Contenu du sommaire : Lectures de John R. Commons

Revue Cahiers d'économie politique Mir@bel
Numéro no 40-41, 2001
Titre du numéro Lectures de John R. Commons
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Lectures de commons - Alain Guéry p. 7 accès libre
  • Propriété, droit et institution dans l'institutionnalisme américain - Alain Guéry p. 9-38 accès libre avec résumé
    Nous assistons au retour de l'institutionnalisme américain dans les derniers courants de la pensée économique hétérodoxe, sans que n'en soit toujours tracée l'origine, les axes qui sont l'arête tenant ensemble les travaux de différents auteurs, et le parcours intellectuel qui fut le leur. D'origine allemande, l'institutionnalisme américain se structure autour d'une idée de la propriété qui prend la place de celle de capital, et ouvre donc sur une analyse qui emprunte ses formes au droit mais pas ses méthodes. Il ne confond pas l'économie et le droit, mais par une définition extrêmement élargie de la notion d'institution, considère l'économie "comme du droit", évacuant le politique dans ses prétentions de seul créateur de règles pour la société tout entière au profit de l'économie, épaulée par un pouvoir judiciaire qui y puise une jurisprudence. Du constat pessimiste d'une évolution à l'?uvre dans l'histoire du capitalisme chez Veblen, à l'optimisme réservé et relatif mais réformiste chez Commons, l'institutionnalisme américain retrouve la problématique du pouvoir dans l'économie, déjà présente dans les travaux de l'École historique allemande, encore camouflée par l'effacement programmé mais incertain de l'État-providence, qui est encore au "social" ce que l'État démocratique est au "politique".
  • La dimension historique de l'économie chez John Rodgers commons - Anne Conchon p. 39-58 accès libre avec résumé
    L'objet de cet article est de saisir la dimension historique de l'économie institutionnelle élaborée par John R. Commons. Une contextualisation de sa réflexion, qui se veut résolument pluridisciplinaire, dans le champ des sciences sociales américaines à son époque - marqué principalement par l'influence du courant pragmatiste et de l'école historique allemande - permet d'en montrer les fondements méthodologiques et épistémologiques. L'évolution même de sa démarche, de ses premiers travaux sur la genèse du mouvement ouvrier jusqu'à sa périodisation conceptualisée du capitalisme, en passant par sa relecture généalogique de l'économie politique, rend compte de l'attention particulière qu'il porte aux mutations des phénomènes institutionnels dans l'histoire.
  • L'institutionnalisme de J. R. Commons et l'économie antique - Jean Andreau p. 59-77 accès libre avec résumé
    Quoique J. R. Commons ne se soit guère intéressé aux sociétés d'avant les Temps modernes, ses typologies peuvent aider à comprendre certains aspects de leur vie économique. Cet article essaie de le montrer pour le cas de la Rome antique, en prenant deux exemples : le régime des terres dans la Rome républicaine (surtout aux 4e et 3e siècles av. J.-C.), en relation avec la typologie des transactions qu'a élaborée Commons ; et, d'autre part, les comportements et stratégies économiques des membres de l'élite romaine (à partir de ce qu'il écrit de l'"intangible property").
  • Saisir les faits économiques : la méthode Commons - Bruno Théret p. 79-137 accès libre avec résumé
    L'article vise à examiner la cohérence d'ensemble du système de pensée avec lequel John Commons cherche à fonder son économie institutionnelle. Pour cela et afin de sortir Commons du contexte américain où il a été cantonné, on le lit avec les lunettes de l'épistémologie génétique structuraliste de Piaget qui partage avec la méthode pragmatiste de Commons de nombreux traits. La première partie de l'article s'attache à montrer la légitimité de cette démarche. La deuxième décrit l'architecture du système conceptuel de Commons établie en la suivant. Une troisième partie est plus spécifiquement consacrée à la difficile question des corrélations entre économie, droit et éthique que Commons met au c?ur de l'économie institutionnelle.
  • Le modèle commons d'économie transactionnelle - Lucien Gillard p. 139-176 accès libre avec résumé
    John Commons rend hommage et cite souvent les travaux que mène Paul Douglas sur les relations quantitatives qui pourraient rendre compte de la production des marchandises ; il se réfère souvent aussi aux constructions statistiques du N.B.E.R. comme bases nécessaires à toute avancée analytique dans le champ de l'économie politique. On tente ici de le prendre au mot en reconstruisant le texte de "Institutional Economics" autour d'un tableau des échanges interindustriels et d'une "fonction de transaction" composée de deux facteurs dérivables. Ces deux facteurs variant eux-mêmes dans la courte période, on propose donc une imbrication temporelle des différents déterminants de la relation sociale à l'échelle d'une nation. Où il apparaît que chez Commons, la socialisation n'est pas d'abord une question de prix de marché mais de droits sur une part de revenus futurs. Ainsi entendue, l'approche institutionnelle se veut une façon de rendre visible la main de Smith dans les représentations et dans les pratiques de l'économie politique. Et de sauvegarder les chances de survie pour le capitalisme.
  • Un cheval est-il un cheval ? : Les mots, les faits, le capitalisme et le droit - Martine Grinberg p. 177-191 accès libre avec résumé
    Cet article s'appuie sur l'analyse des relations entre coutumes, économie et droit et met l'accent sur la méthodologie de Commons. Comment Commons procède-t-il pour fonder une théorie qui soit une théorie "scientifique" ? Si la science et le droit lui servent de modèles pour construire sa théorie de l'économie institutionnelle, il hésite en permanence entre similarité et analogie. Ce qui le conduit à tenir de curieux raisonnements. Il s'appuie dans sa démonstration sur la coutume à laquelle il donne une nouvelle définition et qui, à travers l'action collective et les décisions de la Cour suprême, devient du droit. Il invente une unité d'analyse, le "going concern", valable dans tous les domaines du social, de l'économique, du juridique et du politique. Il suit en cela l'exemple donné par la Cour suprême qui a redéfini le sens des notions juridiques pour s'adapter au nouveau contexte économique. Seule l'idée de valeur raisonnable, elle-même relative et pourtant garantie par la Cour suprême, peut limiter les dégâts. En donnant de nouveaux sens aux mots et en les changeant selon ses besoins, Commons témoigne d'une manière de penser très proche de la philosophie pragmatiste.
