Contenu du sommaire : Où en est l'histoire du Québec ?
Revue |
20 & 21. Revue d'histoire Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire |
---|---|
Numéro | no 129, janvier-mars 2016 |
Titre du numéro | Où en est l'histoire du Québec ? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Articles
- Pourquoi étudier l'histoire du Québec aujourd'hui ? - Olivier Dard, Gérard Fabre p. 5-12
- La réaction en héritage ? : Représentation de la France chez les intellectuels québécois depuis les années 1960 - Éric Bédard p. 13-25 Le rapport à la France des Québécois n'a jamais été neutre. Si elles rejetaient les idéaux républicains, les élites traditionnalistes d'autrefois admiraient la France du Grand Siècle, fille aînée de l'Église. Ce texte tente de démontrer que, depuis les années 1960, parmi les intellectuels québécois les plus en vue, l'héritage français est discrédité en bloc. Ces nouvelles élites modernistes rejettent à la fois son Ancien Régime, inégalitaire, et son modèle républicain d'intégration des nouveaux arrivants, jugé intolérant lors de débats récents sur la laïcité. La vogue du concept d'américanité et l'adhésion au multiculturalisme libéral des élites intellectuelles québécoises ne seraient pas étrangères à ce rejet de l'héritage français.Reaction as Legacy ? Quebecers have always had a fraught relationship with France. While the traditional elites admired the France of the Grand Siècle and Louis XIV, they nonetheless rejected the country's republican ideals. This article seeks to illustrate that, since the 1960s, Quebec's French heritage has been totally discredited by the most well-known Quebecois intellectuals. These new modernist elites simultaneously reject France's inequitable Ancien Régime and its republican model of integration for immigrants, which has come to be seen as intolerant in light of the recent debates on secularity. The appeal of the concept of “Americanness” and the support for liberal multiculturalism expressed by intellectual elites in Quebec help to explain this rejection of French heritage as a whole.
- Le rapport des groulxistes au politique : Entre méfiance et tentation - Michel Bock p. 27-42 Cet article propose une analyse du rapport de l'abbé Lionel Groulx au politique pendant la période de l'entre-deux-guerres. En subordonnant son nationalisme au catholicisme, qu'il refusa toujours d'instrumentaliser à des fins politiques, Groulx développa une idéologie traditionaliste et providentialiste qui accordait peu de place à la question du régime ou aux réformes institutionnelles, et le tenait largement à l'écart de l'influence maurrassiste. Le groulxisme, qui envisageait toutefois sous certains angles la création d'un « État français » indépendant, n'en contenait pas moins une certaine part d'ambiguïté vis-à-vis du politique. La tension dialectique grandissante entre les questions nationale et religieuse dans le champ intellectuel canadien français compte parmi les facteurs à l'origine de la Révolution tranquille des années 1960 au Québec.Groulxism and Politics This article offers an analysis of Lionel Groulx's relationship to politics during the interwar years. By subordinating his nationalism to Catholicism, which he consistently refused to instrumentalise for political purposes, Groulx developed a traditionalist and providentialist ideology that paid little attention to questions of the regime or institutional reform. This in turn left Groulx relatively shielded from the influence of Maurrassism. Groulxism did contain, however, a measure of ambiguity toward the political inasmuch as it envisioned, to some extent, the creation of an independent “French State”. The growing dialectical tension between the national and religious issues within the realm of French Canadian ideology was one of the main causes behind Quebec's Quiet Revolution in the 1960s.
- La Grande Noirceur canadienne-française dans l'historiographie et la mémoire québécoises : Revisiter une interprétation convenue - E.-Martin Meunier p. 43-59 Plus qu'une période historique bien définie (des années 1936 aux années 1950), la Grande Noirceur représente une époque repoussoir. Elle est un mythe constitutif du grand récit moderne québécois. Elle serait par ailleurs une modalité de gestion du passé, qui cherche à prendre en compte le legs dit autoritaire d'une période historique. Ses représentations mettent en scène une « mythistoire » qui, tout en mimant l'histoire savante, propose un récit dominant reproduit de génération en génération. Cet article examine à la fois le discours qui a élaboré et propagé l'idée de la Grande Noirceur, et celui qui a cherché à remettre en question sa véracité et sa portée historique. Son but n'est pas tant d'évaluer le degré de noirceur de la période précédant la Révolution tranquille, que de décrire les jalons de la construction socio-historique de la rupture des années 1960 et de la déconstruction, plus récente, de ce récit encombré de mythologies de toutes sortes.The French-Canadian Great Darkness (Grande Noirceur) in Quebecois History and Memory More than a specific historic period (from the 1930s to the 1950s), the Grande Noirceur, or Great Darkness, is often viewed as an era to be rejected. It is a period that has achieved quasi-mythical status in Quebec's modern narrative. This constitutive myth is a means by which to manage the past, attempting to account for the period's so-called authoritarian legacy. Representations of the Great Darkness, while often presented under the guise of scholarly history, in fact put forth a sort of “mythistory” that perpetuates a dominant narrative from generation to generation. This article examines both the discourse that created and propagated the idea of the Great Darkness, and the counter-discourse that has attempted to challenge its veracity and historical scope. Our goal is not to determine the degree of ‘darkness' of the period preceding the Quiet Revolution, but rather to explore the milestones leading up to the social and historical construction of the 1960s movement, and to better understand the more recent deconstruction of these mythologically burdened narratives.
