Contenu du sommaire : Gloire et Pouvoir

Revue Sociétés & Représentations Mir@bel
Numéro no 26, 2008
Titre du numéro Gloire et Pouvoir
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Gloire et Pouvoir

    • Présentation - Évelyne Cohen p. 7-12 accès libre
    • La Gloire, le mot et la chose - Catherine Bertho-Lavenir p. 13-21 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Considérés dans la longue durée, les représentations que recouvre le mot « gloire » ainsi que les usages du mot, témoignent d'une évolution sensible. Dans la bible hébraïque, la gloire désigne à la fois la puissance divine et ses manifestations tangibles sur la terre. La christianisation du monde occidental va habituer pour vingt siècles les fidèles à un usage quasi quotidien du mot à travers la liturgie. Mais la gloire est aussi celle du prince. Au XVIIe siècle, la gloire du prince, qui s'allie à celle du soldat vainqueur, devient un concept politique central. En architecture et dans les arts, le mot désigne désormais les formes techniques et esthétiques par lesquelles la gloire est signifiée. À l'âge démocratique, les registres d'usage du mot évoluent. La gloire militaire est désormais l'attribut du simple soldat tandis que caricatures et parodies dénoncent les gloires usurpées des puissants. Les multiples usages du mot dans le registre sportif ou dans celui de la gloire médiatique témoignent de la dévaluation du vocable, que concurrence désormais « célébrité ».
      The meanings and uses of the word glory have been quite different throughout the last two last millenniums in Europe. In the Hebraic bible, one spoke of the “glory” of God, which described both the divine strength and its manifestations on earth. When they became Christians, the inhabitants of Europe went familiar with a word that was present in many parts of everyday religious celebrations. Consequently the representations of the glory (of God or of the saints) were frequent in painting and music. In the French language the word glory came to designate parts of architectural decoration or some theatre technical artefacts. When democracy became the prevailing political system, the word was then referred to new registers. After the Napoleonic wars one could celebrate the glory of men of the rank, even that of the Unknown Soldier. In caricature and parody, authors willingly denounced the so-called glory of prominent people. When used in sports or media the word glory became progressively subject to devaluation, being now on a par with “celebrity” or “fame”.
  • Figures de gloire en politique

    • L'inconscient glorieux : destins collectifs de l'idéal - Paul-Laurent Assoun p. 23-35 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      À sonder le mot « gloire », on entrevoit la complexité de la « chose » qu'il recouvre. C'est pour prendre la mesure de ce signifiant, bien plutôt que pour « psychologiser » la notion, que la psychanalyse est requise. La gloire ajoute en effet au pouvoir la référence à une aura qui, pour être mystérieuse, n'en obéit pas moins à une logique de la représentation que le « savoir de l'inconscient » vient éclairer. On voit se dégager une « mytho-logique » de l'exploit qui soutient la mise en discours de la « gloire » en sa dimension « spéculaire ». Rhétorique de l'éloge qui vient doubler la chose politique. Il s'agit de suivre ici la thématique de l'idéal héroïque, se déployant du théologique au politique. Un élément déterminant est le recours à la notion d'idéal du moi, qui soutient l'institutionalisation et le « faire-un », Janus inconscient à deux visages, dont l'un regarde vers l'individuel et l'autre vers le collectif. Celle-ci converge, par un réseau dont la complexité est ici déconstruite, vers la problématique de la souveraineté. C'est dans la figure du Souverain, dont les figures se réincarnent dans l'histoire, que culmine cette thématique glorieuse. La gloire s'avère ainsi un précieux opérateur pour re-questionner la racine de l'illusion collective qui soutient la réalité, soit la question de l'idéal du moi collectif et de l'objet de l'idéal. Tel est l'envers inconscient de la gloire qui vient montrer un sujet de la représentation activement divisé...
