Contenu du sommaire : Quand le social passe en revue
Revue | Revue française des Affaires sociales |
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Numéro | no 4, 2006 |
Titre du numéro | Quand le social passe en revue |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Présentation du numéro - Leclerc Françoise p. 5-14
- Une source pour l'histoire des problèmes sociaux. Présentation de l'indexation thématique et des auteurs de la RFT et de la RFAS - Pitti Laure p. 15-19
- Entretien avec Catherine Baude et ses collaboratrices. « La Revue française des Affaires sociales est une référence en matière de politique publique. » - p. 20-21
Déjà toute une histoire?
- Les années « fastes » de la Revue française du Travail (1946-1948) - Crom Jean-Pierre Le p. 23-43 Créée en 1946, la Revue française du Travail se distingue des publications antérieures du ministère du Travail. En plus des informations pratiques, elle accueille en effet des articles de fond écrits principalement par les hauts fonctionnaires et, dans une moindre mesure, par des universitaires et des syndicalistes (jusqu'en 1947 pour ces derniers). Les réformes de la Libération (Sécurité sociale, comités d'entreprise), et les questions de main-d'oeuvre y sont abondamment traitées dans un état d'esprit de grande curiosité intellectuelle pour les expériences étrangères et internationales. Dès 1948 cependant, la périodicité irrégulière et l'absence de syndicalistes parmi les auteurs de la revue notamment témoignent d'une crise qui perdurera jusqu'aux années 1960.Created in 1946, the Revue française du Travail distinguished itself from other previous Ministry of Labour publications. In addition to practical information, it actually gathered in-depth articles written mainly by senior officials and, to a lesser extent, by academicians and unionists (until 1947 for the latter). The Liberation reforms (social insurance, works councils) and questions of labour have been abundantly addressed in the spirit of great intellectual curiosity regarding foreign and international experiences. As of 1948, however, the irregular publication periods and the absence of unionists among the revue's authors notably bears witness to a crisis, which lasted until the 1960s.
- Annexe : Charles Bettelheim et les débuts de la revue. Charles Bettelheim, (1913-2006), Directeur du Centre d'études et de statistiques du ministère du Travail et de la Sécurité sociale. - p. 44-46
- De la Revue française du Travail à la Revue française des Affaires sociales : une histoire passée en revue - Viet Vincent p. 47-57 Bien que son champ d'exploration soit celui de la santé et des affaires sociales, la Revue française des Affaires sociales revendique clairement une filiation avec l'ancienne Revue française du Travail, créée en 1946. Les nombreuses commémorations dont elle s'est fait l'écho depuis le début des années 1970 soulignent par ailleurs sa prétention à incarner la mémoire institutionnelle des ministères dits « sociaux » dans toute leur diversité. D'où vient donc cette posture, alors même qu'il existe une autre revue ministérielle, spécialisée dans les questions d'emploi, de travail et de formation professionnelle ? Cet article se propose d'y répondre en appréciant la sensibilité et la plasticité historiques de la RFAS-RFT : comment le rapport de cette revue à l'histoire a-t-il évolué durant soixante ans ? à quels usages différenciés de l'histoire les auteurs de cette même revue ont-ils sacrifié ?Although its main fields of exploration are healthcare and social affairs, the Revue française des Affaires sociales clearly asserts a connection with the old Revue Française du Travail, which was created in 1946. The numerous commemorations it has echoed since the beginning of the 1970s underlines its claim to incarnate the institutional memory of the “social” ministries in all their diversity. From where, then, does this position come, being that there exists another ministerial review that specialises in matters of employment, work and professional training? This article attempts to answer these questions: while appreciating the RFAS-RFT's viewpoints and historic plasticity, how has this review evolved within the historical context of the past 60 years? How has the way in which the authors have used the different periods in history influenced their work?
