Contenu du sommaire : La responsabilité collective dans la presse

Revue Questions de communication Mir@bel
Numéro no 13, 2008
Titre du numéro La responsabilité collective dans la presse
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier. La responsabilité collective dans la presse

    • La responsabilité collective dans la presse - Alain Rabatel, Roselyne Koren p. 7-24 accès libre
    • « Éthique de conviction » et/ou « éthique de responsabilité » - Roselyne Koren p. 25-45 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les crises de la vie politique et sociale actuelle placent les citoyens et les sociétés civiles, à l'échelle globale, nationale et individuelle, face à des dilemmes éthiques. Il s'agit alors de s'interroger sur les tenants et aboutissants de la responsabilité collective et de choisir entre deux types essentiels de prise de position : l'invocation de l'impuissance et/ou la recherche passéiste de coupables ; l'acte d'assumer ses responsabilités et de chercher des modes innovateurs de résolution des crises, résolument tournés vers l'avenir. C'est à l'aune de l'action politique ou de l'inaction, de l'autocritique ou de la critique des autres et, à rebours, du déjà-pensé que la responsabilité collective devrait être explorée. Cette contribution a pour fin d'analyser le discours polyphonique de trois journaux de la presse écrite française nationale sur la responsabilité collective. Le principe de sélection des articles y est orienté par une double visée : démontrer qu'ils confirment de façon saisissante les positions d'Hannah Arendt et de Max Weber sur la question ; contribuer à la conceptualisation des avatars actuels de la notion.
      Members of civil societies are facing, be it nationally or individually, ethical dilemmas imposed by the crises of political and social life. The crises generate the emergence of collective responsibility and makes it imperative to choose between two essential types of position taking: 1) the invocation of impotence, turning to the past in search for the guilty; 2) the act of assuming responsibility and searching for innovative modes in order to resolve crises, facing the future. Collective responsibility should be measured against political action and inaction, against self-criticizm, criticizm in general and preconceived notions and ideas. This paper aims to analyze the polyphonic discourse of three actual French newspapers concerning collective responsibility. Two goals guided the selection of the articles: 1) to demonstrate that they remarkably confirm the theses of Hanah Arendt and Max Weber concerning the question. 2) to contribute to the conceptualization of the actual ins and outs of the notion.
    • Pour une conception ethique des debats politiques dans les medias - Alain Rabatel p. 47-69 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La responsabilité collective - distincte de la culpabilité collective -correspond à la façon dont un individu ou un groupe prend en compte les problèmes d'une communauté qui aspire à « faire société ». Cette notion est interrogée du point de vue des journalistes et des responsables politiques, en tant qu'ils sont des médiateurs censés idéalement donner une forme argumentée aux conflits, sur la scène publique. Cette interrogation sera menée à propos du deuxième débat entre prétendants à la candidature socialiste lors de la pré-campagne des élections présidentielles françaises. Elle mettra en avant l'insuffisance des approches déontologiques journalistiques avec leurs rituels d'objectivité, et montrera que ces médiateurs sont profondément responsables de leurs discours et de leur mise en scène, mais aussi du choix ou du non-choix d'exprimer les points de vue des différentes fractions du corps social, devant le corps social tout entier, bref, dans la façon dont ils portent la parole et témoignent dans le but de faire émerger un « nous » refondé au terme de la représentation des conflits.
      Collective responsibility - different from collective guilt - corresponds to the way an individual or group takes into account the problems of a community that aspires to form a society. This notion is questioned from the point of view of journalists and political representatives, in so far as they are mediators who are supposed ideally to present conflicts on the public scene in the form of arguments. The questioning will concern the debate between the socialist candidates in the primaries running up to the French presidential elections. It will bring out the shortcomings in the codes of practice governing journalism and its rituals of objectivity. It will show that these mediators are deeply responsible for their discourse and presentation of events, but also for their choice to express or not the points of view of different sections of society, before society as a whole, and in the way they spread the word and bear witness in order to bring to the surface a reestablished "we" as a resuit of their representation of these conflicts.