  • Common(s) law et souveraineté - Annette Smedley-Weill p. 193-217 accès libre avec résumé
    En 1934, après l'élection de Roosevelt, qui veut, grâce au New Deal, remédier aux effets de la Grande Dépression, J. R. Commons publie Institutional Economics, Its Place in Political Economy. Roosevelt fait voter par le Congrès des lois qui permettent l'intervention directe du gouvernement dans les affaires économiques. Commons propose de mettre fin aux conflits et aux excès du capitalisme en faisant intervenir le pouvoir judiciaire, et, in fine, la Cour Suprême des États-Unis. Pour cela il attribue à celle-ci la Souveraineté dite judiciaire, alors que la Souveraineté, selon la Constitution fédérale de 1787, appartient au peuple américain. Les jugements de ces cours devraient établir un capitalisme raisonnable. En analysant différents arrêts des Cours de justice, il apparaît surtout que les jugements reflètent les opinions courantes de la société (ainsi lorsqu'ils instaurent la discrimination raciale et sexiste) et que, par le biais du recours aux Précédents, ils persistent à défendre des valeurs devenues obsolètes. Ainsi lorsque la Cour invalide les lois du New Deal en défendant la liberté économique, alors que la société américaine a élu et réélu Roosevelt, qui est un, partisan de l'interventionnisme. Commons explique le fonctionnement de la Common Law aux États-Unis, à travers l'usage qu'en font les juristes qui élaborent une jurisprudence adaptée aux nouveaux États. L'auteur donne à cette occasion une vision juste de la "Common Law Method of Making Law by Deciding Disputes".
  • Money's time le temps comme projet épistémologique dans institutional economics de John R. Commons - Jean-Marie Baldner p. 219-252 accès libre avec résumé
    On émet les hypothèses que J. R. Commons, en faisant de la dimension temporelle la principale causalité économique, sous la forme de la "futurité", a l'ambition de révolutionner l'économie politique ; qu'il a la volonté, par la multiplication des corrélations entre les différentes disciplines, de faire d'Institutional Economics une ?uvre d'épistémologie fusionnant les démarches théorique et pragmatique ; qu'il a pour projet d'élaborer la théorie d'un capitalisme raisonnable, dont l'unité ultime, la transaction, et les outils d'analyse, comme le principe, la formule et l'insight, permettent de penser et d'orienter les actions de l'individu dans la société et les interrelations entre le général et le particulier.
  • L'institutionnalisme de Commons et la monnaie - Jérôme Maucourant p. 253-284 accès libre avec résumé
    L'article donne une interprétation du statut des institutions dans l'?uvre de Gommons à travers l'exemple de la monnaie. Une juste place est redonnée à l'influence de Hume dans les constructions de Commons, même si l'institutionnalisme de celui-ci ne relève pas de l'individualisme institutionnel. Commons élabore une théorie des formes monétaires et de leur l'évolution laquelle place la dette, non pas l'échange, au c?ur des économies anciennes comme modernes. Il justifie ainsi l'interventionnisme en matière monétaire. Ses conceptions du capital, du rapport entre épargne et investissement témoignent d'une inventivité qui font de lui l'auteur d'une synthèse entre Wicksell et McLeod.
  • Édition

    • “Institutional economics” the American economic review 1931, vol. XXI, n? 4, pp. 648-657 - John R. Commons p. 287-296 accès libre avec résumé
      Une institution se définit comme une action collective contrôlant, libérant et étendant l'action individuelle [collective action in control, liberation and expansion of individual action]. Ses formes sont la "coutume inorganisée" [unorganized custom] et les "organisations en fonctionnement" [organized going concerns]. L'action individuelle est la participation à des transactions de marchandage [bargaining transactions], de direction [managing transactions] et de répartition [rationing transactions], qui constituent les unités élémentaires de l'activité économique. Le contrôle exercé par les coutumes ou les organisations s'effectue par les "règles de fonctionnement en usage" [working rules] qui déterminent plus ou moins ce que l'individu peut ou ne peut pas faire, doit ou ne doit pas faire, a le droit ou n'a pas le droit de faire. La participation à ces transactions repose sur des choix impliquant une performance [performance], une limitation [forbearance] ou une sélection [avoidance]. La règle de fonctionnement en usage de la Cour Suprême est la "voie légitime du droit" [due process of law]. Les principes universels, c'est-à-dire les similarités de cause, d'effet ou de but, présents dans toutes les transactions sont la rareté [scarcity], l'efficience [efficiency], la "futurité" [futurity], les règles [working rules] et les facteurs limitants [limiting factors] soumis au contrôle de la volonté. Ces principes se révèlent à travers une psychologie de négociation [negotiational psychology] ou comportementale de persuasion et de coercition dans les transactions de marchandage, de commande et d'obéissance dans les transactions de direction, d'argumentation et de plaidoirie dans les transactions de répartition. Alors que les transactions déterminent le contrôle légal, c'est le contrôle matériel qui a intéressé les économistes classiques et néo-classiques. Les trois relations sociales implicites à toutes transactions sont : le conflit, la dépendance et l'ordre. Les philosophies sociales diffèrent économiquement selon le type de transaction qu'elles privilégient.
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