Contenu du sommaire : Sciences, recherche et genre

Revue Travail, genres et société Mir@bel
Numéro no 14, 2005
Titre du numéro Sciences, recherche et genre
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Parcours

  • Dossier  : Sciences, recherche et genre

    • Sciences, recherche et genre - Marlaine Cacouault-Bitaud, Delphine Gardey p. 27-28 accès libre
    • La part de l'ombre ou celle des lumières ? : Les sciences et la recherche au risque du genre - Delphine Gardey p. 29-47 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article propose une lecture de la façon dont les sciences sociales contemporaines ont envisagé les liens entre les femmes (puis le genre) et les sciences et finalement la recherche au cours des trente dernières années. Son objectif est de souligner la vitalité de ces domaines, leur diversité empirique, méthodologique et théorique, les modalités de leur relation avec des réflexions sociales et politiques plus larges, leurs limites mais aussi leurs potentialités. Suivant en cela la façon dont ces travaux se sont historiquement développés, l'article s'intéresse d'abord à la question – classique – de la part et de la place des femmes dans la production des sciences et des savoirs. La question initiale : "qui a pu (qui peut) produire des sciences dans les sociétés occidentales ?" permet d'ouvrir une série d'attendus ayant trait à la façon dont les sciences sont ordinairement produites, dont elles s'insèrent dans les valeurs et les cultures dominantes d'une époque, dont elles contribuent à définir et redéfinir des rapports sociaux et notamment de sexe. L'article tente finalement de mettre en évidence trois apports de ce champ de réflexion critique : les études de genre ont transformé et transforment les conceptions ordinaires sur ce que sont les sciences et permettent d'en donner une vision plus réaliste ; la contribution des femmes aux sciences (sociales et dures) devrait être envisagée comme une opportunité d'enrichissement et d'universalisation des sciences ; l'ouverture de la recherche à la société dans la diversité de ses composantes (aussi bien du point de vue des acteurs légitimes de la production des connaissances que de la définition de ses contenus et agendas, et de l'évaluation de ses pratiques) devrait être à l'agenda du monde de la recherche dans l'avenir.
      This article interprets the way in which contemporary social sciences have envisaged the links between women (later on, gender), sciences and research over the past 30 years. The objective is to highlight the vitality of these fields, their empirical, methodological and theoretical diversity, their relations to broader social and political reflections, and their limits as well as their potential. As was historically the case for these works, the article first questions the – classical – question of the place and share of women in science and knowledge production. The initial question: "Who could (who can) produce science in occidental societies?" gives way to a series of whereas linked to the way sciences are ordinarily produced and fit in the dominant values and cultures of an epoch. They actually contribute to defining and redefining social relations, particularly those that are gendered. The article finally attempts to highlight three contributions of this critical field: gendered studies transformed and will transform ordinary conceptions of what sciences are, providing a more realistic vision of them; women's contribution to sciences (social and exact) should be thought of as an opportunity to enrich sciences and make them universal; the opening of research to society and the very diversity of its parts should be on the agenda of the world of research in the future. This opening concerns the legitimate actors of the production of knowledge as well as the definition of its components and agendas and the evaluation of its practices.
    • Femmes dans les carrières scientifiques en Allemagne : les mécanismes cachés du pouvoir - Sandra Beaufaÿs, Beate Krais p. 49-68 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les statistiques de l'Union européenne montrent chaque année de nouveau la sous-représentation des femmes aux sommets des carrières scientifiques. L'Allemagne fait généralement partie des pays où des femmes sont très rarement dans ces positions. Jusqu'à la période actuelle, la recherche tente d'expliquer cet état de fait surtout par des facteurs liés aux femmes elles-mêmes, comme leurs intérêts, leur manière spécifique d'envisager leur carrière, leur personnalité « peu adaptée à la science », etc. Notre enquête n'étudie pas les femmes, mais le champ scientifique. L'article traite de l'organisation, des relations sociales et des interactions au sein du travail qui consiste à produire des résultats scientifiques. Ce contexte n'est pas neutre mais fondé sur des rapports sociaux de sexe. À partir de deux enquêtes empiriques, l'analyse montre qu'au centre d'un ensemble de conditions complexes qui mènent à l'exclusion des femmes des carrières scientifiques, se situe le problème de la non-reconnaissance des femmes comme « cojoueuses » du champ scientifique.
      Every year, European Union statistics show that women in top scientific careers are under-represented. Germany is one of the countries in which women are very rare in these positions. Until recently, research would look for explanations within women's lives themselves, investigating their areas of interest, the specific way in which they would manage their careers, their personality as "unfit for science", etc. Our survey investigates the scientific field, not women. The article deals with organization, social relations and interactions while producing scientific results. Such a context is not neutral, as shown in the article: it is based upon gendered social links. On the basis of two empirical surveys, the analysis shows that the non-recognition of women as "co-players" in the scientific field is central to a number of complex conditions that lead to the exclusion of women from scientific careers.
    • Chercheuses entre deux passions : L'exemple des biologistes - Catherine Marry, Irène Jonas p. 69-88 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le monde académique n'échappe pas au plafond de verre ou au ciel de plomb qui pèse sur les carrières des femmes : dans toutes les disciplines, leur part s'étiole au fil de la hiérarchie des grades et des honneurs. Cet article, appuyé sur des données statistiques et des entretiens, se propose d'apporter des pistes d'explication à ces inégalités sexuées dans le monde académique en explorant un coin du ciel de plomb : celui qui pèse sur les chercheuses en sciences de la vie en France. Il met l'accent sur la dimension subjective, c'est-à-dire sur les plaisirs et souffrances du métier de chercheur et sur les contradictions, particulièrement vives chez les femmes, générées par les injonctions contradictoires à l'exercice idéal de ce métier et de celui de mère.
