Contenu du sommaire : Esclavage et travail forcé
Revue | Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux |
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Numéro | 2012 |
Titre du numéro | Esclavage et travail forcé |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - Jean-Manuel Larralde p. 7-8
Esclavage et travail forcé
- Penser et définir l'esclavage - Marie-Xavière Catto p. 11-17 Penser et définir l'esclavage comme un type de pouvoir exercé sur un individu suppose d'établir des critères pour le définir, ce qui permettra de qualifier les types de rapports qui en relèveraient. Plusieurs instruments et définitions ont été élaborés sur le plan juridique, mais ils ne sont pas toujours concordants. Le penser suppose également de distinguer la pratique d'autres qui lui sont associées.Thinking slavery as a kind of power exercised over an individual supposes to define criteria so as to qualify the kind of relation which comes under it. Several instruments and cases have defined it, but there are differences in meaning between them. Moreover, thinking slavery supposes to set it apart from practices almost always associated with it.
- L'esclave en droit romain ou l'impossible réification de l'homme - Jean-Jacques Aubert p. 19-25 Le droit romain pré-classique et classique (du Ier s. av. J.-C. au IIIe s. apr. J.-C.) traite l'esclave tour à tour comme chose, comme animal, et comme être humain. Par le truchement du droit honoraire (édits des édiles curules et du préteur urbain) et de la doctrine des jurisconsultes, la reconnaissance de l'humanité de l'esclave s'est affirmée et reflète l'importance de l'esclave comme acteur incontournable de la vie sociale, économique, voire judiciaire du monde romain.Preclassical and classical Roman law (from the first century B.C. until the third century A.D.) deals with slaves alternately as things, animals, and human beings. Through honorary law (aedilician and praetorian edicts) and the jurists' opinion, the humanity of slaves is increasingly acknowledged, reflecting their ubiquitous part in social, economic, and even judiciary life in the Roman empire.
- The International Legal Regime of Slavery and Human Exploitation and its Obfuscation by the Term of Art: “Slavery-like Practice” - Jean Allain p. 27-42 L'article se propose de retracer les trois moments de l'abolition de l'esclavage et de l'exploitation en droit international : celui de la traite, de l'esclavage et de la servitude en droit international général (1890-1966) puis celui des « pratiques similaires à l'esclavage » en droit international des Droits de l'homme (1966-1998) et enfin, de 1998 à nos jours, la réduction en esclavage en droit international pénal. Il analyse en outre les glissements sémantiques et le sens conféré aux différentes expressions employées (« esclavage, servitude, institutions et pratiques analogues à l'esclavage et les pratiques semblables à l'esclavage »).This study considers the three eras of the abolition of slavery and human exploitation: i) 1890-1966 – the slave trade, slavery, and servitude in general international law; ii) 1966-1998 – “slavery-like practices” and human rights law; and iii) 1998-present – enslavement and international criminal law. Focusing on the varied and continued loose use of terminology within the United Nations system (from slavery through “practice similar to slavery” to “contemporary forms of slavery”), it suggests that in reverting back to the legal, within a paradigm of criminal law, the law governing slavery appears to have been given a true lease on life as it has become a viable instrument for holding perpetrators accountable for enslavement and thus offering protection of those enslaved.
- L'esclavage, la servitude et le travail forcé ou obligatoire au regard de la Convention européenne des Droits de l'homme - Hélène Clément p. 43-48 Avec les arrêts Siliadin c. France et Rantsev c. Chypre et Russie, les victimes des formes contemporaines d'esclavage des quarante-sept États membres du Conseil de l'Europe ont trouvé en la Cour européenne des Droits de l'homme un juge chargé de sanctionner tout manquement à l'obligation de protection dégagée de l'article 4 de la Convention européenne des Droits de l'homme, singulièrement renforcée lorsque l'exploitation s'insère dans un phénomène de traite.With the Siliadin v. France and Rantsev v. Cyprus and Russia cases, the victims of contemporary forms of slavery in the forty-seven member States of the Council of Europe have found in the European Court on Human Rights a judge which condemns each violation of the obligation of protection imposed by article 4 of the European Convention on Human Rights, especially when the exploitation involves a situation of slavery.
- Traite des êtres humains et traite des migrants - Johanne Vernier p. 49-57 En 2009, la Commission nationale consultative des Droits de l'homme (CNCDH) faisait ce constat accablant : en France, les victimes de la traite des êtres humains obtiennent rarement la protection qui leur est due. En effet, la politique criminelle mise en œuvre depuis 2003 n'échoue pas seulement à atteindre l'un des principaux objectifs que lui fixe le droit international – l'identification et la protection de toutes victimes de traite –, elle contribue également à atteindre un objectif exactement contraire – leur sanction.In 2009, the French National Consultative Commission on Human Rights (CNCDH) made an alarming observation: in France, victims of human trafficking rarely receive the protection to which they are entitled. Not only does the criminal justice policy implemented since 2003 fail to achieve one of the main goals set by international law—identifying and protecting all trafficking victims—but it also contributes precisely to the opposite objective: punishing them.
