Contenu du sommaire : Justice pénale internationale : les magistrats sauvent l'honneur

Revue Confluences Méditerranée Mir@bel
Numéro no 126, automne 2023
Titre du numéro Justice pénale internationale : les magistrats sauvent l'honneur
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  • Dossier Justice pénale internationale : les magistrats sauvent l'honneur

    • La justice pénale internationale au Moyen-Orient : sursaut pérenne ou sélectivité des efforts étatiques ? - Leïla Bourguiba p. 9-12 accès réservé
    • Justice et raison d'État ou la longue histoire de la pusillanimité des politiques - Jean-Paul Chagnollaud p. 13-30 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Pendant très longtemps, les crimes les plus terribles ont été commis dans d'innombrables conflits sans que leurs auteurs ne soient jamais poursuivis ni même inquiétés. La paix devait l'emporter sur la justice, à n'importe quel prix et donc aussi à celui de l'impunité des criminels – tel était le principe qui prévalait. À l'exception du procès de Nuremberg (et celui de Tokyo) en 1945-1946, ce n'est qu'après la fin de la guerre froide, dans les années 1990, que la justice pénale internationale a enfin pu commencer à s'affirmer. Le chemin à parcourir s'annonce toutefois incertain, particulièrement dans un monde qui voit revenir de toute part des rapports de puissance dans lesquels la lutte contre l'impunité risque d'être marginalisée – sinon étouffée – au nom de la raison d'État.
      For a very long time, the most terrible crimes were committed in countless conflicts without the perpetrators ever being prosecuted or even investigated. Peace had to prevail over justice, at any price, and therefore also at the price of impunity for the criminals - such was the prevailing principle. With the exception of the Nuremberg (and Tokyo) trials in 1945-1946, it was only after the end of the Cold War, in the 1990s, that international criminal justice finally began to assert itself. The road ahead looks uncertain, however, particularly in a world where power relations are returning on all sides, and where the fight against impunity risks being marginalised – if not stifled – in the name of the raison d'état.
    • La Conférence de Rome, entre souveraineté et lutte contre l'impunité - Gilbert Bitti p. 31-41 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Si l'année 2022 marquait le vingtième anniversaire de l'entrée en vigueur du Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), c'est bien l'invasion du territoire ukrainien par les forces armées russes qui propulsera de nouveau les questions de justice pénale internationale sur le devant de la scène médiatique et à une bonne place dans l'agenda d'un certain nombre de pays. C'est dans ces contextes d'effervescence qu'il revient de rappeler l'histoire de la justice pénale internationale. Une histoire qui est longue et compliquée. La complexité des négociations ayant conduit à la création de la CPI sont symptomatiques des points de tension entre désir de lutter contre l'impunité et préservation des souverainetés étatiques. Malgré ces difficultés passées mais aussi actuelles et certainement à venir, la CPI existe et est permanente.
      If 2022 marked the twentieth anniversary of the entry into force of the Rome Statute of International Criminal Court (ICC), it was the invasion of the Ukrainian territory by the Russian armed forces that propelled international criminal justice issues back to the forefront of the media and onto the agenda of a number of countries. It is against this effervescent backdrop that it is worth recalling the history of international criminal justice, a long and complicated history. The complexity of the negotiations that led to the creation of the ICC are symptomatic of the tension points between the desire to combat impunity and the preservation of State sovereignty. Despite these difficulties, both past and present, and certainly in the future, the ICC exists and is permanent.
    • La coopération des États avec le Bureau du Procureur de la CPI : un avant et un après l'Ukraine ? - Pascal Turlan p. 43-60 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Avec l'invasion de l'Ukraine par la Russie le 24 février 2022, une bascule s'est opérée sur les plans géostratégique, politique et diplomatique, mais aussi dans le domaine de la justice pénale internationale. Le sursaut constaté dans ce domaine ne concerne pas tant le travail des institutions judiciaires, dont le niveau d'engagement et la charge de travail étaient déjà très élevés, mais bien la considération qui leur est accordée par les États et l'implication des partenaires de la CPI et de son Bureau du Procureur. Tant par le soutien public affirmé et les ressources allouées que par les efforts d'entraide pénale effectués, le dynamisme renouvelé de la coopération judiciaire internationale rappelle l'importance et l'utilité du système de Rome. Reste à savoir comment passer d'un sursaut ponctuel et circonstanciel à une consolidation au-delà d'une situation donnée.
