Contenu du sommaire : La nouvelle Ve République
Revue | Pouvoirs |
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Numéro | no 99, 2001/4 |
Titre du numéro | La nouvelle Ve République |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- La nouvelle Ve République - Ardant Philippe, Duhamel Olivier, Guillaume Marc p. 5-6
- Les Ves Républiques monarchie, dyarchie, polyarchie. Variations autour du pouvoir sous la Ve République - Bourmaud Daniel p. 7-17 Le régime de la Ve République présente rétrospectivement un visage à plusieurs faces. La domination de l'institution présidentielle, consacrée par le gaullisme, a donné au régime une configuration monarchique. Les tendances dyarchiques, confirmées par les phases de cohabitation, ont paradoxalement affaibli l'institution présidentielle, tout en amplifiant le mouvement de présidentialisation. Simultanément, le régime a connu un processus de fragmentation du pouvoir à l'origine d'une situation de confusion polyarchique. La Ve République est ainsi devenue opaque, creusant le fossé entre les citoyens et leurs institutions.Retrospectively, the Fifth Republic appears to have had several facets. The domination of the presidential office, established by de Gaulle, has given the regime a monarchical dimension. Paradoxically, the dyarchical tendencies, confirmed during the periods of cohabition, have weakened the presidential office while strengthening a trend toward a presidential regime. At the same time, the regime has experienced a process of fragmentation of power which has created a confused polyarchical situation. The Fifth Republic has thus become more opaque, and a gap has appeared between the citizens and their institutions.
- Les mutations de la Ve République. Ou comment se modifie une Constitution écrite - Beaud Olivier p. 19-31 Le présent article essaie de décrire comment l'on peut, du point de vue du droit constitutionnel, expliquer les mutations de la Ve République. À cette fin, il analyse les deux principales voies de modification de la Constitution– la révision et le « changement constitutionnel » – et tente d'appliquer ces deux modalités théoriques de la modification de la Constitution au cas particulier de la Ve République.The article tries to describe how the mutations of the Fifth Republic may be explained from a constitutional point of view. In order to do this, it analyzes the two main methods used to modify the Constitution – revision or « constitutional change » – and applies these two theoretical modes to the case of the Fifth Republic.
- Le président de la République. Une fonction à la croisée des chemins - Ponthoreau Marie-Claire p. 33-44 À l'heure où certains s'inquiètent des attaques répétées à l'encontre de la fonction présidentielle, ou d'autres, au contraire, sont prêts à abattre la statue du commandeur, cet article cherche d'abord à comprendre le malaise qui touche l'institution présidentielle. Si responsabilité et pouvoir sont inéluctablement liés dans une démocratie constitutionnelle, l'absence de responsabilité politique du président a fini par saper les fondements de son autorité. Après trois cohabitations et l'introduction du quinquennat, la fonction présidentielle n'a été préservée qu'au prix d'une autorité diminuée dont on peut penser qu'elle ne pourra être restaurée qu'à la condition d'un exercice plus démocratique de la fonction.While certain people are concerned by the attacks against the presidential office and others, on the contrary, seem ready to reduce the role of the president, the author tries, first, to understand the problems affecting the presidency today. Because responsibility and power are inescapably linked in a constitutional democracy, the lack of responsibility of the president has undermined the basis of his authority. After three periods of cohabitation and the introduction of the five-year term, the price to pay for the preservation of the presidential office has been its downsized authority which could only be restaured to its former status through a more democratic exercise of the office.
- « Mens sana in corpore insano » : du gouvernement sous la Ve République - Dord Olivier p. 45-58 Le révisionnisme, sous la Ve République, ne concerne pas le gouvernement. Pourtant, derrière l'efficacité d'une fonction qui s'est adaptée (fait majoritaire, Europe, déconcentration), on perçoit l'inadéquation d'un organe avec ces exigences de la démocratie que sont la lisibilité de l'action publique et la responsabilité.Under the Fifth Republic revisionism has not affected the Government. However, behind the efficiency of a function that has adapted itself (majority rule, Europe, deconcentration), one perceives the inadequacy of the Government with regards to such requirements of democracy as the clarity of public policy and responsibility.