      When probing the word “glory”, one starts to perceive the complexity of the “thing” it covers. Psychoanalysis is required more to assess its significance than to “psychologize” the notion. Glory actually adds to power the reference to an aura that, even though mysterious, obeys a logic of representation which is enlightened by the “knowledge of the unconscious”. A “mytho-logic” emerges from the exploit that supports the putting in words of “glory” in its “specular” dimension. Rhetoric of the praise which comes to line politics. The point here is to follow the thematic system of the heroic ideal, from theology to politics. A determinant factor is the recourse to the notion of the ideal of the ego, supporting the institutionalization and the “making-one”, unconscious Janus with two faces, one looking at the individual, the other one looking at the collective. This converges, through a web whose complexity is deconstructed here, towards the problematic of sovereignty. This glorious thematic system culminates in the figure of the sovereign, whose figures are reincarnated throughout history. Glory thus proves to be a precious operator to re-question the root of the collective illusion that supports reality, that is the question of the ideal of the collective ego and the object of the ideal. Such is the unconscious underside of glory that comes to show a subject of representation actively divided...
    • La gloire au théâtre : À propos du Jules César de Skakespeare sur les scènes françaises - Pascale Goetschel p. 37-56 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Jules César, la pièce de Shakespeare, tirée du récit de Plutarque, pose la question des usages de la gloire et montre les conflits entre différents personnages puissants de la République romaine finissante. Au XXe siècle, la pièce donne lieu à adaptation et réinterprétation. Plusieurs metteurs en scène français, en écho à leurs homologues anglo-saxons, établissent une tradition de jeu autour du pouvoir glorieux, reposant sur le caractère grandiose des décors, la puissance du jeu des acteurs et la présence de la foule. Cette tradition persiste jusqu'à aujourd'hui. Cependant, dans un siècle marqué par deux conflits mondiaux, l'avènement de régimes dictatoriaux ou totalitaires et la montée en puissance de la médiatisation des hommes politiques, les mises en scène se renouvellent. Elles mettent parfois l'accent sur le caractère dérisoire ou banal des situations exposées aux spectateurs. Surtout, elles contribuent à porter des regards neufs sur les questions multiséculaires relatives à la gloire.
      Julius Caesar, Shakespeare's theatre play, derived from Plutarch, raises the issue of the uses of fame and points out conflicts between different powerful characters in the declining Roman Republic. Throughout the 20th century, the play was adapted and reinterpreted. Several French producers, like their Anglo-Saxon counterparts, have built a tradition of staging the glorious power, based on imposing settings, powerful acting and the presence of a crowd. This tradition still exists today. However, in a century marked by two world wars, the advent of dictatorships or totalitarian regimes and the growth of media exposure for politicians, scenographies are renewed. They emphasize the ridicule and banality of the situations presented to the spectators. Above all, they contribute to bring a new look at centuries-old questions related to glory.
    • De la gloire à l'émotion, Louis XIV en costume de sacre par Hyacinthe Rigaud - Myriam Tsikounas p. 57-70 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'objectif de cet article est de comprendre pour quelles raisons le portrait d'apparat de Louis XIV vieux, peint en 1701 par Hyacinthe Rigaud, est devenu si célèbre. La finalité est aussi de découvrir, par une relecture attentive d'écrits disparates – journal de santé, mémoires de courtisans, inventaire après décès... – pourquoi le monarque apprécia tant ce tableau qui offrait de lui une figure composite, plus émouvante que glorieuse.
      This article aims at understanding the reasons why the portrait of king Louis XIV as an old man, wearing a ceremonial dress, painted in 1701 by Hyacinthe Rigaud, became so famous. The aim is also to discover, through careful reading of miscellaneous sources – health reports, courtiers' memoirs, posthumous inventories... – why the king liked that painting so much, when it showed such a composite figure of himself, more moving than glorious.
