Contenu du sommaire : Dossier : Un printemps arabe ?
Revue | L'année du Maghreb |
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Numéro | Vol. VIII, 2012 |
Titre du numéro | Dossier : Un printemps arabe ? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Avant-Propos
- Un printemps arabe ? - Éric Gobe p. 3-4
Dossier de recherche : Printemps arabe : une « révolution » pour les sciences sociales ?
- Les protestations populaires à l'assaut des régimes autoritaires : une « révolution » pour les sciences sociales ? - Vincent Geisser p. 7-26 On Au-delà des débats contradictoires qui s'engagent dans les sciences sociales sur l'avenir des mouvements protestataires au Maghreb, les chercheurs paraissent pêcher par le même travers : celui de focaliser leurs analyses sur une temporalité courte (le cycle contestation, répression, normalisation), alors que précisément les mouvements étudiés s'inscrivent dans une temporalité longue, dont les secousses actuelles ne représentent qu'un épisode. L'objectif de ce dossier est de montrer que le processus de fissuration des régimes autoritaires n'a pas commencé avec le Printemps arabe de 2010-2011. En amont, les protestations sociales de la décennie 2000 permettaient sans doute d'esquisser des scenarios, laissant entrevoir la possibilité de bouleversements substantiels à l'échelle du Maghreb et du monde arabe. En aval, le processus de transformations politiques des sociétés maghrébines et machrékines ne saurait se limiter aux seuls événements révolutionnaires. Au-delà de l'usure réelle et visible des hommes au pouvoir, la question centrale des processus révolutionnaires reste celle de la légitimité et de l'efficacité symbolique des systèmes : pourquoi des conditions identiques ne débouchent-elles pas partout sur des changements de régime ?What Beyond the contradictory debates held in social science circles on the future of protest movements in North Africa, researchers tend to err on the same point: they focus on the short-term ( protest cycle, repression, standardization), whereas the movements they analyze are specifically part of a long-term process, in which current upheavals are only one episode. The purpose of this study is to show that the ongoing collapse of authoritarian regimes did not start with the 2010-2011 Arab Spring. Previous social protests in the 2000s were probably early signs of possible substantial changes across the Maghreb and the Arab world. Subsequently the process of political transformation in Maghreb and Mashreq societies will not be limited to revolutionary events. Beyond the actual visible weakening of the men in power, the central issue in revolutionary processes remains the legitimacy and symbolic effectiveness of systems: why don't identical circumstances lead to changes in regimes everywhere?
- Un printemps arabe ? L'émulation protestataire et ses limites - Michel Camau p. 27-47 L'expression « printemps arabe » s'est imposée comme allant de soi pour désigner un processus d'émulation protestataire sans précédent dans la région. La métaphore doit beaucoup à la facilité journalistique. Toutefois le questionnement nécessaire du « printemps arabe » ne saurait s'en tenir à ce type de considérations. Il se rapporte tout à la fois aux limites de l'émulation protestataire et à celles de notre propre savoir. Nul n'avait prévu la « révolution tunisienne », pas plus que ses répliques en égypte et dans d'autres pays arabes. L'élan protestataire s'est diffusé, sans toutefois emprunter partout les mêmes formes, ni revêtir la même intensité, ni surtout produire les mêmes effets. Il ressort de l'ensemble une marge d'indétermination, dont l'élucidation passe par l'examen de trois ordres de problèmes, étroitement liés mais analytiquement distincts : les ambigüités du label « révolution », la surprise produite par des événements tenus après coup pour inéluctables, les effets de démonstration et de contexte dans le cycle de protestation. Les éléments de réponse avancés dans l'article se déploient à partir des notions de crise de légitimation comme critère de différenciation parmi les « révolutions arabes », d'ignorance pluraliste au regard de l'opacité des préférences des acteurs en situation autoritaire et enfin d'apprentissage des gouvernants par rapport à leurs modes de prévention et de gestion des crises de légitimation.The term “Arab Spring” has become patently obvious to describe a process of protest emulation unprecedented in the region. Such metaphor owes much to media fluency. However, issues raised by the “Arab Spring” cannot be limited to this type of acceptations. They refer to both the limits of protest emulation and those of our own knowledge. No one had foreseen the “Tunisian Revolution”, no more than its spinoffs in Egypt and other Arab countries. The protest momentum spread but it did not occur in the same form or with the same intensity elsewhere, and above all, it did not produce the same effects. There is an overall margin of uncertainty, which may be elucidated through consideration of three types of problems, closely related but analytically distinct: the ambiguity of the “revolution” label, the surprise generated by events regarded afterwards as inevitable, and the effects of demonstration and context in the protest cycle. We attempted to address those issues based on the idea of crisis of legitimacy as a criterion of differentiation between the “Arab revolutions”, and of pluralistic ignorance with regard to the unclear preferences of those in authority positions and finally of the rulers' learning in relation to their methods of prevention and management of crises of legitimacy.