- Le Parlement entre déclin et modernité - Vandendriessche Xavier p. 59-70 Caractériser la fonction parlementaire sous la Ve République revient souvent à se lamenter sur son affaiblissement ou son déclin, auquel il ne serait possible de répondre que de manière institutionnelle. Si une telle démarche doit être entreprise, s'agissant notamment de la réforme de l'article 20 de la Constitution aux termes duquel c'est le gouvernement qui « détermine » la politique de la Nation, elle ne saurait suffire à remettre le Parlement au centre de nos institutions politiques. Un profond changement de mentalité doit s'opérer, tant sur l'organisation et le rôle du Sénat qu'en ce qui concerne le statut de l'opposition à l'Assemblée nationale.When trying to describe the role of Parliament under the Fifth Republic, one often ends up complaining about its weakening or its decline which could only be reversed through institutional change. If such an action should be taken, notably through a reform of article 20 of the Constitution according to which it is up to the Government to « determine » the policy of the nation, it would not be sufficient to put the Parliament back in the center of our political institutions. A profound change of mentality would also be necessary, regarding the organization and the role of the Senate as well as the status of the opposition in the National Assembly.
- Le Conseil constitutionnel - Jan Pascal p. 71-86 La montée en puissance du juge constitutionnel à partir des années soixante-dix a contribué fortement à la protection des droits et libertés fondamentaux. Mais la diversité de ses attributions et les limites tenant aux modalités de son intervention le handicapent et freinent le développement de sa jurisprudence. La refonte de ses compétences centrée sur le contrôle des normes conditionne toute réforme de son organisation et de la procédure observée devant lui.The growing role of the constitutional judge since the 1970s has greatly contributed to the protection of fundamental rights and freedoms. However, the diversity of his attributions and the limits stemming from the form of his intervention hamper him and check the development of his jurisprudence. Any reform of his office and of the procedures followed before him will be conditioned by a redefinition of his competence focused on the control of norms.
- Le pari de la justice - Renoux Thierry S. p. 87-100 Ce qui a le plus changé depuis 1958 et marque la distance qui sépare le texte de la Constitution de la Ve République avec la vie politique est sans aucun doute, dans la dernière décennie, la « montée en puissance » de la justice dans la société française. Le socle de toute démocratie d'opinion est par définition l'adhésion des citoyens à une forme de vérité sociale. Cette vérité, au-delà de l'affirmation d'une vérité politique ou légale, exige désormais une vérité judiciaire. Si la place de la justice dans la société a changé, il n'en va pas de même de son statut constitutionnel écrit, c'est-à-dire de la place de la justice dans l'État. Une Constitution, c'est d'abord et avant tout une pratique. Et la réforme peut-être la plus ardue à entreprendre est précisément d'infléchir, de corriger cette pratique. Restaurer la justice dans l'État, c'est rétablir confiance et respect mutuel entre le monde politique et le corps judiciaire. La circonstance que les trois pouvoirs se contrôlent réciproquement n 'est que chose naturelle, sans marquer ni supériorité hiérarchique ni surcroît de légitimité, laquelle a beau être politique ou juridique, élective ou constitutionnelle, les trois pouvoirs remplissant leur office et le peuple, seul souverain incontesté, tranchant en dernier ressort. Tel est ainsi le bel enjeu offert au constitutionnaliste en campagne : faire en sorte, dans un souci de liberté, de ne pas mettre la couronne au greffe, mais aussi faire en sorte, dans un souci d'égalité, de ne soustraire quiconque à la justice.Undoubtedly, the main change since 1958 has been the growing role of the judiciary in French society during the last decade, which underlines the distance between the text of the Constitution of the Fifth Republic and French political life. The basis of a democracy of opinion is, by definition, the adhesion of the citizens to a form of social truth. Beyond the affirmation of a political or legal truth, it now also requires a judicial truth. If the role of the judiciary in society has changed, such is not the case of its written constitutional status, i.e., its place within the state. A Constitution is first and foremost a practice, and the most difficult reform is precisely to reorientate or to correct this practice. To restaure the judiciary within the state means to restaure mutual respect and confidence between the political and the judicial spheres. The fact that the three branches of power mutually control one another is only natural ; it does not indicate any hierarchical superiority or any added legitimacy, be it political or judicial, elective or constitutional ; the three branches of power fullfill their office and the people, as the only undisputed sovereign, decides in the last resort. Such are the stakes for the campaigning constitutionalist : with a concern for liberty, to see to it that he does not give too much power to the judiciary and, with a concern for equality, to see to it that he does not shield anyone from justice.