    • Les fils de Louis-Philippe, ou la gloire du roi des Français - Thibaut Trétout p. 71-82 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La monarchie de Juillet est en proie, de 1830 à 1848, à une crise de représentation de la figure du souverain et donc du pouvoir royal qui rend nécessaire et justifie l'élaboration, à l'initiative du roi des Français, d'une stratégie de la gloire d'un type original, destinée à faire rejaillir sur le trône l'éclat des actions militaires accomplies par les fils de Louis-Philippe. Ce transfert de légitimité s'opère à travers une mise en scène et sur la toile d'épisodes héroïques, selon des critères qui valorisent d'abord le patriotisme et l'engagement des princes, devenus la gloire de leur père.
      The Monarchy of July suffered, from 1830 and 1848, a crisis in the representation of the king's figure, therefore of the royal power, which necessitated and justified the elaboration initiated by king Louis-Philippe of an original strategy of glory, consisting in reflecting the military exploits of the French king's sons on the throne. This transfer of legitimacy operates through painting and staging heroic episodes, putting forward the princes' patriotism and courage, making them their father's glory.
  • Le pouvoir et la gloire

    • Ivan le Terrible, par-delà l'individu et le type - Mikhaïl Iampolski p. 83-95 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La représentation du souverain absolu a posé plusieurs problèmes au théâtre russe du début du XXe siècle. Toutes les tentatives pour trouver une image convaincante ont échoué. La figure du despote a été traitée du point de vue psychologique, qui n'ouvrait pas l'accès au phénomène de souverain se plaçant au dessus des hommes et même de l'humain. Eisenstein, dans son dernier film, Ivan le Terrible, a essayé de dépasser le psychologisme d'interprétation. Il est parti de la conviction que la tragédie de la souveraineté réside dans la dissolution des liens avec la communauté des humains. Inspiré par le surhomme de Nietzsche et par l'idée de la personnalité réflexive exprimée par Kierkegaard, Eisenstein travaille sur la figure du pouvoir, qui n'a pas d'essence humaine mais est composée des traces négatives de la multiplicité. Chez Eisenstein, Ivan est une image composite faite de clichés empruntés au Christ, à Méphistophélès, à Don Quichotte, etc. En même temps, il est marqué par la similitude avec ses antagonistes dans le film. Le souverain apparaît comme un vide, comme un miroir des apparences reflétant des aspects de l'humanité auquel il n'arrive pas à appartenir.
      From the beginning of the 20th century, the Russian theatre struggled with the representation of the absolute sovereign. All attempts to find an appropriate solution failed. Usually the figure of a sovereign was approached from the psychological point of view, but that didn't allow to grasp a figure that places itself above men and even above mankind as such. Eisenstein, in his last film, Ivan the Terrible, made an attempt to overcome the psychological approach. He based his work on the idea that the tragedy of sovereignty consists in the dissolution of links with the community of humans. Eisenstein used Nietzsche's superman and Kierkegaard's “reflexive personality” to experiment with the pure manifestation of power that is devoid of human nature and made from the negative traces of the multiplicity that he is unable to appropriate. Eisenstein's Ivan is a composite image made from clichés borrowed from Christ, Mephistopheles, Don Quixote, etc. At the same time, he bears the marks of the similarity with several antagonists from the film. Made of the pieces of everybody, the sovereign appears as a void, as a many-sided mirror of appearances that reflects aspects of a humanity to which he is unable to belong.
    • Les « Deux Grands » au balcon. Le couple américano-soviétique dans les manuels scolaires français - Brigitte Morand p. 97-114 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cette étude, mêlant approches quantitative et qualitative, porte sur 97 manuels – 60 manuels de terminale et 37 manuels de troisième – des années Soixante à nos jours. Le manuel scolaire, support didactique privilégié, est également un objet culturel complexe, porteur d'un véritable réseau de représentations, qui s'expriment par le « texte-auteur », les documents de référence mais également par la présence aujourd'hui massive de l'iconographie. Parmi les nombreuses images de la Guerre Froide, celles du couple américano-soviétique (les « Deux Grands »), de même que leur mise en scène, révèlent le système de représentations de la Guerre Froide véhiculé par ces manuels. Si les partenaires changent, il s'agit bien toujours du même « couple américano-soviétique ». Au gré des événements et du renouvellement des concepts, l'image de ce couple revêt des dimensions différentes (le conflit idéologique pour Kennedy et Khrouchtchev, le « condominium » pour Nixon et Brejnev, la crainte du « chaos » mondial pour Reagan et Gorbatchev), mais celles-ci coexistent et présentent autant de facettes du même phénomène : le partage du monde, thème central des représentations de la Guerre Froide dans les manuels.
