Contenu du sommaire : Les partis politiques
Revue | Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux |
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Numéro | 2018 |
Titre du numéro | Les partis politiques |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - Dominique Custos, Jean-Manuel Larralde, Juliette Lecame p. 7-8
Les partis politiques
- Quand ça commence mal… Le Congrès général des organisations socialistes françaises (Paris, salle Japy, 3-8 décembre 1899) - Patrick Charlot p. 11-19 Cet article propose de revenir sur le Congrès général des organisations socialistes françaises (décembre 1899) où, à en croire les documents et certains commentateurs, est né « un parti socialiste ». À partir des débats, nous essaierons de comprendre pourquoi ce « parti » n'était pas viable, reposant avant tout sur une synthèse tout à la fois artificielle (pour aboutir à l'unité entre les différentes factions ou, dans le vocabulaire d'aujourd'hui, les différents « courants ») et liberticide puisqu'elle aboutit à un contrôle sur les personnes et sur la presse.The aim of this article is to take another look at the Conference of French Socialist Organisations (December 1899), in the course of which, if we believe the documentation and certain commentators, a “socialist party” came into being. Using the material of the debates, we will endeavour to understand why this “party” was not viable, based above all on a synthesis both artificial (to establish unity between the different factions, or, in the language of the day, the different “currents”) and a threat to freedom leading to control over people and the press.
- Vers un nouveau modèle partisan ? Entre déclassement des partis de gouvernement et avènement des partis-mouvements - Rémi Lefebvre p. 21-30 Les partis de gouvernement sont en crise. Leur légitimité est de plus en plus faible. Leur ancrage dans la société décline. Leurs fonctions traditionnelles (sélection des candidats, construction de programmes, organisation du débat public) sont affaiblies. En France, ils ont été balayés lors des élections de 2017. De nouvelles organisations émergent : La France insoumise et La République en marche. Elles sont moins hiérarchisées, plus informelles mais aussi très centralisées et moins démocratiques.The government parties are in crisis. Their legitimacy is being increasingly undermined. Their foothold in society is on the decline. Their traditional functions (selecting candidates, devising programs, organising public debates) are impaired. In France, they were swept away in the 2017 elections. New organisations have emerged: La France insoumise and La République en marche. These are less hierarchical, more informal but yet very centralised and less democratic.
- Les partis politiques en France : des organismes de droit privé ? - Jean-Pierre Camby p. 31-34 Il n'existe pas de définition légale des partis politiques, libres de se créer et d'agir comme ils le souhaitent. Au sens juridique du terme, les partis sont des organisations de droit privé. Les rapports entre leurs membres, la désignation de leurs dirigeants, les investitures électorales relèvent de la réglementation sur les associations et donc de la compétence du juge judiciaire. Ils n'exercent pas de mission de service public. Seule leur participation à la vie politique permet à la loi de les assujettir au respect de l'ordre démocratique et de la légalité de leur action, sous le contrôle du juge administratif.There is no legal definition for political parties, they can be created and act as they wish. In the legal sense of the term, parties are private-law bodies. The relations between their members, the designation of their leaders, their electoral appointments are governed by the rules and regulations concerning associations and therefore a matter for a legal judge. They do not have a mandate for public service. Their participation in political life alone is sufficient to make them subject to the law in respect of democratic order and the legality of their acts, under the supervision of an administrative judge.
- Les politiques de rationalisation des financements partisans - Yves Poirmeur p. 35-43 Cet article analyse la construction et les transformations du référentiel normatif qui, progressivement enrichi, a diversifié les finalités assignées à la réglementation des financements partisans mise en place depuis la fin des années 1980. Celle-ci a doté les formations politiques d'un financement public. Elle a également interdit leur financement par des personnes morales, exception faite d'autres partis politiques, et plafonné les dons des personnes physiques. Ce texte montre que cette rationalisation du droit des financements partisans, rendue nécessaire par l'obsolescence des systèmes de financement antérieurs largement illégaux, n'a fait qu'accompagner une mutation structurelle des partis qui devenaient peu à peu des partis électoraux professionnels et un changement des stratégies d'influence des groupes d'intérêt.This article analyses the construction and transformations of the normative reference system which, progressively upgraded, has diversified the aims assigned to the regulation of partisan financing set up since the end of the 1980s. It has endowed political groups with public funding. It has also banned their funding by legal entities, with the exception of other political parties, and has capped donations by individuals. This text shows that this streamlining of the partisan-financing law, made necessary by the obsolescence of previously widespread illegal financing systems, was merely in step with a structural change in the parties which gradually became professional electoral parties and with a change in the influence strategies of interest groups.