- Entretien avec Marie-José Bernardot. « Le point fort de la Revue française des Affaires sociales à cette époque : sa transversalité, sa capacité de mettre en relation les champs du social, de la santé et du travail, de l'emploi. » - p. 58-60
- Entretien avec Élisabeth Zucker. « La Revue française des Affaires sociales était un outil de réflexion pour la pratique de l'administration des affaires sociales. » - p. 61-62
- Les auteurs dans la Revue française des Affaires sociales : quels profils ? (1946-2004) - Sonnet Martine p. 63-83 L'article observe et mesure comment s'exprime une politique des auteurs, au fil des sommaires de la Revue française du Travail de 1946 à 1966, puis de la Revue française des Affaires sociales qui prend sa suite en 1967, jusqu'en 2004. Le corpus sur lequel repose l'enquête est constitué par 2 232 articles et études « de fond » parus de 1946 à 2004, signés par 1 696 auteurs différents, dont 295 ont signé au moins deux articles. Par ses origines professionnelles et institutionnelles, la population des auteurs, globalement féminisée à hauteur du tiers, se répartit en trois grandes catégories : administrateurs (27,6 %), chercheurs (43,9 %) et « professionnels et experts » (14,4 %). Mais le profil dominant est passé de celui de l'administrateur, 54,9 % des auteurs en 1946-1948, mais 23,2 % seulement depuis 1987 à celui du chercheur 12,7 % en 1946-1948, mais 55 % depuis 1987. Au fil du temps, la revue s'affranchit de ses ministères de tutelle, pour évoluer vers une revue scientifique, dotée à partir du milieu des années 1980, d'un vrai comité de rédaction. Une attention spécifique est portée à l'introduction des sciences sociales dans la revue "disciplines et filières" lorsque celles-ci se saisissent des sujets au coeur des préoccupations des ministères sociaux. Les sociologues, les économistes, les juristes, les démographes et les politistes sont les chercheurs les plus sollicités par la revue.This article observes and measures how authors' policies are expressed through the summaries of the Revue française du Travail from 1946 to 1966, and then the Revue française des Affaires sociales, which followed as of 1967 and until 2004. The corpus upon which this investigation lies is composed of 2,232 articles and "in-depth" studies published between 1946 and 2004, written by 1696 different authors, 295 of whom wrote at least two articles. The authors, one-third of whom are female, come from professional and institutional backgrounds, and can be divided into three main categories: administrators (27.6%), researchers (43.9%) and "professionals and experts" (14.4%). But the dominant profile has changed from administrator 54.9% of the authors from 1946 to 1948, yet only 23.2% since 1987 to that of researcher 12.7% from 1946 to 1948, but 55% since 1987. Over the years, the revue has freed itself from ministerial tutelage and has evolved into a scientific review, equipped with a true editing committee as of the mid-1980s. Special attention has been given to introducing social sciences into the revue fields and networks when they satisfy the subjects at the heart of the social ministries concerns. Sociologists, economists, legal practitioners, demographers and political scientists are the revue's most sought-after researchers.
- Les années « fastes » de la Revue française du Travail (1946-1948) - Crom Jean-Pierre Le p. 23-43
Connaître et donner à connaître les problèmes sanitaires et sociaux
- Entretien avec Mireille Elbaum. « La revue a vraiment confirmé sa place, notamment dans le milieu de la recherche. » - p. 85-89
- Approche internationale de la protection sociale : un cycle de publication - Bouget Denis p. 91-120 La publication d'articles de la Revue française du Travail et de la Revue française des Affaires sociales sur le thème « protection sociale » et « international » représente plus de 10 % des articles parus en cinquante ans. L'analyse de l'évolution des publications permet de mettre en lumière les préoccupations du moment, en distinguant très nettement trois périodes. La première période, courte, de 1946 à 1951 est celle de la découverte des systèmes de protection sociale et de leur réforme dans des pays parfois éloignés de la France, à la fois en distance et culturellement. La seconde période, longue, de 1952 à 1980, du fait de la rareté des articles, est manifestement le reflet d'un repli sur soi. La troisième période, à partir de 1980, connaît un nouvel essor de l'analyse comparative des politiques, avec des caractéristiques mieux connues, car proches de nous. Il ressort de cet ensemble que la publication d'articles a été influencée par le contexte socio-économique du moment et par la création de la Communauté puis de l'Union européenne. Mais le paradoxe est, qu'en même temps, les deux revues ont faiblement intégré dans les articles publiés, du moins en comparaison avec la Revue belge de Sécurité sociale, l'analyse de la politique sociale européenne.For the past 50 years, over 10% of the articles published in the Revue française du Travail and the Revue française des Affaires sociales have addressed the themes of “social welfare” and “international approaches” to welfare. By analysing the developments in these publications we are in a position to highlight the major concerns of the moment and can clearly define three periods. The first, short period from 1946 to 1951 is that of the creation of social welfare systems and the resulting reforms in countries sometimes quite distant from France, in both physical and cultural terms. Due to the rarity of articles, the second, lengthy period from 1952 to 1980, clearly reflects withdrawal. As these are closer to our own, the third period, beginning in 1980, witnesses a new expansion in the comparative analyses of policies and with more familiar characteristics. What comes out of this ensemble is that the publication of articles has been influenced by the socioeconomic context of the moment and by the creation of the European Community and later the European Union. However, the paradox is that, at the same time, the two reviews have only slightly integrated an analysis of European social politics into the articles they have published, at least in comparison with Belgium's Revue belge de Sécurité sociale.