      This study, combining quantitative and qualitative methods, investigates 97 history textbooks : 60 textbooks of “terminale” (end of secondary school) and 37 textbooks of “troisième” (for 14 years old pupils), from the Sixties until today. Textbooks are first a way of didactic transposition, but are also a complex cultural object, carrying a rich network of representations, which are expressed by the texts of the lessons, reference materials, but also by a massive iconography. Among the images of the Cold War, those of the US-Soviet couple, and their presentation, reveal the system of representations of the Cold War carried by textbooks. The partners change, but it is always the same “US-Soviet couple”. As events and concepts change, this couple has different meanings (the ideological conflict for Kennedy and Khrushchev, the “condominium” for Nixon and Brezhnev, the fear of chaos for Reagan and Gorbachev). However, these different meanings coexist, like different facets of the same representation: the division of the World in two parts, the central theme of representations of the Cold War in textbooks.
    • Le Bonaparte d'Abel Gance : un héros pour « apprentis fascistes » ou pour néo-romantiques ? - Dimitri Vezyroglou p. 115-130 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      À sa sortie en 1927, le Napoléon d'Abel Gance, qui retrace le parcours de Bonaparte de la chute de la monarchie à la campagne d'Italie, a suscité de vives réactions : de nombreux critiques ont vu dans ce film une apologie du militarisme et de l'autoritarisme, du héros providentiel venant mettre fin au désordre révolutionnaire ; Léon Moussinac dénonce « un Bonaparte pour apprentis fascistes ». L'étude du film et des archives du cinéaste permet de confronter cette réception publique, dans le contexte particulier de la fin des années Vingt, avec la démarche personnelle de Gance, qui construit sa figure du héros sur la culture romantique dont il est imprégné : Victor Hugo, Stendhal, et surtout Thomas Carlyle et son Culte des héros. Ou comment un décalage culturel peut déboucher sur un malentendu idéologique.
      When released in 1927, Abel Gance's Napoleon, that redraws the route of Bonaparte from the fall of the monarchy until the campaign of Italy, met with animated reactions : numerous critics saw in this film an apology of the militarism and the authoritarianism, the providential hero coming to put an end to the revolutionary disorder ; Léon Moussinac denounces “a Bonaparte for budding fascists”. The study of the film and the archives of the film-maker allows to confront this public reception, in the particular context of the end of the Twenties, with the personal approach of Gance who builds his figure of the hero on his own romantic culture : Victor Hugo, Stendhal, and especially Thomas Carlyle and his Worship of the heroes. Or how a cultural gap can result in an ideological misunderstanding.
  • Monuments de gloire  : durables, éphémères, fragiles

    • Du laurier à l'olivier. La gloire de Louis XV touchée par les Lumières - Daniel Rabreau p. 131-151 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans le cadre d'une histoire culturelle de l'art du XVIIIe siècle, cet article établit une sorte de nuancier des allégories qu'illustrent certaines commandes royales destinées à mettre en scène le portrait de Louis XV sur la place publique. Dans le sillage d'une gloire que le prince partage avec la nation, certaines œuvres privées ont signifié à la cour l'orientation politique des actions du monarque sensible à la pensée des Lumières. Investi des vertus individuelles de père du peuple, guidé par la Tempérance lors de ses exploits militaires, Louis XV, sous l'emprise d'un sentiment humanitaire, a favorisé l'extrême variété de l'expression de son image iconique : sont analysés ici la Gloire chevaleresque, ancestrale et dynastique, les vertus de la Gloire partagée et la Gloire de l'Amour.