    • Du « public journalism » au « journalisme citoyen » - Jean-François Tétu p. 71-88 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La responsabilité sociale des médias et la responsabilité collective des journalistes apparaissent progressivement à la fin du XXe siècle, après plusieurs siècles de revendication de la liberté d'expression et d'impression. Elle est consécutive à l'affirmation du droit du public à l'information. Le public journalism, mouvement américain des années 90, surtout ancré dans la presse locale, en est une illustration : il part de la crise de confiance du lectorat et des journalistes eux-mêmes, et propose une forme de journalisme fondé sur le consensus. Mais ce consensus risque de devenir un communautarisme qui éloigne le journalisme de la distance et de l'impartialité qui sont ses principes constitutifs. Aujourd'hui, la revendication « citoyenne » bascule des journalistes vers les lecteurs, d'où le développement des current event blogs.
      The social responsibility of the media and the collective responsibility of the journalists appears gradually at the end of the 20th century, after several centuries of demand for freedom of expression and printing. It is the result of the assertion of the right of information for the public: “public journalism”. The American movement of the 1990s, especially anchored in the local press, is an illustration of this phenomenon: it leaves the crisis of confidence of readership and journalists, and proposes a form of journalism based on consensus. But this consensus might become a community of interest of the majority, which takes away the journalism of distance and impartiality which are its constituent principles. Today the wish for a “civic journalism” tips over journalists towards the readers, hence the development of current event blogs.
    • Une exception d'irresponsabilité ? - Gilles Bastin p. 89-107 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'absence de lieux véritables de la discussion déontologique dans la profession journalistique en France conduit souvent ce débat à se faire sur un mode répétitif dans les médias eux-mêmes. L'affaire dite d'Outreau fut l'occasion d'un tel débat au début des années 2000. Dans cette contribution, son analyse est menée en deux temps. Le retour sur le traitement médiatique de l'affaire elle-même permet d'abord d'identifier un phénomène d'asymétrie entre les logiques d'anonymisation de la parole journalistique qui sont au coeur des comptes rendus médiatiques de l'enquête judiciaire et, a contrario, la très forte nomination et responsabilisation, dans ces mêmes articles, des personnes suspectées. Une analyse de cooccurrences menée sur un corpus d'articles traitant des rapports entre les médias et l'affaire montre ensuite que deux usages sémantiques permettent de garantir aux journalistes une forme d'exception d'irresponsabilité dans le fonctionnement de l'affaire : ceux des termes « médias » et « emballement » qui fonctionnent comme deux écrans interdisant toute imputation individuelle de responsabilité d'un côté et diluant celle-ci dans une psychologie mécanique et archaïque de l'autre.
      Due to a lack of institutionalized ethical discussion within the journalistic profession in France, debates on that matter often occur, in a repetitive manner, in the media themselves. The Outreau Affair caused such a debate at the beginning of the years 2000. This paper aims at better understanding such processes by providing an analysis of the media coverage of this affair using textual statistics on two different sets of stories. We are able to state firstly that, in stories about the affair itself, journalistic anonymity strongly contrasts with the tendency to bypass the law by giving the names of the people involved and secondly that, in stories about the role played by journalists during the affair, two very convenient semantic practices allow journalists not to face their own responsibility: the use of “media” and “media frenzy” that refer to very vague and both mechanical and psychological processes instead of precisely trying to elucidate individual journalists' responsibilities.
    • Responsabilité journalistique et responsabilité politique - Ruth Amossy p. 109-127 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      À travers une analyse de l'argumentation dans le discours, cette contribution explore le sens que revêt la notion de responsabilité de la presse quand elle traite d'une crise grave de la responsabilité politique. Elle montre comment le quotidien de gauche Ha-aretz a présenté le rapport intermédiaire de la Commission Winograd sur l'irresponsabilité des dirigeants israéliens dans la Deuxième guerre du Liban. À travers le traitement du discours rapporté et la construction d'un raisonnement syllogistique univoque, le journal s'engage dans une polémique avec le gouvernement qu'il somme de démissionner Il remplit ainsi la mission que la Commission avait refusé d'assumer se référant à son autorité en renforçant la légitimité d'une instance de contrôle démocratique, tout en tirant des conclusions qu'elle ne formule pas. Ce cas particulier permet d'ouvrir le débat sur la notion de responsabilité médiatique : consiste-t-elle à prendre position dans l'espace public en s'engageant dans un cas de crise, ou à ouvrir un espace de délibération susceptible de promouvoir la réflexion citoyenne ?