      Russia's invasion of Ukraine on February 24th, 2022 marked a turning point in geostrategic, political and diplomatic terms, but also in the field of international criminal justice. The upsurge in this area does not so much concern the work of the judicial institutions, whose level of commitment and workload were already very high, but rather the consideration given to them by States and the involvement of the partners of the ICC and its Office of the Prosecutor. The renewed dynamism of international judicial cooperation is a reminder of the importance and usefulness of the Rome system, both in terms of the public support it receives and the resources it allocates, and in terms of the efforts it makes to provide mutual assistance in criminal matters. It remains to be seen how to move from a one-off, circumstantial surge to consolidation beyond a given situation.
    • Quelles poursuites internationales des crimes commis en Ukraine ? - Rafaëlle Maison p. 61-74 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Loin d'un engouement « international » pour la poursuite des crimes commis en Ukraine, nous sommes en présence d'une forte pression occidentale. Cette pression soulève différents problèmes. L'insistance européenne et états-unienne risque d'alimenter la réserve d'États non-occidentaux vis-à-vis de la Cour pénale internationale et fait craindre une fragilisation des enquêtes qu'elle mène sur d'autres situations. La licéité des poursuites pour crimes de guerre visant le Président russe récemment annoncées par la Cour pénale internationale est incertaine dès lors, notamment, que le conflit en Ukraine n'a pas fait l'objet d'un renvoi par le Conseil de sécurité des Nations Unies, qu'il concerne deux États non-parties au Statut de la Cour, et que le travail de celle-ci paraît grandement influencé par un troisième État non-partie, les États-Unis. Enfin, l'impossibilité pour la juridiction pénale internationale de se saisir du crime d'agression, dont la définition est d'ailleurs très stricte au regard des précédents de Nuremberg et de Tokyo, conduit les États occidentaux à contourner la Cour en proposant la création d'un Tribunal ad hoc, au risque de modifier l'état du droit international tel que consacré dans la Charte des Nations Unies.
      Far from an "international" enthusiasm for prosecuting the crimes committed in Ukraine, we are witnessing a strong Western pressure. This pressure raises a number of problems. The insistence of Europe and the United States risks fueling reservations about the International Criminal Court on the part of non-Western States and raises fears that the Court's investigations into other situations will be undermined. The legality of the war crimes prosecutions against the Russian President recently announced by the International Criminal Court is questionable, particularly given that the conflict in Ukraine has not been referred by the United Nations Security Council, that it involves two States that are not parties to the Court's Statute, and that the Court's work appears to be greatly influenced by a third non-party State, the United States. Lastly, the impossibility for the international criminal court to deal with the crime of aggression, which is, moreover, very strictly defined by the Nuremberg and Tokyo precedents, has led the Western States to bypass the Court by proposing the creation of an ad hoc Tribunal, at the risk of changing the state of international law as enshrined in the United Nations Charter.
    • La montée en puissance de la CPI - Bruno Cotte, Leïla Bourguiba p. 75-85 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Ancien juge français à la Cour pénale internationale (CPI) et Président honoraire de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, Bruno Cotte a occupé les plus hautes fonctions judiciaires et pénales au niveau national et international. Il est aujourd'hui toujours aussi actif et mobilisé sur les questions de justice pénale internationale, apportant son éclairage et son expertise dans différents fora. Dans un entretien accordé à la revue Confluences Méditerranée, nous revenons avec lui sur la mobilisation extraordinaire de la CPI et de juridictions nationales dans les enquêtes et poursuites des crimes commis dans le conflit russo-ukrainien. Une mobilisation qui soulève des questions quant à la capacité d'en poursuivre les plus hauts responsables, mais aussi quant aux capacités ou volontés de répliquer les mêmes efforts s'agissant d'autres conflits.
      Bruno Cotte is a former French judge at the International Criminal Court (ICC) and Honorary President of the Criminal Division of the Cour de Cassation. He has held the highest judicial and criminal positions at both national and international level. Today, he remains as active as ever on issues of international criminal justice, contributing through his insights and expertise in a variety of forums. In an interview with Confluences Méditerranée, we touch upon the extraordinary involvement of the ICC and national courts in the investigation and prosecution of crimes committed in the Russian-Ukrainian conflict. This mobilisation raises questions about the capacity to prosecute those most responsible, but also about the capacity or willingness to replicate the same efforts in other conflicts.