- Les révolutions arabes entre césures et remembrances : tiers-mondisme, question palestinienne et utopies chiliastiques - Nicolas Dot-Pouillard p. 49-65 L'évènementialité révolutionnaire et insurrectionnelle ouverte dans le monde arabe depuis le mois de janvier 2011 a bien eu sa part de « nouveau » : analystes et chercheurs se sont ainsi attachés à en déceler, pour l'essentiel, les manifestations dans l'appropriation radicale du paradigme démocratique par les insurgés égyptiens, libyens ou tunisiens, dans l'utilisation de nouveaux moyens informatiques globalisés, dans l'absence – tout du moins dans un premier temps –d'idéologies fondatrices, si ce n'est de leaderships dument constitués, au sein des soulèvements en question. Ces processus révolutionnaires auraient même pu, dans leur nouveauté radicale, tracer des points de rupture fondamentaux avec ce qui, tout au long du vingtième siècle, eut justement pu s'attacher au concept même de « révolution » dans le monde arabe. Parmi ces éléments : le caractère tiers-mondiste qui lui fut souvent lié, l'attachement à la question palestinienne, et enfin la dimension chiliastique et révolutionnaire propre aux bouleversements révolutionnaires tels qu'on se les imaginait alors. Et pourtant, cette rupture semble encore relative : c'est plutôt une singulière dialectique irrésolue qui semble aussi se dessiner entre ces différents éléments, où le passé semble encore servir parfois de point de référence, se réactualisant ainsi, face à un « nouveau » dont les contours et les césures qu'il trace sont patiemment en train de s'esquisser.The revolutionary and insurrectionary eventness deployed in the Arab world since January 2011 did have, to some extent a degree of “newness” : analysts and researchers have basically endeavored to identify its manifestations in the radical appropriation of the democratic paradigm by Egyptian, Libyan or Tunisian insurgents, in the use of new globalized computer technologies, and in the absence - at least in the early stages - of seminal ideology, even of duly established leaderships in the uprisings. The radical novelty of these revolutionary processes may even have established fundamental breaking points from elements that were associated to the concept of “revolution” in the Arab world throughout the twentieth century, such as the common underlying notion of Third World, the commitment to the Palestinian cause, and finally the chiliastic and revolutionary dimension of revolutionary upheavals such as they were envisioned at that time. However the break appears to be relative : indeed a singular unresolved dialectic also seems to emerge between these different elements, where the past may sometimes serve as a reference updated in the face of “newness” whose contours and divides are gradually taking shape.
- Les islamistes à l'épreuve du printemps arabe et des urnes : une perspective critique - Haoues Seniguer p. 67-86 Les révoltes sociales du monde arabe qui débutèrent en décembre 2010 en Tunisie constituèrent un puissant révélateur, outre des frustrations socioéconomiques et des attentes démocratiques des peuples arabes dans leur majorité favorable à la chute des régimes autoritaires, des ambivalences, voire des contradictions des mouvements de l'islam politique vis-à-vis de ces mêmes régimes. Certes, les mouvements ou partis islamistes n'ont ni initié ni rallié tout de suite les mobilisations collectives mais leur retenue a cependant mis au jour deux éléments nouveaux : d'une part, contrairement à ce qui peut être avancé parfois, dans la littérature consacrée aux islamistes, la répression qui les a certes le plus souvent visés, ne les a pour autant définitivement privés de transactions collusives avec les régimes autoritaires dont ils ont même fini, quelquefois, par accepter la longévité et s'accommoder. C'est pourquoi, durant les premiers jours de révoltes, ils se sont longuement interrogés sur les éventuels coûts d'un engagement prématuré auprès des manifestants, allant jusqu'à refuser, comme pour le Parti de la justice et du développement marocain (PJD), de les rejoindre, au moins en tant qu'acteur collectif ; d'autre part, ces révoltes sociales ont permis de mettre en évidence, l'existence de clivages au sein des mouvements islamistes, aussi bien entre les dirigeants et la base, au sein de chacun des deux groupes respectifs, mais également, entre les « anciens » et les plus « jeunes ». Enfin, ces révoltes sociales ont montré, dans certains pays tels que le Maroc, que des islamistes légalistes peuvent très bien jouer le jeu de l'autoritarisme et partager avec lui, une forme d'obsession du contrôle social de la population, ainsi que la préservation d'un certain ordre moral. Ce qui n'a pas empêché ces acteurs, au Maroc, en Tunisie et en Égypte, de remporter des élections, non seulement à cause du discrédit frappant la classe politique en général, mais aussi, en particulier, grâce à leurs réseaux sociaux et à une forme de discours prônant la lutte contre la corruption et la moralisation de la vie publique.The Arab world's social revolts that began in Tunisia in December 2010 were a clear indicator not only of the socio-economic frustrations and democratic expectations of Arab peoples, most of whom were in favor of the fall of authoritarian regimes, but also of ambivalent, even contradictory positions in political Islamist movements vis-à-vis these regimes. Although Islamist movements or parties neither initiated nor joined collective mobilizations right away, their restraint revealed two new aspects : on the one hand, contrary to what certain literature about Islamists may have theorized, the repression that had most often affected them had not deprived them permanently of engaging in collusive transactions with authoritarian regimes, whose longevity they even had ended up accepting and getting accustomed to. That is why, during the early days of revolt, they carefully reflected upon the possible drawbacks of a premature commitment to the protesters and sometimes refused to join them, as did Morocco's Party of Justice and Development (PJD), at least as a collective player ; on the other hand, these social uprisings brought to light the existence of rifts within Islamist movements, both between the leaders and the base in each of the two groups respectively, and between the “older” and the “younger” generations. Finally, these social uprisings showed, in a number of countries such as Morocco, that legalistic Islamists may well play the game of authoritarianism and share in a form of obsession of social control of the population, as well as preservation of moral order. That did not stop them from winning elections in Morocco, Tunisia and Egypt, not only because of the patently discredited political class in general, but also, more specifically, through their social networks and a form of campaign against corruption and moralization of public life.