      Through argumentative discourse analysis, this paper explores the meaning of journalistic responsibility when dealing with a severe crisis of political responsibility. It shows how the daily left-wing paper Ha-aretz presented the intermediary report of the Winograd Commission on the irresponsibility of the Israeli leaders in the Second Lebanon War. Through its treatment of reported discourse and its construction of a univocal syllogistic reasoning, the paper both engages in polemics with the government, called upon to resign, and fulfils the mission that the Winograd Commission refuses to take upon itself, by referring to its authority while drawing conclusions which are not stated in the report. This case questions the notion of journalistic responsibility: does it mean deep commitment in the public sphere in a situation of crisis, or the capacity to open a space of deliberation in order to help the citizens explore common problems?
    • Collective Responsibility in the Press - Alain Rabatel, Roselyne Koren accès libre
  • Échanges

    • L'histoire des sciences de l'information et de la communication (3) - Robert Boure p. 131-152 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article invite les chercheurs à poursuivre le débat sur les dimensions méthodologiques de l'histoire des disciplines en général et des sciences de l'information et de la communication en particulier Il traite d'abord des conditions à mettre en œuvre (affirmation et définition d'une posture, réflexivité, projet...), puis interroge quelques notions ou concepts (discipline, institutionnalisation sociale et cognitive) ainsi que des « manières de faire » l'histoire des disciplines (documents ou mémoire vivante, histoire nationale ou histoire locale...),
      This article invites the researchers to continue the debate about the methodological dimensions of the history of scientific disciplines and more particularly history of communication and information science. It deals with conditions to be implemented (affirmation and definition of a position, reflexivity project...), then it questions some notions or concepts (scientific discipline, social and cognitive institutionalization), as well as some methods used for the history of disciplines (documents or living memories. national or local history...).
    • Promouvoir la diversité culturelle ? - Béatrice Fleury, Jacques Walter p. 153-169 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans le prolongement de l'ouvrage qu'ils ont co-écrit en 2006, Les enjeux de la mondialisation culturelle, Joëlle Farchy et Jean Tardif se prêtent ici au jeu des « Échanges », intervenant chacun sur un aspect plus particulier des questions ayant trait à la mondialisation des échanges culturels. Joël Augros, Anne-Marie Autissier, Philippe Bouquillion et Tristan Mattelart leur répondent, proposant une analyse qui couvre différents aspects : économiques, culturels, politiques, scientifiques. Revenant sur l'articulation entre intérêts globaux, nationaux et locaux, entre lois du marché et diversité, plusieurs d'entre eux mettent également à jour les ambiguïtés dont peuvent faire preuve les mesures de régulation adoptées. Après une présentation des contributions de Joëlle Farchy et Jean Tardif, il s'agira de traiter du glissement de la revendication d'exception culturelle à celle de diversité, puis de présenter le positionnement théorique au fondement des problèmes concernant la mondialisation.
      In the continuation of the book which they co-wrote in 2006, Les enjeux de la mondialisation culturelle, Joëlle Farchy and Jean Tardif lend themselves here to the game of the “Exchanges”. Each is speaking on a more particular aspect of the questions concerning the globalization of the cultural exchanges. Joël Augros, Anne-Marie Autissier, Philippe Bouquillion and Tristan Mattelart answer them, proposing an analysis which covers various aspects: economic, cultural, political, scientific. Coming back to the articulation between global, national and local interests, between laws of the market and diversity, some of them also update the ambiguities which the adopted measures of regulation can show. After a presentation of the contributions of Joëlle Farchy and Jean Tardif, we shall discuss the gliding of the demand of cultural exception to that of the diversity, then we will present the theoretical location to the foundation of the problems concerning globalization.
