Contenu du sommaire : Savant cinéma

Revue Revue d'histoire des sciences humaines Mir@bel
Numéro no 39, 2021
Titre du numéro Savant cinéma
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier

    • Jalons pour une anthropologie des savoirs cinématographiques - Baptiste Buob, Damien Mottier p. 7-22 accès libre
    • Une recherche par le film. Henri Wallon, Fernand Deligny et la tentative de la Grande Cordée - Stéphane Privat p. 23-46 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Après la Seconde Guerre mondiale, dans une période qui prend conscience des effets du cinéma de propagande et où les luttes de pouvoir entre éducation, santé et justice restent vives, les trajectoires de l'éducateur Fernand Deligny et du psychologue Henri Wallon laissent entrevoir les développements d'une véritable recherche par le film du milieu social et culturel qu'il participe à modifier et de l'activité individuelle et collective qui peut trouver à s'y insérer. En rapprochant les projets de films imaginés par Deligny au sein de la Grande Cordée et les contributions de Wallon à la recherche filmologique, cet article questionne le modèle même du film, mais aussi de son dispositif, tels qu'ils sont appréhendés, questionnés et déplacés dans ces initiatives de l'après-guerre. En filigrane, nous interrogeons ce moment charnière où la réflexion s'écarte d'une certaine tradition critique pour saisir le cinéma dans sa dimension d'appareil idéologique, culturel et social.
      After the war, in a period that became aware of the effects of propaganda films and where there were power struggles between education, health and justice, the trajectories of the educator Fernand Deligny and the psychologist Henri Wallon demonstrate the effective use of film to research a social and cultural environment that film helped transform, and also the individual and collective activity that can be involved in it. By examining the film projects imagined by Deligny within the context of the Grande Cordée alongside Wallon's contributions to filmological research, this article questions the very model of film, but also of its mechanisms, as they are apprehended, questioned and displaced in these post-war initiatives. Through this we address a pivotal moment of departure from a tradition of film criticism in order to grasp cinema in terms of its ideological, cultural and social apparatus.
    • Edgar Morin et les théories sociales du cinéma en France - Valérie Vignaux p. 47-63 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les propositions d'Edgar Morin quant au cinéma, principalement développées au cours des années 1950, ont longtemps été considérées comme singulières. Pour en restituer les spécificités, l'étude s'attache à retracer son parcours, depuis sa découverte du cinéma dans l'entre-deux-guerres, ses activités résistantes, jusqu'à sa rencontre avec Georges Friedmann et son intégration au groupe de recherche qu'il dirige à l'Institut de filmologie. Trajectoire qui rend manifeste l'existence d'une école française du cinéma comme fait social, active depuis les années 1920 et comprenant entre autres Henri Wallon, Léon Moussinac ou Georges Sadoul. Ainsi replacée dans son contexte intellectuel et institutionnel, l'œuvre d'Edgar Morin trouve place dans une histoire des théories françaises du cinéma.
      Edgar Morin's ideas on cinema, mainly from the 1950s, were long considered original. In order to pinpoint their specificity, this study goes back over Morin's career, from his discovery of cinema between the wars and his activities in the Resistance to his meeting with Georges Friedmann and joining the research group he headed at the Institut de filmologie. This trajectory testifies to the existence of a French school of cinema as a social fact, which had been active since the 1920s and included Henri Wallon, Léon Moussinac and Georges Sadoul, among others. In putting Edgar Morin's work into its intellectual and institutional context, the article situates its place in a history of French theories of cinema.
    • Du Conservatoire national des arts et métiers à la mission ethnographique Ogooué-Congo, et retour - Robert Nardone, Loïc Petitgirard, Catherine Radtka p. 65-91 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Nous nous intéressons ici au Conservatoire national des arts et métiers et à André Didier qui fut officiellement « ingénieur du son » lors de l'expédition ethnologique Ogooué-Congo. Nous avançons que sa collaboration permit à la mission d'être un succès grâce à la collecte réussie de matériaux utiles à la réalisation de films ethnographiques et à l'étude musicologique. Pour rendre compte de l'apport de Didier et du Conservatoire, nous nous intéressons plus particulièrement à l'enregistrement du son. Pour saisir la plasticité de l'objet « sons » et analyser sa diffusion et sa mobilisation dans des milieux professionnels différents, nous mobilisons le concept d'« objet-frontière » introduit par Star et Griesemer (1989). Ce faisant, nous développons les différentes interprétations élaborées autour des sons dont Didier avait la responsabilité. L'investissement d'André Didier est mis en regard de ce qu'est l'institution formatrice Cnam dont il est issu.
      Our focus here is the Conservatoire national des arts et métiers [CNAM] and André Didier, who was officially the ‘sound engineer' during the Ogooué-Congo ethnographic expedition. We argue that his presence made the mission a success due to the collecting of material for ethnographic film-making and musicological study. Didier's and the Conservatoire's contribution is best approached through sound recording. In order to grasp the malleability of ‘sound' as an object of study, and to analyse its presence and mobilisation in different professional milieus, we borrow the concept of ‘boundary object' from Star and Griesemer (1989). This enables us to analyse the different interpretations of the sounds for which Didier was responsible. André Didier's commitment is considered in the light of the formative institution, the CNAM, from which he came.
