Contenu du sommaire : Revisiter les États de l'action publique
Revue | Sciences de la société |
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Numéro | no 105, 2020 |
Titre du numéro | Revisiter les États de l'action publique |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Les interfaces de l'action publique : gérer, décider, contester - Lionel Francou, Céline Mavrot
- L'engagement associatif entre pluralité des logiques d'aide et reconnaissance d'une politique d'action sociale - Maëlle Meigniez Bien que relevant a priori de logiques différentes, l'État et les associations se côtoient et collaborent dans le domaine social de l'aide aux plus démunis en Suisse. Les acteurs associatifs, que ce soit les intervenants sociaux de terrain ou les responsables, doivent agir en fonction de ces logiques d'aide et de l'imbrication avec l'État. Ce texte vise à explorer les manières de faire de ces acteurs à partir d'une étude de cas ethnographique dans une association d'aide en Suisse romande. Il s'agira de comprendre comment l'association s'inscrit dans une politique d'aide, dans l'articulation entre une grande diversité de dispositifs aux objectifs variés et une volonté de produire une action sociale unifiée et reconnue publiquement.Although their logic is different at first glance, the state and associations interact and collaborate in the social field of aid to poorest in Switzerland. The associative actors, from field social workers to the leaders, must deal with these logics of aid and in connexion with the welfare State. Based on an ethnographic case study in an aid association in French-speaking Switzerland, this article explores the practices of these associative actors. The aim is to understand how the association is part of an aid policy, while articulating a wide array of activities with various objectives and the will to produce a unified and publicly recognized social action.
- « Accueillir la personne telle qu'elle est » - Marine Maurin L'article propose de décrire et d'analyser les problèmes posés par la norme de « l'inconditionnalité » dans un accueil de jour pour personnes sans abri. Norme à la fois juridique et sociale, l'inconditionnalité de l'urgence sociale entre en contradiction avec les aides sociales distribuées selon des critères d'attribution et de contribution. Plusieurs questions se posent au regard de cette norme de ce secteur du social. En quoi consiste cette inconditionnalité ? L'inconditionnalité signifie-t-elle l'absence de pratiques de catégorisation des publics de l'intervention sociale ? À plusieurs reprises, les professionnels se trouvent gênés dans leur pratique quant aux manières de faire tenir cette norme. Ils s'en arrangent d'ailleurs régulièrement, par des pratiques de catégorisation des publics afin d'« accueillir la personne telle qu'elle est ». Plus largement, l'inconditionnalité de l'accueil met à l'épreuve les professionnels dans leur manière d'agir et rend compte de décalages entre cette valeur largement mobilisée (accueillir la personne telle qu'elle est) et la réalité de l'accueil.The article describes and analyzes the problems caused by the norm of “unconditionality” in a day care center for homeless people. As a legal and social norm, the unconditionality of social emergency contradicts other kinds of social subsidies granted according to allocation and contribution criteria. Several questions arise regarding this norm in the social sector. What is unconditionality? Does unconditionality mean the absence of categorization of social welfare addressees? On several occasions, professionals are troubled in their practice about how to enforce this standard. They regularly accommodate it through audience categorization in order to "welcome people as they are". From a broader perspective, the unconditionality of social services is a truth-test for professionals regarding their practices. It reflects the gaps between this widely mobilized value (welcoming people as they are) and the reality of social services.