- Comment faire Peuple ? Le cas des protestations publiques au Maghreb - Smaïn Laarcher, Cédric Terzi p. 87-102 Rendre compte des activités des cyberactivistes, c'est être conduit à étudier les protestations publiques et les nombreux lieux dans lesquels elles s'expriment. Le cyberactivisme ne constitue pas un domaine d'activité autonome. Bien au contraire, il participe d'un large mouvement d'élaboration d'enjeux publics. Autrement dit, nous ne sommes pas en présence de deux sphères distinctes : la sphère des cyberactivistes, « communauté virtuelle », et celle de la société, territoire de l'action politique et des luttes entre des groupes aux intérêts à la fois différents et contradictoires. Dans ces circonstances, mener une enquête comparative permet d'observer combien des dispositifs de communications, pourtant techniquement identiques, peuvent faire l'objet d'usages sociaux et politiques différents. Ces usages s'inscrivent avant tout dans des cadres nationaux contraignants qui leur donnent forme, consistance et signification symbolique. Si les liens existent entre le militantisme cyberactiviste et les contestations populaires dans les trois pays du Maghreb, il n'en est pas moins vrai que l'assemblage entre ces univers de protestations s'organise et se déploie différemment en fonction des histoires nationales, de l'état des rapports de force et du développement des revendications. Mais la vertu de la comparaison, c'est de mettre en scène un invariant central : celui de la difficulté à faire peuple et à produire collectivement son unité en institutionnalisant la division ; c'est-à- dire en accordant leur droit et leur légitimité à la mésentente et au politique.C'est bien à cet enjeu majeur que sont confrontés aujourd'hui, au travers des multiples protestations publiques (sous forme d'émeutes ou non), les trois pays du Maghreb.Reporting on the activities of cyber activists leads to investigating public protests and the many places where they are expressed. Cyber activism is not an autonomous sphere of activity. Rather, it is part of a larger movement to develop public issues. In other words, we are not in the presence of two distinct spheres : the sphere of cyber activists, a “virtual community” and that of society, a terrain for political struggles between groups whose interests are both different and contradictory. Under these circumstances, a comparative study reveals how communication tools, though technically identical, may serve different social and political purposes. Their use is primarily part of restraining national frameworks that give them form, consistency and symbolic meaning. While there is a link between cyberactivist militancy and popular protests in the three Maghreb countries, it is no less true that the connection between these worlds of organized protests unfolds differently depending on their national histories, balance of powers and extent of claims. Yet comparison is useful in revealing a central invariant element : the difficulty in acting as one people and collectively produce unity to institutionalize division ; in other words, to give their right and legitimacy to misunderstandings and politics. This is indeed a major challenge facing the three Maghreb countries today, through multiple public protests (whether riots or not).
- Le peuple est-il soluble dans la constitution ? Leçons tunisiennes - Jean-Philippe Bras p. 103-119 Cette contribution propose de décrypter, pour le cas tunisien, le passage du moment révolutionnaire, où le peuple veut la révolution, au moment constitutionnel, où le peuple évènement fait place au peuple référent, dans la mise en place des mécanismes de la représentation. Après une phase initiale où la pression de la rue ou des campagnes s'exerce pleinement sur des instances politiques dotées d'une légitimité faible, bricolée entre lambeaux de l'ordre constitutionnel ancien et une incertaine prétention à porter la revendication révolutionnaire, ce peuple acteur de la révolution se défait. Il consent à quitter son « état révolutionnaire » pour mandater une autorité à poursuivre le processus de changement politique. Dans cet acte de délaissement, il rencontre nécessairement la déception démocratique, des incertitudes de la représentation à travers l'élection. Aussi, dès le lendemain de son élection, l'Assemblée constituante est confrontée à de virulents débats sur la portée et la durée du mandat qui lui a été confié par le peuple électeur, où s'exprime la crainte d'une révolution confisquée par les vainqueurs des urnes (principalement le parti islamique Ennahda), qui ne furent pas, loin s'en faut, les principaux acteurs du moment révolutionnaire. Si la loi de la majorité est une des conditions de l'établissement d'un régime démocratique, comme le rappelle Adam Przeworski, elle ne peut se justifier de manière ultime que par une co présence des mécanismes de l'alternance. De plus, ainsi que le soulignait Hans Kelsen, le dispositif doit être complété par l'instauration d'un tribunal constitutionnel, la menace d'y recourir contribuant à obliger au compromis entre majorité et minorité parlementaires. De bonnes raisons pour observer de près la manière dont cette Assemblée constituante omnipotente va exercer son mandat constitutionnel et législatif, ainsi que les délais d'organisation des futures élections législatives.The purpose of our article is to elucidate the case of Tunisia, namely the transition from revolutionary moment when the people wanted a revolution, to constitutional moment, when the people-as-an-event became the people-as-areferent through the establishment of mechanisms of representation. Following an initial phase when the pressure of the street or rural areas was fully exercised on political bodies whose frail legitimacy was cobbled together from scraps of old constitutional order and a vague ambition to take on the revolutionary claim, the people who engaged in the revolution fell apart. They agreed to give up their “revolutionary status” and appoint an authority to continue the process of political change. In this act of surrender, they inevitably met with democratic disappointment and uncertainty about representation through elections. Also, the day after their election, members of the Constituent Assembly were faced with virulent debates on the scope and duration of the mandate entrusted to them by the voting people, who expressed their fear of having the revolution confiscated by poll winners (mainly members of the Islamic party Ennahda), who had not been, far from it, major players in the revolutionary moment. While the law of majority is a prerequisite for the establishment of democratic regimes, as Adam Przeworski recalled, it can only be justified ultimately by the co-presence of alternation mechanisms. In addition, as Hans Kelsen pointed out, the system must be supplemented by the establishment of a Constitutional Court, whose threat to intervene forces majority and minority parliamentarians to compromise. There are good reasons to observe closely how this omnipotent Constituent Assembly will exercise its constitutional and legislative mandate, and set the dates for organizing future legislative elections.
