Contenu du sommaire : Sciences.com
Revue | Hermès (Cognition, Communication, Politique) |
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Numéro | no 57, 2010 |
Titre du numéro | Sciences.com |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Introduction - Joëlle Farchy, Pascal Froissart, Cécile Méadel p. 9-12
- Abondance et gratuité : pourquoi faire et jusqu'où ? : Entretien avec les coordonnateurs - Dominique Wolton p. 13-19
I. Sciences en réseau, production et circulation des connaissances
- Le libre accès : entre idéal et nécessité - Pierre Mounier p. 23-30 Les débats qui se développent autour de la question du libre accès sont bien souvent menés comme des combats idéologiques, mobilisant des registres d'expression militants autour des notions de biens publics. La très grande visibilité de ces débats occulte deux éléments qui pourraient en relativiser la portée. L'analyse du développement des initiatives de libre accès montre que la dimension politique de la question est loin d'être prédominante dans toutes les disciplines et varie considérablement selon les communautés. Par ailleurs, les modifications profondes que le développement des réseaux numériques entraîne dans les pratiques de communication scientifique pourraient rendre moins pertinente l'approche volontariste et militante du libre accès. La multiplication du nombre de documents disponibles, l'effacement relatif des frontières entre les différents modes de publication, l'abaissement des barrières d'accès à la publication contribuent à relativiser la portée des dispositifs de fabrication de rareté artificielle et à soumettre progressivement le système de communication scientifique à un régime d'économie de l'attention. Il est dès lors possible que le secteur de l'édition scientifique connaisse une évolution comparable à celle des secteurs de la presse et de l'édition musicale.Open access : an ideal or a necessity ?
Much of the current debate on the open access issue has been akin to ideological warfare, using militant language registers around the concept of public common goods. The high level of visibility of the debate masks two important points that could change perceptions on its real impact. Our analysis of the development of open access initiatives shows that the political dimension of the issue is by no means predominant in all disciplines and varies considerably among different communities. Furthermore, the profound changes in scientific communication practices brought about by the expansion of digital networks could lessen the relevance of the militant approach to open access. The proliferation of documents, the relative blurring of boundaries between different forms of publishing and the fact that barriers to access to publications are being lowered are lessening the perceived influence of systems that artificially manufacture rarity, and the scientific communication system is gradually being forced to conform to the attention economics. This makes it possible to anticipate changes in scientific publishing comparable to those in the press and music publishing sectors. - En informatique, impossible d'imaginer une science non ouverte - Enoch Peserico, Francesca Musiani p. 31-33
- Les transformations des sciences en régime numérique - Dominique Vinck p. 35-41 Pour comprendre ce qui se joue avec la numérisation des productions scientifiques, leur mise en circulation et leur accès, le présent article opère un bref détour par l'histoire des pratiques des chercheurs en termes d'échange de données et de publications. Il se penche ensuite sur les pratiques contemporaines d'acquisition et d'actualisation des connaissances, lesquelles passent aujourd'hui par des réseaux d'ordinateurs, ainsi que par une vaste gamme d'outils de calcul et de visualisation, de réseaux de capteurs, de bases de données, de logiciels d'aide à l'édition, d'outils d'aide au travail coopératif, etc. Ces pratiques de communication évoluent au cours du temps et varient selon les disciplines. Le présent article s'efforce de caractériser ce qu'il en est aujourd'hui, y compris en termes d'accès libre.When Science Turns Digital