    • La Syrie, victime du double-standard de la justice pénale internationale ? - Joël Hubrecht p. 87-98 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le décalage entre la forte mobilisation en faveur des Ukrainiens et l'abandon des populations syriennes avalise la critique sur l'inégalité de l'application du droit international. Cet article analyse les divergences et les enjeux communs entre les deux situations puis décrypte les véritables ressorts de ce « deux poids-deux mesures » sur lequel joue, paradoxalement, la propagande russe alors que Poutine conduit dans ces deux pays une même politique criminelle. A contrario, les sanctions occidentales à l'encontre du régime syrien combinées à la sous-traitance régionale d'une « paix de basse intensité » ne constitue pas une politique cohérente. La justice internationale n'est pas une simple option parmi d'autres et son avenir ne se joue pas seulement à Kyiv ou à Moscou, mais aussi à Damas.
      The gap between the strong mobilization in favor of the Ukrainians and the abandonment of the Syrian populations reinforces the criticism of the unequal application of international law. This article analyzes the differences and the common issues between the two situations and then decrypt the true factors of this "double standard" on which Russian propaganda plays, paradoxically, while Putin pursues the same criminal policy in these two countries. Conversely, Western sanctions against the Syrian regime combined with the acceptance of a regional "low-intensity peace" does not constitute a coherent policy. International justice is not just one option among others and its future is not only being played out in Kyiv or Moscow, but also in Damascus.
    • La France, possible havre d'impunité pour criminels syriens ? Un sauvetage in extremis de la compétence universelle des tribunaux français - Leïla Bourguiba p. 99-115 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le développement de la justice pénale internationale est sans aucun doute une évolution majeure du droit international. La Cour pénale internationale en est l'une des figures emblématiques. Son incapacité à se saisir du drame syrien, pour des raisons juridiques, a mis en lumière le travail effectué par d'autres acteurs, notamment les juridictions pénales nationales exerçant leur compétence universelle. Si l'Allemagne a pu mener à terme plusieurs procès sur ce fondement, les juridictions françaises, travaillant pourtant étroitement avec leurs homologues allemands, sont à la peine. Pourquoi ? L'arrêt dit « Chaban » rendu en novembre 2021 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation a mis en lumière le fossé abyssal qui séparait les incantations à la lutte contre l'impunité de la diplomatie française et le carcan procédural national paralysant tout exercice de la compétence universelle. Si l'Assemblée plénière, formation solennelle de la Cour de cassation, a procédé à un sauvetage in extremis de la compétence universelle des tribunaux français, il faut constamment demeurer vigilant pour en assurer l'effectivité.
      The development of international criminal justice is undoubtedly a major development in international law. The International Criminal Court is one of its emblematic figures. Its inability to deal with the Syrian tragedy, for legal reasons, has highlighted the work carried out by other actors, in particular national criminal courts exercising their universal jurisdiction. While Germany has been able to bring several trials to a successful conclusion on this basis, the French courts, despite working closely with their German counterparts, are struggling. Why is this so? The “Chaban” ruling handed down in November 2021 by the Criminal Division of the Court of Cassation highlighted the abyssal gulf between French diplomacy's incantations to fight impunity and the national procedural straitjacket that paralyses any exercise of universal jurisdiction. Although the plenary session of the Court of Cassation, a solemn composition, saved the universal jurisdiction of French courts in extremis, we must remain constantly vigilant to ensure its effectiveness.
    • International Justice in Domestic Courts: Lessons Learned from German Courts and Warning Signs - Fritz Streiff p. 117-123 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le moment est bien choisi pour réfléchir à notre situation en matière de compétence universelle. La plus haute juridiction du système judiciaire français, la Cour de cassation, a décidé le 12 mai 2023 que les affaires d'atrocités internationales pouvaient continuer à être jugées par les tribunaux français sur la base du principe de la compétence universelle. Cette question s'est posée après que la Cour a décidé, en novembre 2021, qu'un suspect syrien ne pouvait être jugé pour « complicité de crimes contre l'humanité » au motif que la loi syrienne ne prévoit pas cette incrimination exacte. Cette décision a été un désastre pour les acteurs du dossier syrien et, plus généralement, pour tous ceux qui sont engagés dans la lutte contre l'impunité. La Cour de cassation vient de clarifier cette interprétation et de revenir sur sa décision, au grand soulagement des acteurs de la société civile impliqués dans le dossier, au premier rang desquels les collègues syriens.