- La révolution tunisienne : interactions entre militantisme de terrain et mobilisation des réseaux sociaux - Zeineb Touati p. 121-141 Sans réduire la révolution tunisienne à une révolution 2.0 et sans nier le rôle des réseaux sociaux dans la montée de la mobilisation d'une tranche importante de la société tunisienne, nous analysons, dans cet article, les modalités pratiques de la mobilisation et les usages des réseaux sociaux et des TIC. Nous mettons en lumière l'évolution du rôle de ces réseaux sociaux tout au long des protestations en Tunisie entre le 17 décembre 2010 (date des premiers rassemblements) et le 14 janvier 2011 (date de départ de Ben Ali) en réponse aux besoins de la mobilisation sur le terrain et de l'évolution de l'implication des militants et des manifestants. En présentant les raisons et les finalités du recours aux réseaux sociaux, nous pointons les différences avec la révolte du bassin minier de Gafsa de 2008.Without reducing the Tunisian revolution to a web 2.0 revolution or denying the role of social networks in the increasing mobilization of a large portion of Tunisian society, this article investigates the practical circumstances of the mobilization and use of social networks and ICT. We bring to light the changing role of social networks throughout the protests in Tunisia between December 17, 2010 (date of the first gatherings) and January 14, 2011 (date of Ben Ali's departure) in response to the needs of on-the-ground mobilization and evolution of activists and protesters' involvement. We specify the reasons and goals of the use of social networks and point out differences with the 2008 revolt in the mining area of Gafsa.
- Les marges renaissantes : Amazigh, Juif, Noir. Ce que la révolution a changé dans ce « petit pays homogène par excellence » qu'est la Tunisie - Stephanie Pouessel p. 143-160 L'article envisage les revendications issues de certains groupes « minoritaires » comme une des lames de fond qui bouscule le « monolithisme culturel » officiel de la Tunisie post-dictatoriale. La focalisation sur certains citoyens qui s'affirment sur la scène culturelle et politique en tant que membres d'un groupe minoré (amazigh, noir, juif) permettra de comprendre comment ils tentent de mettre au centre du débat public la question de la pluralité ethnique et confessionnelle de la société tunisienne. L'inscription du répertoire de la « diversité culturelle » prend ainsi toute sa place dans les enjeux politiques qui suivirent le 14 janvier 2011 puis les premières élections démocratiques visant à constituer une assemblée constituante. Dans cette phase de refonte des représentations de la « nation » se développent des discours inédits sur la discrimination, la reconnaissance ou encore la mémoire plurielle : qu'en est-il de la place de l'héritage juif dans un pays où domine l'islam politique ? Pourquoi inscrire la lutte contre la discrimination raciale dans la nouvelle constitution ? Enfin, comment se constitue une amazighité tunisienne sous pression du militantisme amazigh panmaghrébin ?This article considers the claims made by a number of “minority” groups as a groundswell sweeping the official “cultural monolithic nature” of postdictatorial Tunisia. A focus on citizens who assert themselves on the cultural and political scene as members of minority groups (Amazigh, black, Jewish) helps understand how they attempt to place the issue of ethnic and religious plurality in Tunisian society at the center of public debate. The recognition of “cultural diversity” thus plays a significant part in the political stakes following the events of January 14, 2011 and the first democratic elections to form a Constituent Assembly. The phase of remodeling of the “nation's” representations leads to the emergence of new insights on discrimination, recognition or plural memory : where does the Jewish heritage stand in a country dominated by political Islam ? Why include the fight against racial discrimination in the new constitution ? Finally, how can Tunisian Amazigh specificity develop under pressure from pan-Maghreb Amazigh activism ?