- Le système des partis sous la Ve République - Perraudeau Éric p. 101-115 La Ve République a voulu rompre avec le système de partis de la première moitié du siècle. Deux évolutions majeures du système politique et institutionnel vont façonner progressivement un nouveau système des partis sous la Ve République et remodeler le paysage politique : l'élection présidentielle au suffrage universel direct et le scrutin majoritaire à deux tours des élections législatives et présidentielle vont travailler le système des partis vers une bipolarisation du paysage politique ; le fait majoritaire et la rationalisation du Parlement assureront quant à eux la stabilité aux équipes gouvernementales. Ce modèle, qui atteint une sorte de perfection à partir de 1974-1978 avec une bipolarisation dédoublée, connaît aujourd'hui une remise en question avec la succession des alternances, des cohabitations et l'éclatement du paysage politique.The Fifth Republic intended to break with the party system as it existed during the first half of the twentieth century. Two major evolutions of the political and institutional system gradually shaped a new party system under the Fifth Republic and reorganized the political landscape : the direct election of the president by universal suffrage and the two-round majority ballot for the presidential and legislative elections led to the emergence of a bipartisan system ; the majority rule and the rationalization of parliament guaranteed the stability of governmental teams. Today this model, which by 1974-1978 had reached a kind of perfection with a two-tier bipartisanship, tends to be put into question due to the succession of political change, of periods of cohabitation and the fragmentation of the political landscape.
- Le rôle du juge constitutionnel dans l'élaboration du droit des collectivités locales - Faure Bertrand p. 117-133 Pour la première fois, la Constitution de la Ve République attache une sanction juridictionnelle au respect des bases constitutionnelles du droit des collectivités locales. Mais en donnant ce rôle fondamental au Conseil constitutionnel, on peut se demander quelle part et quel sens prend son juge dans l'élaboration de la matière. Il faut observer que si le principe de libre administration des collectivités territoriales émerge de ces bases constitutionnelles, il ne les domine pas. Apte à limiter le pouvoir législatif, il ne peut néanmoins produire ses effets et se définir sans référence à l'ordre constitutionnel général, et l'essor actuel de la jurisprudence sur les conséquences de l'indivisibilité de la République et ses corollaires imposent une certaine uniformité législative et en limitent la portée. Mais jusqu'à quel point l'accélération des évolutions, notamment outre-mer, s'accommode-t-elle de cet ordre général ?For the first time, the Constitution of the Fifth Republic has given a jurisdictional sanction to the respect of the constitutional bases of the legal rights of local authorities. But while the Constitutional Council has acquired this fundamental role, one may wonder what part it takes in the elaboration of such rights. It should be noted that while the principle of the free administration of local authorities emerges from these constitutional bases, it is not dominant. While it may limit the legislative branch, it cannot produce its own laws and define itself without reference to the general constitutional order, and the current growth of jurisprudence regarding the consequences of the indivisibility of the Republic and its corollaries imposes a certain legislative uniformity and limits the reach of this principle. However, to what extent does the acceleration of current changes, notably in the overseas territories, adapt itself to this general framework ?