In delving into the issues that arise from the digitisation of scientific output, circulation and access, this article first makes a brief detour into the history of practices in the exchange of research data and applications. It then explores contemporary practice in acquiring and updating knowledge, which is now dependent on computer networks and a vast range of calculation and visualisation tools, data capture networks, databases, computer assisted publication software, computer supported collaborative work, and so on. Communication practices have evolved over time and vary among disciplines. This article attempts to characterise the situation today, including in the open access field. - La dissémination de la recherche en sciences économiques : les « cahiers de recherche » - Christian Zimmermann p. 43-46 Publier en sciences économiques impose des délais considérables se chiffrant facilement en de multiples années, de la soumission à la parution. Aussi, le contenu des revues est en retard par rapport à la frontière de la recherche. Les principaux médias pour s'informer de cette frontière sont alors les conférences et les cahiers de recherche, des polycopiés qui circulent parmi certains scientifiques. Ceci favorise la formation de petits cercles fermés et exclut la participation de tiers à la pointe de la recherche. L'apparition d'Internet a fondamentalement changé l'accès aux cahiers de recherche, mais encore faut-il que cet accès soit organisé et qu'il permette d'être lu par les autres. Le présent article décrit RePEc, une initiative qui a justement permis d'accorder tous les économistes sur un dénominateur commun et qui est maintenant devenue un instrument incontournable dans leur domaine de recherche. Des initiatives similaires dans d'autres champs de recherche sont aussi abordées.Disseminating Research in Economics : the « Working Papers »Publishing articles on economics involves long time frames of up to several years, from submission to publication. Consequently, journal contents tend to lag behind what is happening on the research frontier. The most usual sources of information on frontier research are conferences and « working papers », which are photocopied documents that circulate among certain scientists. This practice is fostering the emergence of exclusive small groups and prevents third parties from participating in pioneering research. The Internet has radically changed possibilities for access to working papers, but Internet access still needs to be organised and to allow others to read one's work. This article describes the RePEc initiative, which effectively places all economists on the same footing and has become an essential instrument in its field. Similar initiatives in other fields are also investigated.
- En biologie, le libre accès au quotidien - Samuel Alizon p. 47-49
- La communication scientifique directe : un nouveau champ éditorial - Guylaine Beaudry p. 51-57 La fonction d'auteur se transforme en raison des nouvelles potentialités du numérique, particulièrement de la communication scientifique directe. Néanmoins, le statut de l'auteur d'un discours scientifique répond dans l'univers numérique aux mêmes critères que dans le monde de l'imprimé. Ce sont surtout les modalités d'expression et de diffusion des résultats de la recherche qui changent en raison d'infrastructures et de pratiques scientifiques d'un nouveau genre. Notamment, le dépôt de données dans des systèmes d'information homologués par les chercheurs est reconnu de plus en plus comme une forme de publication. En cela, on assiste à une remise en question et à la proposition de nouveaux modèles d'évaluation et de reconnaissance. La révolution numérique provoque une restructuration des acteurs du système de communication scientifique qui, pour l'heure, donne à voir un tableau d'ensemble fragmenté.Direct scientific communication : a new publishing field
New digital potential is profoundly changing the authorship function, especially in direct scientific communication, although authorship of a scientific discourse nevertheless obeys the same criteria in the digital world as in print. What has mainly changed are the methods used to express and disseminate research results, because of the appearance of infrastructures and scientific practice of a new type. In particular, posting data to researcher-approved information systems is increasingly recognised as a legitimate form of publication. This implies that models for evaluation and recognition are being brought into question and new models are being proposed. The digital revolution is transforming the role structure of a scientific communication system where the overall picture, at present, is fragmentary. - En mathématiques, des archives ouvertes dans une communauté fermée - Stephan Foldes p. 59-60
