Contenu du sommaire : Traduire : une éthique politique
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Numéro | no 231, 3ème trimestre 2024 |
Titre du numéro | Traduire : une éthique politique |
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- Traduire : une éthique politique. Introduction - Alain Policar p. 3-9
- Parler même langage - Souleymane Bachir Diagne p. 11-18 Comment transformer notre dispersion en langues en rencontre en traduction ? La tâche est difficile, les langues étant caractérisées par la domination impériale plus que par l'humanisme de la traduction. L'auteur insiste sur la remise en cause de l'ordre colonial que fut, en 1955, la conférence de Bandung, et il propose un multilatéralisme philosophique inspiré de Merleau-Ponty.How can we transform our dispersion in languages into an encounter in translation? This is a difficult task, since languages are characterised more by imperial domination than by the humanism of translation. The author emphasises the challenge to the colonial order posed by the 1955 Bandung conference, and proposes a philosophical multilateralism inspired by Merleau-Ponty.
- Traduire : une conversation souveraine - Danièle Robert p. 19-25 L'acte de traduire, bien que téméraire, est avant tout accueil du texte étranger, « conversation souveraine », selon l'expression de René Char. Aussi la traduction apparaît-elle comme une précieuse façon de s'opposer à la guerre et à l'uniformisation de la pensée. L'expérience de l'altérité qu'elle permet est en définitive un plaidoyer politique pour l'universel.The act of translating, however daring, is first and foremost a welcoming of the foreign text, a ‘sovereign conversation', to use René Char's expression. Translation is therefore a valuable way of opposing war and the standardization of thought. The experience of otherness that it allows is ultimately a political plea for the universal.
- Du traduire et du deuilTraduire le yiddish - Rachel Ertel p. 27-35 L'autrice envisage la traduction, à la suite de Meschonnic, comme une éthique politique. Dans cette perspective, le yiddish, en tant que langue-monde, incarne exemplairement le rapport entre identité et altérité. Après la Shoah, quelle peut être la tâche du traducteur d'une langue assassinée ? Accepter de loger en soi la folie de l'Histoire et affirmer ainsi la volonté de survivre.Following in Meschonnic's footsteps, the author sees translation as a political ethic. From this perspective, Yiddish, as a world language, is an exemplary embodiment of the relationship between identity and otherness. After the Shoah, what is the task of the translator of a murdered language? To come to terms with the madness of history and thus assert the will to survive.
- Administration, traduction et hospitalité - Danièle Wozny p. 37-46 Comment transformer le parcours administratif du nouvel arrivant en découverte réciproque ? Les glossaires bilingues de l'administration cherchent à remplir cet objectif. Ils se veulent un outil au service des diversités, destiné à faciliter le dialogue entre les cultures et leur enrichissement mutuel. La tâche est néanmoins difficile car confrontée à des différences parfois inouïes entre les cultures et les habitudes de vie.How can we turn the newcomer's administrative journey into a mutual discovery? The administration's bilingual glossaries seek to fulfil this objective. They are intended to be a tool for diversity, facilitating dialogue between cultures and their mutual enrichment. The task is nevertheless a difficult one, as I am faced with differences which can be huge between cultures and ways of life.
- La traductibilité en tant que lutte contre l'injustice épistémique - Angelo Vannini p. 47-54 Cet article examine le rôle de la traduction dans les stratégies visant à résoudre le problème de l'injustice épistémique, à savoir un tort fait à quelqu'un en tant que sujet de connaissance. L'auteur soutient que le paradigme de la traduction, repensé à la lumière des réflexions de Walter Benjamin et d'Antonio Gramsci, permet une analyse plus précise du fonctionnement de cette injustice ainsi que des remèdes capables d'agir à un niveau structurel et pas seulement à un niveau individuel.This article examines the role of translation in strategies to address the problem of epistemic injustice, defined as a wrong done to someone in their capacity as a subject of knowledge. The argument put forth is that the paradigm of translation, when reconsidered in the light of the thought of Walter Benjamin and Antonio Gramsci, allows for a more precise analysis of how such injustice works and for remedies capable of acting at a structural level and not only at an individual level.