- La notion de sanction dans la pratique du Bureau international du travail : à propos de la violation par le Myanmar de la Convention nº 29 sur le travail forcé - Mamoud Zani p. 59-66 Le recours à de véritables sanctions ou mesures coercitives en cas de violation des normes fondamentales du travail n'est pas envisagé par le système institutionnel du Bureau international du travail (BIT). Le cas du Myanmar pour violation d'une norme fondamentale a démontré ses réelles limites, d'où l'importance pour le BIT de repenser le système dans sa globalité.The use of real sanctions or coercive measures in case of violation of the fundamental standards of work is not envisaged by the institutional system of the International Labour Office (ILO). The case of Myanmar for violation of a fundamental standard demonstrated its real limits, hence the importance for the ILO to rethink the system in its entirety.
- Penser et définir l'esclavage - Marie-Xavière Catto p. 11-17
L'écriture de la loi
- Le Conseil d'État, colégislateur ? La possibilité de saisir le Conseil d'État d'une proposition de loi - Séverine Leroyer p. 69-79 La révision du 23 juillet 2008 a créé la possibilité pour les membres du Parlement de saisir le Conseil d'État d'une proposition de loi avant son examen en commission. Cette nouveauté, dont il convient toutefois d'attendre la réelle application, modifie tant le processus législatif – lequel offre désormais au Parlement les mêmes garanties dont le Gouvernement bénéficie pour la rédaction de ses projets de loi –, que le rôle du Conseil d'État, traditionnellement conseiller du seul Gouvernement, qui obtient là une attribution plusieurs fois revendiquée, et qui l'autonomise quelque peu vis-à-vis de l'exécutif.The 2008 revision of the French Constitution made it possible for the members of Parliament to consult the French Conseil d'État about their law proposals. This new measure, which has not shown its real effect yet, changes both the legislative procedure—the Parliament now benefits from the same guarantees as the Government in its legislative work—, and the role of the Conseil d'État: historically an advisor of the sole Government, it has gained some autonomy by giving its advice to the Parliament too.
- Le temps du débat législatif - Sylvia Calmes-Brunet p. 81-96 La réforme constitutionnelle de 2008, la loi organique du 15 avril 2009 et les modifications des règlements de l'Assemblée nationale et du Sénat ont instauré de nouveaux instruments de gestion du temps législatif, pour une meilleure efficacité du travail parlementaire. Mais la tentative d'un partage plus équitable du temps (entre le Gouvernement et le Parlement) s'agissant de la maîtrise de l'ordre du jour et (entre la majorité parlementaire et les autres groupes) s'agissant de la prise de parole, a partiellement échoué. En outre, les débats en séance publique sont soumis à des tempi accélérés susceptibles de nuire à la qualité de la discussion. Enfin, l'encadrement du droit d'amendement en vue de lutter contre l'obstruction reste fortement controversé.The time of legislative debate: a shared, punctuated and framed time. The 2008 constitutional reform, the 15 April 2009 law and the amendments to the procedural rules of the National Assembly and the Senate established new instruments for managing legislative time in order to produce more efficient parliamentary work. However, the attempt to create a fairer distribution of time (between Government and Parliament) in terms of control over the agenda and (between the parliamentary majority and the other groups) regarding each group's interventions to voice opinions was only partially successful. Besides, the accelerated time frames imposed on debates in public sessions are likely to harm the quality of discussions. Finally, the regulation of the right to amendment with a view to combating obstructions remains extremely controversial.
- Un nouveau rôle pour l'opposition dans la procédure législative ? - Renaud Muller p. 97-105 La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 consacre la reconnaissance constitutionnelle de l'opposition au sein de nos assemblées : fallait-il y voir l'avènement d'un rôle nouveau, voire d'une conception nouvelle de l'opposition ? Il faut alors souligner que les deux chambres n'ont pas eu la même approche au sein de leurs règlements respectifs : l'Assemblée nationale a assez précisément détaillé les choses, le Sénat est resté plus évasif. Ce qui a pour effet, principalement à l'Assemblée nationale, d'envisager l'instauration d'une stratégie de la part des groupes se reconnaissant alors d'opposition ou minoritaire. La pratique qui s'est alors mise en place tant au sein des chambres que par l'apport de la jurisprudence du Conseil constitutionnel tend à nettement relativiser la réalité de ce nouveau rôle pour l'opposition. Le parlementarisme rationalisé et le fait majoritaire continuant à s'imposer dans la vie parlementaire.The 23 July 2008 constitutional review sanctions the constitutional recognition of the opposition into our assemblies: should it be the beginning of a new role for the opposition or a new conception of the opposition? It has to be said that the two assemblies do not have the same approach into their procedural rules: the National Assembly gives details while the Senate is more evasive. The parliamentaries groups set up strategies then, preferring to be an opposition group or a minority group. The application of these new rules by the assemblies themselves or by the Constitutional Council tends to show that the new conception of the opposition is not a reality yet. Rationalized parliamentarism and majority rule are still setting the parliamentary game.