- « Tela Botanica » : une fertilisation croisée des amateurs et des experts - Lorna Heaton, Florence Millerand, Serge Proulx p. 61-68 Nous chercherons ici à montrer comment le projet Tela Botanica permet à la fois une transformation et une actualisation du savoir botanique. Trois éléments particuliers retiendront notre attention : la libre circulation et la mise à disposition des données les plus récentes du travail des botanistes ; l'articulation nouvelle entre le travail scientifique des amateurs et celui des professionnels ; la création d'une forme organisationnelle hybride combinant des éléments propres au milieu associatif et à l'entreprise privée. Nous utiliserons ces trois axes d'analyse tour à tour, en fournissant des exemples et des réflexions théoriques pour chacun.« Tela Botanica » : Cross-fertilisation between amateurs and specialists
This article illustrates how the Tela Botanica project is simultaneously transforming botanical knowledge and breathing new life into the field of botany. We discuss three characteristics in particular : the ready availability and free circulation of the most up-to-date botanical data, new links between the scientific work of amateur and professional botanists and the appearance of a hybrid organisational form that combines features from the non-profit model and from private enterprise. We examine these three characteristics in turn, with examples and theoretical discussions in each case. - Wikipedia, un trouble-fête de l'édition scientifique - Lionel Barbe p. 69-74 Wikipedia est devenue en quelques années un outil de diffusion d'informations scientifiques de premier plan, utilisé par élèves, professeurs et chercheurs (parmi ces derniers, un sur dix reconnaît y contribuer). Malgré un système d'édition relativement complexe, le « wiki de la connaissance » a gagné en popularité (15 millions d'articles, 270 langues, 100 000 contributeurs bénévoles). On en sait davantage sur son fonctionnement : son taux d'erreur factuel est relativement similaire à celui de l'encyclopédie payante Britannica ; les articles sont souvent rédigés par un petit nombre de contributeurs (5 % des contributeurs sont à l'origine de 90 % du contenu) ; une série d'« administrateurs » jouent les pompiers ou les gendarmes, non sans s'attirer les foudres d'une partie des contributeurs ; dynamique communautaire et positionnement identitaire sont les deux motivations principales pour contribuer ; les sources scientifiques sont d'autant plus citées dans Wikipedia qu'elles le sont déjà dans le monde scientifique (le « facteur d'impact » est involontairement reproduit)... Comparée à ses concurrents, Citizendium et Knol, l'encyclopédie contributive se démarque par son développement insolent, mais l'éventualité d'une stabilisation du nombre d'articles (on assiste aujourd'hui à une sorte de plafonnement) laisse imaginer qu'à l'avenir les contributeurs se concentreront davantage sur la qualité des articles.Wikipedia meddling with scientific publication
In the space of just a few years, Wikipedia has become one of the foremost tools for disseminating scientific information, used by pupils, teachers and researchers alike (of the latter, one out of ten say they contribute). Despite a relatively complex publication system, the popularity of the « knowledge wiki » is increasing (15 million articles, 270 languages, 100 000 unpaid contributors). We are learning more on how it functions : the factual error rate is fairly similar to that for the fee-paying Encyclopaedia Britannica ; the majority of articles are written by a small number of contributors (5 % of contributors are responsible for 90 % of the content) ; a series of « administrators » act as fire-fighters or policemen, sometimes attracting the wrath of contributors ; community dynamics and a common identity are the two main reasons for contributing ; scientific sources are cited as much and more in Wikipedia as in scientific circles (which is involuntarily reproducing the « impact factor »). In comparison with its competitors, Citizendium and Knol, this contributory encyclopaedia stands out for its outrageously rapid growth, but a possible levelling out in the number of articles (of which there are signs today) suggests that in future, contributors may focus more closely on the quality of articles.
- Le libre accès : entre idéal et nécessité - Pierre Mounier p. 23-30
II. Les politiques du savoir
- Les publications « ouvertes » : coopération ou concurrence ? - Florence Audier p. 77-80 Quel rôle peuvent jouer les publications « ouvertes » alors que les normes de publication se rigidifient et pèsent de plus en plus sur le classement et l'évaluation des institutions, des équipes et des chercheurs ? À quelles conditions peuvent-elles améliorer la diffusion des résultats les plus intéressants ou les plus originaux ? Facilitent-elles les échanges et la coopération, ou paradoxalement contribuent-elles à la concurrence de tous contre tous ? Il s'agit d'un des enjeux auxquels la recherche, notamment en SHS, est confrontée aujourd'hui.
Open publishing : cooperation or competition ?