      This is a fitting moment to reflect on where we stand with universal jurisdiction. The highest court in the French judiciary, the Court de Cassation, decided on 12 May 2023 that international atrocity cases can continue to be tried in French courts based on the principle of universal jurisdiction. This question arose after the court had decided in November 2021 that a Syrian suspect could not be tried for “complicity in crimes against humanity” on the grounds that Syrian law does not provide for this exact incrimination. This decision was a disaster for those involved in the Syria file and, more generally, everyone engaged in the fight against impunity. Since then, and until very recently, France has been at great risk of actually becoming a safe haven for war criminals. The Court de Cassation now clarified this interpretation and in effect reversed its earlier decision, to the huge relief of civil society actors involved in the case, first and foremost Syrian colleagues.2
    • Le Mécanisme international, impartial et indépendant pour la Syrie et la coopération des États : témoignage de sa cheffe - Catherine Marchi-Uhel p. 125-134 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Contournant les blocages du Conseil de sécurité, empêchant la saisine de la Cour pénale internationale, l'Assemblée générale des Nations Unies crée en décembre 2016 un mécanisme tout à fait inédit : le Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 et d'aider à en juger les responsables. Sa cheffe revient sur les circonstances de sa création et sa place dans le champ de la justice pénale internationale avec pour toile ce dialogue constant avec les Etats.
      Bypassing the Security Council's blockages, preventing the referral to the ICC of the situation in Syria, the United Nations General Assembly created in December 2016 a completely new mechanism: the International, Impartial and Independent Mechanism, to facilitate investigations into the most serious violations of international law committed in the Syrian Arab Republic since March 2011, and to help bring to justice those responsible. The head of the Mechanism discusses the circumstances surrounding its creation and its place in the field of international criminal justice, against a backdrop of ongoing dialogue with States.
    • The Situation in Palestine: Seeking for Justice, a Chimera? - Triestino Mariniello p. 135-153 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      La situation en Palestine est l'un des contextes les plus documentés en matière de violations graves du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme. Ces violations peuvent non seulement mettre en cause la responsabilité d'Israël en tant qu'État (devant la Cour internationale de justice), mais aussi la responsabilité pénale des individus puisqu'elles peuvent constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité (devant la Cour pénale internationale ou les juridictions nationales). Le présent document examine les mécanismes de responsabilité disponibles et réalistes dans le contexte israélo-palestinien. Il explore l'absence de recherche de responsabilité pour les crimes internationaux présumés au niveau national, devant les tribunaux israéliens et palestiniens, et analyse de manière critique la réticence de la Cour pénale internationale à mettre en place une enquête efficace sur la situation en Palestine.
      The Palestine situation is one of the most documented contexts for the serious violations of international humanitarian law and international human rights law. These violations may not only question the responsibility of Israel as a State (before the International Court of Justice), but also the criminal responsibility of individuals since they may constitute war crimes and crimes against humanity (before the International Criminal Court or national jurisdictions). This paper reflects on the available and realistic accountability mechanisms in the Israeli-Palestinian setting. It explores the lack of accountability for alleged international crimes at a national level, before both Israeli and Palestinian courts, and critically analyzes the reluctance of the International Criminal Court to put in place an effective investigation into the Palestine situation.
    • De l'Ukraine au Moyen-Orient : Un sursaut de la justice pénale internationale ? - Patrick Baudouin p. 155-161 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Patrick Baudouin propose une synthèse des principaux points discutés par les intervenants du colloque organisé par l'iReMMO au Sénat en février 2023, en rappelant les différentes formes de justice pénale internationale comme la CPI, les tribunaux ad hoc et les procédures relevant de la compétence universelle. Il insiste tout particulièrement sur les contradictions de la France qui se refuse à faire sauter les « verrous » de la loi du 9 août 2010 qui limitent considérablement les possibilités, pour les tribunaux français, de poursuivre les auteurs de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide. Il termine en affirmant sa détermination à se battre pour que la prise en compte immédiate de la justice dans la guerre en Ukraine le soit également dans d'autres conflits « partout où prévaut l'impunité, et ce sans aucune sélectivité ».