    • Promouvoir la diversité culturelle - Joëlle Farchy p. 171-195 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Sur la scène internationale. la diversité culturelle désigne un objectif qui consiste à limiter l'uniformisation censée résulter du fonctionnement du marché et du libre échange. Au cours des 20 dernières années, deux moyens principaux ont été mis en place pour atteindre cet objectif : la politique d'exception culturelle en 1994 dans le cadre de l'omc et la convention signée en 2005 par les membres de l'unesco. Malgré leurs différences. la convention comme l'accord de l'omc ont un point commun : ils considèrent les politiques publiques nationales comme le principal moyen d'assurer la diversité. Ces politiques présentent cependant bon nombre de limites. tant du point de vue de leur efficacité économique qu'en raison des ambiguïtés de l'objectif même. Les soutiens nationaux prennent progressivement l'allure d'une ligne Maginot face aux grandes évolutions économiques qui influencent véritablement la diversité culturelle. De plus, au delà du discours incantatoire général visant à promouvoir la diversité. les décideurs publics doivent effectuer des arbitrages compte tenu du caractère multidimensionnel de la diversité de l'objectif même.
      On the international scene, cultural diversity corresponds to an objective which consists in limiting the standardization supposed to result from the market and free trade. During the last twenty years, two main policies were set up to reach this objective: in 1994, the policies of cultural exception within the framework of the WTO and the agreement signed in 2005 by the members of UNESCO. In spite of their differences, both agreements have a common point: they consider national public policies as the main means to ensure diversity. These policies present however a lot of limits, both from the point of view of their economic efficiency and because of the ambiguities of the objective. The national supports take gradually the shape of a Maginot Line in regard of big economic evolutions which really influence the cultural diversity. Furthermore, beyond the general incantatory speech to promote diversity, public decision-makers have to make arbitrations considering the multidimensional character of the diversity of the goal to achieve.
    • Mondialisation et culture : un nouvel écosystème symbolique - Jean Tardif p. 197-223 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La mondialisation ne se réduit pas à l'intégration planétaire des échanges économiques. Sa dimension culturelle, trop souvent ignorée, pourrait bien constituer un tournant crucial : dans la sphère médiatique globalisée, sont mises en présence intensive et en concurrence des visions du monde, des valeurs, des modes de vie dont les différences irréductibles deviennent immédiatement perceptibles et acquièrent ainsi une portée stratégique inédite. Le pouvoir est étroitement lié à la capacité de produire et de diffuser des symboles. Un marché-monde ne crée pas une société-monde. La culture c'est ce qui constitue une société. La mondialisation culturelle entraîne l'émergence d'un nouvel écosystème symbolique - « l'hyperculture globalisante » - qui affecte toutes les cultures et dont l'importance n'est pas moindre que celle de l'écosystème physique. Les politiques nationales ne peuvent gérer que les effets de ces processus transfrontaliers. Les aires géoculturelles pourraient apporter les réponses à la mondialisation culturelle en inventant les nouvelles modalités du politique requises pour traiter les enjeux géoculturels sur le même pied que les enjeux géopolitiques et géoéconomiques.
      Globalization is not only about the worldwide economic integration. it has an important cultural dimension. Through the globalized media sphere, it brings social models, values and ways of living into intense relation and competition and makes differences widely perceived and thus acquire a strategic dimension. Power is closely linked to manipulating symbols in the media sphere. But a global market does not create a world society. Culture is what institutes a society. Cultural globalization brings the emergence of a new symbolic ecosystem generated by the media that might be called « Globalizing Hyperculture » that affects every single culture and that is thus at least as important as the physical ecosystem. National policies albeit necessary cannot deal with these trans-national issues. In order to address the geo-cultural issues. geocultural areas (Europe of cultures. Francophonie, Ibero-America...) might invent the new political ways of dealing with cultural differences by making cultural pluralism give policy expression to the reality of cultural diversity and the foundation of renewed interactions within each one as well as with others.
    • Glocalisation, runaway et local production - Joël Augros p. 225-238 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En matière de cinéma, coexistent plusieurs formes de relation entre marché local et marché international. Cet article focalise le regard sur deux de ces relations, autour du concept de glocalisation : la runaway production et la local production. Sont examinés les éléments historiques qui caractérisent ces formes de production cinématographique et leur situation actuelle. En écho aux articles de Joëlle Farchy et Jean Tardif (Questions de communication, 13, 2008), sont abordés ensuite les notions d'avantages comparatifs, de régulation et de captation de marchés de niche à l'aune de ces runaway et local productions.