- La réforme de 2008, une réelle revalorisation du rôle du Parlement ? - Jean-Manuel Larralde p. 107-117 La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 cherche officiellement à renforcer le Parlement et mettre fin au déséquilibre des institutions. Cette revalorisation passe évidemment surtout par de nouvelles prérogatives destinées à renforcer sa mission générale de surveillance de l'action gouvernementale, mais également par la réactivation de sa mission législative. Dans les faits, cette double volonté peine à se transformer en réalisations concrètes, et la revalorisation opérée apparaît pour le moins inaboutie.The 23 July 2008 constitutional review aims at strengthening the Parliament and rebalancing the French political institutions. This reform gives the Parliament new prerogatives to control the Government and enhances its legislative powers. But the implementation of these reforms seems for the moment more virtual than real and the strengthening of the Parliament is not yet achieved in practice.
- Le Conseil d'État, colégislateur ? La possibilité de saisir le Conseil d'État d'une proposition de loi - Séverine Leroyer p. 69-79
Variétés
- La liberté individuelle des étrangers après la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité - Gilles Armand p. 121-126 La loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, qui opère la transposition de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, modifie singulièrement le régime de la rétention administrative des étrangers, ce qui impacte les garanties constitutionnelles de leur liberté individuelle et, dans le même temps, prévoit un système nouveau de répartition des compétences entre les juridictions administratives et judiciaires, dont il convient de mesurer les conséquences du point de vue des garanties juridictionnelles de la liberté individuelle des non-nationaux.The French law 2011-672 concerning immigration, integration and nationality, which transposes the directive 2008/115/EC of the European Parliament and of the Council of 16 December 2008 on common standards and procedures in member States for returning illegally staying third-country nationals, changes the organization of the administrative detention of foreigners in France. It impacts the constitutional protection of their individual freedom and modifies the separation of areas of the judges. This reform will also have important consequences concerning the constitutional guarantees of individual freedom of non-French citizens.
- Clinique juridique des droits fondamentaux – CRDFED - Samuel Etoa, Grégory Godiveau, Juliette Lecame, Sébastien Platon, Marie-Joëlle Redor-Fichot p. 127-136 La loi nº 69-3 du 3 janvier 1969 institue un régime dérogatoire du droit commun à l'égard des Gens du voyage. Sollicitée en ce sens, la Clinique juridique des droits fondamentaux soulève les restrictions apportées aux droits et libertés des intéressés (droit à la libre circulation, droit de vote, etc.) et en interroge la constitutionnalité et la conventionnalité. Ce travail a pour finalité de soutenir les avocats et les associations spécialisées dans leurs recours devant différentes instances juridictionnelles.Law No. 69-3 (3 January 1969) establishes vagrancy as an exception to the general law. Approached in that sense, the Fundamental Rights Law Clinic raises the limits applied to the Travellers' rights and freedoms (right to free movement, to vote, etc.) and questions the constitutionality and conventionality of this law. This work thus aims to support lawyers and specialized NGOs in proceedings before various courts.
- La liberté individuelle des étrangers après la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité - Gilles Armand p. 121-126
Chronique
- Chronique de jurisprudence constitutionnelle française 2011 - Amandine Cayol, Juliette Lecame, Ellen Lemesle, Ahmed Ouedraogo, Antoine Siffert p. 139-155 Désormais traditionnelle dans cette revue, la chronique de jurisprudence constitutionnelle vise à faire un état des lieux annuel des décisions rendues par le Conseil constitutionnel. Sous un angle critique, les auteurs présentent les continuité et rupture de jurisprudence, ainsi que la variabilité du contrôle exercé par le Conseil selon les droits en cause.Now traditional in this journal, the chronicle of constitutional jurisprudence aims to make an annual inventory of the Constitutional Council's decisions. With a critical point of view, the authors present the continuity and discontinuity of case law, and the variability of the control exercised by the Council on the ground of the rights in question.
- Chronique de jurisprudence constitutionnelle française 2011 - Amandine Cayol, Juliette Lecame, Ellen Lemesle, Ahmed Ouedraogo, Antoine Siffert p. 139-155