- La Revue française des Affaires sociales et le droit de la protection sociale. Quelques éléments de réflexion - Chauchard Jean-Pierre p. 121-125
- Entretien avec Jacques Commaille. « Je lis la Revue française des Affaires sociales depuis une vingtaine d'années et j'apprécie tout particulièrement la fiabilité et la qualité de ses analyses. » - p. 126-127
- Le droit du travail : un intermittent dans la Revue française du Travail et la Revue française des Affaires sociales - Olszak Norbert p. 129-145 Le droit du travail occupe une place assez limitée et fluctuante dans la Revue française du Travail puis dans la Revue française des Affaires sociales, mais on peut néanmoins relever une certaine constance. Les articles ne sont pas consacrés à la technique juridique pure et pratiquement pas à la jurisprudence et, sauf au début, on est assez peu en phase avec les débats les plus actuels de chaque époque, mais dans l'ensemble il s'agit plutôt de contribuer à une réflexion générale sur les institutions en apportant des éléments de comparaisons historiques et internationales ainsi que des études sur les pratiques économiques et sociales en relation avec l'effectivité du droit du travail.Labour Law occupies a rather limited and fluctuating place in the Revue française du Travail and then the Revue française des Affaires sociales, but it can, nevertheless be seen with some regularity. The articles are not dedicated to pure judicial techniques and practically not at all to jurisprudence and, except in the beginning, are hardly in phase with the most current debates of each era. However, on the whole, they provide general thoughts on the institutions by incorporating elements for historical and international comparisons as well as studies on economic and social practices in relation to the implementation of Labour Law.
- Main-d'oeuvre, emploi, travail : catégories et référentiels. Voyage à travers les pages de la revue (1946-1988) - Barbier Jean-Claude p. 147-172 Le voyage dans les catégories utilisées par les auteurs des articles publiés dans la Revue française des Affaires sociales – Revue française du Travail permet, en suivant l'évolution des usages, de montrer que ces derniers varient en fonction de conceptions de l'action publique dans le domaine du travail et de l'emploi. La présence initiale de la notion de main-d'œuvre s'estompera pratiquement dans les années soixante-dix et la notion de politiques de l'emploi (au pluriel) naîtra et s'installera progressivement à partir de la fin des années soixante-dix. Dans toute la période particulièrement analysée (1946-1988), les incertitudes des frontières entre ce qu'on nomme « travail » et ce qu'on nomme « emploi » ne disparaîtront jamais complètement, dans les activités pratiques comme dans la recherche (et surtout entre disciplines). La variation considérable des nominations (qui fait aussi écho aux changements de dénomination des organismes et services du ministère) est d'autant plus féconde à étudier qu'elle permet de souligner, au-delà même du corpus de textes de la revue, combien les formes de l'action publique en matière d'emploi et de travail ont évolué sur la période qui va de la fin de la deuxième guerre mondiale à la réforme des politiques de l'emploi vers une action nouvelle, au début des années quatre-vingt-dix : la réduction des cotisations sociales.Analysing the categories used by the authors of the articles published in the Revue française des Affaires sociales – Revue française du Travail shows that usage varies according to perceptions of public action in the domain of employment. At the beginning of the period, the concept of labour was dominant, but it practically vanished in the 1970s when the concept of employment policies was coined and eventually achieved undisputed currency in the late 1970s. Over the period particularly analysed (1946 to 1988), the uncertain borders between what was named “work/labour” and what was named “employment” never completely disappeared among practitionners as well as social scientists (with divergences between academic fields). The considerable variation in nominations (which also echoes changes in denomination in ministerial departments and services) is even more fruitful to study in that, even beyond the corpus of the revue's articles, it illustrates how different conceptions of public action regarding employment and work/labour have evolved during the period stretching from the end of World War II to the early 1990s: at that date, employment policies were to be reoriented again when the decreasing of employers' social contributions became one of the main policy instruments.