- Saisir la managérialisation de la coopération belge au développement dans sa matérialité - Justine Contor Cet article aborde la mise en œuvre concrète du paradigme managérial, dans la politique de développement belge, promu dans le domaine de la coopération au développement depuis la fin des années 1990. Ce paradigme managérial prend particulièrement corps dans la Déclaration de Paris (2005), signée par les États du Nord et du Sud. Cette Déclaration met en avant la notion d'efficacité de l'aide au développement comme principe et marque, selon nous, la rencontre entre le new public management et la coopération internationale. Notre approche s'inscrit dans le courant de l'analyse des instruments de l'action publique. Nous proposons donc de revenir sur la mise en œuvre concrète de deux instruments qui démontre une transformation des relations entre l'État belge et le secteur des organisations non gouvernementales (ong). Il s'agit d'étudier les dispositifs suivants : le screening qui est un audit sur les processus de gestion des ong, et les cadres stratégiques communs qui sont des groupes de travail thématiques en vue de rationaliser les actions des ong. Nous discuterons plus spécifiquement de la capacité des ong à s'emparer de ces deux instruments, en usant de modalités d'adaptation ou de stratégies de contestation multiples.This paper discusses the practical implementation of the managerial paradigm, promoted in the field of development cooperation since the late 1990s. This managerial paradigm is rooted in the Paris Declaration (2005). The Declaration highlights the principle of aid effectiveness and marks the convergence between new public management and international cooperation. Our approach draws on the analysis of public policy instruments. We look into the practical implementation of two instruments, demonstrating a change in the relationship between the Belgian state and the non-governmental organization (ngo) sector. The studied instruments are the ‘screening' – which is an audit of ngo management processes – and the Common Strategic Frameworks, which are thematic working groups aimed at rationalizing ngo actions. Lastly, we discuss the capacity of NGOs to appropriate these two instruments, using adaptation or protest strategies.
- De la participation sociale à l'émergence de nouvelles modalités de contrôle des modes de vie - Marion Le Tyrant Le moustique tigre Aedes albopictus, potentiellement vecteur de maladies telles que la dengue, le chikungunya ou le Zika est présent dans une cinquantaine de départements français de métropole. Alors que les pratiques de lutte contre les moustiques évoluent vers des techniques alternatives aux insecticides, le concours des populations est selon les spécialistes de la lutte antivectorielle, de plus en plus nécessaire au succès de leurs actions. Une communauté d'agglomération du Var s'est engagée, avec la création d'un service intercommunal de démoustication, dans un projet territorial de lutte contre le moustique en association avec les populations riveraines. L'ethnographie des interactions entre les agents du service de démoustication et les riverains nous donne à voir les ressorts par lesquels la collectivité locale instigue une coproduction de la lutte contre le moustique tigre, entre séduction, pouvoir, contrôle et partage des responsabilités.The tiger mosquito Aedes albopictus, potential vector of diseases such as dengue, Chikungunya or Zika is present in about fifty metropolitan French departments. According to the vector control specialists, whereas strategies against mosquitoes are evolving towards alternatives to insecticides, the action of the populations seems to be more and more necessary in the fight against disease vectors. With the creation of a vector control intercommunal service, an urban conglomeration located in the Var has created a territorial plan against mosquitoes in partnership with local populations. The ethnography of the interactions between vector control agents and local populations shows how the urban conglomeration incites populations to collaborate in vector control, using seduction, power, control and responsibility sharing.
- La critique citoyenne des politiques publiques en urbanisme - Olivier Struelens Le déploiement des compétences citoyennes en arène publiques face aux élus fait l'objet de nombre d'analyses sociologiques qui s'intéressent aux dispositifs participatifs en urbanisme comme lieux par excellence du renouvellement démocratique. En se penchant sur les dispositifs consultatifs à partir d'une controverse urbanistique à Bruxelles, cette contribution fait ressortir les contrastes des modes d'investissement citoyen entre arènes publiques participatives et consultatives. Face au constat d'une juridicisation du discours et d'une judiciarisation du conflit dans les assemblées consultatives, cet article développe une analyse soulignant l'ambivalence des usages sociaux stratégiques du droit, mobilisés tant par les élus que par les citoyens, tentant respectivement de gérer la contestation citoyenne et de contester la gestion des politiques publiques. Les usages sociaux du droit observés, entre ressource et contrainte, questionnent en définitive les relations entretenues entre droit et politique dans les politiques d'aménagement du territoire.Many sociological works focus on the civic and critical capacities of lay citizens confronted to local officials in public arenas, especially in participative assemblies, considered as the ultimate venue of a democratic renewal. However, by concentrating on the consultative public arenas in the context of a local urban planning controversy in Brussels, this paper aims to shed light on the contrasting modes of citizen investment in participative and consultative assemblies. Taking the political mobilization of law as both judicialization of the conflict and juridicisation of discourse, this article examines how local officials and lay citizen respectively try to manage the contestation and contest the management of public policies. The observed social uses of law question the relations between law and politics in urban planning.