- (Més)aventures d'une coalition contestataire : le cas de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) en Algérie - Layla Baamara p. 161-179 Créée le 21 janvier 2011 au lendemain d'émeutes survenues dans l'ensemble du pays, la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) appelle à un rassemblement des forces pour dénoncer la répression. Collectivement ou individuellement, formellement organisés ou non, un certain nombre d'acteurs se regroupent autour de cette initiative. De janvier à juin 2011, des centaines de personnes se rassemblent à plusieurs reprises à Alger pour réclamer la « chute du régime », bravant ainsi l'interdiction de manifester dans la capitale. Ces actions se heurtent à une faible mobilisation, qui contraste avec l'ampleur et la récurrence des protestations sectorielles. Au-delà des mesures mises en oeuvre par le pouvoir et malgré un faible engouement populaire, entretiens et observations in situ incitent à questionner les logiques et les dynamiques à l'oeuvre dans cette coalition inédite. Explorer les ressorts et les modalités pratiques de la convergence d'acteurs dont les divergences ont marqué les dernières décennies, puis les tensions qui traversent la coordination aide à mieux cerner les rapports de forces qui imprègnent l'espace contestataire. L'analyse des processus qui ont façonné la constitution, l'évolution puis le délitement de cette coalition permet alors d'éclairer les logiques de l'action collective contestataire en Algérie.Created on January 21, 2011 in the aftermath of riots across the country, the National Coordination for Change and Democracy (NCCD) called for forces to rally and denounce the repression. Whether collectively or individually, formally organized or not, a number of players gathered around the initiative. From January to June 2011, hundreds of people repeatedly convened in Algiers and called for the “fall of the regime”, thereby defying the ban on demonstrations in the capital. These movements met with minor success at mobilization, which contrasted with the magnitude and recurrence of sectorial protests. Beyond the measures implemented by the government and despite low popular interest, interviews and on-site observations led to uncertainties about the logic and dynamics at work in this unique coalition. We explored the scope and practical aspects of the convergence of players whose differences have marked recent decades, and the tensions in the coordination, to better understand the power relations that pervade the protest space. An analysis of the processes that have shaped the formation, evolution and disintegration of the coalition may then shed light on the logic of collective protest action in Algeria.
- Les partis politiques égyptiens dans la révolution - Clément Steuer p. 181-192 Cet article propose une classification des partis politiques dans l'Égypte de Moubarak, reposant sur leur degré d'intégration à l'ancien régime qui dépend de la combinatoire de deux éléments : les ressources octroyées directement ou indirectement par le pouvoir exécutif, d'une part, et d'autre part, les différentes ressources indépendantes du centre étatique, et inégalement réparties entre les organisations partisanes. Étant entendu qu'un parti dépourvu de toutes ressources est bien évidemment condamné à disparaître, la combinaison des deux variables retenues ici nous permet de classer les partis égyptiens en trois catégories : les partis exclus du système, les partis cooptés, intégrés à ce dernier, et enfin les partis artificiels, qui ne disposent de quasiment aucune ressource propre et sont en conséquence extrêmement dépendants du pouvoir. Durant la révolution, ces derniers n'ont eu d'autre choix que de défendre le régime, si ce n'est activement, du moins par leur attentisme. Les partis cooptés, quant à eux, ont une existence réelle dans la société, indépendamment du soutien de l'État, mais ils se sont vus octroyer un certain nombre d'avantages par ce dernier. En conséquence, ils n'ont pas cherché à remettre en cause le régime et sont restés en marge des mouvements contestataires qui se sont multipliés au cours de la décennie écoulée. Enfin, les partis exclus du système ne doivent rien au centre politique et sont donc ceux qui avaient le plus intérêt à un changement de régime. Aussi ont-ils pris une part active aux activités contestataires sus-mentionnées. Cette typologie offre une grille de lecture expliquant les positions prises par les différents partis égyptiens durant la révolution, en tenant compte non seulement de leurs intérêts immédiats, mais également des répertoires d'actions à leur disposition et de leur proximité avec les mouvements protestataires, ces deux derniers éléments étant hérités de leurs conduites passées.This article suggests a classification of political parties in Mubarak's Egypt, based on their level of integration into the former regime, according to the combinatorial analysis of two elements : on the one hand, the resources provided directly or indirectly by the executive, on the other hand, the various resources independent from the State, and unevenly distributed among the party organizations. Provided that a party devoid of all resources is obviously doomed to disappear, the combination of the two variables used here helps us classify the Egyptian parties into three categories : parties excluded from the system, parties co-opted and incorporated into the system and finally artificial parties, who have practically no resources of their own and are therefore extremely dependent on the central power. During the revolution, the latter had no choice but to defend the regime, if not actively, at least by their wait-and-see attitude. Co-opted parties however have a genuine existence in society, independent from State support, but they have been given a number of advantages by the State. Consequently, they did not attempt to challenge the regime and remained on the sidelines of the protest movements that proliferated over the past decade. Finally, the parties excluded from the system owe nothing to the political nucleus and were thus the most interested in a change in regime. Therefore they took an active part in the above mentioned protest activities. This typology offers an interpretative framework explaining the different positions taken by the parties during the Egyptian revolution, taking into account not only their immediate interests, but also the range of actions available to them and their proximity to the protest movements, given that the latter two elements are inherited from past behaviors.