    • Des cinéastes surréalistes au musée de l'Homme - Anaïs Mauuarin p. 93-116 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Prendre pour objet L'Invention du monde réalisé par Michel Zimbacca et Jean-Louis Bédouin permet de mettre en perspective le rôle du cinéma dans les rapports qu'entretinrent l'ethnologie et le surréalisme au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Ces deux cinéastes font partie de la jeune génération de surréalistes, attirée de façon renouvelée par le potentiel fantasmatique du cinéma, toujours inspirée par le primitivisme et fermement anticolonialiste. Leur moyen-métrage, qui prend les sciences humaines comme matériau, déploie un audacieux montage visuel et sonore où se mêlent totems, masques à transformation et extraits de films de terrain, porté par un poème-commentaire de Benjamin Péret. À travers l'analyse de la fabrication du film, des réseaux mobilisés et de sa réception, restreinte mais enthousiaste, cet article entend rendre compte de la multitude d'acteurs participant au milieu cinématographique de l'époque et souligner la façon dont le milieu ethnologique s'y inscrit.
      L'Invention du monde [The Invention of the World], directed by Michel Zimbacca and Jean-Louis Bédouin, can show us the role of film in the relationship between ethnology and surrealism in the aftermath of the Second World War. These two filmmakers belonged to the younger generation of staunchly anti-colonialist surrealists who admired primitivism and were interested in renewing the fantasmatic potential of cinema. The bold visual and sound editing of this medium-length film, which takes the human sciences as its material, mixes totems, transformation masks and extracts from films taken in the field, woven together by a poem-commentary by Benjamin Péret. Through an analysis of the making of the film, the networks mobilised and its limited but enthusiastic reception, this article shows the many protagonists revolving around film-making at the time and underlines how the ethnological milieu fitted into this.
    • La télévision face au cinéma - Abdallah Azzouz p. 117-135 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Après la Seconde Guerre mondiale, le retentissement de la télévision demeure restreint. Toutefois, les discours s'interrogeant sur sa place dans la transmission des expressions artistiques, en particulier du cinéma, commencent à se développer au sein des revues corporatives et dans la presse quotidienne. Pour rendre compte des particularités de ces discours, cette étude analyse la circulation des idées entre cinéma et télévision dans les écrits du journaliste, producteur et théoricien Jean Thévenot et dans ses critiques pour L'Écran français, revue qui joue alors un rôle précurseur dans la légitimation de la télévision. Cette étude mobilise également les conférences du cinéaste, critique et téléaste Marcel L'Herbier, qui propose une « politique des auteurs » en faveur des professionnels du cinéma à la télévision. L'examen de ces deux trajectoires, soutenant le développement d'une télévision au service de la culture, constitue ainsi une contribution originale aux études médiatiques.
      Television had limited influence immediately after the Second World War. However, its place in the transmission of artistic expressions, in particular cinema, began to develop within the trade Press and daily newspapers. This study analyses the specificities of these discourses by examining the ideas circulating between cinema and television in the writings of the journalist, producer and theorist Jean Thévenot, and in his reviews for L'Écran français, which was a pioneer in legitimating television. This study also draws on the lectures of the filmmaker, critic and television director Marcel L'Herbier, who advocated an “authorial policy” in favour of film specialists on television. These two figures, who supported the development of television for cultural ends, made an original contribution to media studies.
    • André Bazin et la guerre (1938-1944) - Baptiste Buob p. 137-165 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Quelles furent les convictions politiques du célèbre critique de cinéma André Bazin avant et pendant la Seconde Guerre mondiale ? La lecture d'un texte passé inaperçu et la relecture de ses écrits de jeunesse brossent le portrait d'un homme désemparé qui, comme nombre de ses contemporains, hésite quant à l'attitude à adopter. D'abord convaincu de la nécessité de faire table rase d'un système politique défaillant, il pense que la défaite sera l'occasion de « conquêtes positives ». Délaissant ensuite progressivement ses premières certitudes, il rejoint la Maison des lettres et son groupe de cinéma, composés de personnes favorables à la Résistance, où il noue les relations humaines et intellectuelles grâce auxquelles il se fera, après la guerre, une place dans le monde du cinéma. Cette période fait ainsi état d'une maturation graduelle de la pensée de Bazin dont la prise en compte pourrait permettre de considérer ses activités ultérieures d'homme de cinéma selon de nouvelles perspectives.
      What were the political convictions of the famous film critic André Bazin before and during the Second World War? A long-overlooked text and some early writings paint the portrait of a man who, bewildered like many of his contemporaries, was initially hesitant. At first he thought that a clean slate was necessary, and that the defeat of a defective political system would provide an opportunity for “positive conquests”. He gradually abandoned this position and joined the pro-Resistance Maison des Lettres and its film group, where he established the human and intellectual relationships that would help him make a place for himself in the film world after the war. This period therefore shows a gradual maturation of Bazin's thinking, which can provide a new perspective on his later activities as a film-maker.
  • Document