- Le risque professionnel - Omnès Catherine p. 173-187 La mise en perspective historique de la Revue française des Affaires sociales donne à voir la faible place accordée à la thématique du risque professionnel (3,71 % des occurrences) et le mode de traitement du risque souvent décalé, en retrait ou en porte-à-faux par rapport aux évolutions des politiques publiques et de la société civile. Le risque professionnel est traité selon un rythme à trois temps qui suit plus qu'il n'anticipe les grandes inflexions des politiques publiques, des pratiques et des cultures du risque professionnel et des attentes sociales. La revue a une vision médicale, environnementale et compartimentée du risque professionnel qui néglige les aspects organisationnels du risque et qui reflète sans doute l'écartèlement de la question du risque entre les deux pôles du ministère, le pôle travail et le pôle santé, chacun étant doté d'une revue spécialisée. Enfin, le primat donné à la fonction d'information et les retards de la pratique de l'évaluation en France limitent le rôle anticipateur, mobilisateur, que la revue aurait pu tenir en faveur d'une dynamique de la prévention. La revue n'a ni les leviers efficaces, ni, semble-t-il, la volonté de convertir une société rétive à la logique préventive.Putting the Revue française des Affaires sociales into a historical context shows the small space given to the theme of occupational hazards (3.71% in total) and the method of handling the hazards is often out of phase, removed or off-centre in relation to public policies and civil society. Occupational hazards are dealt with in a three-time rhythm that follows more than it leads the great public policy inflexions, practices and culture of occupational hazards and social expectations. The revue has a vision of occupational hazards that is medical, environmental and compartmentalised, which neglects the organisational aspects of the hazards and, doubtlessly, reflects the struggle concerning the question of occupational hazards between the two ministerial domains, the labour domain and the health domain, each of which have a specialised review. Finally, the importance given to the purpose of information and the delays in making evaluations in France limits the anticipating and mobilising role that the revue could have held in favour of a preventative dynamic. The revue has neither the efficient levers nor, it seems, the desire to convert a recalcitrant society into one embracing preventative logic.
- Reflets de santé publique à travers soixante ans de publications - Setbon Michel p. 189-201
- L'hôpital, une transformation sous contrainte. Hôpital et hospitaliers dans la revue - Schweyer François-Xavier p. 203-223 Jusqu'à la fin des années soixante, les articles de la Revue française des Affaires sociales qui traitent de l'hôpital sont rares. L'hôpital n'apparaît dans la revue qu'à partir du moment où il devient un enjeu gestionnaire. Dans les années 1970-1980, les publications sont régulières mais peu nombreuses. Trois thèmes se dégagent : la modernisation des établissements, la maîtrise des coûts et les réformes hospitalières. À partir de 1990, l'hôpital devient un thème régulier de la revue et les thèmes se diversifient avec l'essor des politiques de santé publique et la transformation de la régulation hospitalière. Le corpus analysé d'environ 170 articles est d'une grande richesse par la diversité des documents mobilisés (études, points de vue, recherches, analyses ponctuelles) et de leurs auteurs (professionnels de terrain, responsables, décideurs, chercheurs). L'hôpital dont il est question, c'est l'hôpital tel qu'il est transformé par l'action publique. Les nombreux articles analysés par F.-X. Schweyer montrent comment l'hôpital public est devenu un espace d'intervention des pouvoirs publics en constante redéfinition. C'est ce qui explique que les dimensions économiques, organisationnelles et politiques dominent, alors que les professionnels de santé, le travail hospitalier et les patients usagers sont des thèmes beaucoup moins présents.Until the end of the 1960s, there were very few articles in the Revue française des Affaires sociales that addressed hospitals. Hospitals only appear in the Revue when the subject concerned administrative issues. Throughout the 1970s and the 1980s, the publications became more regular, but remained few in number. Three themes emerge: the modernisation of the establishments, cost control and hospital reforms. Since 1990, hospitals have been a regular theme in the revue and the theme diversified with the rapid development of public healthcare policies and the transformation of hospital regulations. The corpus of approximately 170 articles analysed is extremely rich due to the diversity of documents mobilised (studies, points of view, research, regular analyses…) and their authors (professionals in the field, policy makers, decision-makers, researchers…). The hospitals in question refer to the hospital transformed through public action rather than to the institution itself. The numerous articles analysed by F-X Schweyer show how public hospitals have become an area of intervention for the government that are constantly being redefined. This explains that the economic, organisational and political dimensions are dominant although healthcare professionals, hospital care and the patients are much less present themes.
