Contenu du sommaire : Le PS, nouvelles approches

Revue 20 & 21. Revue d'histoire Mir@bel
Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire
Numéro no 96, octobre-décembre 2007
Titre du numéro Le PS, nouvelles approches
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Le PS, nouvelles approches

    • Le parti socialiste en France. Approches renouvelées d'un mouvement séculaire - Pascale Goetschel, Gilles Morin p. 3 accès libre
    • Le parti socialiste dans le système politique français. Rupture et intégration - Michel Winock p. 11 accès libre
    • La mairie socialiste, matrice du réformisme (1900-1939) - Aude Chamouard p. 23 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le socialisme municipal de 1900 à 1939 constitue une expérience déterminante du pouvoir par les socialistes. Or celle-ci est longtemps demeurée un terrain inexploré de l'histoire du socialisme français. Dans les communes qu'ils détiennent, les maires socialistes font leur première expérience du pouvoir, une expérience bien plus durable que l'exercice du pouvoir au niveau national. Dans la gestion quotidienne des affaires locales, les socialistes se révèlent être des réformistes, par leurs pratiques comme leur discours. Ils mènent ainsi des politiques sociales ambitieuses pour faire de leurs communes des îlots de socialisme, ce qui nécessite parfois de collaborer avec les pouvoirs dits bourgeois, le préfet notamment. Les maires acceptent et pratiquent le réformisme au quotidien alors que la doctrine du parti le leur interdit. Ces élus locaux se distancient par conséquent d'un parti dont la doctrine ne correspond pas à leur pratique quotidienne du pouvoir. Munis de réseaux de clientèle et d'une légitimité extrapartisane, les maires socialistes font preuve d'un esprit d'indépendance qui va parfois jusqu'à la désobéissance envers un parti qui a besoin d'eux pour sa survie électorale et financière.
      Municipal socialism from 1900 to 1939 represents a decisive political experience for the socialists, and yet, it has long remained among the relatively under-researched aspects of French socialism. In the communes they governed, socialist mayors acquired their first experience in political power, an experience that proved more lasting than the exercise of power at the national level. In the daily management of local affairs, socialists revealed themselves to be reformers in their practices as well as in their discourse. They conducted ambitious social programs to transform their communes into islands of socialism, which sometimes lead to close cooperation with the so-called bourgeois institutions, not least the Prefect. Mayors accepted and practiced reformism every day even though the official party doctrine prohibited it. Therefore they distanced themselves from a party which doctrine no longer corresponded to their daily political practice. With their clientèle networks and a political legitimacy extending beyond the confines of their political party, the socialist mayors displayed an independence verging at times on disobedience towards their own political party which desperately needed them for its own electoral and financial survival.
    • La notabilisation du PS-SFIO sous la Quatrième République - Noëlline Castagnez p. 35 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Au lendemain du 21 avril 2002, la notabilisation du parti socialiste fut dénoncée pour expliquer la défaite de Lionel Jospin et l'absence de mobilisation populaire sur son nom. Le processus s'instaura en fait sous la Quatrième République, laissant de nos jours l'image dégradée d'un « parti de notables de la Troisième Force ». Pourtant, le PS-SFIO se voulait encore et toujours un parti révolutionnaire et de lutte de classe. Mais, en dépit de réflexes ouvriéristes dans le choix de ses candidats, il n'était plus sociologiquement le représentant générique de la classe ouvrière. Grâce à leur implantation locale et à leur ruralisation, ses parlementaires et conseillers généraux devinrent des notables, personnel vieillissant et hostile à la féminisation. Leur professionnalisation fut accentuée par un cumul croissant des mandats et leur capacité à pratiquer des alliances de Troisième Force sur le terrain, alors que celle-ci avait fait long feu au Parlement. Rechignant à animer la Fédération des élus socialistes au profit de l'Association des maires de France, l'autonomisation des élus remit en cause leur intégration à l'appareil militant, et valorisa la défense de l'intérêt général au détriment de l'esprit de parti. Face à l'érosion de sa base militante et de ses suffrages, mais fort de ses notables locaux, le PS-SFIO dut accepter de voir s'effriter le mythe d'un « parti de la classe ouvrière ».
