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Revue 20 & 21. Revue d'histoire Mir@bel
Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire
Numéro no 88, octobre-décembre 2005
Titre du numéro Varia
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • La famine de 1932-1933 en Union soviétique - Lynne Viola (traduction de Bruno Poncharal) p. 5 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'auteur de cet article suit la progression de la famine qui frappa, en Union soviétique, les territoires des « implantations spéciales » des « koulaks » au cours des années 1932-1933. L'histoire des « déplacés spéciaux » montre explicitement que Staline et son gouvernement avaient pleine connaissance de l'avancée et de la force destructrice de la famine. À cet égard, l'expérience des « déplacés spéciaux » éclaire l'histoire de la famine dans son ensemble, en ce qui concerne la nature des documents et des reportages des médias auxquels le gouvernement avait accès. Aucun doute ne subsiste sur le fait que le gouvernement soviétique savait exactement ce qui se passait alors dans le pays. L'histoire des « déplacés spéciaux » montre également que la famine s'est étendue bien au-delà de l'Ukraine et d'autres enclaves de peuples non russes, ayant des effets sur l'ensemble de la paysannerie. Dans ce contexte, la famine pourrait être décrite comme la conséquence épouvantable de la guerre contre la paysannerie, guerre qui débute avec la collectivisation et la dékoulakisation et qui fut une tentative d'éradication de la culture paysanne. L'expression de génocide culturel peut être une qualification bien plus appropriée de la famine que celle de génocide purement national, adoptée par de nombreux chercheurs ukrainiens. Ceci mérite certainement un débat.
    This article follows the course of the 1932-1933 famine in the Soviet Union as it struck the territories of the “kulak” special settlements. The story of the special settlers during the famine clearly demonstrates that Stalin and his government had full knowledge of the course and destructive force of the famine. In this respect, the experience of the special settlers sheds light on the famine as a whole in regard to the kind of documentation and reporting that the government had access to. There is no longer any doubt that the Soviet government knew exactly what was happening in the countryside at this time. The story of the special settlers also demonstrates that the famine extended well beyond Ukraine and other non-Russian ethnic enclaves, effecting the peasantry as a whole. In this context, the famine might best be described as a horrendous by-product of the war on the peasantry that began with collectivization and dekulakization and was an attempt to eradicate peasant culture in its entirety. The term cultural genocide may be a far more accurate description of the famine than the purely national genocide espoused by many Ukrainian scholars. Certainly, it is worthy of debate.
  • Représentations de la main-d'oeuvre, actions parlementaires et administratives : le développement de l'enseignement technique dans l'entre-deux-guerres - Jean-Michel Chapoulie p. 23 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Comment s'explique l'expansion de l'enseignement technique entre 1920 et 1940, qui contraste avec la stagnation prolongée du réseau d'établissements des autres types d'enseignement ? L'article analyse À la fois les transformations des représentations de la main-d'œuvre dans la période 1900-1920 qui ont inspiré À la direction de l'Enseignement technique une nouvelle politique et le mode de financement particulier des écoles techniques après 1925. La politique d'expansion menée de manière très discrète repose sur des décisions du Parlement, dans lesquelles les gouvernements successifs n'ont joué qu'un rôle mineur, et sur l'action sur le terrain de la direction de l'Enseignement technique, qui avait le soutien d'une partie du patronat des industries « modernes ».
    How can the development of vocational teaching between 1920 and 1940 be explained, contrasted with the long-lasting stagnation of the network of setting up other types of teaching ? This article analyses both the transformations of the representations of labor in the first two decades of the 20 th century that inspired the directors of vocational education to adopt a new policy and the specific means of financing these technical schools after 1925. The very low-profile expansion policy was based on Parliamentary decisions in which successive administrations played a minor role and on the work in the field of the management of technical education that had the support of some of the “modern” industries' bosses.