- Traduction et inégalités : les conditions sociales de la circulation des livres - Gisèle Sapiro p. 55-64 Cet article analyse les asymétries des échanges entre les langues sur le marché de la traduction. Sont identifiés des facteurs favorisant ou entravant la circulation des livres en traduction. Ils sont d'ordre politique, économique et culturel. Les sous-champs de la littérature et des sciences sociales et humaines servent d'étude de cas pour illustrer les inégalités particulières à ces secteurs.This article analyses the asymmetries of exchanges between languages on the translation market. Factors that promote or hinder the circulation of books in translation are identified. These factors are political, economic and cultural. The subfields of literature and of the social sciences and humanities are used as case studies to illustrate the inequalities specific to these domains.
- Traduction et Intelligence Artificielle - Marie Hermet p. 65-74 Le métier de traducteur se trouve aujourd'hui en concurrence avec les modèles de langage génératifs auxquels les éditeurs ont recours de plus en plus souvent. Mais que fait-on exactement quand on traduit une œuvre littéraire ? Comment transposer une vision unique du monde d'une langue dans une autre ?The growing trend in the publishing industry to use A.
I. generative translation models threatens the livelihood of literary translators. What do we do when translating literary prose? How can we transpose one uniquely personal vision of the world from one language to another? - Traduire les sciences : incommensurabilité, épistémés, paradigmes - Philippe Huneman p. 75-84 En introduisant les notions de paradigme et de révolutions scientifiques comme « changements de paradigme », l'historien des sciences Thomas Kuhn mit en lumière une certaine incommensurabilité des théories scientifiques à travers le temps. L'opération superficiellement simple de traduire les énoncés d'une théorie ancienne dans la science présente s'avère alors plus difficile qu'une simple extraction des éléments déjà corrects dans la théorie précédente. Après avoir expliqué les conséquences de l'incommensurabilité pour la traduction inter-théorique, cet article examinera l'idée, partagée par d'autres historiens des sciences, de faire porter l'analyse historique sur des unités métathéoriques telles que l'épistémé (Foucault) ou les themata (Holton). Je conclurai que la traductibilité des sciences passées dans notre science dépend de l'unité d'analyse considérée, l'objection kuhnienne ne valant plus lorsqu'on considère des unités de niveau très élevé, ou au contraire infrathéoriques, comme les modèles.By introducing the notions of paradigm and of scientific revolutions as «paradigm shifts», the historian of science Thomas Kuhn highlighted a certain incommensurability of scientific theories over time. The superficially simple operation of translating the statements of an old theory into our current science proves more difficult than simply extracting the elements already correct in the old theory. After explaining the consequences of incommensurability for inter-theoretical translation, this article will examine the idea, shared by other historians of science, of focusing historical analysis on metatheoretical units such as episteme (Foucault) or themata (Holton). I conclude that the translatability of past sciences into our own depends upon the unit of analysis considered – the Kuhnian objection no longer applies when we consider very high-level units, or, on the contrary, infratheoretical units such as models.
- Traduire, se traduire - David Chaillou p. 85-90 Il existe entre le compositeur et l'interprète une chaîne de traductions, à laquelle le public est convié. L'interprète doit, en effet, se réapproprier l'œuvre. C'est à cette condition d'hospitalité qu'est suspendu le dialogue esthétique. Les œuvres sont des traductions imparfaites, un travail toujours recommencé, celui d'une vie.Between the composer and the performer there is a chain of translations, to which the audience is invited. The performer must actually make the work his own. The aesthetic dialogue is based on this condition of hospitality. The works are imperfect translations, an ever-renewed work, that of a lifetime.
- Le massacre de Gaza sape la culture de la démocratie - Enzo Traverso p. 91-100
- Une réflexion sur l'État néo-wébérien - Damien Larrouqué p. 101-108
- Les physiques et l'énergie (2) - Marc Lachièze-Rey p. 110-113
- Sur un ancien mot à la mode actuelle : éco, écolo, écologie - Michel Casevitz p. 114-115
- Errements d'été… - Guy Bruit p. 116-118
- Démultiplier la notion de traduction - Christian Ruby p. 119-121
- La sarabande - Damien Lehman p. 122-124
- Lettres japonaises - Roland Pfefferkorn p. 125-127
- Notes de lecture - Christian Ruby, Roland Pfefferkorn, Michèle Leduc, Alain Policar p. 128-141