      In the aftermath of April 21, 2002, the “notabilization” of the Socialist party was denounced in explanation of Lionel Jospin's defeat and the absence of any popular mobilization around his name. The process began in fact during the Fourth Republic, leaving still today the degraded image of a “party of notables of the Third Force”. Yet the PS-SFIO still and always intended to be a party of revolution and class conflict. But in spite of working class reflexes in the choice of its candidates, it was no longer sociologically the generic representative of the working class. Thanks to their local implantation and ruralization, its parliamentarians and general counselors became notables, aging personnel and hostile to feminization. Their professionalization was accentuated by the practice of holding several concurrent mandates and their ability to forge alliances of the Third Force in the field while it had proved unsuccessful in Parliament. Balking at leading the Federation of Socialist Deputies for the French Mayors' Association, the elected officials and their growing autonomy put into question their integration into the party apparatus and valorized the defense of the general interest to the detriment of party spirit. Faced with the erosion of its militant rank and file and its voters, but strengthened by its local notables, the PS-SFIO had to accept seeing the myth of a “working class party” disintegrate.
    • Les socialistes et la société française. Réseaux et milieux (1905-1981) - Gilles Morin p. 47 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'historiographie du parti socialiste insiste sur la faiblesse organisationnelle du parti, qu'elle rapporte à l'adoption de la charte d'Amiens en 1906. Alors que les partis sociaux-démocrates de l'Europe du Nord ont noué des rapports organiques avec les syndicats, les coopératives et les mutuelles, l'histoire mouvementé du mouvement ouvrier français aurait privé le parti français de partenaires privilégiés en le mettant même en concurrence avec le syndicalisme, cet « autre socialisme ». Pourtant, la permanence de ce parti et sa capacité de rebonds, en dépit de plusieurs crises majeures, durant un siècle (1920, 1945, 1969 par exemple), suppose qu'il ait entretenu des liens réels avec la société. Ce constat a conduit à reconsidérer ces derniers, à travers les réseaux et les milieux sur lesquels les socialistes se sont appuyés et qui ont permis les renaissances réussies. Et donc à reconsidérer les liens souples et évolutifs entretenus avec le mouvement ouvrier, les réseaux laïques et les associations, sans oublier la part des élus.
      Socialist party historiography emphasizes the party's organizational weakness that it links to the adoption of the Amiens Charter in 1906. While Northern Europe's social-democrat parties forged organic relations with trade unions, cooperatives and mutual companies, the hectic history of the French worker movement is thought to have deprived the French party of privileged partners by putting it in competition with trade unionism, this “other socialism”. Yet the permanence of this party and its ability to bounce back, in spite of several major crises over a century (1920, 1945, 1969, for example), suggest that it has real links with the society. This record has led to reconsidering these links, through the networks and milieus supporting the socialists and that enabled successful renewals. And thus to reconsider the supple and evolving links with the working class movement, secular networks and associations, not to mention that of the elected officials.
    • Autorité et pouvoir de décision dans le socialisme français. Le prisme du secrétaire général - François Lafon p. 63 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'article porte sur le rôle politique du secrétaire général puis, à partir de 1969, du premier secrétaire, au sein du parti socialiste. Après l'unité de 1905 et la reconstitution de la SFIO consécutive au congrès de Tours de 1920, le secrétaire général apparaît comme l'élément second dans un mode de gestion dyarchique. Les personnalités qui exercent leur magistère moral l'emportent alors sur les secrétaires généraux : Jean Jaurès sur Louis Dubreuilh, Léon Blum sur Paul Faure. À la veille de 1940, ce fonctionnement dual vole en éclats avec la question de la guerre. Le leadership est désormais exercé par un seul homme, Guy Mollet. L'autorité dont il dispose résulte pour l'essentiel d'un accord politique autour de ses principales valeurs. Elle témoigne aussi de l'adaptation de la SFIO à la logique parlementaire. Enfin, la conclusion souligne le changement de fonctionnement du parti socialiste après l'introduction, en 1962, du suffrage universel direct pour l'élection à la présidence de la République. Il devient une machine à sélectionner des candidats.