      Several ways of combining local and international markets coexist as far as cinema is concerned. This paper focuses on two of these relations centred around the concept of glocalization: runaway and local production. We deal successively with historical and current developments of these types of production. Then echoing to the papers of Joëlle Farchy and Jean Tardif, we examine several points in regard to these runaway and local productions: comparative advantages, regulation and niche markets.
    • Pour une réorientation fondamentale des politiques culturelles - Anne-Marie Autissier p. 239-250 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Quoique les États membres de l'Union européenne soient des protagonistes ambigus des avancées en matière culturelle et artistique, il convient de reconnaître les progrès accomplis depuis 1984, en matière de soutien au patrimoine, aux bibliothèques, au cinéma, à l'audiovisuel et aux arts du spectacle. Il est aussi intéressant d'insister sur les concertations nombreuses qu'ont connues les États membres à la faveur de ces avancées institutionnelles. L'obtention de l'exception culturelle auprès de l'Organisation mondiale du commerce n'est pas le moindre résultat de ces concertations, même si son statut reste fragile et son application beaucoup trop partielle. Quant à la diversité culturelle, elle est reconnue comme partie intégrante des États de l'Union eux-mêmes, à la faveur des émergences régionales ouest-européennes mais aussi de l'élargissement En 2007, la Commission européenne a proposé un Agenda culturel européen à l'ère de la mondialisation, incitant les États membres à se saisir de responsabilités en matière de coopération culturelle communautaire et internationale, via la Méthode ouverte de coordination (moc) en y associant étroitement les échelons sub-nationaux. De plus, la Commission européenne souligne la nécessité d'un dialogue plus suivi avec la « société civile culturelle européenne » qui regroupe à ce jour plus de cent associations, fédérations et réseaux, fort actifs depuis les années 80. Au-delà des programmes communautaires existants de coopération extérieure, l'articulation recommandée par la Commission entre coopération culturelle interne et extérieure de l'Union européenne, a ouvert la voie à des collaborations multilatérales susceptibles d'associer plus étroitement d'autres unions régionales à l'œuvre dans le monde : anase, Mercosur, etc. Il reste que les conséquences anthropologiques de la numérisation restent sous-estimées par l'Union européenne. Loin de constituer un simple cadre d'adaptation à la conquête de nouveaux marchés, elle appelle de nouvelles formes de formation, de socialisation et de rémunération du travail artistique et intellectuel.
      Although EU Member states may appear as ambiguous partners in the EU cultural process, some progress has been accomplished so far at the EU level: since 1984, the EU support to heritage, libraries, film, audio-visual and living performances is far from being insignificant. Moreover Member States entered into frequent negotiations, notably in order to achieve the Cultural Exception statement in the frame of WTO agreements. Moreover, cultural diversity appeared more and more as a constituent aspect of Member States, thanks to the emergent Western European Regional powers and to the Enlargement Process. In 2007. The European Commission proposed a Cultural Agenda in the era of globalization. This document suggests that Member states apply an Open Coordination Method concerning key aspects of cultural European cooperation, while strongly involving sub-national governments. Moreover the European Commission underlined the necessity of a renewed dialogue with the so-called « Cultural civil European society ». Consisting of more than a hundred associations, federations and networks, this constellation has been very active since the eighties. Beyond existing EU external cooperation programmes, the articulation between external and internal European cultural cooperation may pave the way to stronger multilateral collaborations, notably evolving regional unions such as ASEAN or MERCOSUR. However the digitization process seems to be underestimated by the EU authorities in its anthropological aspects. Far from being only a tool for new markets, it requires new methods for training, socialisation and remuneration of intellectual and artistic work.