- Le Caire, 2011. Plongée ethnographique au coeur des lijân sha'abeya (comités populaires) - Perrine Lachenal p. 193-206 La place Tahrir, dans le centre-ville du Caire, apparaît comme la scène incontournable des mobilisations qui ont secoué l'Egypte au début de l'année 2011 et acculé Hosni Mubarak à quitter le pouvoir. On en oublierait presque le reste de la ville, immense, qui a été traversé durant cette même période, par des dynamiques qui ont donné naissance à des phénomènes inédits, dont les « comités populaires » font partie. Pour faire face au retrait calculé des forces de police et à la peur provoquée par les récits réels ou fantasmés – de violences urbaines, les habitants et habitantes du Caire s'organisent. D'abord de manière spontanée, puis de plus en plus « professionnelle », des centaines de « comités populaires », ou lijân sha'abeya, vont pendant plus de trois semaines, assurer la sécurité dans les différents quartiers du Caire. Ces « brigades » civiles, grâce à une étude réalisée à partir des discours de ceux et celles qui les ont incarnées, se révèlent être des exemples uniques d'organisation collective spontanée, supports d'alliances improbables et d'affirmations identitaires – spatiales et sexuées. Loin de l'épicentre de la révolution, dans l'espace familier des quartiers et l'intime des maisons, sur des scènes moins médiatisées, d'autres acteurs et actrices ont contribué à « faire » l'Histoire.Tahrir Square in downtown Cairo appeared as the principal scene of the demonstrations that shook Egypt in early 2011 and drove Hosni Mubarak to step down – almost to the point of forgetting the rest of the city, an immense area which was affected during the same period by dynamics that gave rise to new phenomena, including “popular committees”. To cope with the calculated withdrawal of police and fear caused by reports – real or imagined – of urban violence, residents of Cairo got organized. First spontaneously, then more and more “professionally”, hundreds of “popular committees” or lijân sha'abeya ensured security in different neighborhoods of Cairo during more than three weeks. Through a study based on accounts by those who made up these civilian “brigades”, they appear to be unique examples of spontaneous collective organization, backings of unlikely alliances and assertions of identity – both spatial and sexual. Far from the epicenter of the revolution, in the familiar space of intimate neighborhoods and homes, other players did not attract as much media attention yet contributed in “making” history.
- La « Seconde Jamahiriyya » libyenne : l'échec d'une stratégie de survie - Jesús Jurado Anaya p. 207-218 Les dernières dix années du régime kadhafiste en Libye furent marquées par le poids du tribalisme et par la patrimonialisation du pouvoir autour de certaines élites liées à la figure du colonel Kadhafi. Les différences entre cette forme de régime sultanique et le système jamahirien « classique » établi en 1977 nous amènent à définir la période comprise entre la fin de l'embargo et la « révolution » de février de 2011 comme une « Seconde Jamahiriyya ». Cet article tente d'expliquer l'évolution politique de la Libye depuis les années 1990 pour mieux comprendre la chute du régime kadhafiste et l'actuelle situation de fragmentation du pouvoir dans le pays.The last ten years of the Gaddafi regime in Libya were characterized by the burden of tribalism and by the patrimonialisation of power around a number of elites related to the figure of Colonel Gaddafi. The differences between this form of sultanistic regime and the “classic” Jamahiriya established in 1977 led us to define the period between the end of the embargo and the February 2011 “revolution” as a “Second Jamahiriya.” This article attempts to explain the political developments in Libya since 1990 to better understand the fall of the Gaddafi regime and the current state of power fragmentation in the country.
- « Qu'avez-vous fait de vos vingt ans ? » Militantismes marocains du 23-mars (1965) au 20 février (2011) - Frédéric Vairel p. 219-238 On entend revenir ici sur la séquence politique resserrée qui s'ouvre avec les premières mobilisations du 20 février et qui se clôt avec les élections législatives anticipées de novembre 2011. Cette séquence témoigne de l'inscription renouvelée du régime marocain et de ses contestataires dans des dynamiques internationales de protestation. L'institutionnalisation de l'espace protestataire marocain au sein duquel le 20 février émerge, les effets d'apprentissage du côté des contestataires comme des forces de sécurité sont au principe de conduites d'un évitement extrêmement prudent de tout dérapage. En d'autres termes, indépendamment de la posture radicale que peuvent revendiquer les membres du mouvement ‑.ou que leurs détracteurs leur prêtent à des fins de délégitimation ‑, l'enjeu des mobilisations et des controverses publiques n'est jamais que la réforme de la monarchie. Les partis politiques et les syndicats ne fournissent que des appuis limités aux mobilisations, quand ils ne s'y opposent pas : les mobilisations de 2011 sont un indicateur précis des processus de verrouillage du champ de la politique instituée.The purpose of this article is to examine the tight political sequence that began with the first demonstrations of February 20 and ended with the November 2011 early legislative elections. The sequence reflects the renewed integration of the Moroccan regime and its protesters into the dynamics of international protest. The institutionalization of the Moroccan protest space from which the February 20 movement emerged, and the effects of learning for protesters and security forces alike were the reason for extremely cautions behaviors in an effort to avoid escalation. In other words, regardless of the radical posture claimed by members of the movement - or coined by their critics in an attempt to delegitimize them - the issue of mobilization and public controversy was nothing more than the reform of the monarchy. Political parties and unions offered only limited support to mobilization, when they did not oppose it : the 2011 demonstrations were an accurate indicator of the straitjacket process in the field of established politics.
- « 20 février ». Discours et portraits d'un mouvement de révolte au Maroc - Cédric Baylocq, Jacopo Granci p. 239-258 Cet article s'intéresse aux conséquences du « Printemps arabe » dans la seule monarchie du Maghreb. Moins fulgurant que dans d'autres pays, ce « printemps » n'en a pas moins favorisé une réforme constitutionnelle et des élections anticipées. C'est à travers le prisme du « Mouvement du 20 février », plateforme militante ayant réussi à mobiliser plusieurs dizaines de milliers de personnes à travers le Maroc durant le premier semestre 2011 que nous appréhendons les effets concrets de ce « Printemps arabe » in situ et les discours de ses acteurs marocains.This article focuses on the implications of the “Arab Spring” on the only monarchy in the Maghreb. Though less dramatic than in neighboring countries, this “spring” did promote constitutional reform and early elections. We examined the practical effects of this “Arab Spring” on-site and the discourse and its Moroccan players, through the prism of the “February 20 Movement”, an activist platform where tens of thousands of people were mobilized throughout Morocco during the first half of 2011.