- Entretien avec Emmanuèle Jeandet-Mengual. « Les articles de la Revue française des Affaires sociales représentent un fonds documentaire de référence pour l'IGAS. » - p. 224-225
- L'administration des affaires sociales. Une vision des transformations - Chatriot Alain p. 227-241 L'organisation administrative de l'État providence français a été régulièrement analysée dans les pages de la Revue française des Affaires sociales. De manière générale, longtemps les textes publiés ont été ceux d'acteurs et témoins du fonctionnement administratif jusqu'au début des années 1990 où les spécialistes de sciences sociales sont très représentés. Les variations des structures administratives, des tutelles politiques, les difficultés du corps d'inspection, l'adaptation aux mouvements de réforme et de modernisation de l'État comme la décentralisation sont des thèmes majeurs qui permettent d'apprécier l'importance de ces questions pour la revue.The administrative organisation of the French Welfare State has regularly been analysed in the pages of the Revue française des Affaires sociales. In general, until the beginning of the 1990s articles were written by participants and direct witnesses of the administration. Since that time, greater representation has been given to specialists in the social sciences. Variations in administrative structures and political tutelage, the problems faced by evaluating bodies, adaptations to reform movements and the modernisation of the State such as decentralisation, are the major themes that reveal the importance of these questions for the revue.
- Entretien avec Anne Lemoine-Pape. « Pointue, source de réflexion, fédératrice, accessible? Autant de qualificatifs dédiés à la Revue française des Affaires sociales. » - p. 242-243
- Enfance et politiques sociales - Dessertine Dominique p. 245-271 En soixante ans, la Revue française des Affaires sociales a consacré près de 7 % de ses articles à la famille et à l'aide sociale à l'enfance, entendu au sens large d'interventions en faveur de l'enfance et pas seulement de service administratif de l'ASE, soit plus de 150 articles. Trois périodes peuvent être dégagées. La première est celle de la Revue française du Travail, qui n'a pas vocation à traiter de l'enfance, mais qui publie quelques articles sur ce thème, dans le cadre de l'application de la Sécurité sociale. La deuxième période, celle des années 1970, est incomparablement plus dense : les auteurs, pour la plupart des administrateurs civils, rendent compte des principales lois en gestation ou de nouveaux problèmes liés à la protection de l'enfance : réforme de l'ASE, situation des enfants d'immigrés, intégration des enfants handicapés. La troisième période, à partir de l'extrême fin des années 1970 et plus encore de l'arrivée de la gauche au pouvoir, transforme la revue en revue de référence pour l'analyse, par des scientifiques (sociologues démographes, mais aussi politologues, etc.) des grands problèmes sociaux posés par l'évolution des configurations familiales, les nouvelles situations des enfants et des politiques qui leur sont appliquées. Cette orientation ne se dément plus depuis ces années-là, et fait une place de plus en plus importante aux analyses et aux manifestations européennes et mondiales. En dépit de sa grande richesse, la revue a laissé passer quelques grands sujets, parfois en n'étant pas assez à l'écoute des manifestations de ce qu'il est convenu d'appeler la société civile.Over the past sixty years, the Revue française des Affaires sociales has dedicated nearly 7% of its articles to the family and Children'sWelfare Services, in the broader sense of interventions in favour of children, and not only the administrative service of Children's Welfare Services, i.e. over 150 articles. There are three main periods. The first is that of the Revue Française du Travail, whose vocation was not to address children, but which published several articles on this theme, within the framework of social welfare applications. The second period, that of the 1970s, is incomparably denser: the authors, most of whom are civil administrators, provide an account of the principle administrative laws and new problems linked to children's welfare: the reform of the Children's Welfare Service, the situation of immigrants' children, and the integration handicapped children. The third period, beginning in the very end of the 1970s, and more so with the left's coming to power, transformed the Revue into a benchmark review for analyses by scientists (sociologists and demographers, as well as political scientists, etc.) of major social problems posed by the evolution of familial configurations, new situations for children and the social policies applied to them. This orientation has not been refuted since then, and gives an ever increasing importance to analyses and European and worldwide events. Despite its richness, the revue has let a few subjects pass by, at times because it was not paying thorough attention to the events in what is usually called civil society.