      The article deals with the political role of the general secretary then, from 1969, of the first secretary, within the Socialist party. After the 1905 unity and the re-forming of the SFIO following the 1920 Tours Conference, the general secretary appears as the second element in a dyarchial management method. The personalities who exert moral authority have the upper hand on the general secretaries: Jean Jaurès over Louis Dubreuilh, Léon Blum over Paul Faure. On the eve of 1940, this dual management shatters with the war question. The leadership is from now on exerted by a single man, Guy Mollet. The authority which he has at his disposal results essentially from a political agreement on his main values. It also shows the SFIO adaptation to the parliamentary logic. Finally, the conclusion underlines the operating change the Socialist party went through after the introduction, in 1962, of the direct universal suffrage for the election of the president of the Republic. The party became a machine to select candidates.
    • Une révolution culturelle du parti socialiste dans les années 1970 ? - Hélène Hatzfeld p. 77 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le parti socialiste fondé en 1971 naît dans un contexte où les exigences de renouvellement de la vie politique et de changement social sont fortes. Le parti socialiste est assurément bien différent de la SFIO dont il est en partie l'héritier : il rassemble une diversité de sensibilités et gagne de nombreux adhérents dans les nouvelles classes moyennes, chez les chrétiens de gauche, parmi des militants de la CFDT et d'associations. Il reprend l'aspiration à « changer la vie », l'idée d'autogestion, certaines revendications féministes et écologistes, et contribue ainsi à les légitimer. Cependant, cette traduction politique est subordonnée à sa stratégie de conquête d'un nouvel électorat. Elle ne remet pas en cause les fondements du projet de socialisme. Elle ne conduit pas le parti socialiste à prendre en compte les questions qui sont aussi posées sur les partis, sur le rôle du politique et la place du social, sur les finalités d'une transformation de la société.
      The Socialist party, founded in 1971, was born in a context in which demands for political renewal and social change were strong. The Socialist party was definitely very different from the SFIO whose heir it is in part: it gathered a variety of currents and won many members from the new middle classes, left-wing Christians, CFDT militants and associations. It took up the aspiration of “changing life”, the idea of self-management, and certain feminist and ecological claims, and thus contributed to legitimizing them. However, this political development was subordinated to its conquering strategy of a new electorate. It did not challenge the bases of the socialist project. It did not make the Socialist party take into account questions on parties, the role of politics and the place of social questions, and the finalities of a transformation of society.
    • Être socialiste d'un siècle à l'autre. La tradition militante à l'épreuve des logiques médiatiques - Frédéric Cépède, Fabrice d'Almeida p. 91 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article vise à analyser le rapport à la publicité et au secret dans la définition des identités politiques à partir de l'exemple socialiste. Cette famille politique a souvent mis en avant sa croyance en une politique rationnelle, élaborée collectivement, devant se dire à haute voix, sans honte ni cachotterie. Dès l'origine, l'institution partisane a dû ménager de la discrétion dans l'élaboration de sa doctrine et, bientôt, supporter des éléments irrationnels dans les attitudes de ses membres. Si « être socialiste », c'est à la fois s'intégrer dans des traits partisans (culture, tradition, habitus, réflexe...) et faire valoir sa différence (personnalité, caractère...), cet écart à l'idéal de raison paraît encore plus fort depuis le début des années 1980, à mesure que la vie privée s'immisce dans le débat public.
      This article analyzes the relation to advertising and secrecy in the definition of political identities using the socialist example. This political family has often put forward its belief in a collectively developed rational politics and an ability to articulate itself clearly, without shame or mystification. From its inception, the party institution had to conserve discretion in working out its doctrine and then to accept irrational elements in its members' attitudes. If “being socialist” is both being integrated in party features (culture, tradition, life form, reflexes) and putting forward one's difference (personality, character, etc.), this discrepancy from the ideal of reason seems even stronger since the early 1980s, as private life is interfering more and more in the public debate.