What should be the role of « open » publishing at a time when publishing standards are becoming more rigid and weighing more and more heavily on the way research institutions, research teams and researchers themselves are ranked and assessed ? Under what conditions can open publishing improve dissemination of the most interesting or original research results ? Does it foster exchanges and cooperation or, paradoxically, does it contribute to a spirit of all-out competitiveness ? This is one of the issues that research, especially in the human and social sciences, is faced with today. - Des cordonniers mal chaussés ou les informaticiens face au libre accès : Entretien avec les coordonnateurs - Bernard Lang p. 81-84 Les informaticiens, qui sont les premiers à avoir travaillé à la conception du libre accès, ne s'en sont pas nécessairement saisis pour leurs propres pratiques de publication scientifique, privilégiant longtemps les échanges interindividuels. La question de l'accès ouvert se pose pour leurs productions de manière différente selon qu'il s'agit de conception de logiciels ou de publication de texte, de recherche industrielle ou publique, de secteurs brevetables, de données ouvertes ou non.When the cobbler goes unshod : computer scientists and open access
Computer scientists, who were the first to work on open access design, have not necessarily been its most fervent users in their own scientific publication practice, since they have long given preference to interpersonal exchanges. Concerning their output, the question of open access arises in different terms, depending on whether the context is software design, text publishing, industrial public research, patentable sectors, or open or restricted access data. - Création scientifique et statut d'auteur - Marie Cornu p. 85-93 La production et la diffusion des résultats scientifiques soulèvent un certain nombre de questions juridiques. L'activité scientifique est en effet, en bonne part, une activité de création, donnant naissance à des œuvres au sens du Code de la propriété intellectuelle. Le chercheur est aussi et souvent un auteur dans l'accomplissement de sa tâche. En France, comme dans un certain nombre d'autres États, la recherche est pour l'essentiel du côté du secteur public, dont les personnels relèvent, en général, du statut de la fonction publique, et la production dans ce cadre doit articuler liberté de créer du chercheur et intérêt public. La reconnaissance des droits des chercheurs sur la création scientifique se heurte à certaines difficultés, dont un bon nombre se concentrent sur les questions de paternité. Le mode collectif sur lequel se réalise la création scientifique rend encore plus ardue la détermination de la qualité d'auteur. Les nouveaux modes de production de la connaissance sur les réseaux Internet s'accommodent mal des différents schémas de création collective. Comment qualifier une œuvre initiée par une personne, volontairement versée dans l'espace public pour être discutée, poursuivie et transformée par d'autres ? La question du statut de la création rejoint ici celui de son mode de diffusion.Scientific Creativity and Authorship
The production and dissemination of scientific results raise a number of legal questions. Scientific activity is in fact, and largely, a creative activity that produces « works » as defined in the Intellectual Property Code. Researchers are often also authors in the performance of their tasks. In France, as in a number of other countries, research is essentially a public sector activity employing staff who are usually civil servants and whose output needs to reconcile the freedom to perform creative research with the public interest. The recognition of researchers'rights in creative scientific work comes up against a number of difficulties, many of which have to do with paternity issues. The collective nature of creative scientific work makes authorship all the harder to determine. The new methods of knowledge production through the Internet do not fit easily into the various provisions covering collective creation. What description can be given to a work initiated by one person, deliberately handed over into the public sphere for discussion, then continued and transformed by other people ? In this context, the question of creative authorship is closely tied to the issue of science dissemination. - Les publications scientifiques : faut-il choisir entre libre accès et libre recherche ? - Valérie-Laure Benabou p. 95-106 La confrontation de l'Open Access avec la propriété intellectuelle demeure mesurée dès lors que l'exercice du droit d'auteur n'est nullement antinomique avec un modèle de gratuité pour l'utilisateur final. L'existence de prérogatives morales fortes présente les garanties mêmes que la communauté scientifique appelle de ses vœux, à savoir l'identification de la source et la traçabilité de la version originale de la publication. Le constat est sans doute moins angélique s'agissant du mouvement du Public Access, lequel ne se soucie plus guère des intérêts des auteurs, mais est tout entier tourné vers la diffusion des savoirs comme remboursement des tributs versés par les contribuables dans le financement de la recherche. La logique suivie devrait à terme nier l'existence même de droits d'auteurs de la part des chercheurs lesquels verraient la diffusion de leurs travaux leur échapper en totalité. Il n'est cependant pas certain que l'alternative proposée conduise à des résultats souhaitables car le chercheur doit pouvoir bénéficier d'une certaine liberté dans sa recherche et dans sa parole pour être incité à produire des travaux de qualité ; court-circuiter son contrôle intellectuel sur le destin de ses recherches risque, au contraire de le brider. La rencontre des deux aspirations est sans doute possible. Il n'est pas nécessaire pour atteindre le libre accès de détruire la libre recherche.Scientific publication : must we choose between free access and freedom for research ?
