Contenu du sommaire : Pratiques du travail social : le poids des structures sociales

Revue Pensée Plurielle Mir@bel
Numéro no 26, 2011
Titre du numéro Pratiques du travail social : le poids des structures sociales
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Pratiques du travail social : le poids des structures sociales - Jean-François Gaspar, Jean Foucart p. 7-12 accès libre
  • La médiation de rue comme régulation des désordres urbains - Éric Marlière, Séverine Fontaine p. 13-23 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Les ruptures entre les jeunes dits « des cités » et les élus locaux se sont opérées progressivement depuis les années 1980. Elles se sont accentuées brutalement avec les émeutes de novembre 2005, comme le montrent les récentes échauffourées entre jeunes et police dans les cités populaires urbaines. Quelle que soit la culture politique de la commune, les élus locaux ont de plus en plus de mal à conserver de la crédibilité à l'égard d'une frange croissante de la jeunesse des quartiers populaires, celle qui se situe en marge. C'est le cas d'une municipalité « gauche » de la banlieue de Paris étudiée entre 2007 et 2008 qui voit une augmentation graduelle des tensions entre jeunes et institutions. Cette situation que l'on pourrait qualifier d'« explosive » amène les édiles municipaux à concevoir (avant les émeutes de 2005) un dispositif de médiation de rue composé d'adultes originaires des cités HLM qui composent la ville.
    Street mediation as a regulation of urban disorders
    The breaks between young people labelled “from the housing estates” and local councillors has been taking place gradually from the 80's on. They suddenly increased with the riots of November 2005 as it is plain to see in the recent clashes between young people and the police in the urban popular housing estates. Whatever the political culture of the city, the local councillors find it more and more difficult to keep some credibility from a growing part of young people from popular areas, the part which has opted out of society. It is the case of a “left wing” municipality of the suburbs of Paris, studied between 2007 and 2008, which sees a gradual rise of the tensions between young people and institutions. That situation, which could be labelled “explosive”, brings the local councillors to conceive (before the riots of 2005) a street mediation device made up with adults from the city's blocks of council flats.
  • Les cadres sociaux de l'animation en centres de loisirs en France - Jérôme Camus p. 25-36 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Malgré le « flou » qui entoure les pratiques des animateurs dits « volontaires », l'enquête par observation et entretiens réalisée dans deux centres de loisirs permet de mettre en évidence une grande stabilité des façons de faire. Les processus de régulation implicites dont elles résultent procèdent d'un ajustement des pratiques ordinaires d'agents présentant des propriétés sociales relativement homogènes aux cadres d'interaction propres aux institutions d'accueil. La juvénilité cultivée des encadrants peut alors s'employer et retrouver les oppositions qui, gisant dans la pratique, constituent la mémoire du poste.
    The social frames of animation in leisure centres in France
    Despite the “vagueness” around the practices of the so-called “voluntary” animators, the survey by observation and conversation lead in two leisure centres makes it possible to highlight a great stability of the practices. The implicit regulation processes that they result from, proceed from an adjustment of ordinary practices of agents who present social properties that are relatively homogenous to the interaction frames that are typical of reception institutions. The cultivated youthfulness of the supervisers can then be used and can find again the oppositions, lying in the practice, that make up the memory of the post.
  • L'expérience du stagiaire en travail social : le point de vue situé de l'activité - Sylvie Mezzena p. 37-51 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Notre réflexion sur l'expérience des stagiaires s'inscrit dans un questionnement plus large consacré à la construction de la professionnalité des travailleurs sociaux selon une perspective immanente. À partir du point de vue de l'analyse de l'activité, nous souhaitons saisir de quoi est faite l'expérience des stagiaires dans la formation professionnelle en travail social de niveau bachelor. Après une présentation du dispositif de formation pratique du bachelor en travail social, nous poserons quelques jalons sur l'analyse de l'activité. Nous discuterons ensuite l'expérience du stage dans la formation pratique. Nous nous appuierons sur notre observation des étudiants en stage et sur leurs témoignages recueillis durant notre pratique de formatrice lors de l'accompagnement de la formation pratique. Nous finirons par la présentation de la perspective immanente adoptée dans nos recherches pour l'étude de la construction de la professionnalité des travailleurs sociaux.