      Patrick Baudouin provides a summary of the main points discussed by the speakers at the symposium organised by iReMMO at the French Senate in February 2023, outlining the various forms of international criminal justice, such as the ICC, ad hoc tribunals and universal jurisdiction procedures. He draws particular attention to the contradictions in France's refusal to lift the "locks" of the August 9th, 2010, law, which severely restrict the ability of French courts to prosecute war crimes, crimes against humanity, and genocide. He concludes by asserting his determination to fight for the immediate recognition of justice in the Ukrainian war to be extended to other conflicts “wherever impunity prevails, and without any selectivity”.
  • Variations

    • Les angles morts de la politique de l'eau au Maroc - François Molle, Pierre-Louis Mayaux p. 165-184 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Le Maroc est souvent érigé en exemple international pour sa gestion des ressources en eau. Après une période d'investissement dans les barrages et les périmètres irrigués publics, c'est l'intensification de l'agriculture et le recours aux eaux souterraines qui ont pris les devants. Mais le pays reste soumis à des pénuries d'eau inquiétantes, qui ont pris une tournure particulièrement sévère ces dernières années. Cet article se penche sur quatre composantes fondamentales de la politique de l'eau marocaine – l'augmentation de l'offre par le stockage ; le développement de l'irrigation ; sa modernisation ; la surexploitation des eaux souterraines – et en montre les angles morts. Il questionne l'encouragement à intensifier toujours plus l'agriculture irriguée dans un contexte climatique défavorable et incertain, ainsi que la durabilité des alliances sociales cristallisées autour de ce modèle.
      Morocco is often held up globally as an example of sound water resources management. After a period of investment in dams and public irrigation schemes, the intensification of agriculture and the use of groundwater have taken center stage. But the country is still subject to worrying water shortages, which have become particularly severe in recent years. This article looks at four key components of Moroccan water policy - increasing supply through storage; developing irrigation; modernizing irrigation; and the over-exploitation of groundwater - and highlights their blind spots. It questions the incentive to further intensify irrigated agriculture in an unfavorable and uncertain climatic context, as well as the sustainability of the social alliances that have crystallized around this model.
    • Les associations de jeunesse, vectrices de diffusion des idées turquistes entre la Turquie et l'Azerbaïdjan - Aurélie Stern p. 185-197 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Avec l'effondrement de l'Union soviétique, les habitants de la République de Turquie ont pu renouer contact avec ceux des autres républiques turciques que sont l'Azerbaïdjan, le Kazakhstan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan, et le Kirghizstan. Le monde découvrit l'expression de « monde turc », allant « de l'Adriatique jusqu'à la grande muraille de Chine » selon la formule de l'ancien président turc Süleyman Demirel. Ce fut une période d'effervescence pour les nationalistes (pan) turquistes ayant pour projet politique de fonder une union turcique sur la base d'éléments culturels, éducatifs, et économiques. Mais l'État n'est pas l'unique promoteur d'une meilleure inclusion du monde turc, il existe aussi une frange de l'extrême droite qui considère la turcité au sens large comme le pilier central de son idéologie politique. L'une de ses modalités d'organisation sont les associations de jeunesse turquistes, structures qui regroupent de jeunes nationalistes qui ont grandi avec internet.
      With the collapse of the Soviet Union, the people of the Republic of Turkey were able to reconnect with those of the other Turkic republics of Azerbaijan, Kazakhstan, Uzbekistan, Turkmenistan, and Kyrgyzstan. The world discovered the term "Turkic world", stretching "from the Adriatic to the Great Wall of China", in the words of former Turkish president Süleyman Demirel. This was a period of excitement for (pan) Turkist nationalists whose political project was to found a Turkic union on the basis of cultural, educational and economic elements. But the State is not the only promoter of a more inclusive Turkic world, there is also a fringe of the far right that considers Turkishness in the broadest sense as the central pillar of its political ideology. One of the ways in which it is organised is through Turkist youth associations, structures that bring together young nationalists who have grown up with the internet.
  • Notes de lecture