    • Parti socialiste français et parti travailliste britannique. Le cas des groupes dirigeants - Carole Bachelot p. 107 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Malgré des héritages divergents en matière d'organisation et de représentations de la démocratie interne, le parti socialiste français et le parti travailliste britannique ont entrepris simultanément au début des années 1990 des réformes similaires. Visant à moderniser et démocratiser les partis, ces mesures ont permis une individualisation du vote des adhérents pour la sélection de leurs dirigeants, une féminisation des instances nationales, et l'introduction de procédures délibératives pour l'élaboration des programmes. La comparaison montre cependant que si ces réformes n'ont pas nécessairement abouti à un rééquilibrage du pouvoir interne en faveur des simples adhérents, elles ne peuvent qu'être interprétées de manière distincte, en fonction de l'inscription des groupes dirigeants dans des systèmes politiques spécifiques, des investissements différenciés par les dirigeants au sein de ces instances suivant leurs ressources politiques, et des conceptions différentes de leur travail de représentation.
      Though they have different traditions concerning party politics and internal democracy, both the French Socialist party and the British Labour party undertook similar reforms at the beginning of the 1990s. Aiming at modernizing and democratizing the political parties, these changes have permitted the introduction of the One Member One Vote principle for the selection of leaders, a better representation of women at a national level, and the introduction of deliberation processes in the development of policies. However, the comparison shows that all of these measures have not necessarily succeeded in reshaping the internal power equilibrium in favour of the grassroots party members. Yet, these reforms have taken different meanings according to the national polity, the way political leaders have play their role within these structures, and the difference in the notion of political representation their leaders have.
    • Enjeu
      • Le renouvellement de l'histoire des partis politiques - François Audigier p. 123 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        Annoncé par Serge Berstein en 1988, le renouvellement de l'histoire des partis est manifeste en France depuis une vingtaine d'années, même si ce bouleversement épistémologique a pu être occulté par une diminution quantitative des études partidaires. Influencée dans ses problématiques et ses méthodes par la sociologie et la science politique, plus ouverte à la démarche comparative à l'échelle européenne, intégrant les acquis de la recherche en histoire culturelle, exploitant de nouvelles sources et de nouveaux supports médiatiques mis à sa disposition par un réseau de fondations, comités et associations, l'analyse des formations militantes constitue désormais un des champs de recherches les plus originaux et stimulants de l'histoire politique.
        As forecasted by Serge Berstein in 1988, a renewed interest in the history of political parties has taken place in France in the past twenty years, even though this epistemological upheaval has been overshadowed by a quantitative reduction of studies on the subject. Influenced in its problematics and its methods by sociology and political science, more open to comparative approaches at an European level, integrating the results of cultural history research, and exploiting new sources and new medias put at disposal by a network of foundations, committees and associations, the analysis of militant movements is now one of the most original and stimulating research fields in political history.
  • Articles

    • La délation antisémite sous l'Occupation - Laurent Joly p. 137 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'histoire de la dénonciation en France pendant la seconde guerre mondiale est davantage objet de croyances et de représentations que de connaissance. Le sujet semble polémique et difficile à aborder sur le plan scientifique. En nous fondant sur les registres du courrier « arrivée » du Commissariat général aux Questions juives (CGQJ), tenus à jour de janvier 1942 à août 1944, ainsi que sur les neuf mille dossiers nominatifs constitués par sa direction du Cabinet, nous avons tenté de caractériser et d'évaluer le phénomène particulier de la délation antisémite sous l'Occupation. Impliquant principalement des hommes, majoritairement non anonyme, elle revêtit un caractère politique et « idéologique » beaucoup plus marqué que les autres types de délations. En effet, elle s'inscrivait dans une tradition de l'antisémitisme français, habitué, depuis Édouard Drumont, à dénoncer l'« influence juive » dans la presse et les officines spécialisées. Si le phénomène fut relativement important (vingt mille missives ont été, selon les estimations les plus basses, enregistrées par les services du CGQJ), seules une minorité de lettres eut des conséquences directement criminelles. Dans la majorité des cas, la délation accompagna simplement le processus de persécution.