  • L'"étrange défaite" du divorce ? (1940-1946) - Julie Le Gac p. 49 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dès le 2 avril 1941, le régime de Vichy adopte une loi nouvelle sur le divorce et la séparation de corps. Le divorce symbolise à bien des égards les dérives imputées à la Troisième République et jugées responsables de la défaite. Le redressement de la nation française passe par une réforme des mœurs, favorisée par une réforme du Code de la famille axée, en l'occurrence, sur la multiplication des délais imposés aux couples souhaitant divorcer. La logique politique de cette nouvelle législation se heurte toutefois à la logique de la guerre, qui provoque l'éclatement des familles. Le nombre de divorces prononcés chute au début de l'Occupation pour ensuite connaître une lente progression jusqu'en 1944 où il retrouve presque son niveau d'avant-guerre. La magistrature, d'abord encline à appliquer de manière stricte la loi du 2 avril 1941, se détache progressivement de l'esprit de la Révolution nationale. À la Libération, la législation relative au divorce est assouplie par l'ordonnance du 12 avril 1945, qui accompagne l'explosion du nombre de divorces, caractéristique d'une sortie de guerre. Toutefois, tout comme pour le gouvernement de Vichy, la stabilité et la moralité de la famille constituent les piliers de la reconstruction de la France. Ainsi, en matière de divorce, la continuité des idées prend le pas sur la volonté de rupture affichée par la Quatrième République.
    As of April 2, 1941, the Vichy regime adopted a new law on divorce and the separation of persons. In many respects, divorce symbolized the loss of control that the Third Republic was considered responsible for and that was considered responsible for the defeat. Setting the French nation straight meant a reform of morals, helped along by a reform of the Family Code, based on, in this case, increasing the time imposed on couples who wanted to get divorced. The political logic of this new legislation went up against the logic of war that made families split. The number of divorces pronounced dropped at the beginning of the Occupation and then slowly moved up to be, in 1944, almost at the same rate as pre-war. Judges were first inclined to apply the April 2, 1941 law strictly but then progressively moved away from the national revolution. At Liberation, divorce laws were relaxed by the April 12, 1945 ruling that accompanied the explosion in the number of divorces, characteristic of the end of war. However, just as for the Vichy government, the stability and morality of the family constituted the pillars of French reconstruction. Thus in divorce matters, continuity won over the attempt at change that the Fourth Republic put forward.
  • Le procès Papon : médias, témoin-expert et contre-expertise historiographique - Béatrice Fleury et Jacques Walter p. 63 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Lors du procès de Maurice Papon (1997-1998), des historiens ont été cités à comparaître comme témoins-experts. Certains d'entre eux ont accepté, d'autres ont refusé. Cette question s'est manifestée dans l'espace public en deux temps. La presse généraliste a présenté l'historien-expert sous un jour favorable : il introduisait une dimension pédagogique au procès, faisait aboutir la procédure et minorait ce qui aurait pu aller à l'encontre d'une condamnation. Puis, dans des revues « savantes », un désaccord a émergé : les modalités et les enjeux de ce débat sont au centre de cet article. Celui-ci examine comment l'expertise historienne a fait l'objet, par Henry Rousso, d'une contre-expertise professionnelle, peu présente dans les journaux généralistes. La place du judéocide dans les analyses historiques et journalistiques du régime de Vichy est ensuite étudiée. Enfin, le point aveugle du débat médiatique est mis en lumière : aux yeux de plusieurs intervenants, la mémoire du Génocide fonctionnerait comme un obstacle à la refondation du Politique.
    During the Maurice Papon trial (1997-1998), historians were called on to give testimony as expert-witnesses. Some of them accepted and others refused. This question appeared in the public sphere in two periods. The general press presented the expert-witness in a favorable light. It introduced a pedagogical dimension to the trial, pushed the process along and minimized what could have gone against a condemnation. Then in scholarly journals a disagreement arose whose terms and stakes are at the center of this article. It examines how historical expertise became the object of a professional counter-expertise by Henry Rousso and that this does not appear very often in the general press. The place of the destruction of Jews in the historical and journalistic analyses of the Vichy regime is then studied. Lastly, the blind spot of the press debate is highlighted : in the eyes of several participants, the memory of the genocide acts as an obstacle to an overhaul of politics.
