Contenu du sommaire
Revue | Revue Française de Sociologie |
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Numéro | 1986, 27-2 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
La croyance et les parasciences
- Croyances aux parasciences : dimensions sociales et culturelles - Daniel Boy, Guy Michelat p. 175-204 L'essor des parasciences au sein de nos sociétés semble constituer un fait social indiscutable. Cette étude se propose de mesurer certains aspects de ces phénomènes à partir d'un sondage d'opinion portant principalement sur les attitudes des Français à l'égard de la science. On a pu construire deux échelles de croyance (analyse hiérarchique) concernant l'un des phénomènes paranormaux, l'autre l'astrologie. On a fait apparaître des relations entre ces croyances et une série de variables d'âge, de sexe, de niveau culturel, de situation familiale, etc. Dans un second temps, on a pu montrer que ces croyances semblent liées à des situations d'intégration et de croyances religieuses particulières.Daniel Boy and Guy Michelat : Beliefs in the parasciences : social and cultural dimensions. The rise in the interest of parasciences within our societies seems to be an unquestionable social fact. This study evaluates some aspects of these phenomena, using results of an opinion survey based mainly on the attitudes of French people with regard to science. Two scales of belief have been built up (hierarchical analysis), one concerned with paranormal phenomena, the other with astrology. It has been possible to demonstrate relationships between these beliefs and a number of variables : age, sex, cultural level, family status, and so on. Secondly, it has been shown that these beliefs seem to be linked to situations of integration and particular religious beliefs.
- Parasciences et procédés de légitimation - Gérard Chevalier p. 205-219 La notion de parascience recouvre un ensemble composite de pratiques et de doctrines rejetées par les confessions dominantes et la science officielle. Intimement apparentées à l'occultisme par leurs fonctionnements logiques et leur vision du monde, elles ne s'en distinguent que par la revendication d'un statut de science et la recherche d'une légitimité par la science. L'analyse des revues et ouvrages spécialisés, des procédés promotionnels et des formes de transmission du savoir fait apparaître un décalage entre une disposition à reconnaître les signes de légitimité culturelle et la capacité à maîtriser ces signes. Les erreurs engendrées par cet écart accréditent l'hypothèse d'une domination symbolique du savoir dominant s'exerçant sur les professionnels des parasciences et corrélative d'une attitude ambivalente. La science et son exercice fonctionnent à la fois comme vecteurs d'une domination subie et comme un système de signes réinterprétés alimentant une contestation de la hiérarchie des valeurs culturelles et une mise en question des principes de classement social.Gérard Chevalier : Parasciences and legitimizing procedures. The notion of parascience covers a mixed grouping of practices and doctrines rejected by main religions and official science. Intimately linked to occultism in their logical functioning and view of the world, they are distinguished only by their demand to be recognized and legitimated as a research science by the scientific community. The analysis of journals and specialized works, promotional proceedings and ways of transmitting knowledge shows a gap between a readiness to acknowledge the signs of cultural legitimacy and the ability to master these same signs. The mistakes generated by this discrepancy add credibility to the hypothesis of a symbolic domination of prevailing knowledge which weighs on professionals of the parasciences and accompanies an ambivalent attitude. Science and the practice thereof operates at the same time as a carrier of an experienced domination and as a system of reinterpreted signs adding fuel to a fire of dispute over the questioning of the hierarchy of cultural values and the principles of social classification.
- La croyance aux Extraterrestres. Approche lexicologique - Jean-Bruno Renard p. 221-229 Apparu en France au milieu du XIXe siècle, le mot « extraterrestre » a connu une évolution sémantique et lexicale qui témoigne du changement de la conception du ciel dans la mentalité occidentale. Quatre usages peuvent être distingués chronologiquement. Tout d'abord un sens poético-religieux attesté chez Baudelaire, Mallarmé, Huysmans. Puis un sens matérialiste mais encore fortement connoté de spiritualisme chez des écrivains et savants comme Flammarion ou Charles Cros, en rapport avec leur croyance à des humanités supérieures sur d'autres planètes. L'usage scientifique et matérialiste du mot s'impose à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, où il signifie simplement « extérieur à la terre ». Vers le milieu du XXe siècle, le mot devient aussi substantif et désigne alors les habitants des autres planètes. Tout en conservant un sens matérialiste, il se charge à nouveau d'une signification religieuse présente dans les mythologies modernes autour des OVNI et des « contactés » par les Extraterrestres.Jean-Bruno Renard : Belief in Extraterrestrials : a lexicological approach. Appearing in France in the middle of the nineteenth century, the word « extraterrestrial » has undergone a semantic and lexical development which bears witness to some change in the western way of looking at the heavens. Four uses can be distinguished chronologically. First of all, a politico-religious meaning revealed in the works of Baudelaire, Mallarmé, Huysmans. Then a materialist meaning, still retaining strong spiritualistic connotations in authors or scholars such as Flammarion or Charles Cros, in keeping with their belief in higher beings on other planets. Scientific and materialistic uses of the word are found at the end of the nineteenth and at the beginning of the twentieth centuries, when it comes to mean simply « external to the earth ». Towards the middle of the twentieth century the word also becomes a noun and from that time on, designates the inhabitants of other planets. While keeping a materialist meaning, it is once again charged with religious significance, as shown in modern mythologies concerning ufo's and those « touched » by Extraterrestrials.