The incipient clash between open access and intellectual property need not come to a head as long as the exercise of authorship rights does not contradict free access for end users. The existence of strong moral prerogatives offers the very guarantees that the scientific community is pressing for : identification of sources and traceability of the original version of a publication. The picture is not so well-tempered in the case of the Public Access movement, which has little concern for authorship and is entirely geared to knowledge dissemination as compensation for the taxpayers'money spent on research. Taken to its logical conclusion, this would deny the very existence of authorship rights for researchers, who would lose all control over the dissemination of their work. However, the alternative solution proposed may not necessarily produce the desired results, since researchers need to have a certain amount of freedom in their work and in their communication to motivate high-quality output. Short-circuiting their intellectual control over the fate of their research is more likely to inhibit them than otherwise. But the clash between these two aspirations may yet be resolved : achieving free access does not necessarily mean destroying freedom for research. - Chercheurs, vos papiers ! Les dépôts institutionnels obligatoires - Bernard Rentier p. 107-108
- Les Carnets de Géologie - Bruno Granier p. 109-110
- Les savoirs profanes et l'intelligence du Web - Cécile Méadel p. 111-117 Les savoirs profanes acquièrent une portée et une visibilité accrues, tout particulièrement dans les domaines de l'environnement ou de la santé. Internet leur offre de nouvelles ressources qui ne se résument pas à la mise en ligne de contenus ou à la numérisation de textes scientifiques, mais qui ouvrent aussi de nouvelles possibilités informatives et cognitives. Ces savoirs, qui s'appuient sur des ressources en accès libre, tirent leur efficacité de la participation de collectifs et de leur contrôle. Et pourtant, malgré l'ample travail de confrontation et de vérification accompli par ces groupes de « sachants », ces connaissances profanes accèdent difficilement au statut d'informations stabilisées et reconnues.Laymen's knowledge and Web Intelligence
Laymen's knowledge is becoming increasingly visible and influential, especially in environment and health fields. The Internet provides laymen with new resources that go well beyond downloading content or digitising scientific texts, as they also open up new possibilities for information and cognition. Laymen's knowledge, which is built up from openaccess resources, owes its effectiveness to collective participation and the auditing methods in place. And yet, despite the considerable amount of comparative and verification work performed by these groups of « people who know », laymen's knowledge rarely achieves the status of stable and reputable information. - Les principales plates-formes de revues scientifiques - Pascal Froissart p. 119-120
- Les publications « ouvertes » : coopération ou concurrence ? - Florence Audier p. 77-80
III. Le marché de la science
- Scénarios prospectifs pour l'édition scientifique - Ghislaine Chartron p. 123-129 Cet article s'intéresse au marché de l'édition scientifique et à son évolution dans le cadre de l'Internet et du développement du libre accès. Il s'attache à montrer la diversité de ce marché en fonction des champs scientifiques, notamment par le type d'éditeurs impliqués, les lectorats concernés, les économies associées. Il met en exergue le nécessaire discernement de ces marchés face aux critiques générales de dysfonctionnement soulignées. Il pointe certains effets contrastés du numérique conduisant à certaines reconfigurations paradoxales. Enfin, la vision prospective sur le devenir de ce marché insiste sur la pluralité des modalités de progression vers le libre accès, le poids de la dimension politique et celui des processus d'évaluation de la recherche. La voie d'un partenariat public-privé est privilégiée au regard de certaines valeurs centrales : indépendance, qualité, accessibilité et pérennité des publications scientifiques.Future scenarios for science publishing
This article investigates the scientific publishing market and how it is being transformed by the Internet and the development of open-access services. We illustrate the diversity of the market in terms of scientific fields, and especially in the types of publishers and readerships concerned, and of the associated economics. In view of the sweeping criticisms of dysfunctional practices illustrated in the article, we alert readers as to the need for discernment among these markets. The article points to a number of contrasting effects of digital publishing that are leading to various paradoxical reconfigurations. Finally, this forward-looking study of the publishing market's future emphasises the multiple forms of the onward march towards open access and the influence exerted by the political dimension and the research evaluation process. Publicprivate partnerships are the preferred option to cater for the central