  • Le corps souverain sous la Cinquième République : les funérailles télévisées du général de Gaulle et de François Mitterrand - Evelyne Cohen et André Rauch p. 77 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Obsèques, enterrements, inhumations ou funérailles posent la question du seuil, du passage, dans les représentations contemporaines de la vie et de la mort. Ces rituels renvoient aussi à nos représentations du corps, devenu dépouille du disparu. Au plus haut niveau de la société, en la personne du « Prince », qu'il soit souverain ou président, chef ou guide, la mort déclenche le deuil de tous les citoyens. Quel hommage ceux-ci rendent-ils à celui qui a « représenté » le corps social dans son ensemble ? Comment ce corps social se « sépare »-t-il, sans s'abîmer, de celui qui fut sa tête ? Questions d'anthropologie que soulèvent les funérailles du souverain. L'avènement en France de la télévision de masse dans les années 1960 et l'introduction du suffrage universel comme mode de scrutin pour élire le président de la République posent ces questions en des termes spécifiques à la France et à la Cinquième République. Comment les médias télévisés ont-ils pris part au deuil de la nation ? Comment ont-ils rendu la mort du chef de la nation accessible (c'est-à-dire à la fois intelligible et recevable) aux téléspectateurs et aux citoyens français ?
    Funerals, burials, and inhumations all pose the question of the threshold, the passage, in contemporary representations of life and death. These rituals also make us think of our representations of the body, the body of the deceased. At the highest level of society, in the person of the “Prince”, be he sovereign or president, chief or guide, death sets off the mourning of all the citizens. What homage do they give to the one who “represented” the social body as a whole ? How does this social body “separate” itself, without hurting itself, from the one who was its head ? Questions of anthropology that a state burial raises. The arrival of mass television in France in the 1960s and the introduction of universal suffrage as electoral mode to elect the president of the Republic pose these questions in specific terms to France and to the Fifth Republic. How did the televised media participate in the nation's mourning ? How was the head of the nation's death made accessible (that is, both intelligible and receivable) to the viewers and to French citizens ?
  • Enjeux

    • Le documentaire historique au péril du "docufiction" - François Garçon p. 95 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Alors que le documentaire historique était cantonné sur les chaînes thématiques du câble et du satellite ou programmé entre minuit et cinq heures du matin sur les grandes chaînes hertziennes, il fait, à en croire les médias, un spectaculaire retour aux heures de grande écoute sous l'appellation de « docudrama » ou de « docufiction ». Ce genre, exploité depuis de nombreuses années en Grande-Bretagne et aux États-Unis, semble neuf en France. C'est au service public que l'on doit la consécration du « docudrama » qui rencontre un vif succès. On peut toutefois s'interroger sur ce qu'il reste de documentaire dans ces films. Ne s'agit-il pas plutôt de fiction, tout simplement ? La cherté extrême du produit et la recherche de l'audience maximale induisent une écriture qui n'est pas sans soulever de questions sérieuses à l'historien.
      Whereas the historical documentary used to be shunted onto the cable or satellite theme channels or scheduled between midnight and 5 a.m. on the big hertzian channels, it has made a spectacular return to prime time under the name “docudrama” or “docufiction”, according to the media. This type seems new in France although it has been used for many years in Great Britain and in the United States. Public and not private agency established the “docudrama” which is very successful today in France. A question that can be asked is what remains of the documentary in these films. Aren't they simply fiction films ? The extremely high cost of the product and the search for maximum audience lead to scripts that pose serious problems for the historian.