- Gestion du conflit social et attentes morales - Angelo Montoni Quels sont les processus et les événements qui permettent de retracer le parcours d'un épisode contestataire ? De quelle façon la gestion du conflit social par les gouvernements influence-t-elle sa radicalisation politique ? Comment la non-reconnaissance et la violation des attentes légitiment-elles l'action collective et ses différentes formes d'expression ? À partir de ces questionnements, cet article propose une analyse du processus de contestation des étudiants chiliens débuté en 2011 et toujours en cours. Pour cela, nous proposons d'identifier d'abord la manière dont, depuis la fin du régime autoritaire (1989), le pouvoir politique a entravé les processus contestataires ; et ensuite quels sont les éléments qui ont provoqué la désillusion des jeunes durant la période post-dictatoriale. Dans un second temps, l'article revient sur les « incertitudes structurelles » qui ont amené des groupes de plus en plus nombreux de jeunes à une radicalisation de l'action contestataire durant la mobilisation étudiante. Une enquête ethnographique a été réalisée entre les années 2011 et 2014 dans ce but.Which processes and events allow to retrace the trajectory of a protest episode? How does the government and its management of the social conflict influence its radicalization? How does the non-recognition and violation of people's expectations legitimize collective action and its different forms of expression? Tackling these questions, this article analyzes the process of Chilean students' contestation, initiated in 2011 and still ongoing. First, we identify how the political power has hampered the processes of contestation since the end of the dictatorship (1989), and then which elements caused disillusionment among youth during the post-dictatorship's period. Finally, we focus on the "structural uncertainty" that led more and more groups of young people to radicalize their protest actions during the student's movement. An ethnographic study was made between 2011 and 2014 for this purpose.
- Prendre en charge la pauvreté par la « lutte contre le non-recours » aux aides sociales - Julie Voldoire Cet article entend rendre compte d'un paradoxe inhérent à la mise en place d'une politique publique de « lutte contre le non-recours » qui tout en voulant permettre d'améliorer la prise en charge de la pauvreté ne peut se passer d'injonctions normatives à l'égard de celles et ceux qu'elle « cible », contribuant ainsi mettre en péril l'État social en France et l'idéal de l'égalité de traitement. L'argumentaire repose sur une investigation empirique (qualitative et quantitative) conduite au sein d'un Centre communal d'action sociale, dans le cadre d'une recherche-action, et se réfère aux vingt-trois aides sociales facultatives mise en place par cette collectivité territoriale. À travers l'analyse du regard des professionnels sur leurs pratiques et des ayants droit sur les modalités d'accès à ces aides singulières, ce texte se propose de revenir sur la genèse et les modalités pratiques (règlement institutionnel, démocratie participative, prescriptions comportementales, etc.) de la construction d'un public de l'action publique : les « non-recourants ». Une problématique plus générale investit, d'une part, la structuration même de l'action publique dans le champ du social et, d'autre part, la construction et les contours de l'État social : « réflexif » et/ou « actif ».This article intends to report on a paradox inherent in the implementation of a public policy which focuses on “combating non-take up” of social benefits. The goal of this policy is to improve poverty management but cannot aim this goal without prescriptive injunctions against targeting people. Thereby this policy jeopardizes the social state in France and the ideal of equal treatment. The argumentation is based on an empirical (qualitative and quantitative) investigation carried out within a Centre communal d'action sociale and refers to twenty-three voluntary social benefits open by the local authority that we have investigated. This project was an action-research project. Through the analysis of the professionals' view on their practices and of the beneficiaries on the modalities of access to these singular aids, this text proposes to revisit the genesis and the practical modalities (institutional regulation, participatory democracy, behavioral prescriptions, etc.) of the construction of a public action audience: people who do not use their rights or “non-take up people”. A more general problem is involved, on the one hand, the very structuring of public action in the social field and, on the other hand, the construction and contours of the social state: "reflective" and/or "active".