values of independence, quality, accessibility and the enduring nature of scientific publications. - Communication scientifique : pour le meilleur et le PEER - Laurent Romary p. 131-136 Le projet PEER (Publishing and the Ecology of European Research), lancé en 2007, vise à mieux connaître les développements actuels en matière d'archives institutionnelles scientifiques alors que celles-ci prolifèrent. Il fait collaborer des éditeurs scientifiques et des organismes de recherche et d'enseignement supérieur. Il étudie en particulier les effets du dépôt systématique des travaux scientifiques sur la diffusion des publications, sur la viabilité des revues, sur la production de la recherche...Scientific communication : PEER pressure and the scientific publishing market
The PEER project (Publishing and the Ecology of European Research) launched in 2007 aims to achieve a better understanding of current developments in the field of rapidly proliferating institutional scientific archives. The project involves collaboration from scientific publishers and from research and higher education organisations. It focuses in particular the effects of systematic copyrighting of scientific output on the dissemination of publications, on the viability of scientific journals and on research output itself. - Le marché de l'édition scientifique, entre accès « propriétaire » et accès « libre » - Joëlle Farchy, Pascal Froissart p. 137-150 Divers aspects pratiques ainsi que des considérations morales et politiques ont contribué à la mise en place de l'Open Source dans le domaine pionnier des logiciels, puis à l'extension de la philosophie du « libre » aux domaines de la culture et de la recherche. Cet article explore la généalogie de l'édition scientifique « ouverte » et met l'accent sur une autre variable, les dysfonctionnements économiques du marché et montre que, bien que ceux-ci aient joué un rôle important dans la mise en place de l'Open Access, ils sont loin d'avoir été totalement résolus par cette forme de diffusion de la science.The scientific publishing market, from « proprietary » to « open » access
A number of practical aspects as well as ethical and political considerations have contributed to the advent of opensource applications in pioneering software, and subsequently to an extension of the openness principle to culture and research fields. This article explores the genealogy of open-source scientific publishing, emphasising the other variable of economic market dysfunction to show that although this has been an important factor in the development of open access, the problem has by no means been entirely resolved by this new form of science dissemination. - Le projet « Génome humain » et l'Open Source - Geneviève Piétu, Cécile Méadel p. 151-152
- Science commons : nouvelles règles, nouvelles pratiques - Danièle Bourcier p. 153-160 Les avancées rapides dans les technologies numériques ont considérablement changé et amélioré la façon dont les données, informations et outils peuvent être diffusés, gérés, utilisés et réutilisés dans la recherche, et ont créé de nouvelles opportunités pour accélérer le progrès dans la science et l'innovation. Ces développements sont principalement dus au large mouvement formel ou informel de la peer production et à la diffusion globale de l'information mobilisant la coopération de communautés distribuées œuvrant dans des environnements en réseaux. Les initiatives comme celle de Science Commons s'appuient sur un modèle économique de la science évoluant dans un environnement numérique et plus précisément sur un socle de partage et d'échange entre communautés de pairs comme modalité de production. Beaucoup d'autres initiatives de ce type sont en cours (Atlas au CERN, Genève). Nous avons choisi Science Commons, dont l'objectif, au-delà de la communication scientifique, vise à accélérer la traduction des données en découverte – en débloquant tous les verrous y compris juridiques qui empêchent que la société bénéficie plus rapidement des résultats scientifiques. La philosophie et les outils pratiques de Science Commons seront décrits comme constitutifs d'une approche résolument ouverte de la connaissance scientifique, dans la lignée de la déclaration de Berlin (2003).Science commons : new rules and new practices
Rapid advances in the digital technologies have profoundly changed and improved the way in which data, information and tools can be disseminated, managed, used and re-used in research, and have created new opportunities to speed up progress in science and innovation. These developments are mainly due to an emerging broader movement in support of formal and informal « peer production » and global dissemination of information drawing on the cooperation of distributed science and knowledge communities working in open networked environments. Initiatives like the Science Commons rely on an economic model where science evolves in a digital environment, and more specifically on sharing and exchanges between peer communities as a basis for production. Many other initiatives of this kind are under way (e.g. ATLAS at the CERN in Geneva). We have chosen the Science Commons, whose objective, over and above scientific communication, is to speed up the translation of data into discovery by removing all barriers, including legal obstacles, that prevent society from enjoying the benefits of scientific results as quickly as possible. The philosophy and practical tools of the Science Commons are described as making up a resolutely open approach to scientific knowledge, as recommended by the Berlin Declaration (2003). - Le projet SCOAP3, une révolution en physique des hautes énergies - Salvatore Mele, Herbert Gruttemeier, Jean-Francois Nominé p. 161-163
