut, car le monde a changé. La crise était là avant le printemps arabe, mais ce dernier l'a aggravée, en accélérant la progression de multiples courants et individus prétendant parler au nom de l'islam, en exacerbant les divergences internes à Al Azhar, et en remettant en question les rapports entre le pouvoir en place et l'institution azharite. Aussi cette dernière est-elle sommée de redéfinir son rôle et sa fonction, sur une scène islamique mondialisée marquée par la concurrence et dans un cadre politique et constitutionnel national en cours de reconfiguration.
      Al Azhar University is not only faced with a crisis of legitimacy and representation, but also with the inadequacy of the political, legal, and theological frames and of the structures defining and framing the field and status of the fatwa, for the world has changed. The crisis came before the Arab spring, but was exacerbated by it, with the increased progression of multiples currents and individuals claiming to speak for Islam, deepened Al Azhar internal differences, and challenging the balance of power between the State authority and the azhari institution. The latter is therefore summoned to question its role and function, on a globalized Islamic stage bearing the effect of competition, and in a political and constitutional national frame in the process of reshaping.
    • Les Frères musulmans et l'« État civil démocratique à référence islamique » - Dominique Avon p. 81-95 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans leur « code général » présenté à la fin de l'année 2009, les Frères musulmans ont fixé comme objectif l'édification de « l'État islamique qui exécute effectivement les préceptes de l'islam et ses enseignements, qui les préserve à l'intérieur et qui se charge de leur promotion et de leur transmission à l'extérieur ». Un an plus tard, des centaines de milliers d'Égyptiens ont obtenu le départ du président Moubarak au terme d'une mobilisation inédite. Circonspecte lors des premières manifestations, la direction des Frères musulmans s'est ralliée au mouvement afin de promouvoir un « État civil à référence islamique ». Ce glissement sémantique ne voile cependant pas la continuité doctrinale : les promoteurs d'un État civil fondé sur une véritable souveraineté populaire ont été marginalisés ou exclus ; les dirigeants, engagés dans un dialogue fondé sur le rapport de forces avec le Conseil supérieur des Forces armées, ont revendiqué à travers le programme du Parti de la Liberté et de la Justice, une référence fondatrice à la charî‘a qui pose la « liberté » comme principe mais aussi comme « don de Dieu […] sujet à de la contrainte ».
      In their « general code » introduced at the end of the year 2009, the aim set by the Muslim Brothers was the erection of the « Muslim State effectively executing the precepts and the teachings of Islam, protecting them in Egypt, and promoting and conveying them abroad ». One year later, hundreds of millions of Egyptians got president Mubarak's removal after a never seen before mobilization. Wary during the first demonstrations, the Muslim Brotherhood leaders rallied the movement in order to promote a « civil state with Islamic reference ». This semantic shift does not however mask doctrinal continuity: promoters of a civil state based on a real popular sovereignty have been marginalized or excluded; the Brotherhood leaders, engaged in a power talk with the Supreme Council of Armed Forces, claimed through the Freedom and Justice Party a founding reference to the charî‘a that would state « freedom » as a principle but also as a « gift of God […] subject to constraint ».
    • Les ouvriers égyptiens et le 25 janvier : contexte historique d'un mouvement social - Joel Beinin, Marie-José Tyan p. 97-114 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les actions collectives des ouvriers égyptiens avaient repris depuis 1998, au point de former un mouvement social qui devint l'une des forces érodant la légitimité du régime de Hosni Moubarak. En raison des contraintes imposées par le régime autoritaire, de leurs ressources limitées et de l'absence d'un leadership ou d'un programme national, les grèves et les autres actions collectives constitutives de ce mouvement n'en appelaient que rarement de manière explicite à l'instauration de la démocratie ou à la fin du règne de Hosni Moubarak. Le mouvement ouvrier fut cependant un exercice pratique de masse, de la démocratie en action et un composant essentiel de la culture contestataire qui émergea au début des années 2000.
      Workers' collective action gathered momentum after 1998, coalescing into a social movement that became one of the forces eroding the legitimacy of the regime of Hosni Mubarak. However, due to the constraints of an autocratic regime, limited resources, and the lack of a national leadership or program, the strikes and other collective actions that constituted this social movement rarely called explicitly for democracy or the end of Mubarak's rule. Nonetheless, the workers' movement was a practical mass exercise in substantive democracy and a leading component of the culture of protest that emerged in the 2000s.
    • L'Église, les coptes et la révolution du 25 janvier : mutations communautaristes ou sortie de la logique identitaire ? - Laure Guirguis p. 115-132 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le 25 janvier marque le début d'un processus révolutionnaire car il ne met pas simplement un terme au règne du clan Moubarak : il est l'indice d'une transformation des valeurs et des normes. La communautarisation sociale, solidaire des politiques identitaires, est critiquée et renforcée au cours de l'actuelle phase de transition, caractérisée par le foisonnement des antagonismes et l'irruption de la pluralité. Tandis que le patriarche Chenouda III soutint le régime jusqu'à son dernier souffle, des militants coptes s'engagèrent dans l'action révolutionnaire. Nombre d'entre eux avaient contribué à l'essor de la culture protestataire égyptienne en général et à la critique des logiques identitaires entérinant discriminations et communautarisation sociale. Cependant, la sortie de l'idéologie nationaliste et le déclin de l'idéal national, qui pourraient ouvrir la voie à la rupture de la logique identitaire, semblent pour l'heure ne pas interdire sa reconduction selon des modalités inédites et, en particulier, renforcer les communautarismes transnationaux.
      January 25 marks the start of a revolutionary process, for it does not simply put an end to the ruling of the Mubarak clan: it is a sign of transforming values and norms. Social communitarisation interdependent with identity policies is criticized and strengthened during the current transition phase, defined by the proliferation of antagonisms and the upsurge of plurality. While patriarch Chenouda III supported the regime until his last breath, Coptic activists got involved in revolutionary action. Many of them had been part of the generally emerging protest culture and in criticizing the identity logic ratifying discrimination and social communitarianism. However, extrication from national ideology and decline of national ideal, potentially paving the way for breaking off of identity logic, seem not to be preventing its reconduction for now, under original procedures, as well as strengthening transnational communitariasnisms.
  • Également dans ce numéro…

    • Économie : l'automne arabe - Gilles Sengès p. 133-143 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Déstabilisés sur le plan politique depuis le déclenchement de ce qui a été appelé « le printemps arabe », la Tunisie, la Libye et l'Égypte sont loin d'avoir rétabli leur situation sur le plan économique.
      Destabilized on the political level since the triggering of what has been called « the Arab spring », Tunisia, Libya and Egypt are still far from restoring their economical situation.
    • Printemps arabe : Le tourisme français toujours en panne - Catherine Parenti p. 145-152 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Bientôt deux ans que la Tunisie et l'Égypte ont fait leur révolution. Si les étrangers, Européens, Britanniques et Allemands en tête, y séjournent à nouveau, les visiteurs tricolores continuent d'afficher leurs réticences. Décryptages.
      Tunisian and Egyptian revolutions started almost two years ago. While foreigners – Europeans, British and Germans first – are going back, Gallic visitors maintain their reluctance. Decoding.
    • Notes de lecture - p. 153-157 accès libre