- Les années 68 au Québec : Mise en perspective des expériences québécoise et française autour des mouvements étudiants - Jean-Philippe Warren p. 61-74 Le présent article compare les révoltes étudiantes qui, dans les années 68, secouèrent la France et le Québec. Il ne s'agit pas simplement ici de juxtaposer des faits, mais de dégager aussi des points de contact par-delà toute la distance qui sépare ces deux sociétés. Rompant avec les études plus classiques qui se bornent à évaluer la part d'influence que la France a eue sur l'orientation des groupes étudiants québécois, cette recherche pousse plus loin l'analyse et cherche à fonder un modèle interprétatif qui, empruntant principalement aux travaux français, vise à enrichir la compréhension des facteurs ayant nourri l'activisme politique à la fin des années 1960 de part et d'autre de l'océan.1968 and its Aftermath in Quebec This article compares the student rebellions which shook both France and Quebec in the late 1960s. We do not limit ourselves to merely juxtaposing facts, but seek to identify the points of contact that existed between these two geographically distant societies. Breaking with most traditional studies which simply assess France's influence on the orientation of Quebec's student groups, this article furthers the analysis and looks to establish an interpretive model, which, borrowing primarily from French studies, enriches our understanding of the various factors that fuelled political activism in the late 1960s on both sides of the ocean.
- L'enjeu linguistique au Québec : Relations de domination et prise de parole citoyenne depuis les années 1960 - Marcel Martel, Martin Pâquet p. 75-89 La question du français comme langue d'usage public au Québec fait l'objet de tensions et de conflits depuis de nombreuses décennies. Réalité historique, l'enjeu linguistique ré-émerge de manière spectaculaire, parfois violente, à compter des années 1960, en raison de l'activisme citoyen. Devant ces tensions, l'État du Québec légifère pour promouvoir le français dans l'espace public. Cet article propose une analyse synthétique de l'enjeu linguistique au Québec. Il place l'enjeu linguistique dans une perspective politique de manière à identifier les causes de la mobilisation citoyenne autour de la question linguistique et les stratégies de l'État québécois pour gérer ce débat social.Linguistic Stakes in Quebec The issue of French as the language of public use in Quebec has created tension and conflict for many decades. An inescapable historical reality, the language issue has re-emerged dramatically, and sometimes violently, since the 1960s as a product of citizen activism. Faced with these tensions, the State of Quebec has legislated to promote the use of French in the public sphere. This article offers an analytical overview of the language issue in Quebec. It adopts a political perspective in order to identify the causes that led to citizen mobilisation on the question of language and the strategies that the government has adopted to manage this social debate.
- Annexes - p. 91-94
- Les conférences de guerre du père Sertillanges (1914-1918) - Giovanni Cavagnini p. 95-107 Cet article analyse le discours de guerre du père Antonin-Dalmace Sertillanges entre 1914 et 1918. Professeur à l'Institut catholique de Paris et protagoniste de la culture catholique d'avant-guerre, le dominicain devint dès le déclenchement des hostilités le porte-parole de la frange la plus nationaliste du clergé français. Les sermons qu'il fit à l'église de la Madeleine et de nombreux documents d'archives inédits nous permettent de comprendre pleinement les ambiguïtés de l'attitude catholique face à la guerre, considérée d'un côté comme un fléau causé par les péchés des hommes et, de l'autre, comme une occasion extraordinaire de retour à la société chrétienne détruite par la sécularisation issue de 1789.The War Conferences of Father Sertillanges (1914-1918) This article analyses the war rhetoric expressed by Father Antonin-Dalmace Sertillanges during World War I. A professor at Paris's Institut catholique and a leading figure of pre-war French Catholic culture, when the war broke out the Dominican friar became the spokesperson for the most nationalist fringe of the French clergy. The sermons he delivered at La Madeleine and a variety of unpublished archival sources illustrate the ambiguous attitude of French Catholics towards the war, which was on one hand seen as divine punishment for the sins of men, but also, on the other, as an extraordinary chance to rebuild the Christian society destroyed by secularization after 1789.