- Les courtiers du savoir, nouveaux intermédiaires de la science : Knowledge brokers as the new science mediators - Morgan Meyer p. 165-171 Les courtiers du savoir sont présentés comme des acteurs se déplaçant entre deux mondes, les producteurs de savoir et les utilisateurs de savoir. Leur travail ne consiste pourtant pas seulement à servir de véhicule entre les deux mondes ; ils opèrent d'une triple manière : ils mettent les savoirs en circulation, les traduisent et les solidifient. Ils établissent en fait des connexions très particulières transitoires, temporaires et flexibles. L'article s'attache à décrire ces opérations pour montrer que le courtage conduit vers un nouveau monde aux contours incertains et surtout imprévisibles.Knowledge brokers may be described as people moving between the two different worlds of knowledge producers and knowledge users. However, they do more than merely shuttle knowledge between the two worlds. Their task is threefold : they bring knowledge into circulation, translate it and give it solid substance. To do so, they establish very specific, transitory, temporary and flexible connections. This article describes their operations to show that knowledge brokering is ushering in a new world whose boundaries are not only uncertain but also unpredictable.
- Le point de vue du Syndicat national de l'édition - p. 173-175
- Scénarios prospectifs pour l'édition scientifique - Ghislaine Chartron p. 123-129
Varia
- Les enseignants-chercheurs face aux mutations de leur environnement documentaire - Charline Leblanc-Barriac, Paul Rasse p. 179-182 Le milieu universitaire, précisément le monde des enseignants-chercheurs, se trouve dans la nécessité absolue de s'approprier les nouvelles technologies de l'information ; en même temps, il est l'héritier d'habitudes épistémologiques séculaires. Cet article pose la question des pratiques présentes et émergentes dans les processus de documentation scientifique. Il s'agit d'une part de constater les éventuelles carences dénoncées par les chercheurs en matière d'accès à l'information, d'autre part de faire émerger tout un système de représentations sociales participant d'une culture informationnelle spécifique influençant nécessairement les pratiques.Sur la base d'une analyse qualitative, nous mettons en évidence la nécessité, pour les chercheurs, quelle que soit leur discipline, de maintenir une relation « papier » avec les supports d'information. Cette relation traditionnelle permet de mieux appréhender l'innovation technique et de faire face aux potentialités offertes par les nouvelles sources d'accès à l'information. En outre, nous montrons que la définition même du métier de chercheur et son comportement face au traitement de l'information dépend de sa culture disciplinaire, selon qu'il appartient aux sciences humaines et sociales ou aux « sciences dures ».University professors in a changing documentary environment
The university environment, where scholars and professors work, is faced with an imperative need to appropriate the new information technologies, but it has also inherited the epistemological habits of centuries. This article raises the question of current and emerging practices in the scientific documentation process. It seeks on the one hand to observe the failings exposed by researchers regarding access to information, and on the other hand to draw out the contours of a whole system of social representations relating to a specific information culture that necessarily influences practice. Based on a qualitative analysis, we show the need for researchers in any discipline to maintain « print » relationships with information media. This traditional relationship helps to gain a better grasp of technical innovation and to cope with the potential of new ways of accessing information. We also show that the very definition of the research profession, as well as researchers' attitudes to information processing, depend on their disciplinary culture and whether they belong to the humanities and social sciences or to the « hard sciences ». - Sociopedia - Michel Wieviorka p. 183-184
- Les enseignants-chercheurs face aux mutations de leur environnement documentaire - Charline Leblanc-Barriac, Paul Rasse p. 179-182
Hommages
- Pierre Hadot (1922-2010) : La philosophie comme « art de vivre » - Thierry Paquot p. 187-191
- Claire Blanche-Benveniste (1935-2010) : La passion de la langue véritable - Henri-José Deulofeu p. 193-196
Lectures
- Lectures - p. 197-201