    The trainee's experience in social work: the situated point of view of the activity
    This paper focuses on the trainees' experience in social work professionalization and considers more largely the construction of professionality among an immanent perspective. Starting from the situated perspective of the activity analysis, we would like to seize some aspects of the trainees' experience at the bachelor degree. After a presentation of the practical training in the bachelor cursus in social work, we will set the theoretical frame of the activity analysis. We will further examine the experience of the traineeship in the practical formation from this situated point of view. Our discussion leans on our observation of the students and on their testimonies, specifically recorded during our tutorial experience of the practical formation. Finally, we end by discussing the immanent perspective we adopt in our researches for the construction of social workers' professionality
  • L'articulation des temps sociaux comme enjeu central chez les professionnels du social - David Laloy p. 53-64 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Dans cet article, l'auteur démontre en quoi l'articulation des temps sociaux est un enjeu central chez les assistants sociaux et souligne le rôle de l'organisation dans cette activité banale de l'existence qui semble a priori relever de décisions individuelles. En partant d'une comparaison de cadres organisationnels contrastés du point de vue de leur degré de formalisation, l'article met en lumière leur influence sur la façon dont le travailleur inscrit son rôle professionnel dans l'espace et dans le temps et dont il l'articule avec ses engagements hors travail. De cette manière, il montre que les assistants sociaux ne sont pas dans des conditions identiques d'articulation pratique de leurs temporalités. Dans un deuxième temps, l'auteur interroge la dimension subjective de cette articulation et illustre l'importance de son harmonisation pour ces professionnels qui sont confrontés à des nœuds de tension mentale inhérents à la nature de leur travail et qui peuvent potentiellement perturber leur disponibilité dans des activités hors travail.
    “The articulation of social times as the central stake by the professionals of social work”In this article, the author demonstrates in what the articulation of social times is a central stake by the social assistants and emphasises the role of the organisation in that banal activity of the existence that seems to come a priori under individual decisions. Starting from a comparison of social frames contrasted from the point of view of their formalisation level, the article sheds light on their influence on the way the worker inscribes his professional role in space and time and he articulates it with his out-of-work obligations. This way, he shows that social assistants are not in identical conditions for the practical articulation of their temporality. In a second stage, the author questions the subjective dimension of this articulation and illustrates the importance of its harmonisation for those professionals who are confronted to knots of mental tension inherent to the nature of their work and that can potentially disturb their availability in out-of-work activities.
  • La citoyenneté à l'épreuve des rites : l'exemple des réunions de foyer dans un dispositif d'éducation spécialisée - Laurence Ossipow p. 65-80 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Choisissant de définir a posteriori les moments qui, selon certaines dimensions, peuvent être compris comme des rites tandis que d'autres ressortent de la chronique ordinaire d'une institution, nous avons enquêté sur la vie quotidienne de trois foyers éducatifs genevois accueillant des adolescent-e-s de 14 à 18 ans selon différents types de placements. Parmi d'autres rites (étapes de placement, lever, coucher, repas, anniversaire, fêtes calendaires, camp, sorties d'institutions...), nous avons en particulier analysé les réunions de foyers parce qu'elles nous semblaient être riches en information sur la façon dont est exercé l'apprentissage formel et informel de la citoyenneté, une des missions principales (avec celle de l'autonomisation) que les équipes éducatives mettent en œuvre. Ces réunions hebdomadaires, qui rassemblent tous-toutes les jeunes placé-e-s ainsi qu'une partie des éducatrices et des éducateurs, régulent la vie collective, rappellent les règles de l'institution, gèrent des conflits menaçant le vivre-ensemble, ravivent un certain sentiment d'appartenance au foyer et font expérimenter certaines formes de citoyenneté et de civilité. Elles permettent aussi d'entériner certains changements individuels ou collectifs. Ce sont donc des moments de régulation, mais aussi, pour emprunter une expression d'Albert Piette, des « espaces de réflexion » (au double sens du terme) du groupe et sur le groupe.
    Citizenship tested by the rites: the example of meetings of community homes in a system of specialised educationChoosing to define a posteriori the moments that can be understood as rites according to certain dimensions, while others come from the ordinary chronicle of an institution, we conducted a survey on the everyday life of three educational reception homes of Geneva that take in adolescents from 14 to 18 according to the different types of placements. Among other rites (stages of placements, getting up, going to bed, meals, birthday, calendar celebrations, camps, day out with the institution...), we particularly analysed the meetings of community homes because they seemed to us rich in information about the way formal and informal learning of citizenship takes place, which is one of the main missions (together with the one of autonomisation) that educational teams implement. These weekly meetings, which bring together all young placed boys and girls as well as a part of the educators, regulate collective life, remind everyone of the rules of the institution, manage the conflicts that threaten the life together, revive some feeling of belonging to the home and let young people experience some forms of citizenship and civility. They also make it possible to ratify some individual or collective changes. These are moments of regulation, but also, using the expression of Albert Piette, “reflection spaces” (in the double meaning of the word) of the group and about the group.