- Les précaires et l'activation de la protection sociale en France - Adrien Mazières-Vaysse La mise en place du revenu de solidarité active (rsa) en France, qui s'inscrit dans un tournant européen de développement des politiques d'activation, a conduit à un transfert de catégories des politiques publiques dans les identités individuelles des allocataires. Les mouvements sociaux en lutte contre la précarité s'opposent à la diffusion de ces identités stigmatisées et cherchent à faire émerger, à travers la critique du référentiel d'activation, des contre-identités et des cadres d'interprétation alternatifs. Cet article analyse la production de ces contre-identités qui s'appuient sur une variété de discours militants contre la précarité et l'activation : défense et volonté d'extension de la logique assurantielle de la protection sociale dans un pôle d'inspiration syndicale ; recherche de l'égalité des droits démocratiques appuyée sur une philosophie de la justice sociale dans les organisations de jeunes précaires ; déconnexion entre droit au revenu et obligation de travail dans un pôle mettant les précaires au cœur de la transformation sociale.The implementation of the revenu de solidarité active (rsa) in France, which is part of a European trend in developing active labour market policies (ALMPs, or activation policies), has led to a transfer of public policies categories into the individual identities of welfare recipients. Social movements fighting against precariousness are opposing the spread of these stigmatized identities and are seeking to produce, through criticism of the activation framework, counter-identities and alternative interpretive frameworks. This article analyses the production of these counter-identities, which are based on various activist discourses against precariousness and activation: by defending and willing to extend the insurance logic of social protection in a union-inspired perspective; by seeking equal democratic rights based on a philosophy of social justice in precarious youth organisations; by separating the right to income from the obligation to work in a perspective of social transformation that places precarious people at its heart.
Note de recherche
- Perspectives documentaires en sciences de l'éducation (1983-2005) : revue bidisciplinaire ou revue hybride ? - Cécile Dupin de Saint Cyr-Heckel Une revue Perspectives documentaires en sciences de l'éducation, fondée par J. Hassenforder semble se référer à deux disciplines, les sciences de l'information et de la communication (sic) et les sciences de l'éducation (se). Comment la relation entre elles s'organise-t-elle ? Afin de préciser la part de chacune cette recherche empirique interroge, à partir de l'analyse de l'évolution et du contenu des rubriques, des appartenances des auteurs et des genres discursifs, l'hybridité et la bidisciplinarité des médiations qu'elle propose. Si deux disciplines sont citées dans le titre l'une, les sic, n'est utilisée que dans ses aspects techniques, la documentation, qu'elle met au service des avancées produites par l'autre, la se. L'hybridité se manifeste dans la publication d'auteurs praticiens ou chercheurs en se valorisant ainsi l'expérience de terrain et la recherche appliquée.The journal Perspectives documentaires en sciences de l'éducation (1983-2005) created by J. Hassenforder appears to refer to two disciplines, Information and Communication Sciences (ics) and Educational Sciences (es). How is the relationship between them organized? In order to clarify the part of each, this empirical research questions, from the analysis of the evolution and content of the sections, the affiliations of the authors and the discursive genres, the hybridity and the bidisciplinarity of the mediations that it proposes. If two disciplines are mentioned in the title, one, the ics, is used only in its technical aspects, the documentation, which it puts at the service of the knowledge produced by the other, the es. The hybridity manifests itself in the publication of authors who are practitioners or researchers in es thus valuing practical experience and applied research.
- Perspectives documentaires en sciences de l'éducation (1983-2005) : revue bidisciplinaire ou revue hybride ? - Cécile Dupin de Saint Cyr-Heckel