      The history of denunciation in France during World War 2 is based more on beliefs and representations than on knowledge. The subject seems controversial and difficult to tackle on a scientific level. Using the incoming mail registers of the Commissariat général aux Questions juives (CGQJ), kept up to date from January 1942 to August 1944, and on the nine thousand name files put together by the head of the Cabinet, we tried to characterize and estimate the particular phenomenon of anti-Semite denunciation during the Occupation. Implicating mostly non-anonymous men, it assumes political and “ideological” characteristics far more marked than the other cases of denunciation. Indeed, it is in line with the tradition of French anti-Semitism, which is used since Édouard Drumont to denounce “Jewish influence” in the press and specialised headquarters. If the phenomenon was quite substantial (a low estimate of twenty thousand letters were registered by the services of the CGQJ), only a minority of letters had direct criminal consequences. In the majority of the cases, the denunciation simply went together with the process of persecution.
    • La déportation des Tatars de Crimée et leur vie en exil (1944-1956). Un ethnocide ? - Grégory Dufaud p. 151 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En mai 1944, sur l'ordre de Staline, les Tatars de Crimée sont collectivement déportés en Asie centrale ou en Sibérie. Pour penser cet événement, une historiographie utilise le concept d'ethnocide selon une perspective mémorielle qui fait souvent peu cas de la réalité passée. Cet article se propose ainsi de soumettre l'usage de ce vocable à la critique de la description historique. Il s'agit de décrire la déportation des Tatars péninsulaires, leur vie dans les colonies spéciales de peuplement et l'entreprise de « dé-tatarisation » de la Crimée. En s'appuyant sur la variété des sources aujourd'hui disponibles, ce récit permet de démonter les ressorts d'une « rafle-déportation » exceptionnellement normale et les formes de stigmatisation de la communauté tatare exilée. Il révèle également en creux comment se pense la société soviétique au sortir de la seconde guerre mondiale.
      In May 1944, on Stalin's orders, the Tatars of Crimea were collectively deported to central Asia or Siberia. To deal with this event, historiography uses the concept of “ethnocide”, according to a memory perspective that often does not take into account the past reality. This article aims at subjecting the use of this term to historical criticism. It is a question of studying the deportation of the peninsular Tatars, their life in special settlement colonies and the process of “de-Tatarization” of Crimea. Based on varied sources, this analysis deconstructs the mechanisms of a deportation raid and the forms of stigmatization of the exiled Tatar community. It also shows by default how the Soviet society thought itself at the end of the World War 2.
    • Mutations des pratiques répressives de la police secrète tchécoslovaque (1956-1968). Du recours à la force au contrôle social - Duane Huguenin p. 163 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article analyse les mutations des pratiques répressives de la police secrète tchécoslovaque (Státní Bezpecnost) entre 1946 et 1968. Cette période est souvent décrite comme un moment de libéralisation progressive conduisant au printemps de Prague. En effet, la répression devient moins dure et moins visible, même si l'activité de la police secrète continue à croître, notamment avec la multiplication des dites « mesures prophylactiques ». Celles-ci permettent de clore un dossier sans jugement, mais avec des sanctions administratives. Leur principal intérêt réside dans les réunions qu'elles impliquent. Là, les représentants du pouvoir apparaissent sur scène et révèlent les « crimes » devant une large audience, faisant ainsi preuve d'omniscience, clémence et magnanimité. Ces réunions suivent un déroulement strictement codifié, et constituent un rituel politique qui met en scène l'union du pouvoir et du peuple dans un moment de populaire et donc légitime justice. Ces mesures impliquent la collaboration entre la police secrète et des organisation socio-économiques (syndicats, entreprises…), élargissant le spectre des activités sociales qui peuvent être contrôlées.
      This article analyses the transformations of the repressive practices of the Czechoslovak secret police (Státní Bezpecnost) between 1946 and 1968. This period is often described as a moment of progressive liberalization leading to the Prague Spring. Indeed, the repression became less tough and less visible, even though the secret police's activity kept growing, particularly with the multiplication of the so-called “prophylactic measures”. These measures allowed to close a file without a trial, but with administrative sanctions. However their main significance lied in the political meetings they implied. In those, the representatives of the authorities appeared on stage and revealed the “crimes” in front of a large audience, proving therefore omniscience, clemency and magnanimity. These meetings followed a strictly codified pattern, and constituted a political ritual staging the union of the authorities and the people in a moment of popular and therefore legitimized justice. These measures implied a collaboration between the secret police and the social and economic organizations (trade unions, firms…), enlarging the range of the social activities that could be policed.