- Interdire Civitas ? - Samuel Etoa p. 45-58 Cette contribution s'interroge sur la compatibilité du nouveau parti politique Civitas avec la démocratie. L'idée d'une démocratie « apte à se défendre » véhiculée par la jurisprudence de la Convention européenne des droits de l'homme et certains ordres juridiques nationaux, dont la France, entend en effet revenir sur l'idée ancienne selon laquelle la démocratie est le seul régime politique qui ne se défendrait pas contre ses ennemis. Or, si la dissolution de Civitas a été demandée à plusieurs reprises aux pouvoirs publics français, aucune procédure n'a été diligentée pour que soit interdit ce parti politique. Pourquoi ?This contribution questions the compatibility of Civitas, the new political party, with democracy. The idea of a democracy “able to defend itself” conveyed by the jurisprudence of the European Convention on Human Rights and certain national legal systems, including France, is intended to question the old idea that democracy is the only regime that does not defend itself against its enemies. However, even if French public authorities have been asked several times to disband Civitas, no procedure has been initiated to ban that political party. It begs the question: Why not?
- La notion de parti politique en Chine - Xiaowei Sun p. 59-67 Introduit de l'Occident, le phénomène de parti politique a connu un sort différent en Chine. Ainsi, la République populaire est caractérisée par une forme d'État-parti. Cet article propose une analyse, sous l'angle juridique, du statut des partis politiques chinois ainsi que de leurs rôles respectifs dans le système de « coopération multipartite et de consultation politique sous la direction du Parti communiste de Chine ». L'objectif est de comprendre l'évolution de la notion de parti politique, de la période de confusion du Parti et de l'État, suivie de la politique de leur séparation, et enfin de leur fusion dans un contexte de construction de l'État de droit.Introduced from the Western World, the fate of the political-party phenomenon in China has been different. Thus, the People's Republic of China is characterised by a kind of Party-State. This article offers an analysis, from a legal point of view, of the status of Chinese political parties and their respective roles in the system of “multi-party cooperation and political consultation under the leadership of the Communist Party of China”. The objective is to understand the evolution of the notion of a political party during the period of confusion between Party and State, then the politics of their separation, and finally their fusion in a context of implementing the Rule of law.
- Le rôle des partis politiques en Tunisie : entre quête du pouvoir et pacification sociale - Wafa Tamzini p. 69-78 Cet article propose d'examiner le rôle des partis politiques en Tunisie. Ces formations occupent une place institutionnelle importante depuis longtemps. Mais ce n'est que depuis très récemment que les formations partisanes sont libres de se constituer et ne sont plus simplement réduites au rôle de spectateur par le pouvoir en place comme ce fut le cas sous les deux régimes autoritaires qui se succédèrent de 1956 à 2010. Pour autant, la fin du monopartisme et l'avènement du pluralisme politique n'ont pas encore su faire oublier les stigmates des anciens régimes et la méfiance des citoyens vis-à-vis de ces multiples formations, incitant ces derniers à préférer se regrouper et à agir en dehors de la sphère strictement politique pour exprimer des revendications sociales.The aim of this paper is to examine the role of political parties in Tunisia. These groups have enjoyed a certain importance in the institutions for some time. But it is only very recently that partisan formations have had the freedom to constitute a group and are no longer reduced to the simple role of spectator by those in power, as was the case under both successive authoritarian regimes between 1956 and 2010. Nevertheless, the end of the single-party system and the advent of political pluralism have not yet eradicated the stigma of the old regimes nor the citizens' mistrust of these multiple groupings, encouraging them to prefer to regroup and act outside the strictly political sphere to voice their social grievances.
- Le statut partisan du chef de l'État turc - Aysegul Fistikci p. 79-99 Le statut partisan du chef de l'État en Turquie a été amorcé par la pratique du régime politique turc, bien avant les révisions constitutionnelles de 2007 et 2017. Toutefois, la consécration officielle de ce statut lors de la dernière révision constitutionnelle, qui fait du président le chef de l'État et le leader officiel du parti, va bien au-delà en transformant la nature même du régime. Si la révision constitutionnelle de 2007 prévoyant notamment l'élection directe systématise une lecture présidentialisée des institutions en s'inscrivant, en ce qui concerne ses motifs, dans un affrontement entre le parti majoritaire et les autorités de tutelle, celle de 2017 bouleverse complètement l'équilibre du régime en instaurant une confusion des pouvoirs au profit du président partisan, et en réduisant considérablement les chances de revenir à une interprétation neutre du statut présidentiel.The partisan status of the head of State in Turkey was initiated by the practice of the Turkish political regime long before the constitution was reviewed in 2007 and 2017. However, it was the last constitutional revision which formally implemented this status, making the president the head of State and the official leader of the party, and goes much further by transforming the very nature of the regime. While the constitutional revision of 2007, which notably provides for direct elections, systematises an interpretation of president-led institutions by entering, as far as its motives are concerned, into a confrontation between the majority party and the supervisory authorities, the revision of 2017 completely upsets the balance of power of the regime by introducing a confusion in the respective powers in favour of the partisan president and by considerably reducing the chances of returning to a neutral interpretation of the presidential status.