  • Points de vue

    • Le monde du cinéma français sous l'Occupation ou 25 ans de questions aux archives - Jean-Pierre Bertin-Maghit p. 109 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Jean-Pierre Bertin-Maghit retrace les vingt-cinq années de ses recherches sur le cinéma français sous l'Occupation. Il montre combien ses travaux sont liés à la fois à sa formation d'historien, à ses activités de formateur audiovisuel à la Ligue de l'enseignement et à son rattachement au laboratoire de recherches de Marc Ferro. Ses analyses se sont construites autour d'une double préoccupation : celle de l'historien, qui intègre l'image dans sa pratique de l'histoire pour contribuer à la connaissance d'une époque trouble et complexe ; celle de l'historien du cinéma, qui inscrit son travail dans le long mouvement de l'histoire des formes et des institutions cinématographiques. Ses recherches se sont appuyées sur le champ théorique de la sociologie du cinéma et sur une des problématiques fondamentales de l'école des Annales, qui veut qu'en histoire l'initiative appartienne à la question posée plutôt qu'au document. L'auteur préconise l'écriture d'une « histoire plurielle » qui relève à la fois de l'histoire, de l'économie, de la sociologie et de l'analyse de contenu (sémiologie, narratologie, etc.).
      Jean-Pierre Bertin-Maghit goes back over his 25 years of research on French cinema during the Occupation. He shows what his work owes to his training as a historian, his activities as an audiovisual trainer at the Ligue de l'enseignement (Teaching League) and to his connection to Marc Ferro's research laboratory. His analyses are constructed around a duel preoccupation : that of the historian who uses images in his practice of history to add to the knowledge of a murky and complex period and that of the historian of cinema, who considers his work as part of the long movement of the history of form and cinema institutions. His theoretical field is the sociology of cinema and the basic problematic of the Annales school that promotes the idea that in history the initiative belongs to the questions rather than to the document. The author advocates writing a “plural history” that has to do with history, economy, sociology and content analysis (semiology, narratology, etc.) all at once.
    • Quand l'oncle Sam ausculte l'Hexagone : les historiens américains et l'histoire de la France - Edward Berenson et Nancy L. Green p. 121 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Malgré l'antipathie pour la France qui marque un tiers de leurs compatriotes, un grand nombre d'historiens américains travaillent sur l'histoire de la France et affichent des sentiments de sympathie envers ce pays. À l'occasion de son 50e anniversaire, la Society for French Historical Studies, qui compte 900 membres, a organisé un grand congrès à la Bibliothèque nationale de France. Toutes les séances de ce congrès étaient « mixtes », comptant presque autant d'historiens français que d'historiens nord-américains, signe de la vitalité d'une branche de l'histoire qui a connu quelques évolutions. De 1955, date du premier colloque de la SFHS, jusqu'aux années 1970, les sujets traités par les historiens nord-américains sont traditionnels (relations franco-américaines, histoire politique). Mais sous l'influence de l'historiographie française, de la politique et de la vie intellectuelle américaines ou d'autres disciplines, les membres de la SFHS renouvelèrent les sujets, méthodes et approches théoriques. Pendant le congrès de juin 2004, les historiens nord-américains ont proposé, comme on pouvait s'y attendre, des communications consacrées à l'histoire du genre et à l'histoire coloniale. L'histoire de la Révolution française a toutefois été bien représentée et l'histoire de la religion a fait un retour remarqué. Un tableau de l'avancée des recherches de part et d'autre de l'Atlantique a ainsi pu être esquissé. Le congrès s'est déroulé dans une ambiance chaleureuse, l'histoire devenant à cette occasion, dixit un membre de la BNF, « une science festive ».
      Despite the antipathy of certain Americans toward France, a large number of American historians specialize in French history and feel a strong sense of attachment to the Hexagon. Their professional organization, the Society for French Historical Studies, has nearly 900 members, and in June 2004, the SFHS celebrated its 50th anniversary by organizing a huge conference in Paris at the Bibliothèque nationale de France. The program included 200 historians from France, 300 from North America and 50 from 16 other countries. Every session of this large conference included both French and American historians. From the formation of the SFHS in 1955 until the early 1970s, the subjects treated by North American historians of France remained traditional (e.g. Franco-American relations and political history). But under the influence of new developments in French historiography, in American intellectual life, and in allied disciplines, members of the SFHS turned to new subjects, methods, and theoretical approaches. At the 2004 conference in Paris, North American historians focused, as expected, on the history of gender and on colonial history. But the French Revolution was also well represented, and the history of religion made a remarkable comeback. A colleague from the BNF summed up the conference as a “festival of scholarship”.
  • Avis de recherches

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  • Images et sons

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