- Croyances aux parasciences : dimensions sociales et culturelles - Daniel Boy, Guy Michelat p. 175-204
Notes critiques
- Le rite et la croyance - François Héran p. 231-263 Une tradition constante s'emploie à opposer la croyance au credo, c'est-à-dire un sentiment religieux réfléchi à une religion objectivée dans des rites et des formules. Ce schéma dualiste recouvre généralement des jugements de valeur sur le rôle respectif des institutions et de la liberté individuelle. Mais d'un auteur à l'autre, la coupure se déplace : on oppose ainsi, selon les cas, le rite au mythe, la religion romaine à la religion grecque, l'ensemble des religions antiques au christianisme, le christianisme tardif au christianisme des origines, le christianisme traditionnel au christianisme rénové, et ainsi de suite, comme en témoignent certaines analyses de Herder, Hegel, Fustel de Coulanges, Pareto ou Lévi-Strauss, qu'on peut confronter à celles de Durkheim ou de Weber. Deux publications récentes donnent l'occasion de revenir sur la question. La première expose les dernières recherches sur cette religion apparemment mécanique et désenchantée qu'était la religio des Romains ; on y découvre, contre toute attente, un usage hautement stratégique du rite, qu'il faut mettre en rapport avec l'histoire des luttes pour le pouvoir symbolique. La seconde part du pôle opposé ; elle étudie l'évolution du christianisme dans la France rurale et oppose au ritualisme d'avant les années cinquante le « sens théorique » qui se développerait désormais dans la conscience religieuse populaire. Pourtant, loin de confirmer cette thèse sur la croyance, les témoignages écrits et oraux présentés par l'auteur fournissent plutôt des matériaux pour une histoire sociale de l'encadrement des fidèles et une sociologie de l'inculcation du credo.François Héran : Rites and beliefs. Tradition obstinantly opposes belief to creed, i.e. reflected religious feelings as opposed to religion objectivised in rites and formulas. This dualistic scheme generally marks value judgments on the respective roles of institutions and individual liberty. But from one author to the next, the cut-off point shifts : thus rites are opposed, as the case may be, to myths, the Roman Catholic religion opposed to the Greek, the body of ancient religions to Christianity, late Christianity to renewed and so on, as may be illustrated by certain analyses from Herder, Hegel, Fustel de Coulanges, Pareto or Lévi-Strauss, which can be confronted with those of Durkheim or Weber. Two recent publications offer an opportunity to renew the question. The first exposes the latest research on that apparently mechanical and disenchanted religio of the Romans. Here we discover against all expectations a highly strategic use of rites that must be linked with the history of the struggle for symbolic power. The second starts from the opposite pole, studying the evolution of Christianity in rural France and opposing, in face of the ritualism of the pre-fifties, that « theoretical sense » that was to develop henceforth in popular religious consciousness. However, far from confirming the above hypothesis on beliefs, the written and oral testimonies presented here supply material, on the contrary, for a social history of the management of congregations and for a sociology of the inculcation of creeds.
- Socio-style - Nicolas Herpin p. 265-272 En marge de la recherche universitaire et des publications savantes, s'est développée une littérature qui prétend se rattacher à la sociologie. Ni les informations qu'elle établit, ni ses concepts, ni ses méthodes ne confèrent aux écrits sur les socio-styles une situation très remarquable et, assurément, l'apport scientifique de cette approche ne mérite pas une discussion approfondie. Cependant un mouvement d'opinions autour des socio-styles existe. Cette note se propose d'esquisser l'étude de ce phénomène. La démesure des prétentions de ses initiateurs rapproche ce mouvement du prosélytisme de secte.Nicolas Herpin : Socio-style. On the outskirts of university research and scholarly publications, a literature which has pretensions of links with sociology has developed. Neither the information it establishes, nor its concepts, nor its methods confer on these « socio-style » writings a particularly noticeable situation, and it is certain that the scientific contribution of this approach doesn't deserve any deep discussion. Nevertheless, a movement of opinion concerning « socio-styles » exists. This article intends to sketch the study of this phenomenon. The enormity of the pretensions of its initiations brings to this movement the proselytizing aspects of a sect.
- Composition démographique et cycle de vie. Quelques réflexions sur le contenu et la notion de « type de ménage » - Yannick Lemel, Daniel Verger p. 273-300 L'usage du « type de ménage » est général dans les travaux sur les comportements quotidiens, bien que les fondements théoriques et empiriques d'une telle pratique soient rarement explicités. Cet article se propose de faire un premier bilan d'une réflexion entreprise sur le sujet. On essaiera d'identifier les conditions auxquelles devrait satisfaire toute nomenclature « type de ménage » et de rapprocher les contraintes techniques des soucis interprétatifs.Yanick Lemel and Daniel Verger : Demographic composition and life cycle. Some reflexions on the contents of a classification of households.