    • Les interventions des intellectuels de droite dans Le Figaro littéraire .L'invention du contre-engagement - Claire Blandin p. 179 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      C'est un homme de lettres, Pierre Brisson, qui reprend en 1934 Le Figaro compromis par les sympathies fascistes de François Coty. Il impose avec lui une équipe d'écrivains qui « redonnent sa plume » au journal puis tentent d'en maintenir la publication, à Lyon, entre 1940 et 1942. Lorsque la censure de Vichy se fait plus pressante, Brisson imagine de saborder Le Figaro et de maintenir la publication des pages littéraires seules : deux numéros du Figaro littéraire paraissent en novembre 1942. À la Libération, aidé par Maurice Noël, Pierre Brisson relance un hebdomadaire littéraire, vendu séparément du quotidien et réalisé par une rédaction autonome. Le Figaro littéraire est créé en avril 1946 en réponse à la mainmise du parti communiste sur de nombreux journaux culturels et pour défendre la théorie de l'art pour l'art face à l'engagement proclamé des intellectuels. Mais comment répondre lorsque l'on refuse de prendre part à la bataille ? Ou comment s'opposer sans s'engager ? C'est à ce problème qu'est confronté l'hebdomadaire dans les premières années de son existence et de la guerre froide. Il met alors en place des stratégies de contournement (défense des écrivains des pays socialistes, débats sur les modalités de l'épuration) avant de trouver ses hérauts (Koestler, Kravchenko, Rousset ou Rougemont) et d'entrer dans une stratégie de contre-engagement.
      A man of letters, Pierre Brisson, took over Le Figaro in 1934, compromised by François Coty's fascist sympathies. He imposed a team of writers who brought back the newspaper's dignity and then tried to keep its publication going, in Lyon, between 1940 and 1942. When Vichy censorship became more pressing, Brisson thought of scuttling Le Figaro and maintaining the publication of its literary pages only: two issues of the Figaro littéraire came out in November 1942. At the Liberation, assisted by Maurice Noël, Pierre Brisson relaunched a literary weekly, sold separately from the daily and put out by an autonomous editorial staff. The Figaro littéraire was created in April 1946 in response to the Communist party takeover of many cultural newspapers and to defend the theory of art for art's sake in opposition to the proclaimed engagement of the intellectuals. But how can one respond when refusing to participate in the battle? Or how to oppose without committing oneself? This was the problem the weekly faced in the first years of its existence and of the cold war. It put in place avoidance strategies (defense of writers from socialist countries, debates on the processes of purification) before finding its heroes (Koestler, Kravchenko, Rousset or Rougement) and entering a strategy of counter engagement.
    • L'enfance au service de la guerre froide. Le voyage de Samantha Smith en URSS (juillet 1983) - Andreï Kozovoï p. 195 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En juillet 1983, une Américaine de 10 ans, Samantha Smith, se rend en Union soviétique sur invitation d'Andropov. Ayant lu sa lettre remplie d'inquiétude sur l'avenir de la planète, ce dernier l'invite à constater que l'Union soviétique ne veut en aucun cas provoquer une guerre nucléaire comme le craint la jeune enfant. L'opération est largement couverte par les médias soviétiques qui s'efforcent de cultiver la mémoire de l'événement, en particulier après la mort dramatique de Smith en 1985. En invitant l'Américaine à devenir la première représentante de la « diplomatie des enfants », le pouvoir soviétique poursuit en fait des objectifs complexes, qui ne se réduisent pas à une simple opération de propagande destinée à l'étranger. En effet, il s'agit aussi et peut-être surtout de contribuer à réformer une machine anti-américaine devenue trop inefficace auprès des jeunes. Le succès de l'opération est en partie avéré, mais la maladie du dirigeant, et surtout les événements de septembre 1983 qui précipitent les deux superpuissances au bord de la guerre nucléaire, empêchent Moscou de profiter pleinement des fruits de cette opération. Cependant, la mémoire de la visite demeure aujourd'hui assez vive et redonne pour certains du crédit à l'ancien régime.