      Within a cultural history of art in the 18th century, this article proposes a sort of colour chart of the allegories that illustrate certain royal orders commissioned to promote Louis XV's portrait in the public space. In the wake of a glory shared by the prince and the nation, a few private works presented the court with the political orientations of the king's actions influenced by the “Lights”. Invested with the individual virtues of father of the People, guided by Temperance during his military exploits, Louis XV, driven by humanitarian feelings, encouraged the extreme variety of the expressions of his iconic image : The Chivalrous Glory, ancestral and dynastic, The Virtues of shared Glory and The Glory of Love are analysed here.
    • La gloire des femmes célèbres. Métamorphoses et disparités de la statuaire publique parisienne de 1870 à nos jours - Christel Sniter p. 153-170 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'étude des statues de femmes célèbres érigées à Paris de 1870 à nos jours permet de dessiner les contours d'une gloire spécifiquement féminine par contraste avec les Grands hommes. Quatre types peuvent être mis en valeur, témoignant des contours multiples de la gloire au féminin et plus largement de l'évolution du statut de la commémoration au XXe siècle : Jeanne d'Arc la guerrière dressée ; Edith Cavell l'héroïne martyre exceptionnelle ; les femmes de lettres et artistes assagies et, enfin Dalida, la starisation de la célébrité.
      Statues of famous women erected in Paris from 1870 up to now define a specific concept of feminine glory as opposed to the public celebration of Great men. From a study of the said concept through the gender perspective and within the history of commemorations in the 20th century, emerges a typology in four models : Joan of Arc, the upright warrior; Edith Cavell, the outstanding martyr ; tamer women of letters and artists ; and finally Dalida, exemplifying the starification of fame.
    • David, de la polémique à la gloire. Autour du Saint Roch du Bureau de la Santé de Marseille (1780) - Annie Duprat p. 171-182 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Peintre néo-classique reconnu avant la Révolution au cours de laquelle il a exercé une influence déterminante sur l'avenir des arts en France, David a rencontré de nombreuses difficultés pour accomplir le cursus qui lui permettra d'être officiellement reçu comme peintre par l'Académie royale de peinture en 1783. Durant son séjour à l'Académie de France à Rome, il accepte une commande du Bureau de la Santé de Marseille qui désirait décorer un autel de la chapelle du Lazaret. Le sujet est imposé : il s'agira d'honorer la figure de Saint Roch, protecteur des pestiférés. Achevé au printemps 1780, le Saint Roch intercédant auprès de la Vierge pour la guérison des pestiférés est accueilli de façon contradictoire, entre éloges et critiques violentes qui se focalisent sur le traitement assez froid et distancié des figures religieuses (la Vierge, l'enfant Jésus et Saint Roch) ; à l'inverse, les visages des malades fixent le spectateur symbolisent l'Humanité souffrante abandonnée par la divinité. Après ce tableau, d'autres commandes arrivent ; dès lors, la gloire de David est assurée, même si ses œuvres continuent à susciter de nombreuses réactions, preuves de leur importance.
      A neoclassical painter acknowledged before the Revolution in the course of which he exercised a decisive influence on the future of arts in France, David met numerous difficulties to fulfil the program which will allow him to be officially accepted as a painter by the royal Academy (1783). During his stay in Rome, he accepted an order from the Health office of Marseille who wished to decorate an altar of the chapel of Lazaret. The subject is imposed : it will be a tribute to Saint Roch, protector of plague victims. Completed in the spring of 1780, the painting of Saint Roch pleading Virgin Mary to heal the victims of plague is received with mixed reactions, between praises and violent criticism mostly focused on the rather cold and aloof treatment of the religious figures (Virgin Mary, Jesus Christ and Saint Roch) ; on the opposite, the faces of the sick men staring at the spectator symbolize the suffering of humanity abandoned by God. Following this work, other orders were commissioned ; from then on, David's glory was ensured even if his paintings continued to provoke numerous reactions, which proves their importance.