- L'interférence de l'Europe - Marre Béatrice p. 135-150 La Constitution du 5 octobre 1958 ne faisait aucune mention de l'Europe, pourtant née à Rome le 25 mars 1957. Pendant trente-cinq ans, la construction européenne fut l'affaire des diplomates et des fonctionnaires, jusqu'au jour où le déficit démocratique réveilla les Parlements (1979), et où le traité de Maastricht de 1992 rendit incontournable son entrée dans la Constitution. L'Europe conforta en apparence les traits saillants de la Ve République : bicéphalisme de l'exécutif, abaissement du Parlement, centralisme. Mais la réalité est tout autre : le pouvoir est ailleurs en raison de l'extension continue des transferts de compétence, puis de souveraineté, de l'émergence d'une société européenne, et, plus récemment, de l'envahissement de la mondialisation. On peut donc considérer que l'inscription institutionnelle de l'Europe dans la Ve République, tardive et faible, ne rend aucun compte de sa place réelle dans la nouvelle République : l'Europe est aujourd'hui l'avenir de la France dans le monde.The Constitution ratified on October 5, 1958 did not mention Europe, although the latter had been created in Rome on March 25, 1957. For 35 years, the construction of Europe was the domain of diplomats and civil servants, until the democratic deficit awakened the Parliaments (in 1979) and the Treaty of Maastricht, signed in 1992, made its entry into the Constitution inevitable.Apparently, Europe has strengthened the dominant traits of the Fifth Republic : a two-headed executive, a weak parliament, and a great centralization of power. But reality is quite different : power resides elsewhere due to the permanent transfers of competence and of sovereignty, to the emergence of a European society and, more recently, to the growing globalization. One may therefore consider that the belated and limited institutional inscription of Europe in the Fifth Republic does not give a true account of its real place in the new Republic. Today Europe represents the future of France in the world.
- L'électeur - Haegel Florence p. 151-161 La frilosité qu'a manifestée la Ve République dans l'entreprise de transformation du statut d'électeur en vecteur d'intégration politique tout autant que les tendances à la démobilisation perceptibles dans les usages de plus en plus intermittents du droit de vote ne permettent pas de célébrer la marche triomphale de l'électeur. En revanche, les institutions de 1958 ont été le cadre d'un profond renouveau de l'électorat, des orientations des catégories qui le constituent et des modèles d'intelligibilité qui tentent de donner du sens à ses comportements.The coolness expressed by the Fifth Republic toward the idea of making the status of voter a factor of political integration together with the declining mobilisation perceptible in the increasingly sporadic use of the ballot do not lead one to celebrate the triumphant forward march of the voter. On the other hand, the institutions created in 1958 have offered a framework for a profound renewal of the electorate, of its various categories as well as of the models used to try to analyse and interpret its behavior.
- Justice et médias, les nouveaux aristocrates de la Ve - Zemmour Éric p. 163-170 Le principe de la Ve République, c'est le secret. Le principe des médias, c'est la transparence. Le principe du judiciaire, c'est l'aveu. Depuis des années, juges et journalistes se sont alliés pour « faire parler le politique ». Entre le temps court du média, et le temps long du juge, le politique ne maîtrise plus rien. Or, la Ve République reposait sur le tête-à-tête entre le peuple souverain et « l'homme de l'essentiel », président de la République. Depuis dix ans, ont ainsi émergé de nouvelles puissances, nouvelles élites, nouvelles aristocraties. Qui portent une nouvelle idéologie : le politiquement correct. Un seul objectif semble les guider : arracher la réalité du pouvoir au peuple. Et vider de sa substance le suffrage universel, base de la Ve République.Secrecy is the operating principle of the Fifth Republic. The operating principle of the media is openness. The operating principle of the judiciary is confession. For years, judges and journalists have joined forces to « make the politicians talk ». Caught between the short term perspective of the media and the long term perspective of the judge, the politicians no longer control anything. But the Fifth Republic used to be based on a tête-à-tête between the sovereign people and the essential political figure, the president of the Republic. During the last ten years new powers, new elites, new aristocracies have thus emerged, who uphold the new ideology of political correctness. They seem to be guided by a single goal, i.e. to take the reality of power away from the people, and to deprive of its very substance the universal suffrage which is the basis of the Fifth Republic.
Chroniques - « Lettre des États-Unis »
- Faire campagne au centre, gouverner à la marge. L'élection présidentielle américaine 2000 et les premiers pas de l'administration Bush - Jones Bryan D., Larsen Heather A. p. 173-184
- La réforme du financement de la vie politique au Royaume-Uni - Doublet Yves-Marie p. 185-189
Chroniques
- Repères étrangers. (1er avril - 30 juin 2001) - Astié Pierre, Breillat Dominique, Hiscock-Lageot Celine p. 191-197
- Chronique constitutionnelle française. (1er mai - 30 juin 2001) - Avril Pierre, Gicquel Jean p. 199-216