- La Marche sur Buenos Aires de 1935 : Fraude électorale et mobilisation de masse au temps de la crise de la démocratie - Marianne González Alemán p. 109-121 Le 13 octobre 1935, les habitants de la ville Buenos Aires assistent stupéfaits à un spectacle inédit : le défilé d'environ cent mille citoyens venant de la province de Buenos Aires qui convergent vers la place de Mai, cœur de la ville de Buenos Aires, pour manifester leur soutien à Manuel Fresco, alors candidat du parti conservateur aux élections pour le poste de gouverneur. Dans ce contexte, la Marche sur Buenos Aires rend compte d'un changement notable de la façon dont le Parti conçoit la représentation politique. L'étude de cette grande mobilisation et du contexte dans lequel elle prend place permet de comprendre ce changement, à un moment où la province entre dans l'ère des mobilisations de masse.The March on Buenos Aires The people of Buenos Aires were stunned on 13 October, 1935, when they witnessed an unprecedented phenomenon: about 100,000 citizens from the province of Buenos Aires were gathered in the Plaza de Mayo, in the heart of Argentina's capital, to show their support for Manuel Fresco, the Conservative Party's gubernatorial candidate. In this context, the “March on Buenos Aires” reflected a significant change in the way that the Party viewed political representation. The study of this rally and the context in which it occurred allow us to understand this change, at the moment when the province of Buenos Aires entered the era of mass mobilisations.
- Les relations entre les mouvements étudiants américain et français dans les années 1960 : Une méfiance cordiale - Jean Lamarre p. 123-139 Cet article analyse les relations entre les deux plus importantes unions étudiantes des années 1960, soit l'Union nationale des étudiants de France (UNEF) et l'United States National Student Association (NSA), et identifie les points de convergence et de divergence qui ont marqué leurs rapports. Ces deux syndicats étudiants, bien qu'aux antipodes quant à leur philosophie, leur fonctionnement et leur objectif, ont entretenu des relations cordiales et continues, moins par volonté de collaborer que pour s'épier, afin d'identifier leurs failles respectives, s'en servir pour miner leur crédibilité et gagner en leadership auprès des autres unions nationales.The Relations between American and French Student Movements in the 1960s This article analyses the relationship between the two largest student unions in the 1960s, the French Union Nationale des Étudiants de France (UNEF) and the United States National Student Association (NSA), and highlights the similarities and differences that marked this relationship. Despite being radically different with regard to their philosophies, operations and objectives, these two student unions nevertheless maintained regular and friendly relations. This stemmed less from any desire to collaborate than to spy each other, in an attempt to identify each other's weaknesses, thus discrediting their opponents and gaining prestige over other national student unions.
- Management public et développement agricole : Histoire méconnue d'un mariage précoce (1972-1983) - Sylvain Brunier p. 141-155 L'article revient sur l'introduction de nouveaux instruments de contrôle et de gestion de la politique de développement agricole au début des années 1970. Ce tournant managérial n'est pas imposé de l'extérieur, il s'inscrit dans les luttes internes au champ des organisations professionnelles agricoles françaises et des administrations d'État spécifiques à ce secteur. Les nouvelles méthodes introduites dans le sillage de la politique de Rationalisation des choix budgétaires (RCB) participent à délégitimer l'ancienne conception du développement agricole qui liait la sélection des agriculteurs à la promotion des exploitations familiales, pour favoriser la parcellisation du travail de conseil agricole, la primauté accordées aux indicateurs de performance, la spécialisation et l'intensification des productions.Public Management and Agricultural Development This article examines how new tools to control and manage agricultural development policy were introduced in the early 1970s. This managerial turn was not imposed from the outside, but was part and parcel of internal fights in French professional agricultural organisations and specific administrative branches. The new methods introduced in the wake of the Rationalisation des choix budgétaires (RCB, Rationalisation of Budget Choices) policy helped to delegitimise the traditional concept of agricultural development, which linked the selection of farmers with the promotion of family farms, instead favouring the fragmentation of the work of the agricultural council, relying on performance indicators, and encouraging specialisation and intensification.
Rubriques
- Archives - p. 157-168
- Avis de recherches - p. 169-174
- Images, lettres et sons - p. 175-189
- Vingtième Siècle signale - p. 191-199
- Librairie - p. 201-247