- Sahara Occidental : quel scénario après Gdeim Izik ? - Carmen Gómez Martín p. 259-276 À l'automne 2010, comme prélude aux protestations populaires du Maghreb et du Machrek, les Sahraouis accomplissent une action totalement inattendue : ils dressent le campement pacifique de Gdeim Izik afin de dénoncer leur situation sur les plans politique, économique et social au sein des territoires occupés par le Maroc au Sahara occidental. L'objectif de ce texte est de détailler le déroulement des protestations de Gdeim Izik et de fournir les éléments nécessaires à la compréhension des effets que cet événement a eu à court terme au sein des territoires occupés et dans les camps de réfugiés sahraouis à Tindouf (Algérie). Ces effets se matérialisent dans la revitalisation du conflit par de nouvelles formes de protestation (l'établissement de campements en dehors des centres urbains), dans l'irruption de nouveaux acteurs dans l'espace de contestation sahraoui (notamment des jeunes chômeurs et des activistes des droits de l'Homme), dans la transition d'actions pacifiques vers des réactions plus radicales et violentes, ou encore dans la montée des tensions entre les différentes populations qui cohabitent dans la région.In the fall of 2010, as a prelude to the popular protests in the Maghreb and Mashreq, the Sahrawis engaged in a totally unexpected action : they set up the Gdeim Izik peaceful camp to draw attention to their political, economic and social situation within the territories occupied by Morocco in Western Sahara. The purpose of our study is to explain the development of the Gdeim Izik protests and provide the necessary elements to better understand the shortterm impact of this event in the occupied territories and in the Sahrawi refugee camps in Tindouf (Algeria). These effects materialized in the revitalization of the conflict by new forms of protest (such as the establishment of settlements outside urban centers) in the emergence of new players in the Sahrawi protest space (including young unemployed people and Human Rights activists), in the transition from peaceful actions to more radical and violent reactions, or in the escalating tensions between the different populations that live together in the region.
- Les protestations populaires à l'assaut des régimes autoritaires : une « révolution » pour les sciences sociales ? - Vincent Geisser p. 7-26
Algérie
L'année politique
- De la résilience des régimes autoritaires : la complexité algérienne - Louisa Dris Aït Hamadouche, Cherif Dris p. 279-301
Gros plan
- La nouvelle loi organique sur l'information de 2012 en Algérie : vers un ordre médiatique néo-autoritaire ? - Cherif Dris p. 303-320 En Algérie, dans le domaine de l'information, au lieu de réprimer, le pouvoir politique joue au jeu de l'exclusion/marginalisation, d'une part, et l'inclusion/ la cooptation, d'autre part, promouvant un journalisme d'allégeance. Dans un contexte mondialisé ou les technologies de l'information brise les murs de la censure, il est impossible, à un régime de prétendre exercer un contrôle total sur l'information. La gestion rationnelle de l'information ne passe plus par la censure et la langue de bois qui produisent des réactions contraires à celles escomptées. Il s'agit plutôt pour le régime algérien de mélanger subtilement le langage officiel et l'expression libre afin que les récepteurs soient moins suspicieux. À la différence d'autres régimes autoritaires arabes, le pouvoir algérien a permis l'éclosion d'organes de presse privés et de débats politiques contradictoires. Il a aussi démocratisé l'accès à Internet et n'en a jamais interrompu la diffusion. In fine, nous sommes en présence d'un ordre médiatique néo-autoritaire où le crédo est la liberté d'expression sans la liberté de la presse.In the field of information in Algeria, the government, rather than suppress, plays the game of exclusion/marginalization on the one hand, and inclusion/ co-optation, on the other hand, thus promoting allegiance journalism. In a globalized context where information technologies break down the walls of censorship, regimes cannot manage to retain complete control over information. Rational management of information can no longer be based on censorship and stonewalling which produce adverse reactions to those expected. Instead the Algerian regime has subtly mixed official language and free expression so that receivers are less suspicious. Unlike other Arab authoritarian regimes, the Algerian government has allowed the emergence of private media and contradictory political debates. They have also democratized the use of Internet and have never stopped its access. Ultimately, we are in the presence of a neo-authoritarian media order where the motto is freedom of expression without freedom of the press.
- La nouvelle loi organique sur l'information de 2012 en Algérie : vers un ordre médiatique néo-autoritaire ? - Cherif Dris p. 303-320
Libye
L'année politique
- La fin de l'État des masses ou les incertitudes libyennes - Saïd Haddad p. 323-339
Gros plan
- La position des pays de l'ALBA et de l'UNASUR face à la guerre en Libye - Hortense Faivre d'Arcier-Flores p. 341-355 Pour comprendre cette condamnation ferme de l'intervention militaire de l'OTAN en Libye de la part des pays bolivariens et leur soutien à la légitimité du Guide de la Révolution, Mouammar Kadhafi, il convient d'étudier le contexte latino-américain, depuis l'émergence de la Révolution cubaine jusqu'à l'instauration d'un nouvel équilibre géopolitique régional. Au-delà de l'aspect factuel, cet article se propose de rechercher au travers des discours politiques des dirigeants latino-américains les filiations idéologiques qui se sont maintenues depuis les années 1960 dans les principes fondateurs et les déclarations communes des organisations régionales actuelles dont l'Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique (ALBA) est politiquement la plus affirmée.To better understand the Bolivarian countries' condemnation of the NATO military intervention in Libya and their support of the legitimacy of the Guide of the Revolution Muammar Gaddafi, we had to examine the Latin American context, since the emergence of the Cuban Revolution to the establishment of a new regional geopolitical balance. Beyond the factual aspect, the purpose of this article is to identify, through the political discourse of Latin American leaders, the ideological filiations that have persisted since the 1960s in the founding principles and joint statements of existing regional organizations among which the Bolivarian Alliance for the Peoples of Our America (ALBA) is the most politically assertive.
