Contenu du sommaire : Dossier-débat (suite). Systèmes productifs : les modèles en question.

Parmi les nombreux débats sur les nouveaux systèmes productifs conçus comme dépassement du modèle fordien/taylorien, la notion d'apprentissage organisationnel constitue sans doute l'un des meilleurs analyseurs de l'efficacité des «modèles» en question. C'est en tout cas la théorie défendue ici par l'auteur et qu'il applique à deux cas désormais classiques : Nummi et Uddevalla (transplant japonais aux Etats-Unis et expérimentation originale en Suède). Se référant tout à tour à l'un et à l'autre, ses réflexions ouvrent une théorie de l'apprentissage conçue comme processus évolutif et de diffusion de l'innovation, dépassant l'image trop statique que véhicule la notion de «modèle». Les acteurs et l'organisation participent conjointement aux mécanismes de sélection et de rétention des connaissances, seuls capables de répondre efficacement aux aléas de la production et du marché.

Fermée depuis 1993, l'usine Volvo d'Uddevalla réouvrira ses portes début 1996, remettant ainsi en question les diverses argumentations déployées jusque-là pour expliquer sa fermeture. Cet article propose une comparaison terme à terme du travail sur chaîne et en stations fixes. Il montre que, le toyotisme n'est finalement qu'un ensemble de remèdes visant à pallier certains maux du fordisme sans s'écarter radicalement de ce dernier. L'expérience uddevallienne en revanche relève d'une conception du travail qui s'appuie sur les dimensions cognitives et coopératives de l'action et qui remet en cause l'apparente nécessité des opérations de décomposition/recomposition et la fluidification du processus productif.

L'auteur étudie les conséquences du toyotisme -juste-à-temps, zéro défaut -sur l'organisation de l'industrie automobile. Il s'appuie sur les concepts d'ordre, de désordre et d'organisation et oppose aux modèles rigides les construits contingents mieux adaptés à la gestion des aléas. Dans cette industrie l 'ordre recherché crée une vulnérabilité car il y a un décalage entre de nombreuses exigences et des marges de manœuvre faibles. L'organisation émerge alors comme une solution contingente. Les acteurs recréent des stocks tampons dans l'ensemble du process. Ils coopèrent pour connaître les disponibilités des pièces et gérer les aléas.

Le plan est une forme de l'action collective organisée, de politique ou de management. Il est aujourd'hui critiqué car les théories contemporaines de l'action ne supposent ni la mémorisation ni la projection exigées par le plan. Pourtant, il ne faut pas abandonner la forme du plan qui est une «socialisation de l'action», une modalité du passage de l'individuel au collectif ; c'est un «investissement déformé» et une obligation de généralisation. Le plan suppose un équipement cognitif partagé et se coule dans le langage naturel de l'action. Les figures du plan examinées montrent comment le plan participe d'une «grandeur civique» et porte une exigence d'explication.

Cet article étudie un comité de pilotage mis en place pour faire de la construction du Synchrotron un chantier exemplaire en matière de protection des risques. Tout d'abord, sont analysées les modalités de constitution de ce «dispositif d'innovation» ainsi que les logiques à l'œuvre en son sein, ses actions et son incidence. Puis, ces résultats sont utilisés pour montrer comment le dispositif choisi a permis de prévenir ou d'accompagner les difficultés que rencontre tout processus d'innovation mais aussi comment, en se heurtant à des controverses et en les recomposant, il a agi comme révélateur des enjeux du changement.

A partir de l'examen critique du déroulement d'une mission portant sur l'enseignement professionnel, L. Tanguy compare systématiquement l'activité d'expertise avec le travail scientifique «normal» destiné à une communauté scientifique, en attirant l'attention sur les tensions qu 'ils entretiennent. Elle montre que les contraintes particulières qui caractérisent l'expertise n'empêchent pas la production de connaissances, pour autant que les questions posées par le commanditaire soient problématisées, que les limites d'une analyse orientée vers l'action soient identifiées et que le chercheur mobilise les références théoriques des spécialités concernées. Si les démarches et les méthodes adoptées et la manière dont les obstacles ont été franchis sont explicitées, l'expertise est susceptible de devenir un type particulier d'activité scientifique, et devrait être reconnue comme tel.