      The academic world does not escape the glass ceiling nor the leaden sky that weighs upon women's careers: in all fields, their share declines as one escalates the hierarchy of ranks and honors. On the basis of statistical data and interviews, this article offers possible explanations to these gendered inequalities in the academic world by exploring part of the leaden sky that weighs upon female researchers in natural sciences in France. It focuses on the subjective dimension, i.e. on pleasure and sufferance inherent to the profession of researcher, as well as on the contradictions between the schedule of an ideal researcher and that of a mother. What is the meaning of recognizing the time spent educating one's children in retirement benefits when the status of housewife is that of fewer and fewer women among the generations that will retire in the years to come? The question of equal rights between mothers and fathers in the French public service emerged since the Griesmar case. It had to be dealt with when the retirement system was reformed. However, the fundamental question of equal rights to retirement between men and women still need to be dealt with. Beyond the strict question of genders, that of family rights is still unanswered.
    • Le féminisme a-t-il changé la recherche biomédicale ? : Le "Women Health Movement" et les transformations de la médecine aux États-Unis - Ilana Löwy p. 89-108 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Pour certains observateurs, la médecine a radicalement changé sous la double pression du mouvement féministe et des femmes médecins – de plus en plus nombreuses dans la profession. Cet article examine la pertinence d'une telle affirmation, ainsi que la contribution du mouvement des femmes dans la modification des pratiques médicales, notamment à travers l'étude du rôle du Women Health Movement (whm) sur les attitudes des femmes et des médecins. Ce mouvement a contesté le pouvoir des experts, proclamé le droit des femmes à prendre en charge leur corps et développé des structures médicales « parallèles », co-animées par des professionnel-le-s et des militantes. Si la formidable charge radicale portée par le whm dans les années 1970 s'est diluée par la suite, des actions inspirées par le mouvement continuent cependant à façonner la médecine et la recherche biomédicale aux États-Unis.
      According to certain observers, medicine has radically changed under the pressures both of the feminist movement and of female doctors, whose numbers steadily increase in the profession. This article examines the validity of such a statement as well as the contribution of the women's movement to the modification of medical practice, examining in particular the impact of the Women's Health Movement on women's and doctors' attitudes. This movement challenged the expert's power, pro-claimed women's right to take charge of their bodies, and developed alternative medical structures ran both by professionals and by militants. If the amazing radical charge carried by the whm in the 1970s weakened later on, actions inspired by that movement continue to shape medicine and biomedical research in the USA.
    • La mémoire n'est pas neutre : Souvenirs de femmes à la Faculté des Sciences et Techniques de Nantes - Emmanuelle Houzé-Robert p. 109-128 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Ce texte propose d'explorer la mémoire d'universitaires pour cerner certains aspects de la dynamique des rapports sociaux de sexe dans une faculté peu féminisée, la Faculté des Sciences et Techniques de Nantes, considérant que la place sociale est déterminante de la structure, de la forme et de l'étendue de la mémoire. Dans les souvenirs portant sur les enseignantes s'exprime l'androcentrisme de l'institution. Dans les récits de vie professionnelle des enseignantes chercheures se révèle la forte ségrégation horizontale et verticale des emplois qui existe dans l'établissement, à cet échelon pourtant élevé du salariat d'encadrement. L'entrée par la mémoire permet cependant de se garder de tout constat misérabiliste : les femmes jouent du caractère composite de leur métier pour construire des carrières en rapport avec leurs ambitions.
      This text explores scholars' memories in order to apprehend dynamics of gendered social links in a faculty counting very few women, the faculty of science and technical objects of Nantes, France. It is considered that the social position is a determining factor in the structure, form and range of memory. In the female professors' memories, the androcentrism of the institution is flagrant. In the researchers' and professors' professional life stories, the strong vertical and horizontal job segregation within the institution is obvious, even at such high ranks in the hierarchy. However, approaching the matter through memory excludes any kind of dwelling on sordid reality: women play with the heterogeneous nature of their job to build careers in accordance with their ambitions.
  • Mutations

    • Sur l'éducation des enfants et les droits à la retraite - Anne-Lise Moreau p. 131-147 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Quel est le sens de la reconnaissance du temps d'éducation des enfants pour les droits à la retraite alors que la situation de femme au foyer concerne beaucoup moins les générations qui vont partir à la retraite désormais ? La question de l'équité des droits entre pères et mères en la matière est sous-jacente depuis l'affaire Griesmar, dans la fonction publique. Dès lors, elle devait nécessairement être traitée à l'occasion de la réforme des retraites. Cependant, faute d'avoir pris en compte plus fondamentalement la dimension d'égalité des droits à la retraite entre les hommes et les femmes, la question reste encore à débattre. Au-delà de la stricte problématique des genres, peut se poser la question du droit des familles.
      What is the meaning of the recognition of the time spent educating one's children in retirement benefits when the status of housewife is that of fewer and fewer women within the generations that will retire in the years to come? The question of equal rights between mothers and fathers in the French public service emerged since the Griesmar case. It had to be dealt with when the retirement system was reformed. However, equal rights to retirement between men and women still need to be enforced. Beyond the strict question of genders, that of family rights is still unanswered.
  • Controverse  : "Métamorphoses de la Parenté"

  • Critiques