      In July 1983, a ten-year old American girl, Samantha Smith, is invited to the Soviet Union by Yuri Andropov himself. After reading her worried letter on the future of the planet, the Soviet chairman invites her to see by herself that the USSR does not want to start any nuclear war. The whole operation is widely covered by the soviet media which do their best to keep the memory of the event alive, especially after the tragic death of the American girl in 1985. By inviting Samantha to be the first representative of the “childhood diplomacy” policy, the soviet power has in mind complex objectives which go beyond a simple propaganda operation for foreign countries. The goal is also, and maybe above all, to help reform an anti-American propaganda machine which has become too inefficient, especially with the youth. The operation is quiet successful, but the chairman's sickness, and more importantly, the tragic events of September 1983 which bring the two superpowers to the edge of the nuclear abyss, prevent Moscow from exploiting fully this operation. However, the memory of Samantha's visit still remains alive today and for some contributes to the communist regime's nostalgia.
    • Billy Graham, un pasteur américain en politique - Stephen Whitfield p. 209 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Des sondages menés aux États-Unis sur l'Américain le plus admiré du dernier demi-siècle montre que le révérend Billy Graham est classé invariablement près du sommet. De l'après-guerre jusqu'à aujourd'hui, aucun pasteur ne fut près de rivaliser d'influence avec ce baptiste revivaliste du Sud dans une société majoritairement protestante qui revendique une relation personnelle avec le Sauveur. Graham lui-même a joui d'une relation personnelle avec deux présidents américains en particulier : Richard M. Nixon et George W. Bush. Les deux sont républicains ; les deux ont pu être classés, dans des sondages conduits à la même période parmi des historiens, comme les pires occupants de la Maison Blanche. L'analyse des jugements politiques, valeurs et pratiques du révérend Graham, théoriquement démocrate, peut ainsi contribuer à l'étude du rôle de la religion dans la vie publique américaine, et à nuancer l'image d'une division ferme entre l'Église et l'État au cours des cinq dernières décennies.
      Polls conducted in the United States of the most admired American of the past half-century show the Reverend Billy Graham to rank consistently near the top. In the postwar era until the present, no clergyman has come close to rivaling the influence of this Southern Baptist revivalist in a predominantly Protestant society that has valued claims of a personal relationship to the Savior. Yet Graham himself, nominally remained a Democrat, had enjoyed a personal relationship with two American Presidents in particular. Both of them are Republicans; both may rank in polls conducted among historians as the worst occupants of the White House in that same era: Richard M. Nixon and George W. Bush. The analyse of Reverend Graham's political judgments, values and practices can therefore contribute to the study of the role of religion in American public life, and complicate the picture of a firm division between church and state in the past five decades.
    • Point de vue - La décolonisation, cette histoire sans fin - Jean-Pierre Rioux p. 225 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La décolonisation a longtemps été étudiée et enseignée comme s'il s'agissait d'un phénomène historique inscrit dans un cours progressiste et linéaire de l'évolution de l'humanité : elle était d'abord, intrinsèquement, la marche des colonisés vers l'indépendance et la nationalité. Mais nombreux ont été les aléas chronologiques et géographiques qui ont contredit cet optimisme et désavoue le concept de « jeune nation ». Et le débarquement en force du terme « postcolonial » l'affaiblit encore. Si bien qu'a surgi une trouble interrogation : quel est donc le fil rouge de cette histoire qui désormais paraît sans fin ?
      Decolonization has been studied and taught for a longtime as if it were a historical phenomenon inscribed in a progressive and linear current of the evolution of humanity: it was first, intrinsically, the march of the colonized towards independence and nationality. But many were the chronological and geographical hazards that contradicted this optimism and disavowed the “young nation” concept. And the arrival in strength of the term “postcolonial” weakens it even more.
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