- L'ouvert et le fermé dans la pratique du questionnaire. Analyse comparative et spécificités de l'enquête par correspondance - Salvador Juan p. 301-316 A partir de l'analyse secondaire des données d'une enquête combinant diverses modalités de questionnement et associant deux versions du même questionnaire (l'une comportant des questions ouvertes et l'autre non), cet article montre les écarts ? quelquefois très importants ? de distribution des réponses obtenus selon la méthode utilisée auprès de deux populations similaires. Les différences d'effectifs concernent aussi bien la structure des non-réponses ou des « ne sait pas » que les positions par rapport aux variables d'attitude ; elles sont évaluées et interprétées après contrôle de l'homogénéité des sous-populations interrogées et de la cohérence de la grille d'analyse commune aux deux versions du questionnaire.Salvador Juan : The open and the closed in the use of questionnaires : comparative analysis and specificity of surveys by mail. On the basis of secondary analysis of data of a survey combining various techniques of questioning and associating two versions of the same questionnaire (one including open questions, and the other not), this paper shows that sometimes different results are obtained in two similar populations. The variance in outcomes is related as much to non-respondants or « don't know » respondants as to attitude variables ; they are evaluated and interpreted after the homogeneity of the sub-populations and the coherence of the pattern shared by both questionnaires have been tested.
- Les associations d'anciens élèves d'écoles d'ingénieurs des origines à 1914. Approche comparative - Georges Ribeill p. 317-338 La seconde moitié du XIXe siècle voit en France l'éclosion systématique d'associations d'anciens élèves d'écoles d'ingénieurs. L'étude de six d'entre elles (polytechniciens, ingénieurs du corps des Ponts et chaussées, ingénieurs diplômés de l'Ecole des ponts et chaussées, de l'Ecole centrale, des écoles des Arts et métiers, de l'Ecole de physique et de chimie industrielles de Paris) et de leurs modalités de fonctionnement permet de révéler leur contribution à la constitution d'une identité collective corporative, par école d'origine. Dans tous les cas, c'est un statut social, un rang social collectif de l'ingénieur diplômé sur une échelle hiérarchisée et dans un contexte concurrentiel que l'association gère selon des modalités différentes toutefois : aux deux extrêmes, chez les polytechniciens, il s'agit de préserver l'image valorisée attachée au seul diplôme, tandis que chez les diplômés d'écoles d'un moindre rang, aux origines sociales plus modestes, l'association offre un moyen permanent de promotion collective et de valorisation sociale. Les taux d'adhésion, très élevés à la veille de la Grande Guerre, témoignent de l'importance du rôle assigné aux associations pour assurer et garantir une certaine identité collective dans les diverses familles d'ingénieurs.Georges Ribeill : Associations of alumni of engineering schools from their beginnings until 1914 : a comparative approach. France experienced the systematic proliferation of alumni associations of engineering schools during the second half of the nineteenth century. The study of six of them (Polytechnique, State engineers of Ponts et Chaussées, engineering graduates of Ponts et Chaussées, of the Ecole Centrale, of the Ecoles des Arts et Métiers and of the Ecole de Physique et Chimie Industrielles de Paris) and their way of functioning shows their contribution to the building-up of a collective trade identity, according to the school they graduated from. In all cases, the associations manage and uphold ? each in its own way ? the social status, the collective social positioning of the graduate engineer on a hierarchical scale and in a competitive context. At one extreme, among Polytechniciens, the role of the association is to maintain the prestige image connected with the diploma itself ; whereas among graduates of less prestigious schools, whose social backgrounds are more modest, the association provides a continuous mean of assuring collective upward mobility and social enhancement. The percentage of students who joined these associations ? very great before the First World War ? shows the importance of the role accorded to the associations in insuring and guaranteeing a certain collective identity amongst various groups of engineers.
- Le rite et la croyance - François Héran p. 231-263
Les livres
- Dupâquier Jacques, Bideau Alain, Ducreux Marie-Elisabeth, Le prénom, mode et histoire. Les entretiens de Mahler, 1980. - Guy Desplanques p. 339-340
- Pérouas Louis, Barrière Bernadette, Boutier Jean, Peyronnet Jean-CLaude, Tricard Jean, Léonard, Marie, Jean et les autres. Les prénoms en Limousin depuis un millénaire. - Philippe Besnard p. 340-342
- Girod Roger, Les inégalités sociales. - Charles-Henry Cuin p. 342-344
- Johnson Terry, Dandeker Christopher, Ashworth Clive, The structure of social theory. Dilemmas and strategies. - Gilles Ferréol p. 344-348
- Pascon Paul, La Maison d'Iligh et l'histoire sociale du Tazerwalt. - Jean-René Tréanton p. 348-349
- Résumés (anglais, allemand, espagnol) - p. 351-359