Contenu du sommaire : Service public - Service universel

L'universalité du service téléphonique est généralement considérée comme le résultat de l'existence d'un monopole réglementé et de mécanismes de redistribution de revenus par voies tarifaires. Cet article fait un examen critique des revendications historiques de ce qu'on appellera ici l'idéologie du service universel. On montre qu'une infrastructure téléphonique généralisée s'est développée aux Etats-Unis entre 1894 et 1921 à cause de la rivalité entre Bell et les indépendants. Plus encore, cet article démontre que ce fût le refus de Bell et des indépendants de s'interconnecter, un phénomène généralement ignoré ou condamné dans la littérature historique et économique, qui propulsa les deux systèmes dans une course à l'universalité, permettant une progression rapide de la pénétration du téléphone dans de larges zones géographiques, particulièrement en milieu rural.

Cet article retrace, à partir d'une étude de cas sur le modèle britannique, l'histoire et l'évolution en Europe de l'idée de service public dans les télécommunications et la radiodiffusion. Dans la première partie, consacrée aux télécommunications, l'auteur établit un parallèle entre l'évolution du concept de service public au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, afin de déterminer les formes institutionnelles et réglementaires au travers lesquelles s'est concrétisé ce concept, et développe en particulier celui de l'entreprise publique. L'auteur explicite par exemple la naissance, à partir de l'Office des Postes et des Télécommunications, de l'actuelle British Telecom et de l'organisme de réglementation des télécommunications britanniques, l'OFTEL, en faisant ressortir l'interaction entre ces deux entités. L'idée de service public est ensuite resituée dans le contexte économique actuel de déréglementation et la question posée sur son actualité et son avenir. Dans une deuxième partie, l'auteur décrit l'évolution de l'idée de service public dans la radiodiffusion, en indiquant les influences politiques, économiques, sociales et culturelles qui la sous-tendent. L'auteur développe en particulier l'histoire de la BBC, son rôle culturel et son évolution économique face à l'émergence de la concurrence.

Dans un contexte de libéralisation et de privatisation, un des principaux enjeux de la politique est la remise en question du rôle social et économique assuré par l'Etat. L'étude de la genèse et de l'évolution du service public offre plusieurs pistes de réflexion qui permettent d'éclairer la nature des changements actuellement à l'oeuvre au sein du secteur de la communication. Trois questions structure cette réflexion tout au long de cet article : quelle est la nature des changements observés; quel est l'enjeu social de ces transformations et, enfin, dans quelle mesure de nouvelles politiques vont-elles ou devront-elles être développées afin de répondre à ces nouveaux enjeux ? En adoptant une perspective historique, on constate que la notion de service public en matière d'audiovisuel et de télécommunications s'est constamment transformée pour traduire de nouvelles préférences sociales. L'évolution de ce concept s'avère en cela révélatrice de modifications plus profondes de la structure de la société. Ainsi la thèse développée sera que la nature des obligations imposées à l'exploitant des services de communication, et la manière dont ces contraintes sont mises en oeuvre résultent d'une médiation sociale qui reflète les rapports de force existants entre les parties intéressées du secteur.

Vingt ans de réflexion, suivi d'une même période de propositions. En 1923, la IIP République accouche d'une réforme qui crée le budget annexe des PTT. Ce cadre juridique régira l'activité des Postes et Télécommunications jusqu'à la réforme de 1990, autour d'une notion d'« autonomie » qui, selon l'auteur, restera à jamais insaisissable...

L'intervention de la Commission des Communautés Européennes dans le secteur des télécommunications est un phénomène récent (le milieu des années quatre- vingt) dans l'histoire de la communauté. Ce texte propose une analyse historique (1973-1992) des raisons qui ont amené une intervention considérablement amplifiée depuis ce tournant. Il précise le cadre juridique et institutionnel et sa déclinaison dans le secteur des télécommunications. Il s'interroge sur la répartition des compétences tant entre les états-membres et la commission qu'au sein de cette dernière comme sur les modèles de régulation possibles sur le plan européen.

Malgré des lignes de convergence forte, la redéfinition des modèles nationaux de régulation du secteur des télécommunications qui s'opère depuis des années 80 connait des processus et des formes nettement différenciés. La compréhension de ces différences appelle l'analyse du double processus de déconstruction du modèle traditionnel de service public et de reconstruction sociale d'un nouveau modèle. Apparait alors, derrière l'apparente similitude des systèmes institutionnels correspondant au monopole de service public la diversité réelle des conceptions et des interprétations concrètes de ce modèle ; de même, l'inscription de la problématique sectorielle dans un débat social et un jeu politique d'ensemble dont les règles et le contenu portent la marque de cultures, d'histoires politiques et économiques, de conjonctures singulières, informe la renégociation du compromis et son contenu. La démarche comparative adoptée ici a pour objet et permet de saisir le poids du politique et des formes spécifiques de la régulation politique propre à chaque pays dans la définition des conditions institutionnelles et dans les cheminements différenciés de la régulation sectorielle.

On considère souvent qu'un nouveau modèle de gestion de la communication est en train d'apparaître qui serait en tout point opposé à celui qui a prévalu jusqu'aux années 1970. En évoquant différents exemples historiques, cet article montre qu'en fait il y a eu une assez grande variété de modèles de gestion des télécommunications et de l'audiovisuel. On peut les caractériser par cinq variables : monopole/concurrence, public/privé, universel/spécifique, masse/élite, national/régional/international. Les recompositions actuelles jouent simultanément sur ces différentes variables et devrait donc faire apparaître comme par le passé plusieurs modèles de gestion.

Faisant partie de l'ensemble des discours que notre culture engendre, le discours des médias ne doit pas être soumis à un traitement spécial - en dépit de la prétention des journalistes concernant le caractère à part de leur travail. Un regard « éloigné », c'est à dire anthropologique nous montre que la construction discoursive des journalistes subit les mêmes contraintes que celle des bricoleurs des mythes - elle essai de définir la réalité à l'aide des structures narratives qui font appel, afin de donner un sens à l'innattendu, aux symboles profonds (les « roots paradigms », selon V.Turner) de la culture. L'analyse d'un « media event » (Dayan, Katz) qui a mobilisé la presse roumaine en 1992 - la visite de l'ancien roi de la Roumanie pendant les fêtes de Pâques - montrent la force du travail symbolique auquel les médias se livrent, tout en gardant l'illusion qu'ils ne font que reproduire les événements concrets. En fin de compte les médias ont créé deux grandes constructions mythiques : celle du rituel sacré de la communion avec le PELERIN lointain, venu afin de laver la souillure du pays, et celle du rituel carnavalesque, hilare, de la FOULE curieuse, attirée par le spectacle offert par un roi qui s'expose directement au public.