    • La diversité culturelle. une approche communicationnelle - Philippe Bouquillion p. 251-268 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La thématique de la diversité culturelle est au cœur de différentes stratégies d'acteurs sociaux, liées à deux importantes mutations sociales : les transformations du système interétatique et de l'État nation, dans un cadre de mondialisation, ainsi que les articulations entre les industries des contenus et les industries de la communication (télécommunications, Web et matériels). Les théories et les discours de la diversité, œuvrant comme des « discours de vérité » inséparables de systèmes de pouvoirs, accompagnent, facilitent et légitiment quatre tendances de long terme qui marquent l'économie des contenus : le poids croissant de l'aval des filières, l'organisation des industries de la culture et de la communication dans une logique d'économie-monde, la polarisation des contenus entre hits et contenus de niche, la remise en cause des politiques publiques.
      The theme of cultural diversity is at the heart of various strategies of social actors bound to two important social alterations: the transformations of the interstate system and the Nation state in a frame of globalization as well as the joints between the industries of the contents and the communications industries (telecommunications, Web and Consumer electronic equipment). The theories and the speeches about diversity, working as a “speech of truth” inseparable of systems of powers, accompany, facilitate and legitimize four long-term tendencies which mark the economy of the contents: the increasing weight of the distribution within the branches, the organization of the industries of culture and communication in a logic of “economy-world”, the polarization of the contents between hits and the contents of niche, the questioning of the public policies.
    • Pour une critique des théories de la mondialisation culturelle - Tristan Mattelart p. 269-287 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Depuis la fin des années 80, l'avènement des théories de la mondialisation culturelle dans le champ académique anglo-saxon s'est traduit par une transformation en profondeur des manières de penser les enjeux de l'internationalisation des médias. Avec ces théories, l'économie politique critique de la communication - qui, dès la fin des années 60, a joué un rôle pionnier dans la réflexion sur ces processus - a en effet été supplantée par des disciplines qui ne s'étaient, jusqu'à la deuxième moitié de la décennie 80, jamais véritablement penchées sur l'ubiquité des médias. Nées d'une convergence entre certains tenants des Cultural Studies, de l'anthropologie et de la sociologie, ces théories ont ainsi donné naissance à un nouveau paradigme, devenu dominant pour saisir les conséquences de l'internationalisation des médias, qui a largement déconstruit les perspectives esquissées par l'économie politique et les a remplacées par des visions radicalement différentes. En revenant en détail sur quelques-uns des principaux textes leur ayant donné corps, l'objectif de cette contribution est de retracer de façon critique le développement de ces théories de la mondialisation culturelle et de souligner les ruptures décisives qu'elles ont pu entraîner dans la compréhension de l'internationalisation des médias.
      The development. since the end of the 80s. of the theories of cultural globalization in the Anglo-Saxon académie field has resulted in a deep transformation in the ways of thinking media internationalization. With these theories, the critical political economy of communication, which has played. since the end of the 60s. a key role in analyzing media internationalization, has been supplanted by disciplines that had never, before the end of the 80s. studied media ubiquity Theories of cultural globalization, as we show here, are the product of a convergence among cultural studies. anthropology and sociology. Beyond their diversity these theories tend to think the cultural consequences of globalization along the same lines. As such. they propose a new dominant paradigm to apprehend the consequences of media internationalization - a paradigm that has deconstructed the perspectives drawn by the political economy and replaced them by radically different visions. The aim of this paper is, by studying some of the main texts having given them birth. to show how these theories of cultural globalization have emerged and to underline some of the major ruptures that they have entailed in the ways of thinking media internationalization.
  • Notes de recherche

    • Quelle réception pour quelle médiation du témoignage ? - Linda Idjéraoui-Ravez p. 289-302 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La contribution traite de la relation qu'un visiteur instaure avec le monde représenté dans des expositions de témoignages vivants, c'est-à-dire des paroles et photographies privées de personnes ayant vécu des événements « chauds » de l'Histoire. Elle est fondée sur des photographies polaroïds réalisées par les visiteurs, ainsi que sur une série d'entretiens avec ces derniers. Il s'agit également de faire émerger les facteurs qui ont pu intervenir dans la façon dont s'est opérée la relation des visiteurs à ce type de médiation. Dans cette étude de réception, la méthode expérimentée et les résultats obtenus ont permis d'ouvrir d'autres pistes de recherche.