  • Idéal féministe et injonction à l'autonomie économique. Le travail social des associations luttant contre les violences conjugales - Elisa Herman p. 81-92 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Les associations luttant contre les violences sont prises dans une ambivalence : malgré l'idéal féministe de l'émancipation et de la prise de conscience des rapports de force hiérarchisés, la « réinsertion » par l'économie prévaut. Sous la pression de leurs financeurs demandant une « rotation » des personnes hébergées, les travailleuses sociales sont contraintes de céder aux sirènes de l'autonomie économique, amenant les femmes hébergées à chercher un emploi parmi les plus précarisés et les plus pénibles. Celles-ci étant souvent seules avec leurs enfants, elles doivent trouver un mode de garde et ainsi alimenter la chaîne de la délégation marchande du travail de care. C'est alors que se trouve renforcée la division sexuelle du travail professionnel et domestique, malgré l'ambition féministe d'un changement social, quand le travail social ne peut apporter qu'une aide individualisée sans maîtriser l'ensemble des rouages dans lesquels il est pris.
    Feminist ideal and injunction to economic autonomy. Social work of associations struggling against domestic violenceThe associations that struggle against violence are taken in ambivalence: in spite of the feminist ideal of emancipation and awareness of the struggle powers in hierarchy, “reinsertion” through economy prevails. Under pressure of their financers who ask a “rotation” of the accommodated people, females social workers are obliged to give way to the sirens of economical autonomy, which brings the accommodated women to look for employment among the hardest and the most precarious forms. These are often alone with their children, they have to find a mode for them to be looked after and so feed the chain of the trade delegation of care work. Then the sexual division of professional and domestic work is strengthened despite the feminist ambition of social change, when social work can only bring an individualised help without mastering the whole of the cogwheels it is taken in.
  • Dispositif d'insertion par le maraîchage biologique. Épreuve d'une nouvelle gouvernementalité - Kenjiro Muramatsu p. 93-109 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Le travail d'insertion socio-professionnelle montre un mode d'exercice caractéristique de la gouvernementalité néolibérale et contemporaine. Le cas d'un dispositif d'insertion par le maraîchage biologique en Belgique, étudié dans ce texte, vise par sa forme une « production du corps régulateur » combinant concrètement les enjeux de régulation de l'économie et de contrôle de l'individu. Ainsi, loin d'être un simple effet illusoire d'une idéologie, son lieu d'opération constitue un lieu central de légitimation de l'action du « social » inscrit dans une politique de l'État social actif. Suite à une mise en évidence d'éléments de cadrage discursif et normatif de l'action, nous examinerons des effets de ce cadrage à partir de la forme d'engagement des opérateurs dans leur espace d'activités concret. Le régime d'action compassionnel de ces travailleurs, combiné à celui civique, se trouve au cœur de l'épreuve politique et pratique de cette nouvelle gouvernementalité.
    Device of insertion thanks to organic market gardening. Test of a new governmentality
    The work of socioprofessionnel inclusion shows a characteristic mode of exercise of neoliberal and contemporary governmentality. The case of a device of social inclusion through organic gardening in Belgium aims in his form “production of regulatory body” which combines concretely the stakes of economic regulation and control of the individual. Far from being a simple illusionary effect of an ideology, that place of operation constitute a central place of legitimation of this social action inscribed in a policy of the social active state. After showing some elements of discursive and normative framing of the action, we will examine the effects of this framing from the form of commitment of the operators in their concrete space of activities. The compassionate regime of action of these workers, combined to civic one, is in the center of the political and practical test of this new governmentality.
  • De la scientificité du travail social. Quelles recherches pour quels savoirs ? - Stéphane Rullac p. 111-128 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    La recherche dans le champ du travail social se développe enfin en France et pose inévitablement la question de la nature du savoir produit, ainsi que celle du cadre de son rattachement épistémologique et institutionnel. C'est ainsi que la scientificité du travail social est questionnée, contestée ou revendiquée, selon les jeux acteurs qui se mobilisent, débattent et s'affrontent. Ces enjeux méthodologiques se cristallisent autour d'enjeux relatifs à une lutte entre les champs des sciences sociales et celui du travail social, dans le cadre d'une réactivation de la dichotomie entre savoir universel théorique et savoir situé pratique. C'est dans ce contexte que le développement d'une science du travail social se décompose en trois modalités de recherche : « sur », « en » et « pour » le travail social.
    About the scientific nature of social work Which research for which knowledge?
    Research in the field of social work is developing in France and then inevitably raises the question of the nature of knowledge produced, and that's part of its epistemological and institutional affiliation. Thus the scientific nature of social work is questioned, challenged or claimed, by game players who are mobilizing, debate and compete. These methodological issues crystallize around issues related to a struggle between the fields of social sciences and the social work as part of a reactivation of the dichotomy between theoretical knowledge and universal knowledge situated practice. It is within this context that the development of a science of social work consists of three search terms “on”, “in” and “for” social work.