    • Les arcs de triomphe de l'Antiquité au XXe siècle. Essai sur la postérité artistique et idéologique du monument triomphal - Isabelle Rouge-Ducos p. 183-195 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les arcs de triomphe sont des édifices de la gloire militaire qui servirent aussi à des fins politiques et idéologiques de l'Antiquité jusqu'à nos jours : ce monument a pu glorifier des régimes politiques très différents, sans se laisser enfermer dans une forme architecturale et artistique ni dans une signification politique uniques. La permanence de ce type architectural est à souligner, tout comme la façon dont fonctionne la symbolique d'un tel édifice. En analysant les arcs dès leur origine antique, on peut établir que leur postérité est due à plusieurs critères, présents dès leur création par les Romains : leur origine religieuse sacralise un événement guerrier puis un homme et un régime politique, leur valeur d'usage (le triomphe) en fait un élément éphémère ou durable du spectacle en politique et leur rôle urbain, un art de la monumentalité publique au service de l'État.L'architecture et le style des arcs jouent un rôle dans l'expression de différentes cultures politiques (république, empire, monarchie, tyrannie, etc.) : le plan, les élévations et la disposition urbaine expriment souvent une volonté idéologique et ne sont pas purement gratuites. De nouveaux triomphes viennent compléter l'usage militaire à l'époque médiévale et moderne tandis que leur rôle funéraire s'affirme au XXe siècle.Par une comparaison des arcs de la période contemporaine, on sait que les régimes politiques ont pu utiliser des arcs déjà construits afin de les détourner à leur profit ou bien construire des monuments triomphaux en opposition à d'autres, faisant passer les arcs de l'expression du patriotisme au nationalisme.
      Triumphal arches are buildings of military glory, also used for political purposes and ideologies from antiquity until today : this monument glorified very different systems of government without being confined to a single architectural form or a single political meaning. The permanency of this architectural type is to be stressed, as well as the way its monumental symbolism works. By analyzing arches from their antique origin, we can establish the fact that their posterity is due to several requirements present since they were first created by the Romans : their religious origin marked a military event, then a man and a political system, as sacred, their use-value (triumph) makes them an ephemeral or lasting element of show in politics and their urban function a part of an art based on public monumentality serving the state.The architecture and style of arches play a part in the expression of different political cultures (republic, empire, monarchy, tyranny...) : plan, elevation, urban location often express an ideological will and are not simply unmotivated. New triumphs completed the military use in medieval and modern times, whereas the funeral function was established in the 20th century.By comparing arches of the contemporary period, we know that political systems have used already built arches to derive benefit for themselves or built triumphal monuments in opposition to others, turning arches from the expression of patriotism to nationalism.
    • Gloires et opprobres politiques au musée - Dominique Poulot p. 197-217 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'histoire des expositions d'art et de culture dans les musées est directement liée aux modes, complexes et ambigüs, de représenter la nation dans sa gloire, à des fins pédagogiques. Depuis le début de l'âge des musées, à la fin du XVIIIe siècle, les conservateurs et les historiens ont été de plus en plus conscients du pouvoir de ces représentations, comme des débats auxquels elles pouvaient donner lieu. Cet article examine la poétique et la politique des expositions muséales, à propos des grands hommes, de la victoire et de la défaite, et en particulier de ces deuils nationaux qui, selon Renan, renforcent la nation en face de l'ennemi. La fin du XXe siècle connaît une crise à l'égard de la représentation de la gloire : s'agit-il de glorification authentique, ou bien de l'illustration d'une réalité historique atroce ? Quelques nouveaux musées consacrés à la Seconde Guerre mondiale mettent l'accent sur les souffrances collectives, et adoptent un propos quasi irénique à ce sujet. En revanche, leurs critiques soutiennent que les musées doivent toujours glorifier des événements et des personnages. Ils doivent même susciter la honte chez leurs visiteurs pour certains aspects du patrimoine français. Parallèlement, les musées ne célèbrent plus unanimement la gloire républicaine – comme le prouve la construction d'un mémorial à l'anti-révolution en Vendée. Les musées ont toujours été pris dans la tension entre exposer une auto-représentation collective et la connaissance intime des échecs de leur communauté : maintenant, ils peuvent exposer la honte aussi bien que la gloire, dans la mesure où les deux peuvent faire figure d'outils politiques au service de la grandeur du pays. La gloire ou l'opprobre d'une communauté telle qu'elle est donnée à voir au musée peut être utilisée pour souligner l'autorité de la tradition, susciter diverses émotions chez les spectateurs, et exposer ces émotions aux conflits de valeurs antagonistes. La gloire et l'opprobre peuvent être considérées comme des processus sociaux complexes au cours desquels la valeur des événements et des personnes est peu à peu fixée, pour faire sens symboliquement et socialement.