- La position des pays de l'ALBA et de l'UNASUR face à la guerre en Libye - Hortense Faivre d'Arcier-Flores p. 341-355
Maroc
L'année politique
- Le Mouvement du 20 février et le régime marocain : contestation, révision constitutionnelle et élections - Thierry Desrues p. 359-389
Gros plan
- La consécration de la monarchie gouvernante - Omar Bendourou p. 391-404 Bien qu'acculé à des réformes constitutionnelles par le mouvement du 20 février, le roi n'a répondu que partiellement aux attentes de ce dernier. Même si des chancelleries étrangères alliées du régime, ont rendu hommage au roi pour avoir été réceptif aux revendications des citoyens, la nouvelle constitution a laissé intacts les fondements du régime et a conservé au roi ses principales prérogatives prévues par les anciens textes constitutionnels. La stratégie royale a été couronnée par la nomination du nouveau gouvernement issu des élections législatives du 25 novembre 2011 que dirige l'ancien parti d'opposition islamiste le Parti de la justice et du développement (PJD). Dans un contexte régional incertain marqué par des bouleversements sociaux et politiques, le choix du PJD est fonctionnel. Il permet de neutraliser certaines associations islamistes contestataires, de donner espoir aux franges défavorisées de la population et de véhiculer l'image qu'un changement important est en train de s'opérer au Maroc.Although he was forced to undertake constitutional reforms by the February 20 Movement, the king responded only partially to the movement's expectations. Even if foreign embassies supporting the regime paid tribute to the king for being responsive to citizens' demands, the new constitution has had no bearings on the foundations of the regime or the king's main prerogatives under the old constitutional texts. The king's strategy was crowned by the appointment of the new government formed after the November 25, 2011 elections and headed by the former Islamist opposition party- the Party of Justice and Development (PJD). In an insecure regional context marked by social and political upheavals, the choice of the PJD is functional. It helps neutralize a number of Islamist protest associations, give hope to disadvantaged fringes of population and convey the image that a significant change is taking place in Morocco.
- La consécration de la monarchie gouvernante - Omar Bendourou p. 391-404
Mauritanie
L'année politique
- Une hirondelle ne fait pas le printemps. Grammaire des mobilisations sociales et politiques et retour de la question negro-mauritanienne - Alain Antil, Céline Lesourd p. 407-429
Tunisie
L'année politique
- Tunisie an I : les chantiers de la transition - Éric Gobe p. 433-454
Relations internationales
- Les États-Unis, l'Europe et la Libye : de la réhabilitation de Kadhafi à son renversement - Yahia Zoubir p. 457-469 Pendant des décennies, les relations entre l'Occident, en particulier avec les États-Unis, et la Jamahiriya étaient hostiles. Les activités de Mouammar Kadhafi à l'étranger ont suscité des représailles de la part des États-Unis, qui ont bombardé la Libye en 1986. L'attentat du vol de la Pan Am en 1988 au-dessus de Lockerbie pour lequel la Libye a été blâmée a abouti à des sanctions sévères. Cependant, de 1999 jusqu'à la chute de son régime et son assassinat en octobre 2011, Kadhafi a réussi à normaliser les relations avec l'Europe et, plus tard, avec les États-Unis sans engager une transformation fondamentale de sa politique intérieure. Cette réhabilitation a laissé son système autoritaire intact. Cet article montre comment Kadhafi a réussi à poursuivre une politique basée sur un pragmatisme opportuniste qui lui a permis de survivre et préserver son régime jusqu'en 2011.For decades, relations between the West, particularly the United States, and the Jamahiriya were hostile. Muammar Gaddafi's actions abroad prompted retaliation from the United States, who bombed Libya in 1986. The 1988 bombing of a Pan Am flight over Lockerbie, for which Libya was blamed, resulted in severe sanctions. However, from 1999 until the fall of his regime and his murder in October 2011, Gaddafi was able to normalize relations with Europe and, later, with the United States without engaging in fundamental changes in his domestic policy. This rehabilitation has left his authoritarian system intact. This article shows how Gaddafi managed to pursue a policy based opportunistic pragmatism which allowed him to survive and prolong the existence of his regime until 2011.
- Les États-Unis, l'Europe et la Libye : de la réhabilitation de Kadhafi à son renversement - Yahia Zoubir p. 457-469
- Les notices d'Aldébaran - Jean-Christophe Peyssard, Véronique Ginouvès, Anaïs Salamon p. 453-454 http://aldebaran.revues.orgAldébaran est une revue électronique, en libre accès, qui propose une sélection de ressources documentaires en sciences humaines à travers des notices de sites et des conseils de recherche. Les notices présentées dans ce numéro ont été rédigées par Véronique Ginouvès (MMSH, Aix-en-Provence), Jean-Christophe Peyssard (Cléo, Marseille) et Anaïs Salamon (Bibliothèque des études islamiques, Université McGill, Montréal).