      Starting from polaroid photographs which the visitor takes and what he confides to us about the reasons for his choice of what to photograph, we have tried to understand the process of the relationship he establishes with exhibitions that are based on living testimonies, privates speeches and photographs, relating historical but also sensitive events. We try, above all, to clarify the factors which intervene in the regulation of the relationship which the visitor establishes with this kind of exhibition. In this study of the reception, the method and the results permit to define original research trails.
    • Enjeux de mémoire et identités nationales - Angeliki Koukoutsaki-Monnier p. 303-322 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article explore la question de la gestion de la mémoire telle qu'elle est apparue en Grèce à l'occasion de l'édition d'un nouveau manuel scolaire d'histoire pour les élèves de la 6e année de l'école primaire en septembre 2006. Portant sur l'histoire de la Grèce moderne (de 1453 à nos jours), cet ouvrage a été qualifié d'antipatriotique et a été accusé de sacrifier l'identité nationale au service du politiquement correct. Ayant provoqué un débat houleux, le manuel a finalement été retiré un an après sa parution. Afin de mettre en lumière les logiques qui ont sous-tendu la parution de ce manuel et comprendre son accueil difficile au sein de la société hellénique, nous examinons les modes de légitimation employés par les historiens grecs pour et contre l'ouvrage. Nous montrons que ces derniers s'appuient sur deux conceptions divergentes de l'Histoire, sous-tendues par deux façons d'appréhender l'identité nationale, indice des rapports ambivalents des sociétés contemporaines au passé et au concept de la nation.
      This article explores the issue of the control of the historical memory as it appeared in Greece on the occasion of the publication of a new sixth-grade school textbook on Modern Greek history (1453 to present). The book was charged with being anti-patriotic and sacrificing national identity to political correctness. It provoked a stormy debate within Greek society and was finally recalled a year after its release. The article examines the modes of legitimization, employed by Greek historians in favor of or against the work. It demonstrates that these latter were based on two divergent conceptions of History and two underlying ways of understanding national identity indicating contemporary societies' ambivalent relations with the past and the concept of the nation.
    • Identité/altérité et noms collectifs humains - Michelle Lecolle p. 323-342 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En articulant faits de langue et faits de discours, l'article aborde la question de l'identité du point de vue des groupes humains sous un angle lexical et sémantique, par le biais des noms collectifs humains et particulièrement du nom collectif communauté, que l'on contraste avec d'autres noms collectifs, davantage marqués a priori d'un point de vue « identitaire » comme ethnie et race. Après avoir présenté la notion de nom collectif en sémantique, il décrit, pour communauté, la diversité de ses sens et emplois référentiels. Partant de la constatation de la grande flexibilité de ce nom collectif, dont on peut dire qu'il est employé comme un « mot-joker », il cherche à montrer que, dans le contexte de faits sociaux discutés et problématisés dans les discours publics, comme celui de l'identité et de son corollaire, l'altérité, communauté voit son sens se spécifier pour devenir un désignateur « identitaire ». C'est ce qu'on observe, d'une part, dans la structure syntaxique [la communauté + adjectif catégorisant], d'autre part, en étudiant ses dérivés communautaire et communautarisme. dont on postule que leur sens (supposé dérivé) opère un effet en retour sur le sens de communauté.
      By connecting linguistic and discursive facts, this paper tackles the issue of the identity of different groups of people. Opting for a lexical and semantic approach, it focuses on the meaning and the use of several collective nouns, principally the French noun communauté, a word which can be compared to other collective nouns such as ethnie and race – perhaps more strongly marked by the identity question. The paper first introduces the semantic concept of collective noun; it then describes the diversity of meanings and referential uses for the word communauté. Indeed, this collective noun has such a wide semantic and syntactic flexibility that it can actually be regarded as a joker word (“mot-joker”). However in the context of such social issues as identity and otherness, that are currently questioned and debated in public discourse, the meaning of the noun tends to be more specific, to the extent that it actually becomes an Identity indicator This fact can first be observed in the syntactic structure [la communauté + category adjective], but also in the examination of the derived forms communautaire and communautarisme. The paper postulates that the meanings of the derived words rebound on the meaning of communauté.
  • Notes de lecture