      The history of displaying culture and art in museums is directly linked to the complexities and ambiguities of representing the nation in glory, for a pedagogical purpose. Since the beginning of the era of museums, at the end of the 18th century, curators and historians have become increasingly aware of the power and of the contested nature of these representations as well. This paper explores the poetics and politics of museum display, about great political men, victory and defeat, and especially the national humiliations which can build a new citizenship, as Renan said, against the enemy. There is, at the end of the 20th century, a crisis of cultural representation of glory – is it an authentic glorification or the illustration of a brutal historical reality ? Some new museums about WWII put the stress on the collective sufferings of the country, and take a kind of irenic turn ; but, on the other hand, some critics argue that museums must always glorify events and people. They must even make their visitors feel ashamed in front of some moments of the French heritage. Even the republican glory is no longer unanimously celebrated in French museums, with for example the building of a memorial of the anti-revolution in Vendée. The museums are always caught in the tension between the display of a collective self-presentation, and the embarrassment of a self-knowledge of failures : but now they may represent shames as well as images of glory, as a means of political skill to enhance the present greatness of the country. The glory or the shame of a community as displayed in museums can be used to emphasise the authority of tradition, invoke in people various emotions, and expose these emotions to the contest of values. Glory and humiliation may be regarded as complex social processes in which the value of events and people is determined by developing a broad set of agreements concerning symbolic and social meanings.
  • Lieux et Ressources

  • Regards croisés

  • Trames

  • Retours sur

  • Actualités

  • Grand entretien

  • Hors cadre

    • L'esthétique de l'insu, ou la politique de l'écriture historiographique dans Fiorile - Daryl Lee p. 271-288 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Avec la sortie du film Fiorile (1993), Paolo et Vittorio Taviani construisent un récit de l'Italie moderne à travers l'histoire d'une famille aisée en Toscane. Tout en imaginant des chapitres-clefs de l'Europe moderne entre les guerres napoléoniennes jusqu'au moment du traité de Maastricht –, dont tous les deux marquent l'ouverture des frontières aux immigrés, au commerce et aux idées – le récit laisse catégoriquement le Risorgimento hors-cadre. Cette étude établit le lien entre la mise en scène de l'effondrement d'une écriture historique qui aurait voulu réhabiliter la dissémination du républicanisme jacobin comme point d'origine de l'Italie précédant le Risorgimento, et une série de plans dont le cadre exclut – de même que l'historiographie italienne – la présence d'éléments qui organise déjà et à notre insu le présent.
      Paolo and Vittorio Taviani's film Fiorile (1993) presents a fragmented history of modern Italy through the story of a privileged Tuscan family. While the film bookends that history with the Napoleonic occupation of Italy and (implicitly) the Maastricht Treaty – both of which are characterized by the opening of borders to people, ideas and commerce – it nevertheless leaves the Risorgimento off-screen. This study links a series of scenes in which what is off-screen structures the present to the film's preoccupation with the tragic failure of historical writing that would have rehabilitated the spread of jacobine republicanism as a point of origin for Italy's democratization well before the Risorgimento, and a series of shots in which the in-frame rules out – like the Italian historiography – the presence of elements already organizing, unbeknownst to us, the present.