  • Varia

    • La condamnation du mesmérisme revisitée - Bruno Belhoste p. 187-214 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'article revient sur les enquêtes officielles qui ont conduit à la condamnation du magnétisme animal en 1784. Il s'attache principalement à étudier comment ont été constituées les deux commissions chargées d'enquêter, la commission royale et la commission de la Société royale de médecine, comment se sont déroulées les enquêtes elles-mêmes, sous forme d'observations dans la clinique du docteur Deslon, un disciple de Mesmer, puis sous forme d'expériences sur des sujets isolés (certaines en simple aveugle), et, enfin, comment les rapports ont été préparés et rédigés. L'objectif est de montrer, à partir des nombreux documents produits à cette occasion, la complexité et les contradictions des enquêtes, les divisions entre les enquêteurs et, finalement, la fragilité des conclusions auxquelles ils sont parvenus. L'article illustre ainsi, sur un cas célèbre, la difficulté d'arriver à des certitudes quand il s'agit d'évaluer des traitements médicaux.
      This article rereads the official inquiries that led to the condemnation of animal magnetism in 1784. It focuses on how the two investigating committees, the Royal Commission and the Commission of the Royal Society of Medicine, were constituted; how the investigations themselves were carried out, in the form of observations in the clinic of Dr Deslon, a disciple of Mesmer, and then in the form of experiments on isolated subjects (some of them for placebo effect); and finally how the reports were prepared and written. The aim is to show, on the basis of the numerous documents produced on this occasion, the complexity and contradictions of the investigations, the divisions between the investigators, and the fragility of the conclusions they reached. Using this famous case, the article thus illustrates the difficulty of arriving at certainties when it comes to evaluating medical treatments.
  • Géographies académiques

  • Débats, chantiers et livres