- Entretien avec Jean-Marie Schléret. « La Revue française des Affaires sociales doit aller vers les nouveaux champs de l'action sociale ». - p. 272-274
- Handicap et évolutions sociétales : soixante ans de politique éditoriale - Boissonnat Vincent p. 275-282
- Entretien avec Éric Brunie. « Une revue pour s'informer intelligemment » - p. 283-284
- Le logement est-il une question sociale ? Le logement dans la revue (1946-2004) - Carriou Claire, Haguenauer-caceres Lucie p. 285-297 Depuis sa fondation en 1946, la Revue française des Affaires sociales a consacré peu d'articles au logement en tant que tel : à peine 50 sur les quelque 2 300 recensés. Cette absence s'explique sans doute parce que, depuis cette date, l'habitat et le logement n'ont pas principalement relevé de la tutelle administrative du ministère du Travail. Mais cette inattention vient aussi de la perception même de la question, avant tout considérée durant les Trente Glorieuses comme un problème technique et quantitatif. Aux yeux des pouvoirs publics, la mise sur le marché public et privé de nombreux appartements était le remède à la crise du logement dont les aspects sociaux étaient sous-estimés au profit du nombre. Ce n'est qu'avec le retour de la crise et de la pauvreté de la fin duXXe siècle, que le logement tend à redevenir une question sociale, sur laquelle se penche désormais davantage la revue.Since its creation in 1946, the Revue française des Affaires sociales has dedicated few articles to housing, as such: barely 50 out of the 2,300 articles counted. This absence can doubtlessly be explained by the fact that, since this date, habitat and housing have not been under the administrative tutelage of the Ministry of Labour. Yet this inattention also stems from the very way in which this question is perceived; it was considered, above all, during the “post-war golden age of prosperity” (from 1945 to 1975), to be a technical and quantitative problem. As far as the government is concerned, putting numerous apartments on the public and private markets was the solution for the housing crisis, whose social aspects were under-estimated in favour of the majority. It was only at the end of the 20th century, when the crisis and poverty returned, that housing has tended to be a social matter once again, one which the Revue now addresses more than ever.
- La Revue française des Affaires sociales et la pauvreté : des approches sélectives - Strobel Pierre p. 299-325 Des origines aux années quatre-vingt, la Revue française du Travail-Revue française des Affaires sociales n'aborde que très marginalement les phénomènes de pauvreté qui, malgré la croissance et la hausse du pouvoir d'achat pendant les Trente Glorieuses, continuent de toucher une part importante de la société française. Elle ne s'intéresse notamment pas aux populations mal couvertes par le système de Sécurité sociale mis en place à la Libération autour de la figure du salarié chargé de famille. Par la suite, lorsque le chômage de masse induit une « nouvelle » pauvreté touchant une partie du salariat, la revue aborde les questions de pauvreté, mais de façon sélective : le RMI et ses bénéficiaires vont occuper presque totalement l'espace des débats sur ce thème. Dès la fin des années quatre-vingt, les thèmes de l'insertion puis de l'activation occupent une place privilégiée dans la Revue française des Affaires sociales. Son ouverture à la comparaison internationale renforce, et éclaire, des interrogations sur l'ensemble du système de protection sociale français, aide et action sociale incluses : peut-on continuer à vouloir traiter la pauvreté persistante avec les outils de l'assurance sociale ? se dirige-t-on vers un clivage accru entre un système national de protection des individus en emploi et des chômeurs les plus aptes à retourner rapidement sur le marché du travail et des dispositifs locaux, personnalisés, visant les ménages durablement éloignés de l'emploi ce qui consacrerait un retour à la distinction entre les pauvres valides et invalides ?From its origins and until the 1980s, the Revue française du Travail-Revue française des Affaires sociales only marginally addressed phenomenon of poverty that, despite the economic growth and the increase in buying power during the “post-war golden age of prosperity” (from 1945 to 1975), continued to affect a large part of French society. The Revue was notably uninterested in the populations badly covered by the social security system that was implemented at the Liberation of France around the central figure of the male breadwinner. Later, when massive unemployment led to a “new” poverty affecting a portion of employees, the revue addressed the question of poverty, but only in a selective manner: The RMI (guaranteed minimum income) and its beneficiaries will occupy practically all of the debates on this theme. Starting in the end of the 1980s, the themes of occupational insertion and activation have held a privileged place in the Revue française des Affaires sociales. The revue's opening to international comparison reinforces and sheds light on interrogations about the entire French social protection system, including its welfare component: Is it possible to continue to handle persistent poverty with social insurance's tools? Are we heading towards an increasing divide between a national system, which protects employed individuals and the unemployed most apt to rapidly return to the labour market and individualised local welfare programs, which are aimed at households experiencing long-term unemployment, thus re-establishing a distinction between the valid and invalid poor?