- L'histoire dans le contentieux des partis politiques devant la Cour européenne des droits de l'homme - Yannick Lécuyer p. 101-110 Cet article propose un tour d'horizon de la jurisprudence de la Cour européenne relative aux partis politique et une tentative de systématisation de l'utilisation de l'histoire dans le cadre du contrôle des ingérences étatiques. Arrêt après arrêt et au-delà des seuls droits et libertés concernés – liberté d'expression, liberté d'association, droit à des élections libres – se dessinent les contours d'un ordre politique européen, un ordre juridique original et constitutionnalisant qui tient compte de l'histoire parfois mouvementée des États défendeurs et de l'histoire de l'Europe en général.The article offers an overview of the jurisprudence of the European Court concerning political parties and an attempt to systematise the use of history in the context of the control of State interference. Judgement after judgement and beyond the basic rights and freedoms concerned – freedom of expression, freedom of association, right to free elections – are to be seen the outlines of a European political system, an original and constitutionalising legal system which takes into account the sometimes-turbulent history of the respondent States and the history of Europe in general.
- Les partis politiques devant la Cour interaméricaine des droits de l'homme - Marie Rota p. 111-120 Cet article tente de rendre compte de la faiblesse de la protection offerte par la Cour interaméricaine des droits de l'homme aux partis politiques au travers de l'analyse de trois décisions qui y sont indirectement consacrées. Car si la rédaction de certaines dispositions de la Convention américaine relative aux droits de l'homme, telles que la liberté d'association ou encore les droits politiques, laissait présager un niveau de protection élevé, la jurisprudence de la Cour ne va pas dans ce sens. Elle refuse, tout d'abord, de reconnaître une quelconque exclusivité des partis politiques dans la présentation de candidats à des élections puisqu'elle admet tout à la fois la licéité des candidatures indépendantes et l'existence d'autres formes d'associations à des fins politiques pouvant jouer ce rôle. Sa jurisprudence récente semble en outre annoncer un encadrement rigoureux tant de l'expression que des actions des partis via l'importation d'un concept : celui de « démocratie militante » (ou de « démocratie apte à se défendre » pour reprendre l'expression employée par la Cour européenne des droits de l'homme). Elle incite ainsi les États parties à la Convention à s'affranchir du modèle classique du régime représentatif, au sein duquel les partis politiques jouent un rôle primordial.This article attempts to underline the weakness of the protection afforded by the Inter-American Court of Human Rights to political parties through the analysis of three of its decisions, which are indirectly concerned with it. If the drafting of certain provisions of the American Convention on Human Rights, such as freedom of association or political rights, gave the impression of being highly protective, the case-law of the Court of San José does not go in that direction. First of all, the Court refuses to recognise any exclusivity of political parties in the presentation of candidates for elections since the Court admits both the lawfulness of independent candidatures and the existence of other forms of association with a political purpose that can play this role. Furthermore, its recent jurisprudence also seems to announce a rigorous framing of both the expression and the actions of the parties via the importation of a concept: that of “militant democracy” (or of “democracy able to defend itself”, to use the term of the European Court of Human Rights). The Court thus encourages States subscribing to the Convention to break away from the classical model of the representative system, in which political parties play a key role.
- Quand ça commence mal… Le Congrès général des organisations socialistes françaises (Paris, salle Japy, 3-8 décembre 1899) - Patrick Charlot p. 11-19
Variétés
- L'Union européenne et le Sahara occidental : pas (seulement) une affaire de droits de l'homme - Carlos Ruiz Miguel p. 123-140 L'approche de l'Union européenne au Sahara occidental s'est développée à partir de plusieurs perspectives, grâce à plusieurs institutions, à différentes périodes. Le Parlement européen s'est d'abord intéressé à la question du statut du territoire pour prêter davantage d'attention aux droits de l'homme dans une phase ultérieure et pour ensuite négliger le conflit. La Cour de justice de l'Union européenne a elle été saisie d'affaires qui ont abouti à d'importants arrêts. Mais si dans un premier temps une chambre de la Cour a pu régler l'affaire en s'appuyant sur les droits fondamentaux, la grande chambre a ensuite tranché la question en faisant appel au statut du territoire d'après les normes du droit international.The European Union's approach to the Western Sahara has developed from several perspectives, arising from a number of institutions at various moments in time. At first, the European Parliament considered the question of the status of the territory and then focused more on the human rights issue at a later stage but then ignored the conflict. Whereas the European Court of Justice has dealt with a number of cases that have led to important judgements. But if, at first, a chamber of the European Court of Justice gave a ruling based on fundamental rights, the Grand Chamber subsequently settled the issue by referring to the status of the territory according to the norms of international law.
- Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et la qualification des conflits armés - Mamoud Zani p. 141-155 Cet article propose d'examiner une question à la fois complexe et délicate, à savoir la qualification juridique des conflits armés par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Cette qualification est d'une importance considérable car elle détermine au final le régime juridique applicable dans les conflits armés. L'analyse porte de manière détaillée sur les traits généraux caractérisant le CICR, la démarche de celui-ci en matière de qualification, les critères objectifs de qualification et ceux dégagés par les juridictions internationales, ainsi que les normes de droit international humanitaire régissant les conflits armés et les situations de violence.The aim of this paper is to examine a question which is both complex and delicate, namely that of the legal qualification of armed conflicts by the International Committee of the Red Cross (ICRC). This qualification is of considerable importance as it ultimately determines the legal regime applicable to the armed conflicts. The analysis deals in detail with the general characteristics of the ICRC, its approach to qualification, the objective criteria of qualification and those identified by international courts, as well as the norms of international humanitarian law governing armed conflicts and situations involving violence.
- L'Union européenne et le Sahara occidental : pas (seulement) une affaire de droits de l'homme - Carlos Ruiz Miguel p. 123-140
Chroniques
- Chronique de jurisprudence constitutionnelle française 2017 - Alexia David, Eugénie Duval, Juliette Lecame, Morgan Pénitot p. 159-174 Désormais traditionnelle dans cette revue, la chronique de jurisprudence constitutionnelle vise à faire un état des lieux annuel des décisions rendues par le Conseil constitutionnel. Sous un angle critique, les auteurs présentent les continuité et rupture de jurisprudence, ainsi que la variabilité du contrôle exercé par le Conseil selon les droits en cause.Now traditional in this journal, the chronicle of constitutional jurisprudence aims to make an annual inventory of the Constitutional Council's decisions. From a critical point of view, the authors present the continuity and discontinuity of case law, and the variability of the control exercised by the Council according to the rights in question.
- Chronique de jurisprudence du droit des étrangers 2017 - Manon Decaux, Guillaume Dujardin, David Vicomte p. 175-185 Cette chronique a pour but de jeter un « coup de projecteur » sur quelques-uns des grands chantiers jurisprudentiels qui auront marqué l'année écoulée en droit des étrangers. Choisis aussi bien pour leur impact pratique que pour leur intérêt théorique, les arrêts font l'objet d'un commentaire critique et sont systématiquement replacés dans leur contexte jurisprudentiel et législatif, afin de tenter de mettre en lumière les logiques qui animent ces précédents en devenir.This chronicle aims to “turn the spotlight” on certain important case law projects, which have marked the past year in the rights of aliens. Chosen both for their practical impact as well as for their academic interest, the judgements are criticised and systematically replaced in their jurisprudential and legislative context in order to shed light on the logic behind these nascent precedents.
- Chronique de jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme relative aux prisons 2016-2017 - Jean-Manuel Larralde p. 187-196 Si la Convention européenne des droits de l'homme du 4 novembre 1950 ne possède pas de clause consacrée spécifiquement à la situation des personnes détenues, la Cour de Strasbourg a, depuis le début des années 1980, élaboré une jurisprudence originale et très protectrice en la matière. Cette chronique, qui porte sur les années 2016-2017, présente les évolutions de la jurisprudence strasbourgeoise sur les questions de dignité et de légitimé des détentions, sur l'évolution des méthodes pénitentiaires, sur la prise en charge de la santé des personnes détenues et sur le renforcement des voies de recours ouvertes aux personnes détenues.While the European Convention on Human Rights of November 4, 1950 does not have a specific clause devoted in particular to the situation of detainees, the Court in Strasbourg has, since the early 1980's, developed an innovative and protective jurisprudence on the matter. This chronicle, which studies 2016 and 2017, outlines the evolutions of the Strasbourg Court's case law on the issues of dignity and legitimacy of detentions, of the changes in penitentiary methods, of the medical care of detainees, and of the improvement of appeal procedures for prison inmates.
- Chronique de jurisprudence constitutionnelle française 2017 - Alexia David, Eugénie Duval, Juliette Lecame, Morgan Pénitot p. 159-174